en différens endroits des fentinelles & des corps-de-garde. On vit enfuite arriver lc Grand Vicaire avec deux Jefuites Anglois, les Peres Sabran & Stephani qu'il venoit établir dans le Seminaire. Comme toutes les portes étoient fermées, les Jefuites firent rompre les fenêtres par les foldats. Ils firent auffi brifer les ferrures des portes de l'églife, où ils entrerent, toujours accompagnés de l'Officier Luthérien qui tenoit des difcours fcandaleux jufques dans le fanctuaire. Les Jefuites chafferent le Préfident & les Directeurs du Seminaire, & s'y établirent à leur place. Depuis ce tems-là ce Seminaire, qui étoit une excellente Ecole, où l'on formoit un grand nombre de jeunes Eccléfiaftiques à la fcience & à la piété, est devenu semblable à tous ceux que gouvernent les Jefuites. Pour en bannir le Rigorifine & le prétendu Janfénifme, ces Peres y ont introduit toute forte de défordres & de relâchemens. On peut voir Thiire, de l'intrufion des Jefuites dans le Seminaire de Liége dans plufieurs Ecrits, & fur-tout dans celui qui a pour titre: Motifs de droit, ou Défense du Seminaire de Liége contre L'entreprife & les libelles des Jefuites Anglois de cette ville. Les Jefuites n'ont depuis ceffé de calomnier & de perfécuter tous les gens de bien qui Le trouvoient dans ce grand Diocèle, & qui ont été obligés de chercher dans les païs voifins une retraite contre leurs violences. Auffi ce Diocèfe a-t-il changé de face depuis que les Jefuites y dominent. Le principal auteur de tous les maux fut leur P. Gletlé Confeffeur de l'Electeur de Cologne, Evêque & Prince de Liége. Ce Jefuite, dont la fin a été h funefte, abufoit de la confiance de ce Prince, pour faire réuffir tous les noirs deffeins de fes Confreres ; il n'eft pas poffible de faire connoître tous les excès aufquels fe porta ce miférable, pour venir à bout de détruire tout le bien qui étoit à Liége. Il faifoit fous le nom du Prince, des Mandemens où il calomnioit tous ceux qui lui déplaifoient, Dans un de ces Mandemens dont d'abord on ne connoiffoit pas la fuppofition, il fait dire à l'Evêque que la ville de Liége étoit devenue par un déplorable changement la maîtreffe de l'erreur, & l'arsenal où l'on pratiquoit tous les jours de nouvelles armes pour faire la guerre à l'Eglife & au SaintSiége. Un autre Jesuite nommé Corret appuïoit par les plus violentes déclamations les calomnies dont le Pere Gletlé remplissoir les Mandemens de l'Evêque, & ne ceffoit de foulever les peuples contre leurs Pasteurs par fes difcours féditieux. Enfin les Jefuites qui croïoient pouvoir tout entreprendre, liezent encore fous le nom de l'Evêque un Mandement, où ils avoient mis tant d'impoftures, que vingt-huit Curés refuferent de le publier, & députerent au Prince pour l'informer de l'abus énorme que les Jefuites & fur-tout le Pere Gletlé fon Confeffeur faifoient de fa confiance & de fon autorité. Le Prince indigné de la conduite des Jefuites, fit publier un nouveau Mandement, par lequel il défavouoit celui que ces Peres avoient répandu fous fon nom. Quelque tems après, ce même Pere Gletlé qui avoit été le fléau du Diocèfe de Liége, mit le comble à tous les crimes par une infâme apoftafie, qui fit connoître à l'Electeur de Cologne à quel homme il avoit fi long-tems donné fa confiance pour ARTICLE XXXV I. Eglifes d'Espagne & de Portugal. I. HILIPPE III, fils de Philippe II & d'Anne-Marie d'Autriche fille de l'Empereur Maximilien, monta fur le trône d'Eipagne en 1598 étant âgé de vingt ans. Dès la premiere année de fon regne, il écrivit au célebre Lanuza Dominicain une Lettre qui fait beaucoup d'honneur à ce jeune Prince & à fes Miniftres, qui lui faifoient connoître combien il