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$ 2. Vente des effets

soit parlé de l'assu

reste au pouvoir du

Si, dans l'acte de vente des effets assurés, il n'est point parlé de l'assurance déjà faite, et que la police reste au pouvoir du vendeur, que deviendra-t-elle? assurés (Car il est certain qu'en cas de sinistre, le vendeur, qui a déjà reçu le prix rance dont la police de sa chose, ne pourrait pas s'attribuer le bénéfice de l'assurance). Un juge- vendeur. ment du Grand Conseil de Hollande décida que l'assurance non cédée à l'achetcur devenait caduque, et condamna les assureurs à rendre la prime. Luzac, sur Wolf, S 629, tom. 4, pag. 3, n'approuve pas ce jugement, ct je suis de

son avis.

1o. La vente des effets en risque est un acte absolument étranger aux assureurs, qui n'y sont pas intervenus, et à qui il ne peut ni nuire ni profiter; 2o. L'assurance est un contrat accessoire attaché à la chose assurée, et incapable de subsister indépendamment de son objet ;

3°. L'acheteur représente le vendeur. Loi 17, § 5, ff de pactis; loi 15, Cod. de contrah. stipulat;

4°. Il serait aussi injuste qu'odieux que le vendeur reçût deux fois le prix de sa chose. De Luca, de credito, disc. 8, no. 6;

5°. En vendant les effets assurés, on est présumé céder l'assurance qui y était attachée: Appellatione rei simpliciter, etiam alio non expresso, venit res cum omnibus suis accessoriis, juribus et pertinentiis. Dumoulin, Coutume de Paris, titre des fiefs, S. 1, gl. 5, no. 14. Despeisses, tom. 1, pag. 371, n°. 11.

Il est vrai que si, lors du sinistre, le vendeur intentait l'action de délaissement contre les assureurs, ceux-ci seraient non recevables à exciper de la vente par lui faite; car agissant en vertu de la police dont il serait porteur, la question de propriété ne saurait être élevée contre lui. (Suprà, ch. 5, sect. 3). Mais le bénéfice de cette action refluerait sur l'acheteur, lequel pourrait alors requérir de son chef le paiement de la perte, en comptant la prime, si elle n'avait pas été acquittée.

Il suit du même principe que les nouvelles assurances que l'acheteur aurait fait faire, dans l'ignorance des premières, tomberaient en ristourne, si, jointes aux premières, elles excédaient la valeur des effets assurés. Art. 25, titre des assurances, de l'Ordonnance.

CONFÉRENCE.

CXCV. Les observations d'Emérigon sont justes, et elles reposent sur des principes certains. Si, d'ailleurs, l'acheteur, dans l'ignorance des premières, avait fait faire de nouvelles assurances, il faudrait appliquer les dispositions de l'art. 359 du Code de commerce, qui a remplacé l'art. 25, titre des assurances, de l'Ordonnance; de sorte que si la première assu25

T. II.

rance est de 30,000 fr., les autres faites par l'acheteur, l'une de 10,000 fr., et la dernière de 5,000, et que le chargement ne vaille que 35,000 fr., la première assurance sera valable, la deuxième sera réduite à 5,000 fr. Il y aura ristourne pour le restant et pour la troisième assurance, et les assureurs recevront l'indemnité du demi pour cent, pour les valeurs assurées qui excèdent le chargement.

Ces dispositions ne sont applicables qu'aux assurances qui auraient été faites de bonne foi et sans fraude, par l'acheteur. L'art. 359 n'a point entendu valider des assurances frauduleuses, lesquelles sont d'ailleurs frappées de nullité par le droit commun, art. 1109 et 1116 du Code civil, et par les art. 348 et 357 du Code de commerce. Il n'a seulement voulu soumettre l'assuré à la simple indemnité de' demi pour cent que lorsqu'il serait de bonne foi.

L'assuré qui fait frauduleusement des assurances, des assurances où le chargement a été masqué par le dol, peut, suivant les circonstances, être poursuivi par voies extraordinaires.

Assurance faite

par fraude au-delà de l'intérêt en ris

que.

Assurance faite

sans fraude au-delà

que.

SECTION IV.

Assurance qui excède la valeur des effets mis en risque.

Au ch. 9, sect. 1, j'ai parlé de l'assurance faite par fraude, au-delà de l'intérêt mis en risque.

Je vais maintenant parler des assurances faites sans fraude, au-delà de la de l'intérêt en ris- valeur des choses assurées; mais pour mieux éclaicir la matière, je crois devoir commencer par rapporter le texte des réglemens et des ordonnances. Guidon de la mer, ch. 2, art. 16 : « Le ressortiment du trop assuré se fait, non au marc la livre, mais selon la postériorité des dates.

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Texte des réglemens et des ordon

nances.

