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Or le délai de l'appel est de trois mois. L'injonction législative serait d'ailleurs ici sans aucune sanction, et, en cette matière, il ne saurait y avoir d'efficace que le sentiment du devoir dans les administrations publiques et le contrôle du Parle

ment.

Il ne serait pas non plus sans inconvénient de déroger à la règle de droit commun d'après laquelle les intérêts des créances contre l'Etat ne courent qu'à partir de la demaude en justice.

Ces considérations nous ont empêché d'accepter la proposition de l'honorable M. Delacour. Nous sommes d'ailleurs convaincus que le dépôt de pièces exigé par la loi aura pour effet nécessaire d'assurer une prompte liquidation de toutes les indemnités. Cette prompte liquidation est commandée par l'intérêt de l'Etat autant que par celui des particuliers.

En conséquence, votre commission a l'honneur de vous proposer l'adoption du projet de loi sni

vant :

Article unique. Les porteurs des bons de réquisition délivrés depuis le commencement de la guerre par les autorités françaises, civiles ou militaires, sont tenus, dans le délai de deux mois à partir de la promulgation du présent décret, à peine de déchéance de tous droits et actions contre le Trésor, de déposer à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l'arrondissement dans lesquels les réquisitions ont été exercées, lesdits bons avec un état indicatif des sommes par eux réclamées et les pièces justificatives, si déjà la remise n'en a été faite aux autorités compétentes.

con

Tous ceux qui se croiraient fondés à réclamer des indemnités à raison des prestations ou des objets de toute nature qu'ils auraient été traints de fournir ou de livrer aux troupes fr çaises, sans avoir reçu de réquisitions régulières, sont également tenus, à peine de déchéance, de faire, au lieu et dans le délai ci-dessus indiqués, le dépôt d'un état indicatif des sommes auxquelles ils prétendent avoir droit, avec les pièces justificatives de leur possession.

Il sera donné un récépissé aux déposants.

Annexe n° 188

(Séance du 2 mai 1871.)

RAPPORT SOMMAIRE fait au nom de la 2o commission d'initiative parlementaire sur la proposition de M. le général de division Martín des Pallières, relative au recrutement de l'armée, par M. le comte de Melun, membre de l'Assemblée.

Messieurs, notre collègue, M. le général Martin des Pallières, a présenté à l'Assemblée un projet de loi sur le recrutement de l'armée. Ce projet, que vous avez renvoyé à la deuxième commission d'initiative parlementaire, repose, comme celui que vous avez déjà pris en considération, sur le principe du service obligatoire et sur la nécessité de satisfaire à tous les besoins militaires du pays, en ne grevant pas, outre mesure, le budget de l'Etat.

Sans entrer dans les détails de la proposition qu'il ne lui appartient pas de discuter, la commission d'initiative a pensé que ce projet, sérieusement étudié par un homme compétent, devait être également pris en considération et renvoyé à la commission déjà chargée d'examiner la proposition de M. le marquis de Mornay.

Cette commission, à laquelle vous renverrez sans doute les divers projets que l'Assemblée a reçus, et qu'elle recevra encore sur une question aussi importante, aura pour but, en s'entourant de toutes les lumières et de toutes les expériences, de réunir les documents, de comparer et de coordonner les systèmes, et de faire sortir, de cette étude complète, un projet d'ensemble qui satisfera aux vœux du pays. Si elle ne possède

pas, en ce moment, les moyens d'accomplir cette
grande tåche, elle trouvera toujours l'Assemblée
prête à lui accorder les pouvoirs dont elle aura
besoin.

Confiante dans le dévouement de son armée, le
France n'a pu attribuer ses revers qu'à l'aveugle-
men funeste qui l'avait exposé dans des condi-
tions telles que le mérite de ses généraux et la va-
leur de ses soldats étaient frappés d'impuissance.
L'une des premières missions qu'elle a données à
ses représentants, c'est de rechercher le moyen
d'enlever à nos ennemis la supériorité du nom-
bre et de l'organisation, seule cause de nos dé-
sastres.