étoit important de mettre en place des perfonnes de mérite, & d'ufer F d'un grand difcernement dans le choix de ceux qu'on élevoit aux premieres places de l'Eglife. La Lettre dont nous parlons, eft datée du 2 Décembre 1598. « Vous m'apprendrez, dit le Roi, quels font les Eccléhaftiques ou les Religieux que vous jugez propres pour l'Epifcopat. Marquez exactement le nom, l'âge, la capacité de chacun; dans quelle Univerfité il a étudié ; quels dégrés il y a pris ; quelle a été fa conduite paffée ; quelles font aujourd'hui fes vertus & fa réputation; s'il eft charitable, exempt d'avarice & d'ambition: car ces deux paffions obfcurciffent toutes les vertus. Marquez auffi avec le même foin toutes les qualités de ceux que vous croïcz pouvoir être placés dans les Abbaïes, les Prieurés & les autres moindres Ce grand homme, dont nous avons eu occafion de parler ailleurs, étoit alors Provincial des Dominicains d'Arragon. Sa réputation étoit fi grande, qu'on l'appelloit le faint Dominique de fon fiècle. Le Roi même lui donnoit fouvent ce titre fi glorieux. Nous avons vu les Requêtes qu'il adressa à Philippe II fur le progrès du Molinifme.. Après avoir brillé dans l'Univerfité de Sarragoffe, il fut fait Evêque de Balbaftre en Arragon. Le Pere Touron dit qu'il entra dans l'Epifcopat, comme y étoit entré Dom Barthelemi des Martyrs, & qu'il y vécut de même. C'est faire de Lanuza le plus parfait éloge. Il fut transféré en 1622 fur le fiége d'Albarafin, pour faire dans ce fecond Diocèfe tout le bien qu'il avoit fait dans celui de Balbaftre. Il s'appliqua uniquement à procurer la gloire de Dieu, le falut des ames, le Toulagement des pauvres, l'inftruction de fon troupeau. Il travailla infatigablement jufqu'au dernier foupir à régler fon Clergé felon l'efprit des Canons, à former les peuples à la piété, à faire la guerre au vice, à bannir l'ignorance, à déraciner les abus, les fuperftitions & les défordres. Il joignoit aux travaux de la vie paftorale les exercices d'une pénitence rigoureufe. Il fut forcé de publier les Traités Evangéliques qu'il avoit compofés, & où l'on trouve tous les principes de la plus pure morale, & les plus folides maximes de la vie Chrétienne. Il a auffi laiffé trois volumes d'Homélies fur toute forte de fujets de morale. Ils ont été traduits en plufieurs langues. Ce digne Evêque mourut en 1625 dans une grande réputation de fainteté, étant âgé d'environ foixante-douze ans. Les Seigneurs de Lanuza firent tranfporter fon corps à Sarragoffe, & enterrer avec pompe dans le tombeau de leurs Ancêtres, fur lequel ils firent graver une magnifique infcription, qui contient le plus parfait éloge. Cette infcription fut compofée par le P. de Bajas de la Compagnie de Jefus. Cet éloge de Lanuza n'eft point par conféquent fufpect. Philippe III avoit été promis en mariage mort. III. à Marguerite d'Autriche, fille de Charles Suite du ReArchiduc de Grats & de Marie de Baviere, gne de Phi& ce mariage fut accompli en 1599. Le Pape pe L. Sa Clement VIII en fit lui-même la cérémonie à Ferrare, où cette Princeffe paffa en allant en Efpagne. Dès le commencement du regne de Philippe III, la guerre fut allumée dans les Païs-Bas. Le feul fiége d'Oftende couta aux Efpagnols des fommes immenfes & plus de cinquante mille hommes. Fréderic Spinola après quelques années de fervice, fut nommé Général des Galeres aux Païs Bas. Il cut plufieurs avantages fur les Hollandois. Ce fut lui qui engagea Ambroite Spinola fon frere à venir en Flandres à la tête de neuf mille Italiens. Celui-ci n'y fut pas long-tems fans fe fignaler. Son frere Fréderic aiant été tué entre Oftende & l'Eclufe dans un combat naval contre les Hollandois, l'Archiduc |