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reur au même Parlement, mon très-respectable père, qui, pour héritage, a laissé l'amour de la vertu à sa nombreuse famille, composée de treize enfans.

■ Blaise Marin, négociant à Marseille, fit faire des assurances sur les facultés » du vaisseau la Sainte-Marguerite-Bonaventure. Ce vaisseau fut pris par les › ennemis. La déclaration de la perte fut faite à la chambre du commerce, le 14 janvier 1706. Tous les assureurs payèrent la perte, à la réserve de Fran› çois Sabain, l'un d'eux. Il ne fut assigné en justice que le 3 février 1711. › Sentence rendue par défaut, qui le condamna à payer. Appel de sa part. » Il opposa la prescription déterminée par l'art. 48, titre des assurances. Il soutint que depuis le 14 janvier 1706, jour que la perte avait été connue, jusqu'au 3 février 1711, jour de la mise en cause, s'étant écoulé plus de cinq » années, Blaise Marin n'était plus recevable en sa demande. Il fut répondu, » de la part de celui-ci, que les polices d'assurance étaient des contrats dont › l'exécution dure trente ans ; que la jurisprudence des arrêts avait perpétuel» lement rejeté pareilles fins de non-recevoir. Ce qui était constamment vrai; » car il est de fait que cette jurisprudence n'avait jamais varié. Cependant, par » arrêt du mois de mai 1713, rendu au rapport de M. le conseiller JeanBaptiste Leblanc, de service en Tournelle, la sentence de l'amirauté de Mar⚫ seille fut réformée, et par nouveau jugement, François Sabain fut mis hors › de Cour et de procès, avec dépens, tenant ceux du défaut. Lors de cet arrêt, ⚫ MM. de la Tournelle délibérèrent de faire droit dorénavant aux prescriptions › prononcées par l'Ordonnance maritime, quoique jusqu'alors elles eussent toujours été rejetées; que si la chambre du commerce les trouvait trop ri› goureuses, elle n'avait qu'à se pourvoir au roi pour les faire mitiger; mais › que jusqu'alors l'art. 48 serait suivi. J'intervenais pour Sabain, et j'ai appris > cela de la bouche de M. le commissaire. »

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Dans la consultation que M. Valin a insérée à la suite de l'art. 48, on voit que, depuis 1713, le Parlement d'Aix s'est conformé à l'Ordonnance maritime, pour ce qui concerne les prescriptions.

CONFÉRENCE,

CCXXIV. Si Valin, sur l'art. 48, ainsi qu'Emérigon, ne nous attestait pas que le Parlement d'Aix n'avait pas toujours été scrupuleusement attaché à la fin de non-recevoir portée par cet article, on serait vraiment étonné de la question que fait notre auteur. Il n'y a pas de doute aujourd'hui, comme alors, que les prescriptions dont il s'agit ne soient de rigueur. L'art. 373 du Code de commerce, qui a copié à cet égard l'art. 48, titre des assurances, de

l'Ordonnance, porte: « Et ces délais passés, les assurés ne seront plus recevables à faire le délais

sement. »

SECTION V.

Péremption d'instance en matière d'assurance:

Il ne suffit pas que le délaissement soit fait aux assureurs dans le tems prescrit; il faut de plus que les poursuites judiciaires ne soient pas interrompues pendant un égal délai.

« Les actions qui doivent être intentées dans l'an et jour, ou dans un moindre > tems, sont prescrites par la cessation des procédures durant un pareil tems, pourvu qu'il n'y ait point de contestation en cause; mais après la contestation, la péremption n'est acquise que par la cessation de trois années entières, à compter du jour de la dernière procédure. » C'est ainsi que M. de Lamoignon s'explique en ses Arrêtés, titre de la péremption, art. 10.

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Telle est la doctrine générale de nos auteurs, et la jurisprudence de tous les Parlemens du royaume. Journal des audiences, tom. 4, pag. 424. Brodeau, sur Louet, litt. P, somm. 14, et sur la Coutume de Paris, tom. 2, pag. 91, n°. 9. Charondas, quest. et rep., pag. 258. Theveneau, pag. 389. Despeisses, tom. 1, pag. 729, n°. 32. Dantoine, Règles de droit civil, pag. 408. Albert, pag. 346. Daix, sur le Statut de Marseille, pag. 423. Buisson, Cod. de judiciis. Boniface, tom. 1, pag. 470. Decormis, tom. 2, col. 675 et 1712. Pothier, du retrait, no. 258, tom. 1, pag. 793.

