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dépendre de lui, à l'effet d'obtenir la main-levée des effets arrêtés. (Art. 388 du Code de commerce; voyez aussi l'art. 395 du même Code).

JURISPRUDENCE.

1o. Le privilége du prêteur de fonds, pour le recouvrement des marchandises naufragées, ne s'étend pas aux créances que le propriétaire du navire a lui-même, à raison du sauvetage, contre les propriétaires des marchandises recouvrées, et, en conséquence, ne lui donne pas le droit de former des saisies-arrêts entre leurs mains, au préjudice du transport qui a été fait de ces créances à un tiers, et par lui légalement signifié. (Arrêt de la Cour de Bruxelles,

du 17 juin 1809).

2o. L'art. 27, tit. 9, de l'Ordonnance de 1681, qui accorde la troisième partie des effets naufragés à ceux qui les ont sauvés, ne s'applique qu'aux effets trouvés en pleine mer ou tirés de son fond, et nullement aux effets sauvés à la proximité de la côte où le vaisseau était échoué. Décision du Conseil des prises, du 20 janvier 1813. Poitiers, a thermidor an 10),

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SECTION VIH.

Délaissement doit être fait pour le tout.

'LE Guidon de la mer, ch. 7, art. 7, 8 et 9, distingue le cas où l'on a fait assurer diverses espèces ou sortes de marchandises, d'avec le cas où l'assurance porte sur le même genre de marchandises, telles que fruits, sel, grains, victuailles et autres provisions.

Dans le premier cas, si l'une des marchandises était perdue ou avariée audelà de la moitié, on pouvait en faire délaissement aux assureurs, et retenir l'autre.

Dans le second cas, où il s'agit d'un même genre de marchandises, l'assuré (est-il dit) ne pourra faire délais de ce qui est gâté, et retenir ce qui est sain; mais faudra qu'il fasse délais de toute l'espèce.

Notre Ordonnance, en l'art. 47, a établi une règle plus simple. On ne pourra, dit-elle, faire délaissement d'une partie et retenir l'autre. Car, comme l'observe M. Valin, ibid., le contrat d'assurance étant individu, ne peut souffrir aucune division.

Mais quelque simple que cette règle paraisse, elle a besoin de quelque interprétation.

1°. Je me fais indéfiniment assurer 10,000 liv. sur facultés, ou sur telles et telles marchandises, chargées dans un tel navire, sans rien distinguer; cette assurance est une unica assecuratio omnium mercium. Je ne puis délaisser mes sucres, et retenir mes indigos. De Luca, de credito, disc. 108, no. 11. Casaregis, disc. 1, no. 110. Valin, dicto loco. Pothier, no. 131;

2o. Si par une police, je fais assurer mes sucres, et par une autre mes indigos; ou si, par la même police, je fais assurer distinctement et séparément telle somme sur mes sucres, et telle autre somme sur mes indigos, je pourrai, le cas échéant, retenir l'un de ces objets, et délaisser l'autre, parce que ce sont deux assurances distinctes l'une de l'autre : Dua assecurationes. De Luca et Casaregis, d. locis. Valin, art. 47. Pothier, n°. 132.

Le sieur Peyronet, de Bordeaux, armateur du navire le Saint-Marc, s'était fait assurer par une même police, 24,000 liv., savoir, 6,000 liv. sur le corps, et le reste sur les facultés. Dans le cours du voyage, le navire fut déclaré innavigable. L'assuré aurait pu, suivant la jurisprudence alors en vigueur, faire abandon du corps et des facultés; mais comme les facultés et le corps avaient été distingués dans la police, il se borna à présenter requête en abandon du corps, et en paiement des 6,000 liv. assurées sur icelui. Les assureurs contestaient cette requête, soutenant que l'assuré aurait dû abandonner également la cargaison. Cette exception fut rejetée; et par sentence de notre amirauté, rendue le 16 mars 1752, les assureurs furent condamnés à payer la somme demandée; 3o. Si je fais assurer une somme confusément et sans distinction sur corps et facultés, et que le navire fasse naufrage, je ne puis retenir, en tout ni en partie, les marchandises sauvées, et délaisser le corps naufragé.

Cependant, en fait d'innavigabilité, la déclaration du 17 août 1779 veut que l'assurance sur corps et facultés soit divisée au sou la livre. ( Suprà, ch. 10, sect. 1; ch. 12, sect. 38, § 10). Mais ce cas est une exception à la règle générale ;

4. Ce n'est pas délaisser une partie et retenir l'autre, que de ne faire le délaissement aux assureurs, que jusqu'à la concurrence du risque par eux pris; car, comme je le dirai infrà, sect. 12, l'assuré est comme assureur à lui-même, par rapport à son découvert.

