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CHAPITRE IV.

DE L'ACTION EXERCITOIRE.

SOMMAIRE.

SECT. I. Observations générales sur l'action exercitoire.

S1. De l'exerciteur.

S 2. Du maitre.

SECT. II. En règle générale, l'exerciteur est tenu de tous les faits du maître. Capitaine subrogé.

SECT. III. Les propriétaires répondent-ils des engagemens que le capitaine contracte dans le lieu de leur demeure?

S1. Du capitaine qui prend des deniers à la grosse dans le lieu de la demeure des propriétaires.

Texte des lois.

Nul privilége sur la part des quirataires non

consentans.

Action de in rem verso.

S 2. Pacotille chargée par le capitaine dans le lieu de la demeure des propriétaires.

SECT. IV. Du quirataire qui refuse de fournir son contingent.

S 1. Les quirataires qui refusent leur contribution perdent-ils leurs quirats?

$ 2. On peut prendre à la grosse pour leur compte.

$3. Si le refusant requérait la licitation. Avis du plus grand nombre.

SECT. V. Du capitaine qui, pendant le cours

du voyage, prend des deniers à la grosse.

S 1. Texte des lois.

S 2. Le capitaine doit-il se faire autoriser par le magistrat du lieu à prendre deniers à la grosse?

$ 3. Faut-il un contrat public?

S 4. Il faut que l'emprunt soit nommément fait pour les besoins du navire.

S 5. Le capitaine peut-il prendre à la grosse pour compléter son chargement?

SECT. VI. Diverses questions au sujet des points qui ont été traités dans les trois sections précédentes.

§ 1. Que doit-on entendre par demeure des propriétaires?

Demeure dans le même bailliage.
Demeure hors du bailliage.

S 2. Dans le lieu même de l'armement, le capitaine peut-il faire des emprunts sans l'aveu des propriétaires domiciliés ailleurs? S3. Si les propriétaires ont des correspon

dans sur les lieux.

SECT. VII. Du capitaine infidèle.

S1. Les armateurs ne sont tenus des faits du maitre que pour les objets concernant la navigation.

S2. Peine du capitaine infidèle.

S 3. L'infidélité du capitaine qui a dissipe l'argent, ne nuit pas au tiers qui a contracté avec lui de bonne foi.

Action contraire des armateurs; ̧.

$4. Le donneur n'est pas obligé de prouver

l'utile emploi.

S5. Billet de grosse simulė.

SECT. VIII. Du fournisseur imprudent.

S. Faut-il que, lors du prêt, les besoins du

navire aient été réels?

S2. S'il y a excès dans l'emprunt.

Si l'on se trouve dans un pays où l'emploi des deniers ne puisse se faire.

$ 3. Du capitaine à qui il a été défendu de prendre à la grosse.

$ 4. On peut, suivant les circonstances, adopter les exceptions établies par la loi LuciusTitius.

SECT. IX. Du capitaine qui, en cours de voyage, vend des marchandises du charge

ment.

SECT. X. Des actions principale, accessoire

et contraire.

S 1. Droit romain.

L'action contre l'exerciteur était ajoutée à

celle contre le maître.

On avait le choix d'attaquer le maitre ou l'exerciteur.

Ce choix n'altérait point l'action principale

contre le maître.

Quid, si le maitre était esclave?

Si l'on se bornait à attaquer l'exerciteur, l'action devenait principale.

Elle était solidaire et pour le tout. L'action exercitoire était perpétuelle. $ 2. Droit nouveau.

Lorsque le voyage est fini, le capitaine cesse

1-il d'être maître ?

Peut-on intenter les actions contre lui?
Le jugement obtenu contre le maitre s'exécute

contre les armateurs.

Action solidaire contre chacun des armateurs.

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priétaires, pour n'être pas tenus des faits du maitre.

S1. Les propriétaires répondent-ils solidai rement des faits du maître?

S 2. L'obligation des propriétaires, pour les faits du maitre, est plus réelle que personnelle.

S3. Du capitaine géreur de la cargaison. $ 4. Si les propriétaires abandonnent le bâtiment et le fret.

$5. Le capitaine peut-il emprunter à jour, ou tirer des lettres de change?

§ 6. Forme de l'abandon fait par les intéres

sés, pour n'être pas tenus des faits du mailre.

S7. Exception au sujet du rachat du navire. SECT. XII. Le capitaine est-il personnellement

tenu des obligations qu'il contracte en sa qualité de maître ?

