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au souverain auprès duquel son ministre réside, de la mort de son prédécesseur. Dans le second cas, la non-remise de nouvelles lettres de créance ferait supposer que le nouveau souverain ne serait pas reconnu par le prince que le ministre représente (6).

Une seule lettre de créance peut suffire à deux ministres envoyés à la fois, s'ils sont d'un même ordre; de même qu'un seul ministre peut être chargé de plusieurs lettres de créance, lorsq'uil est accrédité auprès de plusieurs cours à la fois (7), ou auprès d'un même prince, mais en plusieurs qualités.

Il est rare que l'on réponde à une lettre de créance; il faut pour cela que le souverain ait des motifs particuliers, tel que le choix du ministre qu'on lui envoie; ou bien qu'il regarde sa mission comme une marque particulière d'estime et d'amitié.

On ne doit point confondre les lettres de créance avec les simples lettres de recommandation dont le ministre est quelquefois porteur, et qui sont `adressées par son souverain à des princes ou princesses de la famille, ou à un des premiers fonctionnaires publics du souverain près lequel il est accrédité (8),

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(6),, Ce principe, dit PECQUET dans son Discours sur l'art de négocier, est de la plus grande rigueur, car dans la pratique on ne regarderait pas comme moins digne d'attention ce qu'un ministre dirait ou ferait avant de recevoir ses ,, nouvelles lettres de créance, parce que l'autorité d'où émané son pouvoir subsiste et ne souffre point par

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a

,,la mort du prince auprès duquel le pouvoir avait été

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donné. 66

(7) Ainsi que plusieurs des ministres accrédités près les petites cours d'Allemagne.

(8) Tous les agens diplomatiques envoyés à Constantinople

ou enfin pour le magistrat du lieu où il fera sa résidence (9).

§. 16.

Des Instructions (1).

Les Instructions (2) données par le souverain à son ministre, ont pour but, de l'informer de la conduite qu'il doit tenir pendant le cours de sa mission, tant envers la cour à laquelle il est envoyé, les membres du corps diplomatiques etc., que relativement à l'objet même de sa mission (3),

Comme elles

reçoivent de leur gouvernement des lettres de recommandation pour le Grand - Visir, ainsi que cela se pratiquait autrefois, pour les ministres accrédités près les Provinces-Unies des Pays-Bas, pour le Stathouder.

(9) Ce qui arrive fréquemment quant aux agens diplomatiques accrédités près les villes anséatiques.

(1) Voyez, PIÈCES DIPLOMATIQUES.

(2) Voyez WICQUEFORT T. I, Chap. 14. CALLIÈRES Chap. 12. PECQUET P. 53. BIELFELD T. II, p. 180. NFYRON principes du droit des gens §. 173-175. WALSINGHAM maximes poli

tiques p. 503.

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(3) Dans les instructions données au Comte d'Avaux Envoyé de France en Suède en 1692, il était dit; que S. M. voulait, que, ,, le Sieur d'Avaux lui donnât avis de tout ce qui se passait à ,, la cour de Suède; l'intention de S. M. étant que tous les ,, ambassadeurs et ministres au-dehors, lui apportassent une relation exacte de ce qui se serait passé de plus important dans les négociations qu'ils auraient conduites, de l'état des ,, cours et des pays ou ils auraient servi, des cérémonies qui ,, s'y observent, soit dans les entrées, soit dans les audiences ,, ou dans toute autre rencontre; du génie et des inclinations ,, des princes et de leurs ministres; enfin de tout ce qui pouvait donner une connaissance particulière des lieux ou ,, ils auraient été employés, et des personnes avec lesquelles ils

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contiennent encore un ensemble de desseins, vues et de motifs raisonnés, propres à faire connaître l'esprit et la tendance du cabinet, on peut faire à ce sujet les observations suivantes (4).