La recherche sera longue et difficile; il est donc opportun de l'entreprendre. En se livrant à cette étude, l'Assemblée répondra aux préoccupations du pays et à celles de l'armée elle-même, impatiente d'être assurée qu'au point de vue matérie, elle est au niveau des armées étrangères; sous le rapport du courage et du patriotisme, elle n'emprunte rien à personne.

Jnsqu'ici, des circonstances fatales nous ort contraints à ne discuter que des lois transitoires ou d'exception; il est temps que l'Assemblée fasse quelque chose de durable et aborde, enfin, les lois organiques. N'oublions pas qu'avant de donner un Gouvernement à la France, nous devons lui assurer des éléments de forcé et de stabilité, sans lesquels, comme tous ceux qui l'ont précédé, il aurait bientôt disparu.

Par ces motifs, la commission d'initiative a l'honneur de vous proposer de prendre en considération le projet de loi présenté par M. le général Martin des Pallières, et de le renvoyer à la commission chargée d'étudier la proposition de M. le marquis de Mornay.

Annexe n° 189.

(Séance du 2 mai 1871.)

RAPPORT SOMMAIRE fait au nom de la 2° commission d'initiative parlementaire sur la proposition de MM. Vétillant, Busson-Duviviers, Ambroise Joubert et plusieurs de leurs collègues, relative à la convocation des conseils généraux dans des circonstances exceptionnelles, par M. le vicomte de Bonald, membre de l'Assemblée.

Messieurs, la proposition de MM. Větillart, Busson-Duviviers et plusieurs autres de nos collègues a pour but d'autoriser les conseils généraux a se réunir sur la convocation du quart au moins de leurs membres, dans le cas où les communications avec le Gouvernement viendraient à être entravées par suite de troubles intérieurs, ou par toute autre cause.

La gravité de cette proposition n'a pas besoin de vous être signalée.

Le législateur ne doit-il pas prévoir des circonstances où les représentants du pouvoir central peuvent se trouver isolés dans leur département, destitués de toute force morale, et, comme on l'a vu trop souvent, obligés de résigner leurs fonctions entre les mains d'ambitieux sans mandat? Les départements ne doivent-ils pas être mis en possession d'un moyen légal de pourvoir à de telles éventualités ? Et des conseillers, qui sont les élus du pays, ne semblent-ils pas désignés, par cela même, pour user, en pareil cas, d'une certaine initiative? D'un autre côté, cette proposition est-elle en opposition directe avec l'esprit de notre législation actuelle? N'aurait-elle pas pour résultat de transformer en corps politiques des conseils que la loi a voulu jusqu'ici renfermer rigoureusement dans le domaine administratif? Toutes ces questions sont ardues; mais, à l'heure où nous sommes, elles doivent être virilement abordées.

Toutefois, ce n'est pas isolément qu'elles seraient étudiées avec fruit et résolues avec sagesse. Elles

appartiennent à un ordre d'idées qui ne pourra tre utilement abordé qu'en traitant dans son ensemble la question des attributions des conseils généraux, et il nous paraît que l'Assemblée ayant saisi la commission de décentralisation du projel de loi de MM. Magnin et Bethmont, relatif ces attributions, il conviendrait de renvoyer à la même commission la proposition qui fait l'objet de ce rapport.

En conséquence, votre deuxième commission d'initiative parlementaire a l'honneur de vous proposer de prendre en considération la proposition de MM. Vétillard, Busson-Duviviers et plusieurs autres de nos collègues, et en demande le renvoi à la commission de décentralisation.

Annexe n' 190.

(Séance du 2 mai 1871.)

RAPPORT fait au nom de la commission chargée d'examiner la proposition de M. Wallon, relative à une modification de l'article 93 du règlement concernant les pétitions, par M. le vicomte de Bonald, membre de l'Assemblée nationale..

Messieurs, plus d'une fois et à diverses époques, de très-bons esprits se sont demandé s'il ne conviendrait pas, sans restreindre le droit important et nécessaire de pétition, d'en soumettre l'exercice à quelques règles. Mais jamais peut-être cette pensée ne s'était produite avec autant de force que dans les circonstances actuelles, et dès les premiers rapports de pétitions dont l'Assemblée nationale a été saisie; en sorte qu'il est permis de dire, qu'en proposant une disposition additionnelle à l'article de votre règlement relatif aux pétitions, l'initiative de notre honorable collègue M. Wallon s'est inspirée d'une initiative plus haule que la nôtre, celle de l'opinion publique.