S1. Celui qui contracte en qualité de préposé est-il tenu personnellement ?

Mandataire qui désigne sa qualité, ou dont la qualité n'est pas ignorée.

Si, nonobstant la qualité de mandataire qu'on désigne, on s'oblige personnellement. $ 2. Usage du commerce.

SECT. XIII. Peine stipulée contre le capitaine

qui contrevient à ses engagemens. S. La peine conventionnelle est de rigueur. Pacte que l'affréteur pourra demander la peine

conventionnelle et les dommages et intérêts. S 2. Le privilege des matelots et des donneurs à la grosse est-il altéré par la peine conventionnelle dont il s'agit?

TOUTE personne qui a intérêt sur le corps ou sur les facultés d'un navire, peut prendre des deniers à la grosse, jusqu'à la concurrence de l'intérêt qu'elle

expose aux risques de la mer; et toute personne capable de contracter peut donner des deniers à la grosse aventure. Vide mon Traité des assurances, ch. 4. Les capitaines de navire peuvent quelquefois prendre des deniers à la grosse pour compte de leurs armateurs, soit dans le lieu de l'armement, soit pendant le cours du voyage. Ce qui donne lieu à l'action exercitoire, de laquelle il s'agira dans ce chapitre.

CONFÉRENCE.

XVI. Les principes généraux que notre auteur établit préliminairement ici, recevront successivement leur application dans les sections de ce chapitre.

SECTION I.

Observations générales sur l'action exercitoire.

Le génie des Romains, leur amour pour la gloire, leur éducation militaire, la forme de leur gouvernement, tout les éloignait du commerce. S'ils l'exerçaient, c'était sous le nom et par le ministère de leurs esclaves ou de leurs affranchis. Leur préposé au commerce de terre était appelé instilor, et leur préposé au commerce de mer s'appelait maître, et quelquefois marchand :

Naviget, te mediis hiemet mercator in undis.

HORACE, lib. 1, epist. 16, vers. 71.

Le propriétaire du navire, ou celui qui le louait en entier pour le faire naviguer à son profit, était appelé exercitor, parce qu'il exerçait cette espèce de commerce: Exercitorem eum dicimus, ad quem obventiones et reditus omnes perveniunt, sive is dominus navis sit, sive à domino navem per aversionem conduxit, vel ad tempus, vel in perpetuum. Loi 1, § 15, ff de exercit. act.

Il résulte des lois du même titre qu'on donnait également le nom d'exerciteurs aux esclaves qui représentaient leur maître dans la propriété des navires, et qui agissaient à ce sujet, comme s'ils en eussent été les propriétaires. Cet arrangement était sans doute suivi par Lentulus, qui avait promis à Cicéron une place dans ses vaisseaux : Lentulus naves suas pollicetur. Lib. 1, epist. 5, ad Atticum. Par ce moyen, les grands de Rome éludaient la loi, qui

$ 1.

De l'exerciteur.

§ 2.

Du maitre.

leur prohibait d'avoir pour leur compte des navires marchands. Vide mon Traité des assurances, ch. 4, § 1, tom. 1.

Celui à qui le soin de l'entier vaisseau et du commerce d'outre mer était confié, s'appelait maître du navire: Magistrum navis accipere debemus, cui totius navis cura mandata est. Loi 1, § 1, ff de exercit. act.

A l'exemple de ce qui se pratiquait pour le commerce de terre, qu'on faisait par le ministère d'un institeur, on établissait sur le navire un maître pour le commerce de mer: Datur institoria ex negatione terrestri, sic exercitoria de tantùm navali. Dumoulin, Cod. de inst. et exerc. act.

Magistri imponuntur locandis navibus, vel ad merces, vel vectoribus conducendis, armamentisve emendis; sed etiam si mercibus emendis vel vendendis, fuerit præpositus, etiam hoc nomine obligat exercitorem. Loi 1, S3, ff de exercit. act. Vide Cujas, sur la loi 5, ff eod., lib. 29, Pauli ad edictum, et sur le Cod. de institoriâ.

Pendant le cours du voyage, ce préposé représentait l'exerciteur, et avait ordinairement le même pouvoir que lui, pour tout ce qui concernait le navire. Totâ leg. 1, ff de exercit. act.

Peu importait que cette fonction fût déférée à un esclave ou à un homme libre, à un majeur ou à un mineur de vingt-cinq ans : Cujus autem conditionis sit magister ipse nihil interest, utrùm liber an servus, et utrùm exercitoris an alienus; sed nec cujus ætatis sit intererit : sibi imputaturo, qui eum præposuit. Loi 1, § 4, ff eod.