Ces règles ont lieu, sans contredit, dans les procès au sujet des assurances. Le sort de l'assuré dépend de la diligence ou du défaut d'attention de son procureur. Si la cause n'a pas été audiencée dans le tems de droit, la prescription de trois mois ou de six semaines est définitivement acquise; mais s'il y a litis-contestation, les assureurs sont soumis pendant trois ans aux poursuites judiciaires! Par ce moyen, l'objet de l'Ordonnance de la marine s'évanouit; on passe d'une extrémité à l'autre, et les procès se perpétuent.

CONFÉRENCE.

CCXXV. Les art. 397 et 401 du Code de procédure contiennent des dispositions qui s'appliquent aux instances de toute nature, et ces règles ont lieu incontestablement, et doivent

être suivies dans les procès au sujet des assurances. — (Voyez d'ailleurs ce que nous avons dit ci-devant sur la sect. 2 de ce chapitre ).

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SECTION VI.

Prescription en cas d'arrêt de Prince.

SUIVANT le Guidon de la mer, ch. 7, art. 6, et ch. 9, art. 7, si le navire » est arrêté par autorité de prince dans un lieu de relâche, le chargeur sera › tenu d'attendre six mois pour vider l'arrêt....... Si, dans ledit tems, il ne peut, il ne pourra faire son délais....... Si les marchandises sont périssables, l'assuré ne sera tenu d'attendre tel tems, mais donnera incontinent › avertissement à ses assureurs, fera ses poursuites pour avoir main-levée de ⚫ sa marchandise et pour recevoir son navire. S'il ne peut si promptement, il pourra faire délais six semaines après l'arrêt.»

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Le Réglement d'Amsterdam, art. 8, dit que advenant que quelque navire, faisant son voyage, fût arrêté ou empêché par détention de rois, princes , ou autres seigneurs étrangers, avec espérance toutefois de faire tollir et cesser › ledit arrêtement......, les assurés sont tenus d'attendre six mois, premier › que pouvoir abandonner ou faire délais du navire ou marchandises, et subroger l'assureur en leur lieu et place, à compter lesdits six mois, du jour et › heure de la signification et intimation faite de la fortune advenue; lesquels six › mois auront lieu, pourvu que tels arrêts et détentions soient advenues en Europe ou Barbarie; mais hors de là, on ne pourra abandonner ou faire , délais de tel navire ou marchandise, qu'un an après bonne et due intimation. » L'art. 9 parle des marchandises sujettes à dépérition, et permet d'en faire le délaissement tout à l'heure. Vide Stypmannus, part. 4, tit. 7, n°. 443, pag. 458. Kuricke, diatr., no. 16, pag. 837.

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L'Ordonnance de 1681 a été dressée d'après ces anciens réglemens.

Art. 49, titre des assurances. En cas d'arrêt de prince, le délaissement ne , pourra être fait qu'après six mois, si les effets sont arrêtés en Europe ou » Barbarie, et après un an, si c'est en pays plus éloigné; le tout à compter › du jour de la signification de l'arrêt aux assureurs, et ne courra en ce cas

› la fin de non-recevoir portée par l'article précédent, contre les assurés, que » du jour qu'ils auront pu agir. »

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T. II.

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Art. 50. Si toutefois les marchandises arrêtées sont périssables, le délais» sement pourra être fait après six semaines, si elles sont arrêtées en Europe » ou en Barbarie, et après trois mois, si c'est en pays plus éloigné, à compter > aussi du jour de la signification de l'arrêt aux assureurs. »

1°. Le délaissement ne pourra être fait qu'après six mois ou un an, suivant les lieux où le navire aura été arrêté, et ce délai n'est comptable que du jour de la signification faite aux assureurs ; de sorte qu'il dépend de l'assuré d'étendre le délai aussi loin qu'il lui plaît; par où, en prolongeant son action, il éloigne d'autant la perception des sommes assurées.

2o. Dans l'intervalle, l'assuré est tenu de faire toutes diligences pour obtenir main-levée des effets arrêtés; mais il n'est soumis à aucune peine, s'il y manque, parce que les assureurs peuvent faire de leur chef les diligences, si bon leur semble. Art. 51, titre des assurances.