Disons-le, messieurs, à l'honneur de l'esprit français, c'est que le sentiment exquis des convenances qui en fait le caractère distinctif, supperte difficilement que, dans les circonstances les plus douloureuses pour la patrie, des cerveaux malades ou de vaniteuses et ineptes personnalités nous imposent l'obligation de subir à la tribune, à l'heure même où s'y doivent traiter les plus graves questions, l'exposé de leurs fiévreu es lucubrations ou de leurs burlesques excentricités. Il est impossible de se le dissimuler; un pareil abus d'un droit légitime, constitue une atteinte grave à la dignité de l'Assemblée.

Sauvegarder cette dignité, en même temps que protéger le droit de pétition contre ses propres excès, tout en le respectant dans ce qu'il a d'essentiel, tel a été le but de la proposition que vous avez prise en considération. La commission spéciale que vous avez chargée de l'examiner, s'est pénétrée des mêmes vues, et a cherché, comme l'auteur de la proposition, à concilier le sentiment des convenances avec la raison politique qui commande de maintenir, à l'abri de toute atteinte, le droit de pétition.

Ce droit est, en effet, le moyen, le seul moyen, ne l'oublions pas, par lequel l'individu le plus inconnu entre en rélation directe avec le pouvoir politique de son pays, et si obscur, si humble qu'il soit, peut lui dénoncer un abus ou un excès de pouvoir, lui signaler un acte arbitraire d'un de ses agents, une atteinte à sa liberté, et lui demander le redressement d'un grief légitime. Sa voix qui ne pourrait se produire dans la presse, ou qui y serait perdue, se fait entendre du haut de la tribune nationale, grace au droit de pétition. Que l'accès ne puisse jamais en être interdit à une seule réclamatiou juste!

Hy a là un si grand intérêt, que les membres de votre commission, unis dans un même sentiment, de sont divi és sur le fond de la question, et n'ont pas été unanimes à reconnaitre la nécessité de modifier le règlement. Quelques-uns ont

pensé qu'on ne pourrait le faire sans de graves inconvénients.

La minorité de la commission a émis l'opinion que, dans une société démocratique, le droit de pétition devait être absolu, entier, libre de toute entrave, de toute réglementation; que la mesure proposée prendrait aux yeux du public un caractère d'atteinte au droit de pétition: que l'apparence même serait un danger et devra t être évitée avec le plus grand soin; que d'ailleurs une pitition écartée d'abord par la commission, et mise en discussion après avoir été relevée par un membre, recevrait, du fait même de cette procédure, un éclat tres-fâcheux; que les avantages de la proposition ne seraient pas aussi grands qu'on le supposait et seraient loin d'en compenser les dangers; que les inconvénients de la publicité donnée à certaines pétitions étaient exagérés et plus apparents que réels, et qu'enfin il n'était pas impossible de les éviter sans toucher au règlement, la jurisprudence de l'Assemblée s'y prètant facilement; qu'il y avait donc lieu de s'en rapporter sur ce point à la sagesse des commissions et au tact des rapporteurs.

On a répondu que les efforts tentés jusqu'ici par les commissions et leurs rapporteurs, pour prévenir ou amoindrir une publicité très-regrettable en certains cas, n'avaient eu d'autres résultats que de signaler le danger et de démontrer l'embarras où les plaçaient certaines pétitions, et avaieut abouti à l'introductiou d'une jurisprudence contraire au réglement; qu'en présence de cette alternative, l'impuissance ou la violation du réglement, le modifier était préférable.