Lorsqu'il s'agissait d'une navigation importante, on établissait quelquefois plusieurs maîtres, plures magistros, dans le même navire, afin qu'ils fussent surveillans les uns des autres, ou que chacun remplît la tâche qui lui était imposée. Loi 1, § 13, ff eod.

Le naviculaire était celui qui était chargé de diriger la navigation et de conduire le navire à bon port. C'est ce qui résulte de la loi 13, § 2, ff de locati, et des lois du Code, au titre de naufrag.

Parmi nous, ces deux fonctions sont séparées, lorsque les armateurs établissent sur le navire un supercargue, à qui ils donnent le pouvoir d'exiger les nolis et de faire toutes les opérations et dépenses convenables. Le capitaine est alors (sauf les droits du tiers) simple naviculaire, et le supercargue

est maître.

Chez les Romains, ces deux fonctions étaient quelquefois réunies, ainsi qu'il résulte de la loi 13, § 2, ff locati, et de la loi 1, SS 2 et 13, ff nautæ. Voilà pourquoi nos docteurs comparent tantôt nos capitaines et patrons aux

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naviculaires (Calvinus, vo. navicularius); et tantôt ils comparent les maîtres de navire à nos capitaines et patrons. Budée, ad leg. 1, ff nautæ, pag. 146. Cette dernière idée a prévalu dans l'usage; elle a été adoptée par l'Ordon

nance.

Faber, sur la loi 1, S1, ff de exercit. act., et Stypmannus, part. 4, cap. 15, n°. 128, pag. 543, paraissent surpris qu'on établisse divers maîtres sur un navire. Malè enim regitur navis, ut et respublica, si non ab uno regatur. La surprise serait fondée, s'il s'agissait de plusieurs naviculaires; mais les SS 13 et 14 de la loi 1, ff de exercit. act., parlent de plusieurs facteurs et supercargues, qui avaient le titre de maîtres, non pour diriger le navire, mais pour gérer la marchandise, exiger les nolis, et faire les opérations concernant le commerce maritime: Si plures sint magistri, non divisis officiis, quodcumque cum uno gestum erit, obligabit exercitorem; si divisis, ut alter locando, alter exigendo, pro cujusque officio obligabitur exercitor. Sed et si sic præposuit, ut plerumque faciant ne alter sine altero quid gerat, qui contraxit cum uno, sibi imputabit.

CONFÉRENCE.

XVII. Voyez ce que nous avons dit à cet égard tom. 1, sect. 1, tit. 3, de notre Cours de droit maritime.

Parmi nous, capitaine, maître ou patron sont, à proprement parler, des mots synonymes, en ce sens qu'ils désignent indifféremment celui qui commande un bâtiment de mer. Mais, dans l'usage, on appelle capitaines ceux qui commandent sur les vaisseaux de l'Etat. On donne le même nom à ceux qui commandent sur des navires marchands destinés à des voyages de long cours, et à ceux qui commandent les vaisseaux des particuliers armés en course. Mais ceux qui commandent sur des barques marchandes et sur des bâtimens marchands qui ne font pas de longs trajets, se nomment, sur l'Océan, maitres, et sur la Méditerranée, patrons.

Le titre de maître, ou capitaine, magister, est un titre d'honneur, d'expérience et de bonnes mœurs, dit Cleirac sur le premier des Jugemens d'Oléron. Le capitaine exerce une espèce de magistrature à son bord; il doit être respecté de son équipage. Aussi, l'ancienne législation et la nouvelle lui défèrent une puissance et une sorte de jurisdiction capables de conserver ou de rappeler le bon ordre dans le navire. - (Voyez Roccus, de navibus, not. 7; voyez Valin, sur l'art. 22, titre du capitaine, de l'Ordonnance).

Le capitaine a le pouvoir d'infliger certaines peines aux mutins, aux ivrognes, aux querelleurs, à ceux qui maltraitent leurs camarades, et à tous ceux, en un mot, qui troublent l'ordre et le service, ou qui commettent des fautes pour lesquelles ils peuvent être chassés et congédiés sans gage. Il est de la dernière conséquence que le bon ordre soit gardé et la subordination entretenue sur le navire. -(Voyez ce que nous avons dit à cet égard, tom. x de cet ouvrage, pag. 195).

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