Art. 18 L'assuré peut faire ressortir et tirer hors du péril les dernières

› assurances, si au lieu de charger pour 2,000 écus de marchandises, il n'en charge que pour 12 ou 1,500 liv. ›

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Ch. 3, art. 3: S'il y a plusieurs polices d'assurance sur une même cargaison, celle qui est antérieure en date préférera les autres. S'il y a ressortiment, » les derniers assureurs, soit en perte ou en gain, retireront leur seing, en leur payant demi pour cent. »

Réglement d'Anvers, art. 15: « Si l'on trouve que les navires ont été assurés » en plusieurs lieux, sans fraude du propriétaire qui fait assurer, la préassu» rance tiendra et sera bonne; et si elle n'est pas suffisante, et que les marchan» dises vaillent beaucoup plus, le reste sera pris sur la seconde assurance, jusqu'à proportion de ce qui sera permis, et pour le surplus, sera nulle et pour

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, non advenue, sauf toutefois que ceux qui ont assuré retiendront demi pour cent à leur profit, suivant l'ancienne coutume. »

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Réglement d'Amsterdam, art. 22: « Quelqu'un s'étant fait assurer sur quelques marchandises, et de là à quelque tems il se réavise et ne les envoie > pas......... ou il se trouve qu'elles valent beaucoup moins que la somme assurée; lors, il est permis à l'assuré de répéter contre l'assureur le surplus » du prix de l'assurance, en donnant toutefois à l'assureur demi pour cent. » Art. 23: Le dernier assureur participera autant que le premier, soit perte, soit profit.

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Les art. 23, 24 et 25 de l'Ordonnance de la marine, titre des assurances, ont été puisés dans ces anciens réglemens.

Il faut distinguer le cas où il n'y a qu'une seule police, d'avec celui où il y en a plusieurs.

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S'il se trouve une police faite sans fraude qui excède la valeur des effets › chargés, elle subsistera jusqu'à concurrence de leur estimation.» Art. 23, titre des assurances. Ibiq. Valin, ibid., et Pothier, n°. 77 et 183. Guidon de la mer, ch. 2, art. 18. Réglement d'Amsterdam, art. 22. Kuricke, diatr., no. 6 et 16, pag. 834 et 836. Loccenius, lib. 2, cap. 5, n°. 16. Roccus, n°. 82.

$ 2. Cas où il n'y a qu'une seule police.

Les assureurs sont tenus chacun à pro

En cas de perte, les assureurs en seront tenus chacun à proportion des » sommes par eux assurées, comme aussi de rendre la prime du surplus. portion. (Art. 23, titre des assurances). Ainsi l'assureur qui, sous la même date, a signé le dernier la même police, participera autant que le premier au profit ou à la perte (Réglement d'Amsterdam, art. 23), c'est-à-dire qu'au sou la livre, ils supporteront la perte jusqu'à concurrence de l'estimation des effets assurés, et qu'ils ne profiteront de la prime que jusqu'à la même concurrence; le tout relativement aux sommes par eux assurées : Habet omnis assecuratio hoc peculiare, ut in eâ non sit priùs, nec posteriùs, quantùm ad effectum et validitatem contractûs; sed ultimus assecurator tantùmdem participat in damno et lucro ex assecuratione provenienti, quantùm prior. Kuricke, d. loco, n°. 16. Casaregis, disc. 1, n°. 65.

On trouve la même décision dans les formules de Hambourg, d'Anvers, de Rouen et de Bordeaux.

. S'il

$ 3.

Cas où il y a plu

y a plusieurs polices aussi faites sans fraude, et que la première , monte à la valeur des effets chargés, elle subsistera seule, et les autres assu- sieurs polices. reurs sortiront de l'assurance, et restitueront la primc. Art. 24, titre des assurances. Ibiq. Valin. Pothier, n°. 77. Guidon de la mer, ch. 2, art. 16 et 18; ch. 3, art. 3. Ibiq. Cleirac, pug. 243. Réglement d'Anvers, art. 15. Ku

Polices privées.

$4.

Les assureurs in

solvables

nombre ?

ricke, diatr., no. 5, pag. 834. Loccenius, lib. 2, cap. 5, no. 8, pag. 983. Targa, ch. 52, no. 9. Casaregis, disc. 1, no. 89.

En cas que la première police ne monte pas à la valeur des effets chargés, les assureurs de la seconde répondront du surplus. Et s'il y a des effets chargés pour le contenu aux assurances, en cas de perte d'une partie, elle sera payée par les assureurs y dénommés, au marc la livre de leur intérêt.». Art. 25, titre des assurances.

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Plusieurs polices de même date n'en forment qu'une seule, et viennent en

concours.

Si, en conformité du réglement de la chambre du commerce, du 31 mai 1692 (suprà, ch. 2, sect. 4), la police renfermait diverses dates, chaque date formerait un acte particulier, et fixerait le sort de chacun des assureurs, Mais les polices n'ayant parmi nous qu'une seule date, celui qui signe le dernier est traité de la même manière que les autres.

Peu importe que la première police ait été dressée par écrite privée; elle n'en est pas moins valable pour fixer l'ordre prescrit par les art. 24 et 25, titre des assurances.

