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Car, pour me servir des paroles du même auteur, n°. 24, c'est par rapport » à la nullité que cela doit avoir lieu, et non pour infliger à l'assuré la peine › d'un dol, qui doit être prouvé par des preuves indubitables.

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... CONFÉRENCE.

CLXXXIX. L'une des parties, soit qu'il existe, soit qu'il n'existe pas de présomption légale, même lorsque l'assurance a été faite sur bonnes ou mauvaises nouvelles, même quand on aurait déjà exécuté le contrat, peut toujours être admise à prouver qué l'autre partie connaissait l'événement, et n'a contracté que par fraude. Elle pourra fournir cette preuve tant par titres, correspondances, que par témoins. Il s'agit d'un délit contre lequel la preuve testimoniale est toujours reçue. (Art. 1348 du Code civil).

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Il ne faut jamais perdre de vue que la bonne foi qui doit régner dans le contrat d'assurance, oblige chacun des contractans de ne rien dissimuler à l'autre de ce qu'il sait sur les choses qui font la matière du contrat. Cette dissimulation, comme le disent Pothier, n°. 194, des assurances, et tous les auteurs, est un dol, une fraude véritable. Si elle est prouvée, on ne saurait hésiter de casser l'assurance, dont on a dû écarter toute feinte et toute surprise. — (Argument de l'art. 348 du Code de commerce).

Loin de nous la doctrine scandaleuse du jésuite Lessius, qui soutient qu'un assureur, pour profiter d'une prime avantageuse, peut dissimuler les faits dont il est instruit en son part iculier. « Les faits, dit-il, à moi seul connus, qui diminuent le péril, n'en diminuent pas la >> croyance commune. » Principes de la plus profonde immoralité, d'après lesquels le commerce des assurances ne serait plus qu'un véritable brigandage. — (Voyez Lessius, de justitiâ et jure, lib. 2, cap. 28, no. 27).

Maintenant, examinons la question de savoir si, à défaut de preuves, on peut obliger sa partie adverse à affirmer par serment que, lors de la signature de la police, l'événement lui était inconnu. L'art. 21 des Assurances d'Amsterdam admet le serment en pareil cas. Valin, sur l'art. 40, titre des assurances, dit qu'on peut obliger l'autre partie d'affirmer. Pothier, assurances, no. 16, dit même que son refus rend avéré le fait de cette connaissance qu'elle a eue. Enfin, les art. 1357, 1358 et 1359 du Code civil, semblent enlever tout doute à cet égard.

Cependant, le refus de prêter serment peut très-bien faire prononcer la nullité de l'assurance, mais il ne peut pas faire condamner aux peines portées par l'art. 368. « C'est par rap» port à la nullité de l'assurance que cela doit avoir lieu, observe ensuite Pothier, ibidem, » no. 24, et non pour infliger à l'assuré la peine du dol, qui doit être prouvé par des preuves » indubitables. » En effet, l'art. 368 ne prononce de peines que dans le cas où la fraude est prouvée par des preuves positives, et le refus de prêter serment n'est ici qu'une présomption légale, qui ne doit avoir d'autre effet que celui de la présomption dont parlent les art. 365 et 366 du Code de commerce. C'est aussi l'avis d'Emérigon, au texte, et celui de M. Estrangin sur Pothier, n°. 16.

SECTION VII.

Peine de la fraude:

La présomption tirée de la lieue et demie pour heure (à laquelle on n'a pas renoncé par un pacte de la police), opère la nullité de l'assurance, mais elle n'est pas une preuve de fraude; par conséquent, elle n'est accompagnée d'aucune peine. Si l'assuré pouvait savoir, l'assureur pouvait savoir aussi. Ils n'ont rien à se reprocher sur ce point. Il suffit donc de casser l'assurance, par cela seul que la loi la déclare nulle. Pothier, n°. 34.

Mais, en cas de preuve que l'assuré savait la perte, il sera tenu de restituer à l'assureur ce qu'il aura reçu, et de lui payer la double prime. Art. 41, des as-·

surances.

Et en cas de preuve que l'assureur savait l'arrivée du vaisseau, il sera condamné à la restitution de la prime, et d'en payer le double à l'assuré (d. art. 41); c'est-à-dire qu'il sera condamné à restituer la prime, et en outre à payer à l'assuré le double de cette même prime. Valin, tom. 2, sur l'art. 38. Pothier, n°. 14, 24 et 47.

On dira peut-être que la peine prononcée en pareil cas par l'Ordonnance, est trop légère; car celui qui, malgré la connaissance certaine de l'événement, assure ou se fait assurer, se rend coupable de stellionat. Straccha, gl. 27, n°, 4. Par conséquent, l'action criminelle compète contre lui. Valin, art. 41. Pothier, no. 14.