Le ministre doit désirer que ses instructions soient précises et détaillées, il ne doit pas perdre de vue, que plus elles sont générales, plus il devient responsable des événemens; et pour ne pas s'y exposer, il en doit scrupuleusement examiner tous les points, se faire expliquer ce qu'il trouve d'obscur ou d'ambigu, y faire changer ce qu'il juge être contraire au succès de sa négociation, en faire ôter ce qui pourrait rendre sa conduite suspecte ou odieuse, et y faire ajouter ce qui pourrait faciliter la négociation; il doit encore tâcher de prévoir les différentes situations dans lesquelles il peut se trouver, les différentes tournures que peut prendre l'affaire dont on le charge; ce n'est qu'en proposant ainsi ses doutes, qu'il peut s'instruire entièrement et suppléer à ce qui échappe souvent à l'attention la plus réfléchie de celui qui a dressé les instructions. Pour bien faire il faudrait, et surtout dans les affaires importantes, discuter pour ainsi dire avec le ministre-secrétaire d'état, les affaires

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auraient négocié, le Sieur d'Avaux devait avoir un mémoire de cette sorte pour le remettre à son retour entre les mains de S. M. etc." Voyez Mr. DE FLASSAN Hist. de la diplom. française Liv. 4, p. 169.

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(4) Souvent on l'instruit même en termes généraux, des autres affaires de l'état qui ne regardent point sa mission, afin qu'il soit à même de répondre aux questions qu'on pourrait lui faire à ce sujet, ainsi que pour lui donner par-là une marque de confiance.

dont il doit être chargé, afin d'en mieux connaître toute la portée et l'étendue.

Indépendamment des premières instructions que reçoit le ministre ou tout autre agent diplomatique, en se rendant à son poste, les lettres qui lui sont envoyées de son souverain ou du ministre des affaires étrangères pendant le cours de sa mission, doivent être regardées comme de nouvelles instructions ou le développement des anciennes.

Les instructions ne sont destinées qu'au ministre seul, et par conséquent ne se communiquent point, à moins que sa cour ne lui en donne l'ordre, ou que, par des motifs particuliers, il se croye autorisé à en communiquer quelques points (5). Il arrive souvent aussi que l'on en fait deux expéditions, dont l'une est rédigée pour être montrée au besoin, et l'autre secrète, et uniquement à l'usage du ministre (6).

Il résulte de la nature même des instructions, qu'elles doivent être d'une diversité infinie, selon le but et l'objet de chaque mission, et qu'il est impos

(5) Les mémoires du comte D'AVAUX fournissent nombre d'exem ples de communications de ce genre. C'est à la sagesse du ministre à juger les cas où il peut se le permettre, sans compromettre les intérêts de sa cour, et ce que sans ordre il peut confidentiellement communiquer aux ministres des cours amies.

(6) On ne peut sans violer le droit des gens forcer un ministro public à montrer ses instructions; il n'a besoin d'autre titre pour faire ajouter foi aux paroles qu'il porte de la partR de son souverain, que la lettre de créance qu'il a présentée ou le plein-pouvoir qu'il a communiqué; voyez CALLIÈRES, Art de nég. T. I, p. 88. de MARTENS Précis du D, d. gens P. 309.

sible que l'on puisse faire l'énumération de tous les points qui peuvent la composer (7).

§. 17.

Du Plein-pouvoir (1).

Le pouvoir, dit WICQUEFORT à l'égard de l'ambassadeur, n'est autre chose, que ce qu'une procuration est à l'égard d'un particulier. Tout ministre chargé d'une négociation proprement-dite (2) doit être muni d'un plein-pouvoir, qui indique le degré d'autorité qui lui est confiée, et sur la foi duquel on peut entrer en négociation avec lui; il faut qu'il soit dit expressément, si le ministre n'est autorisé qu'à écouter les propositions, pour en faire rapport, ou à proposer ou même à conclure; et quand il y a plu sieurs ministres, s'ils sont autorisés à agir séparément.

Le plein-pouvoir peut être inséré dans la lettre de créance; mais le plus ordinairement on en dresse un séparément et en forme de lettre patente. Les

(7) Celles, sorties de la plume habile de Torcy, peuvent être regardées comme des modèles dans ce genre d'écrits diplomatiques. On trouve des instructions intéressantes dans les mémoires de WALSINGHAM, D'ÁVAUX, D'ESTRADES, de WALPOLE, de D'EON etc. et dans l'ouvrage de ROUSSET T. V, 301. T. VII, 18 et T. XI, 355.

(1) Voyez, PIÈCES DIPLOMATIQUES.

(2) Quant aux ministres résidant à une cour étrangère, la lettre de créance leur sert d'ordinaire également de pouvoir, à moins qu'indépendament de celle-ci on l'ait muni encore d'un pouvoir spécial, pour une affaire ou négociation particulière.

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