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Cette disposition lui paraît indispensable, et il l'aurait proposée, si elle ne s'y trouvait.

S. Exc. M. Beernaert adresse un appel à tous les partisans de l'arbitrage, en les priant de ne pas entraver son développement, et d'en garder l'usage facile.

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S. Exc. M. Ruy Barbosa se déclare favorable à une interprétation aussi restrictive que possible de la notion de la contrebande; la proposition brésilienne s'est inspirée de cette considération générale. C'est pourquoi il est contraire à la formule de l'article 3 de la proposition française, ainsi qu'à la clause générale proposée par M. Kriege.

1 Le 15 août 1907.

XXXI.

Arbitrage obligatoire et compétence des tribunaux nationaux.

Comité d'examen A.

Première Sous-Commission de la Première
Commission.

NEUVIÈME SÉANCE 1

M. Ruy Barbosa voudrait faire quelques remarques dans le sens des considérations que M. l'Ambassadeur d'Allemagne a produites dans cette Séance. Tout en étant favorable à la proposition portugaise, il pense que les considérations développées par M. de Marschall sont irréfragables. Il leur donne sa pleine adhésion dans les termes qu'il tient à expliquer.

Tout d'abord, il est à observer que l'opinion qui voudrait voir dans la résistance d'un parlement à l'exécution d'un traité dûment conclu un cas de force majeure, lequel autoriserait juridiquement à y invoquer la maxime ,,ad impossibilia nemo tenetur", n'est pas soutenable. Du moment qu'une obligation de droit des gens existe, elle atteint le pouvoir législatif de l'État, aussi bien que le pouvoir exécutif.

L'État juridiquement lié par une convention régulière ne saurait se dégager, en prétextant que l'opposition de Le 15 août, 1907.

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son parlement ne lui permet pas d'exécuter le contrat. Cependant, il n'est pas admissible que l'on ne tienne compte, dans une convention internationale, des lois fondamentales, constitutionnelles de son pays. Si une stipulation y porte atteinte, elle créera au sein de la nation, dont on prétendrait régler la conduite, une situation révolutionnaire d'antagonisme entre les pouvoirs établis et la constitution dont ils émanent. Un tel état de choses serait inconciliable avec l'ordre juridique, et porterait au bouleversement de l'ordre public.

Les États ne peuvent donc souscrire à des traités, qui stipuleraient des obligations internationales en contradiction avec les principes fondamentaux de la loi nationale. Or c'est ce qui arriverait, si l'on voyait dans la cour internationale une instance en révision pour certains jugements des tribunaux nationaux.

C'est précisément là où l'on aboutirait dans les hypothèses indiquées par M. le premier délégué d'Allemagne, s'il était admis que, dans des cas semblables, les décisions des juridictions nationales ne seraient pas définitives. Si l'on considère bien les circonstances, telles qu'il les a figurées, on sentira que ce résultat est inévitable. Imaginons, en effet, que l'on plaide devant un tribunal national une de ces controverses d'intérêt privé, qui peuvent se soulever par rapport à quelques uns des articles d'arbitrage obligatoire énumérés dans la proposition portugaise. Le jugement définitif a été prononcé par les juges du pays; tous les recours sont épuisés; l'arrêt a force de chose jugée. Mais ceux qui sont mécontents de la décision judiciale intervenue, s'adressent à leur gouvernement, qui à son tour, soutenant leurs prétentions, réclame devant l'État dont les tribunaux viennent de statuer. Que s'en suivra-t-il, si l'État auquel on s'est adressé, y consent? On aura recours à l'arbitrage, et l'examen de la cause recommencera en révision devant une cour arbitrale. Mais considérons la portée juridique de cet état de choses, et

apprécions en les conséquences. Deux hypothèses sont possibles. Ou la cour arbitrale confirmera le jugement rendu par les tribunaux nationaux, ou elle le réformera. Dans le premier cas, le jugement n'aurait pas acquis force de chose jugée que parce que la décision internationale l'avait sanctionné. Dans le second cas il serait cassé par la sentence arbitrale. Or, au point de vue juridique, cela veut dire que la justice nationale est placée, vis-à-vis de la justice internationale, dans la même situation que les tribunaux de première instance à l'égard des cours d'appel nationales dans l'organisation judiciaire d'un pays quelconque. Il n'existerait plus de chose jugée, en ce qui concerne certaines catégories d'affaires, avant que l'on n'aurait épuisé, non seulement les recours par la voie diplomatique, mais encore celui de la cour arbitrale.

Et cette nouvelle juridiction aurait même des privilèges, que les principes de la procédure ordinaire ne toléreraient pas. D'après une loi universellement reconnue, l'appel d'une décision judiciaire ne peut avoir lieu que dans un délai déterminé, après lequel, si les parties n'en ont pas fait usage, les décisions ont force de chose jugée. Ici, bien au contraire, il n'y aurait jamais chose jugée. Une réclamation pourrait surgir en tout temps, et, du moment qu'elle surgirait, l'instance en révision serait toujours ouverte. De sorte que les décisions de la justice nationale se trouveraient, à l'égard de la justice internationale, dans une position moins favorable que celle d'un tribunal de première instance vis-à-vis des cours d'appel. Pour cette catégorie de cas, la cour arbitrale deviendrait une véritable cour d'appel, dotée de privilèges extraordinaires. Celà est-il compatible avec le principe, qui considère partout la justice nationale comme un des organes de la souveraineté de l'État, dans l'expression par laquelle les constitutions elles-mêmes désignent le pouvoir judiciaire chez tous les peuples? Conserverait-elle ce caractère de pouvoir constitutionnel organe de la souveraineté nationale,

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