Dans le même intervalle de tems, il est permis aux assureurs de faire charger sur un autre navire les marchandises assurées, en payant par eux seulement les dépens, dommages et intérêts, ensemble le nouveau fret encouru pour raison dudit arrêt. Réglement d'Amsterdam, art. 8.

5°. La distinction de l'Europe ou Barbarie d'avec les pays les plus éloignés, faite par l'art. 49, titre des assurances, est aussi simple que peu susceptible de litige. Pourquoi ne l'a-t-on pas admise dans tous les cas?

par

4. La fin de non-recevoir, portee par l'art. 48. contre los assurés, ne court que du jour qu'ils auront pu agir; c'est-à-dire après que les délais fixés les art. 49 et 50, titre des assurances, se seront écoulés. Alors la perte sera présumée, et l'assuré sera obligé de faire son délaissement dans les tems déterminés par ledit article, relativement aux lieux où le navire se trouvera arrêté. Valin, art. 49. Pothier, n. 156.

CONFÉRENCE.

CCXXVI. Voyez les dispositions des art. 387, 388 et 394 du Code de commerce.

Dans les cas de naufrages, d'échouement avec bris, de prises, etc., la loi permet à l'assuré de faire le délaissement dès qu'il a reçu la nouvelle du' sinistre, parce qu'il est certain alors que les objets sont perdus; mais en cas d'arrêt de prince, il n'en est pas ainsi. Cet arrêt peut n'être que momentané: le navire sera peut-être rendu. Il serait injuste de donner à l'assuré le droit de se hâter d'en faire le délaissement. La loi fixe un délai pendant lequel on devra faire toutes les diligences nécessaires à l'effet d'obtenir la main-levée de la chose arrêtée; passé ce délai, si les démarches ont été infructueuses, cette chose pourra être délaissée. L'assuré devra faire son délaissement dans les délais généraux prescrits par l'art. 373; délais qui ne commenceront à courir contre lui que du jour où il aura pu agir en délaissement.

Si, dans le même intervalle de tems, c'est-à-dire si, dans les délais prescrits par l'art. 387, le capitaine n'a pu trouver de navire pour recharger les marchandises, et les conduire au lieu de leur destination, l'assuré peut en faire le délaissement; mais il doit prouver ses recherches inutiles. En cela, il doit s'adresser aux autorités locales, qui constateront ses efforts infructueux.

SECTION VII.

Prescription au sujet d'un navire arrêté pour cause de contrebande civile.

EN 1775, on me présenta le parère suivant, sur lequel on demanda mon avis: Nicolas, capitaine du navire le Saint-François, est parti de la Rochelle avec un chargement d'eau-de-vie et de sucre, destiné pour Dunkerque. Le navire et la cargaison ont été assurés à Dunkerque. Les assureurs se sont rendus garans de la baraterie du patron. Dans le cours de la navigation, le navire a relâché en Angleterre, où le capitaine a vendu, en contrebande, des eauxde-vie. Les employés des fermes ont saisi le navire, et en ont obtenu la confiscation par un jugement de Londres. Les assureurs, attaqués après les quatre mois depuis la nouvelle de cet accident, opposent que les assurés sont non recevables en leur action, suivant l'art. 48, titre des assurances. Les assurés réclament l'art. 49 du même titre, et prétendent que c'est ici un arrêt de prince; que, par conséquent, leur action a été formée dans le tems de droit. Première question. Je répondis que ce n'était pas là un arrêt de prince, tel l'Ordonnance l'entend, puisque le navire le Saint-François avait été saisi dans un port d'Angleterre, pour cause de contrebande civile.

que

1o. L'arrêt de prince est un cas inopiné, qui arrive lorsque, sans le fait du capitaine, un navire neutre est arrêté pour cause publique, soit à la suite d'une flotte, soit sous une citadelle, soit dans un port ami. On ne le détient point pour en faire un objet de rapine de mer, ni pour en priver les propriétaires. La cause de cet arrêt n'est que pour un tems. Dès qu'elle cesse, le navire recouvre sa liberté naturelle, qu'on avait toujours eu dessein de lui rendre. Si on a besoin de sa cargaison, on la paie à sa légitime valeur. Telle est la description de l'arrêt de prince qu'on trouve dans nos livres. Carlo Targa, ch. 66, pag. 283. Guidon de la mer, ch. 7. Valin, tom. 2, sur l'art. 49, titre des assu

rances.

2o. La saisie d'un navire pour cause de contrebande civile, n'est pas un cas

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