C'est une erreur de croire qu'en thèse générale, les actes privés n'aient aucune force contre le tiers. Cela est bon lorsqu'il s'agit de l'ordre des hypothèques, mais nullement lorsqu'il s'agit de savoir si un fait est vrai ou non. Cujas, sur la loi 5, Cod. de probat. Decormis, tom. 2, col. 858. Brodeau, Coutume de Paris, tom. 2, pag. 218, n°. 3. Augeard, tom. 2, pag. 137. Boutaric, inst., pag. 415.

L'Ordonnance de 1681, titre des contrats à la grosse, art. 1, veut que les contrats à la grosse soient faits pardevant notaires, ou sous signature privée, et l'art. 2, titre des assurances, veut que le contrat d'assurance soit rédigé par écrit, et qu'il puisse être fait sous signature privée. Les art. 24, 25, 54 et 55 du même titre ne font aucune distinction là-dessus. Il faut donc conclure que le ristourne tombe sur les dernières assurances, quoique les premières aient été faites par écrite privée. Ainsi jugé par notre amirauté, le 30 janvier 1731, entre les frères Bonnet et les assureurs du navire du capitaine Gamel. La forme privée est légale, puisqu'elle est adoptée par l'Ordonnance, sauf le cas de fraude.

Targa, ch. 52, no. 9, pag. 225, dit que la faillite des assureurs premiers en font-ils date n'interrompt pas l'ordre dont on vient de parler, et que le ristourne n'a pas moins lieu vis-à-vis des derniers assureurs, quoique les premiers soient devenus insolvables.

Ce que l'assuré peut faire en pareil cas, si le navire est encore en risque, c'est ou de faire assurer la solvabilité des faillis (suprà, ch. 8, sect. 15), ou d'obtenir un décret du juge, qui lui permette de faire de nouvelles assurances. (Suprà, ch. 3, sect. 6, et ch. 8, sect. 16). Mais les nouveaux assureurs seront placés au même rang que les assureurs faillis, sans que l'ordre établi par l'Ordonnance soit en rien altéré. C'est ainsi que je décidai la question en 1774, au sujet de l'appel d'une sentence rendue par l'amirauté de Nantes. Je me fondais sur les principes très-bien développés par M. Pothier, no. 33, 96 et suiv.

CONFÉRENCE.

CXCVI. Tous les principes établis par Emérigon sont rappelés dans les articles 357, 358, 35g et 360 du Code de commerce.

Un contrat d'assurance ou de réassurance, consenti pour une somme excédant la valeur des effets chargés, est nul à l'égard de l'assuré seulement, s'il est prouvé qu'il y a dol ou fraude de sa part. (Art. 357). En effet, l'assurance porterait sur des objets qui n'existeraient pas à bord, et qui, par conséquent, ne courraient aucun risque; ce qui serait contraire à l'essence du contrat. D'ailleurs, il suivrait de là qu'en cas de perte, l'assureur serait tenu de payer des mar chandises fictives souvent au-delà du chargement; ce qui conduirait l'assuré à provoquer le sinistre pour doubler son intérêt. Mais l'assurance n'est nulle qu'à l'égard de l'assuré, seul coupable; de sorte que l'assureur aura le droit de se faire payer la prime, comme si véritablement les effets eussent été chargés à bord, et l'assuré, au contraire, ne pourra, en cas de perte, demander le paiement des marchandises perdues. Cependant, il faut que l'assureur prouve la mauvaise foi de l'assuré, car le dol ne se présume jamais. — (Voyez Pothier, assurances, no. 78).

Quid, s'il y avait dol des deux côtés, ce qu'il est difficile de présumer? Cette espèce d'assurance ne serait plus qu'une gageure, pour laquelle il n'y aurait pas d'action. Il faudrait suivre la disposition de la loi 4, § 1, ff de cond. ob turp. causam : Cùm utriusque turpitudo versatur, cessat repetitio. En conséquence, si la prime n'était pas payée, l'assureur ne pourrait la demander, et si elle était payée, l'assuré ne pourrait la répéter.

S'il n'y a ni dol ni fraude, le contrat d'assurance est valable ( quoique fait pour une somme excédant la valeur des effets chargés), jusqu'à concurrence de la valeur des effets chargés, d'après l'estimation qui en est faite ou convenue. En cas de perte, les assureurs sont tenus d'y contribuer, chacun à proportion des sommes par lui assurées. Ils ne reçoivent pas la prime de cet excédant de valeur, mais seulement l'indemnité de demi pour cent. - (Voyez art. 358, dont la disposition a été puisée dans l'art. 23 de l'Ordonnance de 1681, qui l'avait elle-même prise dans l'art. 15 des Assurances d'Anvers, et les art. 22 et 23 des Assurances d'Amsterdam, ainsi que dans l'art. 18 du Guidon de la mer, rapportés par Emerigon).

Ainsi, l'assureur n'est responsable que de ce qui a été effectivement chargé; et, en cas de perte, s'il y a plusieurs assureurs, la réduction de la garantie leur profite également à tous. Mais il faut faire observer avec Valin, sur l'art. 23, titre des assurances, que cette dernière

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