On a ajouté que l'obligation de rapporter toutes les pétitions avait les plus graves, les plus sérieux inconvénients, en surexcitant, par la publicité du compte rendu officiel, des esprits oisifs et rèveurs, amoureux de leurs folles imaginations, possédés du besoin de les produire, et en permettant au premier venu de s'imposer à l'Assemblée, pour la forcer à étudier sérieusement ce que souveut il ne considere pas lui-même comme sėrieux, et n'a pe it-être produit que dans un but coupable de dérision pour l'Assemblée ou d'insulte pour la morale; que s'il y a une compensation et un contre-poids à l'inconvenance ou à l'immoralité de quelques pétitions, dans la détrissure que leur inlige l'Assemblée, il n'y en a aucuns pour certaines autres dont l'exentricité et la grotesque insanité, provoquent inévitablement l'explosion d'une regrettable hilarité.

On a dit aussi que l'objection tirée de l'apparence d'une atteinte portée au droit, ne devait pas, toute sérieuse qu'elle était, arrêter l'Assemblée; que l'opinion publique et la presse, son organe légitime, frappées de certains écarts du droit de pétition, demandaieut qu'on en prêvînt le retour; qu'il n'était donc pas à craindre que l'on se méprit sur le caractère d'une mesure, qui tournerait en définitive à l'avantage du droit de pétition en le rendant plus sérieux, le relèverait dans l'opinion, en le mettant à l'abri du ridicule qui le compromet et le déshonore, et dont le résultat serait, cn le faisant respecter, de le sauvegarder.

Et en effet, messieurs, régler l'exercice d'un droit, ce n'est ni le nier ni le diminuer; indiquer les conditions dans lesquelles il doit être pratiqué, ce n'est pas nécessairement le restreindre.

Des constitutions très-libérales, très-démocratiques on admis que l'exercice du droit de pétition ne pouvait être laissé à l'arbitraire de chacun ; le principe qui doit être réglé par la loi est pro- . clamé par la constitution de Genève de 1847; en France, la constitution de l'an III avait poussé cette réglementation à un degré que nous u'admettrions certes pas aujourd'hui, mais nous pouvons bien avec elle exiger des pétitionnaires le respect dû aux autorités constituées.

Un pays auquel nous pouvons demander des

leçons de liberté, et où le droit de pétition, trèsrespecté et largement pratiqué, a été depuis un demi-siècle te promoteur fécond de larges réfor mes, l'Angleterre, n'a pas reculé devant une rẻglementation que l'on peut trouver excessive. Aucune pétition ne peut arriver à l'une ou à l'antre Chambre, si elle n'est présentée par un membre du Parlement, ce qui exclut toute pétition ridicule ou incouvenante, et, malgré cette précaution absolument restrictive, un règlement, fait en 1839, permet de renvoyer, presque indéfiniment, la discussion des pétitions qui n'ont pas pour but de dénoncer la lésion d'un intérêt légitime ou la violation d'un droit dans la personne d'un citoyen.

Votre commission est loin, bien loin de vous proposer rien de semblable. rien qui ressemble à une diminution, à une restriction du droit; et nous ne prétendons pas emprunter à nos voisins des conditions qui sont acceptées chez eux par l'opinion, et qu'un long usage leur a rendues respectables, mais qui portent au droit de pétition une incontestable atteinte. Nous avons cité ces exemples dans le but unique de montrer que, dans des pays très-libres, soumettre à une réglementation l'exercice du droit de pétition, ne rẻpugne pas à un sentiment très-profond de la liberté politique.

Ce que nous vous proposons, c'est tout simplement de ne pas donner à certains petitionnaires la satisfaction, qui ne leur est pas due, de lire dans le compte rendu officie! l'énoncé de leurs malsaines élucubrations; mais en même temps de laisser à chacun de vos membres un moyen simple, facile de contrôler la manière dont vos commissions remplissent leur mandat, de rendre toute surprise impossible et d'empêcher qu'aucune pétition puisse être soustraite à vos regards.