Le Réglement de Rotterdam, cité par Valin, d. loco, veut que celui qui est coupable de ce crime soit puni comme faussaire; et M. Valin, art. 38, dit que • la connaissance certaine du fait, imprimant sur celui qui l'avait une note d'in• famie, pourra, selon la nature des preuves, l'assujettir à des peines, dont la › moindre sera la dégradation du titre de négociant. »

Pourquoi donc notre Ordonnance se borne-t-elle à la simple peine de double prime, tandis qu'en l'art. 16, elle fait défense à ceux qui prennent des deniers à la grosse de les faire assurer, à peine de nullité de l'assurance et de punition corporelle, et qu'en l'art. 55, elle veut que, si l'assuré poursuit le paiement des sommes assurées au-delà de la valeur de ses effets, il soit puni exemplairement?

Pour concilier ces divers objets, M. Valin, art. 38 et 41, pense que la peine

de double prime concerne le cas de la connaissance présumée par la lieue et demie pour heure.

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M. Pothier, no. 24, est d'un avis contraire. L'Ordonnance, dans l'art. 38, , dit-il, propose deux cas, dans lesquels elle prononce contre l'assuré la nul»lité du contrat d'assurance: 1°. lorsqu'il savait; 2°. lorsque probablement » il pouvait savoir la perte des effets assurés. Mais elle ne prononce, par l'article 41, la peine du paiement de la double prime, que dans le seul cas auquel l'assuré a su la perte, et non dans celui auquel il a seulement pu la savoir; car elle dit, en cas de preuve contre l'assuré. Or, de ce que l'assuré pouvait savoir la perte de ses effets, s'étant écoulé assez de tems pour cela, » on n'en peut pas tirer la conséquence qu'il la savait effectivement: A posse › ad actum, non valet consequentia. On opposera que l'Ordonnance, art. 39, » dit qu'en ce cas, l'assuré sera présumé avoir su la perte; mais cela doit s'entendre en ce sens, que le contrat doit être en ce cas déclaré nul, de même » que s'il y avait des preuves positives qu'il la savait. Ce n'est que par rapport » à la nullité du contrat que cette proposition doit avoir lieu, et non pour › infliger à l'assuré la peine d'un dol qui doit être prouvé par des preuves » indubitables: Dolus nonnisi ex perspicuis indiciis probari debet. »

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On ajoutera que la double prime est la seule peine à laquelle la partie lésée puisse conclure, soit par voie civile, soit par voie criminelle. Mais cela n'empêche pas qu'à la poursuite du ministère public, le coupable ne doive être. puni plus sévèrement.

Je n'ai jamais vu de procès criminels sur cette matière, et même je n'ai aucun exemple que parmi nous la peine de double prime ait été prononcée. M. Pothier, n°. 17, observe que, dans le for de la conscience, il suffit que le coupable restitue ce qu'il a indûment reçu, sans qu'il se condamne luimême à la peine de double prime. Mais en restituant le capital, le coupable doit de plus payer l'intérêt : Si assecurator scivit navim appulisse, et merces in tuto esse, tunc contractus est nullus; et tenetur restituere assecurator, non solùm quod eâ ratione acceperit, sed etiam interesse et damna indè secuta. Casaregis, disc, 1, no. 19. Vide infrà, ch. 18, sect. 5.

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1.

CXC. Les effets de la présomption légale se réduisent simplement à opérer la nullité du contrat. Mais les effets de la preuve de la fraude ont d'autres résultats. Outre la nullité de l'assurance, l'art. 368 veut que la partie convaincue de fraude soit condamnée à des peines qui sont, 1o. la réparation envers la partie lésée; 2°. la réparation envers la société. La pre

mière est fixée au paiement d'une double prime, si la preuve est faite contre l'assuré, et au paiement d'une somme double de la prime convenue, si c'est l'assureur qui se trouve convaincu de fraude. Quant à la réparation envers la société, la loi veut que la partie soit pour suivie correctionnellement, et, par conséquent, qu'elle devienne passible des peines réservées au vol et à l'escroquerie. (Art. 405 du Code penal).

En ordonnant que le coupable de fraude sera toujours poursuivi correctionnellement, la dernière disposition de l'art. 368 lève toutes les équivoques et fait cesser toutes les incertitudes que l'Ordonnance avait laissées, et qui avaient donné lieu à des opinions différentes parmi les jurisconsultes.