$ 1. Assurance faite confusément et solidairement sur diverses marchandises.

Assurance distincte sur tels effets

pour telle somme,

et sur d'autres, pour

telle autre somme.

Assurance confuse sur corps et facultés,

$ 2. Effets déchargés à

Au ch. 13, sect. 8, on a vu que si l'assuré décharge, en une échelle, partie des marchandises assurées, le risque se consolide dans celles laissées à bord: terre avant le sinisD'où il suit qu'en cas de perte, on n'est pas obligé de faire le délaissement des marchandises déchargées à terre dans le cours du voyage.

L'art. 47 s'entend des marchandises sauvées du naufrage, ou autre sinistre

T. II.

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tre.

qui donne licu à l'abandon: Suscipiens enim periculum pro iis solùm tenetur, quæ tempore periculi aut naufragii in navi fuerunt. Marquardus, lib. 2, cap. 13, n°. 25. On ne peut point délaisser les marchandises qui sont perdues, et retenir celles qui sont sauvées du naufrage même.

Mais cet art. 47 ne concerne en rien les marchandises déchargées dans le cours de la navigation. Étant déjà en lieu de sûreté, elles ne peuvent plus ni former l'objet de l'assurance, ni être soumises à l'abandon, quoique le sinistre soit arrivé dans la suite. On distingue alors deux cas :

1. Si les marchandises qui, lors du sinistre, se trouvent dans le vaisseau, sont d'une valeur relative aux sommes assurées, les assureurs n'ont à se plaindre de rien, et doivent remplir leur engagement, moyennant l'abandon qui leur est fait de ce qui est sauvé du naufrage. Peu importe qu'on eût auparavant chargé plus ou moins de marchandises dans le vaisseau; il suffit que l'aliment de l'assurance s'y soit trouvé lors du sinistre même. Cette décision résulte des art. 22, 23, 24, 25, 54, 55 et 56, titre des assurances. Le déchargement fait dans le cours du voyage et avant le sinistre arrivé, ne peut ni nuire, ni profiter aux assureurs, et ne change en rien leur condition, pourvu que lors du sinistre, l'aliment de l'assurance ait été dans le navire.

L'avantage de la navigation et du commerce le demande ainsi. Ce serait une gêne intolérable, s'il était permis aux assureurs de jeter les yeux sur les effets déchargés dans les Échelles du Levant, ou aux Iles, et d'examiner si tous les retraits ont été chargés, ou ne l'ont pas été. Une telle idée occasionnerait des procès dans toutes les assurances qui se font d'entrée et de sortie, et rendrait pareilles assurances impraticables.

2o. Si les effets qui, lors du naufrage, se trouvent dans le navire, ne répondent pas à la somme assurée, l'assurance ne subsistera que jusqu'à concurrence de leur estimation, en conformité de l'art. 23, titre des assurances; et l'abandon n'aura lieu que pour les marchandises perdues dans le naufrage, ou sauvées du naufrage, et non pour celles qui avaient auparavant été déchargées à terre. C'est ainsi que la question fut jugée par arrêt du mois de juin 1752, au rapport de M. de Mondespin, en faveur d'André-Vincent Fabre, capitaine du vaisseau le Marquis de Vaudreuil, contre les sieurs Cougnié et Nicolas, ses assureurs. Valin, art. 47.

Voyez tout ce que j'ai dit sur la même matière, suprà, ch. 13, sect. 8. Voyez aussi mon Traité des contrats à la grosse, ch. 12, sect. 2, § 3.

CONFÉRENCE.

CCVII. L'art. 372 du Code de commerce porte : « Le délaissement des objets assurés ne » peut être partiel ni conditionnel; il ne s'étend qu'aux effets qui sont l'objet de l'assurance » et du risque. »

Cette disposition, prise de l'art. 47, titre des assurances, de l'Ordonnance, ne doit s'étendre que sur les objets compris dans la même assurance. L'assurance est indivisible. L'assureur n'a pas répondu des objets partiellement, mais de tous indistinctement. Si, par exemple, je fais assurer une cargaison estimée 40,000 fr., composée de 10,000 fr. de coton, et de 30,000 fr. de sucre, je ne pourrai pas délaisser le sucre, et garder le coton. D'un autre côté, je charge sur un navire une cargaison de sucre et de coton; je fais assurer le coton seulement; je ne pourrai délaisser que le coton assuré, et non le sucre, qui ne l'est pas. Enfin, le délaissement ne pouvant être conditionnel, je ne saurais délaisser la chose assurée, sous la condition que le délaissement sera nul, si cette chose est recouvrée. Le délaissement doit transférer la propriété à l'assureur: il doit donc être pur et simple; il est irrévocable une fois qu'il a été fait.