Et lorsque vous aurez fait cela, le droit du pėtitionnaire ne sera-t-il pas suffisamment garanti? Lorsque sa pétition aura été reçue, enregistrée, analysée au rôle général, reproduite de la même manière au feuilleton, avec une indication spéciale destinée à le signaler à votre attention; lorsqu'elle aura été à la tribune l'objet d'un rapport sommaire qui la désignera par son numéro d'ordre et le nom de son auteur; lorsqu'enfin il suffira qu'un seul membre en fasse la demande pour que les conclusions de la commission soient mises en discussion apès un délai de huit jours, le pétitionnaire n'aura-t-il pas pleinement usé de son droit? Sera til indispensable que nous fassions à son œuvre, quel è qu'elle soit, l'honneur d'en entendre l'analyse à la tribune? L'Assemblée dispose souverainement de cet insigne honneur, elle ne le doit à personne; et il est conforme à sa dignité comme au bon sens de le réserver pour les pétitionnaires sérieux, qui savent ne pas s'en montrer indignes, pour un travailleur obscur, pour un savant modeste qui apporteront une idée utile, ou pour un citoyeu qui méritera bien de la liberté et de la justice, en dénonçant un acte arbitraire, une violation de la loi.

La majorité de votre commission l'a pensé ainsi, et elle a adopté la proposition de M. Wallon dans son principe, tout en la modifiant dans

sa rédaction.

La différence entre la proposition de notre collègue et celle que nous avons l'honneur de vous soumettre, c'est que, dans le projet de M. Wallon, l'ordre du jour ou la question préalable se nient d'abord prononcés conformément aux conclusions de la commission, et qu'à partir de ce moment, chaque membre pourrait, pendant un mois, relever une pétition ainsi condamnée, et en demander la discussion qui serait alors de plein droit. Votre commission n'a pu admettre ni le délai d'un mois, ni surtout le droit de relever une pétition après le prononcé de l'ordre du jour ou de la question préalable. Cette forme de procédure, ee vote auquel on ferait opposition, comme à un jugement par défaut, et qui ne serait acquis qu'au

bout d'un mois, nous a paru trop en dehors des règles ou du moins des habitudes parlementaires. Nous vous proposons d'attribuer à chaque membre le droit de relever une pétition et d'en faire renvoyer la discussion à huit jours, mais ce droit devra être exercé au moment où la commission fera le rapport sommaire de la pétition, rapport dont les conclusions seront indiquées d'avance au feuilleton.

Mais on a fait une objection. Ce vote sans dis cussion, sur rapport sommaire, ne se prêtera-t-il jamais à une surprise dangereuse? N'offrira-t-il pas, dans certaines circonstances, un de ces moyens que la passion politique explique sans les justifier, et à l'aide duquel on écarterait, par un imprévu, une pétition ambarrassante? Voici notre réponse. Cette objection supposerait que la commission serait, non-seulement unaime dans ses conclusions, puisque nous faisons le cette unanimité la condition essentielle de cette procédure spéciale, mais unanime encoro dans le projet de surprendre la bonne foi de l'Assemblée; et, ce parti pris de la commission étant donné, i reste encore l'analyse de la pétition au rôle général, puis au feuilleton, qui doit être dis tribué trois jours à l'avance; il faudrait que la commission eût, ponr auxiliaire indispensable, la négligence absolue de tous les membres de l'Assemblée; dans cette hypothèse enfin, il faut admettre une pétition vraiment importante, et il serait bien étonnant qu'une pièce de cette nature n'eût pas été communiquée à quelque membre de l'Assemblée, ne fût pas connue au dehors, n'eût pas été signalée dans la presse. Pour s'arrê ter à une semblable hypothèse, il faut accumuler les invraisemblances, disons mieux, les impossibilités.

Votre commission a donc l'honneur de vous proposer d'ajouter à l'art. 95 de votre règlement la disposition suivante :

«La commission pourra néanmoins, lorsqu'à l'u nanimité des membres présents, elle l'aura jugé convenable, ne rapporter à la tribuue, que par l'indication du nom de leurs auteurs et leur numéro d'ordre au rôle général, les pétitions qui ne lui paraitraient pas mériter un débat public. »

Ces pétitions seront rangées a feuilleton sous cette désignation spéciale: Pétitions que la com❤ mission, à l'unanimité, propose d'écarter par la question préalable, conformément à l'art. 95 du règlement.

Toutefois si, avant l'adoption des conclusions du rapport, une de ces pétitions était relevée par un membre de l'Assemblée, elle serait de plein droit mise en discussion au jour fixé pour le prochain rapport des pétitions.