Il n'y a pas de doute, d'ailleurs, que, dans cette circonstance, l'intention du législateur ne fût que l'action dût être portée devant le tribunal correctionnel auquel la connaissance en appartient comme délit. D'un autre côté, l'art. 161 du Code d'instruction criminelle veut que le tribunal qui prononce la peine, statue par le même jugement sur les demandes en restitution et en dommages et intérêts. - (Voyez ce que nous avons dit à cet égard dans notre Cours de droit maritime, tom. 4, tit. 10, sect. 25, pag. 207 et suivantes).

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Du reste, tous ces principes s'appliquent à toutes sortes d'assurances maritimes, quel qu'en soit l'objet, et entre quelques personnes que ce contrat ait été formé.

Enfin, dans tous les cas où la fraude est alléguée, il n'est pas nécessaire de preuves écrites pour la prouver. Les dépositions des témoins et tous les moyens possibles d'éclairer la conscience des magistrats sont admis. — ( Arti 1353 dù Code civil; arrêt de cassation, du 21 mars 1808)."

"La partie convaincue de fraude doit être condamnée par corps à la restitution de la prime, etc., non pas parce que la cause de la condamnation est un stellionat, comme le dit Pothier, mais parce que c'est un délit, et que d'ailleurs il s'agit d'une matière de commerce. Il n'y a point ici stellionat dans la signification littérale donnée à ce mot par l'art. 2059 du Code civil. 16 Voyez Pothier, assurances, no. 13).

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Sı, lors de la signature de la police, le commissionnaire qui fait faire l'assurance pour compte d'autrui, est instruit du sinistre, l'assurance est nulle, quoique le commettant l'eût ignoré.

Elle est également nulle, si le commettant était instruit du sinistre, lorsqu'il a donné ordre de faire faire les assurances, quoique le commissionnaire ait été de bonne foi. Ainsi jugé par l'arrêt du Parlement de Paris, rapporté ci-dessus, sect, 3.

Il en est de même si le commettant, instruit à tems pour révoquer l'ordre, a omis de le révoquer.

Dans tous ces cas, la double prime et autres peines ne tombent que sur celui qui est coupable de dol. Casaregis, disc. 9. Valin, art. 40. Pothier, n°. 18, 19 et 20.

Ces deux derniers auteurs citent l'arrêt du Parlement d'Aix, rendu en favéur des propriétaires du corsaire la Junon, et qui est rapporté suprà, ch. 8, sect. 9, § 3, tom. 1. Ce corsaire avait fait six prises qui avaient été amarinées. Il revint à Bayonne le 10 juillet 1746. Deux des prises y arrivèrent en même tems; mais n'ayant aucune nouvelle des quatre autres, on écrivit à Bordeaux, à Livourne et à Marseille, pour les faire assurer.

Peu de jours après, on eut avis à Bayonne qu'elles avaient été reprises. On se hâta d'en instruire le commissionnaire de Marseille. Mais l'ordre avait déjà

été exécuté.

Il y eut au sujet de cette assurance un grand procès, où l'on agita diverses questions. Mais les assureurs n'ayant pas rapporté la preuve à laquelle ils avaient été admis par l'arrêt, payèrent la perte.

Autre question. Si, dans l'assurance faite par commission, on n'a pas renoncé à la lieue et demie pour heure, et que la nouvelle de l'événement ait pu être portée, avant la signature de la police, dans le lieu où la police a été passée, en comptant pour heure une lieue et demie, le contrat est-il nul? D'un côté, on peut dire que le commissionnaire n'ayant aucun intérêt en la chose, est présumé avoir agi de bonne foi, et que la notice présumée du sinistre ne doit pas nuire au commettant, qui n'a été informé du sinistre que long-tems après. Mais, 1°. le commissionnaire peut s'être laissé aveugler par l'intérêt de son ami; 2°. la loi est générale, et ne distingue pas l'assurance faite pour compte propre de celle faite pour compte d'autrui. Le cas s'étant présenté à Gênes, des arbitres furent nommés. Ils décidèrent que l'assurance était nulle. Casaregis, qui fut un des arbitres, rapporte, dans son disc. 8, les motifs de cette décision, à laquelle on ne peut qu'adhérer.

Cette dernière question donne lieu à l'examen d'une autre. Un négociant de Londres, après avoir donné ordre à ses commissionnaires à Marseille de faire des assurances pour son compte, apprend que le navire a été pris. Il écrit tout de suite pour révoquer l'ordre; mais avant la réception de sa seconde lettre, l'assurance a été faite à Marseille, sans que, par la police, on ait renoncé à la lieue et demie pour heure. Il semble d'abord que le contrat soit nul, si (en comptant une lieue et demie pour heure) la nouvelle de la

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