S'il y avait deux assurances divisément faites entre les mêmes assureurs et les mêmes assurés, il y aurait deux contrats qui n'auraient rien de commun entre eux, et l'assuré pourrait retenir les objets de l'un, et délaisser ceux qui seraient dénommés dans l'autre.

La diversité des objets assurés ne constitue, d'une manière certaine, des assurances différentes, que lorsqu'il y a deux polices. S'il n'en avait été passé qu'une seule, il faudrait distinguer ou tous les objets qui y sont compris ont été assurés, moyennant une somme unique; ou chaque nature d'objets a été assurée pour une somme différente. Dans le premier cas, il n'y a qu'une assurance; dans le second, il y en a plusieurs. Au surplus, Emérigon a justement appliqué ces règles dans les diverses hypothèses qu'il a établies. Elles sont également développées par Valin sur l'art. 47 de l'Ordonnance, et par Pothier, des assurances, no. 131, (Voyez aussi la sect. 3, tit. 11, tom. 4 de notre Cours de droit maritime).

132 et 133.

SECTION IX.

Faut-il délaisser le fret?

DANS nos conférences tenues en 1778, nous agitâmes pendant long-tems trois grandes questions, qui nous paraissaient dépendre des mêmes principes, et que je crois devoir ramener ici, quoique la première concerne le contrat à la grosse.

1o. En cas de naufrage, le nolis des marchandises, sauvées doit-il servir au paiement des deniers donnés à la grosse sur le corps:

2°. Le nolis des marchandises sauvées du naufrage doit-il être délaissé aux assureurs sur le corps?

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3°. Doit-on délaisser aux assureurs sur le corps, non seulement le nolis des marchandises qui se trouvaient dans le navire lors du sinistre, mais encore le nolis gagné et perçu avant le sinistre, pendant le cours du voyage assuré? Exposition des ar- Nous commençâmes d'abord par examiner les arrêts rendus sur cette rêts rendus sur cette matière.

matière.

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Premier arrêt. Gasqui, capitaine du navire l'Heureux Envié, emprunta sur le corps 2,900 liv. à la grosse, et fit assurer 6,000 liv. sur le corps du même

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Dans le cours du voyage, le vaisseau échoua, et fut déclaré innavigable. Le fret des marchandises fut payé; les débris du navire furent vendus. Sentence qui condamna les assureurs au paiement des sommes assurées, sous la déduction du prix des débris, au cas que le fret exigé par Gasqui suffirait au paiement des salaires de l'équipage et autres frais privilégiés et des sommes prises à la grosse.

Par où le fret n'était accordé aux assureurs que d'une manière indirecte et imparfaite.

Gasqui appela de cette sentence au Parlement d'Aix. Les assureurs en appelèrent in quantum contrà, et requirent que Gasqui fût condamné à leur › délaisser le fret en entier, prélevé sur icelui les dépenses privilégiées et les ⚫ sommes données à la grosse. »

La chambre du commerce intervint pour les assureurs.

Nota. Les donneurs n'étaient pas en qualité. Arrêt du 23 juin 1734, au rapport de M. d'Orcin. « La Cour, faisant droit sur toutes les fins et conclusions des parties, sans s'arrêter à l'appel in quantum contrà des assureurs, › de la sentence du 10 octobre 1733, ni à l'adhérence des députés du com› merce, dont les a démis et déboutés; ayant égard à celui relevé par les hoirs › de Gasqui, de la même sentence, a mis icelui, et ce dont est appel, au › néant; et par nouveau jugement, a mis lesdits hoirs, sur la demande des » assureurs et députés du commerce, hors de Cour et de procès; déclarant, › au moyen de ce, que le fret ne devait pas être compris dans le délaissement, › ni servir au paiement des sommes assurées, non plus que de celles données à la › grosse; et en cet état, a renvoyé et renvoie les parties et matières au lieu> tenant, autre que celui qui a jugé, pour faire exécuter le surplus de ladite » sentence, et le présent arrêt, suivant sa forme et teneur; condamne les assureurs et les députés du commerce à l'amende modérée à 12 liv., et aux dépens, envers les hoirs de Gasqui, des qualités chacun les concernant. » Second arrêt. Il est rapporté dans Dénisart, vo. assurances, tom. 15 pag. 181.

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