SÉANCE DU 4 MAI 1871

SOMMAIRE.

Congés. Communication de M. le ministre de l'intérieur relative aux faits de guerre. Dépôt, par M. le vicomte Othenin d'Haussonville, au nom de la 2 commission d'initiative parlementaire, de deux rapports sommaires; le premier, sur la proposition de MM. Paul Jozon et Charles Rolland, relative aux règles générales applicables à toutes les élections; le second, sur la proposition de M. Aubry, relative à la constatation du domicile en matière électorale. Dépôt, par M. Théry, de deux rapports: le premier, au nom de la 2 commission d'initiative parlementaire, sur la proposition de M. CourbetPoulard, tendant à modifier Farticle 2102 du code civil: le second, au nom de la commission chargée d'examiner la proposition de M. Gannivet et autres, ayant pour objet l'abrogation

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M. le ministre de l'intérieur. Je demande la parole.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

du décret du 2 novembre 1870, qui a suspendu les procédures de saisie immobilière, de folleenchère et autres ventes judiciaires. Dépôt par M. Antonin Lefèvre-Pontalis, au nom de la 2 commission d'initiative parlementaire, d'un rapport sommaire sur la proposition de M. M. Ernest Picard, ministre de l'intérieur. Louis Blanc et autres, tendant à modifier la loi Le Gouvernement a reçu ce matin la dépêche électorale. Dépôt, par M. le comte de Me- suivante, que je m'empresse de communiquer lun, au nom de la 3 commission d'initiative à l'Assemblée, en laissant la parole au général parlementaire, d'un rapport sommaire sur la qui l'a rédigée : proposition de M. Calemard de La Fayette et autres, tendant à tormer une commission de trente membres, dite de la réorganisation de l'armée. - Dépôt, par M. le comte de Rességuier, au nom de la 1" commission d'initiative parlementaire, d'un rapport sommaire sur deux propositions:- l'une, de M. Prax-Paris et autres, tendant à la réduction des traitements des fonctionnaires publics; l'autre, de M. Flotard, tendant à l'établissement d'un impôt provisoire sur le revenu. Discussion des interpellations de M. Luro sur les fonctionnaires et magistrats nommés ou destitués par les délégués du Gouvernement de la défense nationale & Tours et à Bordeaux: MM. Luro, le garde des sceaux, Silva, Baragnon. Adoption de l'ordre du jour.

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-

PRÉSIDENCE DE M. GRÉVY.

La séance est ouverte à deux heures et de[nie.

M. Paul de Rémusat, l'un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal de la séance d'avant-hier mardi.

Le procès-verbal est adopté.

M. le président. J'ai reçu les lettres suivantes, dont je donne connaissance à l'Assemblée :

"Monsieur le président,

Frappé subitement par un malheur de fainille, je viens vous demander de vouloir bien m'autoriser à m'absenter immédiatement, quelques jours, pour de cruels devoirs.

« Veuillez agréer, monsieur le président,
l'assurance de ma considération la plus respec-
tueuse.
« Signé duc D'HARCOURT. »

Il n'y a pas d'opposition?...
Le congé est accordé d'urgence.

Monsieur le président,

« J'ai l'honneur de vous prier de vouloir bien m'accorder un congé de six jours pour affaires urgentes.

Veuillez agréer, monsieur le président, l'assurance de mes sentiments respectueux.

« Signé comte OCTAVE DE BASTARD.. Il n'y a pas d'opposition ?... Le congé est accordé d'urgence.

Monsieur le président,

« Une indisposition peu grave, mais trèsincommode et très-tenace, m'empêche d'aller reprendre mon poste à l'Assemblée nationale à l'expiration du congé qu'elle m'a accordé.

Je vous prie de vouloir bien m'excuser auprès d'elle, si vous le jugez convenable, et l'assurer que je m'empresserai de rentrer à Versailles dès que je le pourrai. J'espère que ce sera dans quelques jours.

Agréez, monsieur le président, l'assurance de ma haute considération.

« Signé : GATIEN-ARNOULD. »

« Le général Lacretelle m'annonce à l'instant un succès complet à la droite des attaques. La redoute du Moulin-Saquet a été prise d'assaut, 8 pièces de canon enlevées et 300 prisonniers. Les insurgés ont laissé environ 150 hommes sur le terrain. On a pris aux insurgés plusieurs fanions et un grand nombre d'officiers.» (Nombreuses marques de satisfaction.)

M. le président. M. d'Haussonville a la parce pour le dépôt d'un rapport.

M. le vicomte Othenin d'Haussonville. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Assemblée, au nom de la deuxième commission d'initiative parlementaire, un rapport sommaire sur la proposition de MM. Paul Jozon et Charles Rolland, relative aux règles générales applicables à toutes les élections.

Le rapport conclut à la prise en considération.

J'ai également l'honneur de déposer, au nom de la même commission, un rapport sommaire sur la proposition de M. Aubry, relative à la constatation du domicile en matière électorale.

Le rapport conclut à la prise en considération et au renvoi à la commission qui sera chargée d'examiner la proposition de M. Jo

zon.

M. le président. Ces rapports seront imprimés et distribués.

M. Théry. J'ai l'honneur de déposer sur te bureau de l'Assemblée, au nom de la deuxième commission d'initiative parlementaire, un rapport sommaire sur la proposition de M. Courbet-Poulard, tendant à modifier l'article 2102 du code civil.

J'ai l'honneur de déposer aussi le rapport fait au nom de la commission chargée d'examiner la proposition de M. Gannivet et plusieurs de ses collègues, ayant pour objet l'abrogation du décret du 2 novembre 1870, qui avait suspendu les procédures de saisie immobilière, de folle-enchère et autres ventes judiciaires.

M. le président. Les rapports seront imprimés et distribués.

M. Antonin Lefèvre-Pontalis. La deuxiè me commission d'initiative parlementaire m'a chargé de vous présenter le rapport sommaire sur la proposition de M. Louis Blanc et de plusieurs de nos collègues, tendant à modifier la loi électorale.

La commission conclut contre la prise en considération.

M. le président. Le rapport sera imprimé et distribué.

M. le comte de Melun. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de l'Assemblée, au nom de la commission d'initiative parlementaire, le rapport sur la proposition de M. Calemard de Lafayette et de plusieurs de nos collègues.

Cette proposition a pour but la création d'une commission de trente membres pour traiter

toutes les questions qui ont rapport à la réorganisation de l'armée.

La commission d'initiative parlementaire conclut à la prise en considération de cette proposition.

M. le président. Le rapport sera imprimé et distribu..

M. le comte de Rességuier. Au nom de la première commission d'initiative parlementaire, et conformément aux articles 24 et 75 de votre règlement, j'ai l'honneur de demander de renvoyer à la commission financière de trente membres que vous avez récemment nommée, deux propositions qui affectent les recettes et les dépenses de l'Etat.

L'une est celle de M. Prax-Paris et de plusieurs de nos collègues, tendant à la réduction des traitements des fonctionnaires publics.

L'a tre est celle de M. Flotard, tendant à l'établissement d'un impôt provisoire sur les

revenus.

M. le président S'il n'y a pas d'objection, con'ormément à l'indication de la commission d'initiative, les propositions seront renvoyées à la commission des finances.

L'ordre du jour appelle la discussion des interpellations de M. Luro sur les fonctionnaires et magistrats nommés ou destitués par la délégation, à Tours et à Bordeaux, du Gouvernement de la défense nationale.

La parole est à M. Luro.

M. Victor Luro. Messieurs, je viens développer l'interpellation que j'ai eu l'honneur de proposer dans une de vos dernières séances.

Et tout d'abord, vous me permettrez d'établir d'une manière précise et non équivoque la situation dans laquelle je veux me présenter devant vous, situation qui n'a peut-être pas

été,

par ma faute, suffisamment caractérisée la dernière fois que j'ai eu l'honneur de monter à cette tribune.

En effet, il semblait peut-être que le mobile qui m'y avait poussé n'était autre qu'un sentiment de faveur trop marqué pour un personnel qui a pu se trouver plus ou moins promis dans un ordre de choses qui n'existe plus.

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Mais, messieurs, telle n'est pas, croyez-le bien, ma pensée. J'entends séparer complétement ce qui existait avant le 4 septembre de ce qui a existé depuis cette dernière date, et c'est seulement des faits qui se sont passés entre cette dernière date et la date du 8 février dernier que j'entends m'occuper dans cette interpellation.

Pourquoi cela, messieurs? C'est qu'entre ces deux dates, le 4 septembre et le 8 fevrier, ly a eu des actes d'administration qui ont été accomplis sous l'empire d'idées politiques, de vues politiques auxquelles il m'est permis de dire que la France ne s'est pas associée, car le jugement qui vous a amenés dans cette Assemblée est précisément celui qui a condamné cette politique.

Or, quand un changement aussi radical survient dans la politique du pays, quel est le devoir du nouveau gouvernement chargé d'ex-cuter la nouvelle idée qui a preside à ce changement? Quel est le devoir du gouvernement qui personnifie le principe qui a amené la grande révolution, car c'est le mot qu'il faut em

ANNALES. — T. I.

ployer, la grande révolution pacifique du 8 février dernier?

Il a fallu que le Gouvernement que vous avez créé et qui n'est qu'une émanation de votre autorité propre, mit en rapport l'état de choses qui a été créé, à tort ou à raison, entre le 4 septembre et le 8 février, avec le nouvel état de choses qu'il est chargé d'établir. (Très-bien! à droite.)

Or, messieurs, à cet égard il y avait deux ordres de modifications qu'il fallait aborder: il y avait des chaugements essentiels à faire dans les choses et des changements essentiels à faire, disons-le, dans les personnes.

Les changements dans les choses se font d'eux-mêmes; ils sont les plus faciles; ils se font d'eux mêmes, par le fait même du changement de principe et de direction; mais les changements de personnes offrent plus de difticulte, et cependant si chacun restait dans son role, dans la sincérité de son rôle... (Plus haut ! plus haut!)

Un membre au fond de la salle, à très-haute voix. On n'entend rien ! (On rit.)

Un autre membre. Voilà une interpellation à à l'interpellateur!

M. Victor Luro. Je vais tâcher, autant qu'il dépendra de moi, de satisfaire l'interrupteur. Je disais que les changements dans les personnes sont les plus difficiles. Et cependant, messieurs, si chacun restait sincèrement dans son role, ils ne devraient rencontrer aucune dificulté, car lorsqu'un homme s'est associé volontairement à une politique dont il devient solidaire, son premier devoir, quand cette politique est condamnée, c'est de s'effacer. (Très-bien! très bien!)

Mais malheureusement, dans le temps où nous sommes, il n'arrive que trop souvent que ceux-là qui ont été poussés aux emplois par le triomphe d'une opinion, se montrent peu soucieux de rester fidèles a cette derniere lorsqu'il s'agit pour eux de choisir entre l'emploi et l'opinion. (Très-bien!)

De là, messieurs, la nécessité pour le Gouvernement de procéder à des mesures d'épuration que devrait lui épargner la dignité bien sent e de ceux qui ambitionnent l'honneur de servir une politique. (Marques d'adhésion.) Et ainsi le devoir pour ce Governement, encore une fois, c'est de se montrer rigoureux. Cependant, je m'empresse de d re que cette rigueur a sa limite. Quelle est-elle? C'est celle de la stricte nécessité. Au delà, la rigueur pourrait devenir de l'arbitraire et toucher à la spolation; en deçà, elle n'est que simple justice.

Le Gouvernement a-t-il dépassé cette limite? Je m'empresse de lui ren ire ce témoignage que, dans le rôle qui lui appartient, il a apporté jusqu'à ce jour des menagements qui, je veux le croire, lui ont été commandés par la difficulté de la situation; ita apporté dans ce travail nible, délicat, une main très-discrète, trop dcrète peut être.

Plusieurs membres. Oui! oui! trop discrète! M. Victor Luro. Et dans l'interpellation que je viens soutenir devant vous, le seul but que je me propose, c'est de l'aider, c'est de raffermir ses intentions, alors qu'il doit se proposer de rendre justice, mais de la rendre sévère, s'il le faut...

Plusieurs membres. Oui, sévère !

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