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Les armateurs ne

du maître que pour

SECTION VII.

Du Capitaine infidèle.

La loi ne donne pas contre les armateurs une action indéfinie pour les faits sont tenus des faits du maître, quels qu'ils soient, non autem ex omni causâ, prætor dat in exerciles objets concernant torem actionem; mais seulement pour l'objet de la navigation, et pour les points qui dépendent de l'administration du capitaine, en sa seule qualité de maître Sed ejus rei nomine, cujus ibi præpositus fuerit.

la navigation.

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:

De sorte que si le capitaine a emprunté de l'argent, sans expliquer dans le billet ou contrat que c'est pour les besoins du navire, ou s'il a fait quelque acte qui ne soit pas une dépendance de sa qualité de maître, les armateurs n'en sont pas tenus : Quid, si mutuam pecuniam sumpserit? An ejus rei nomine videatur gestum? Et Pegasus existimat si ad usum ejus rei, in quâ præpositus est, fuerit mutuatus, dandam actionem: quam sententiam puto veram. Loi 1, § 8, ff de exercit. act.

Si les deniers dont l'emprunt avait ou pouvait avoir eu pour objet les nécesPeine du capi- sités de la navigation, ont été dissipés par le capitaine, il mérite d'être sévère

taine infidèle.

ment puni.

Ordonnance de 1681, titre du capitaine, art. 20. Le maître qui aura pris » sans nécessité de l'argent sur le corps, avictuaillement ou équipement du , vaisseau, vendu des marchandises, engagé des apparaux, ou employé dans > ses mémoires des avaries et dépenses supposées, sera tenu de payer en son › propre, déclaré indigne de la maîtrise, et banni du port de sa demeure or» dinaire. »

L'art. 29 fait défenses aux capitaines d'emprunter, pour leur voyage, plus grande somme de deniers que celle qui leur sera nécessaire pour le fonds » de leur chargement, à peine de privation de la maîtrise, et de leur part au profit..

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Jus hanseat., tit. 6, art. 3. Si præter hæc, nauclerus in aliis peregrinis locis absque necessitate fraudulento modo pecuniam sub fænore nautico mutuò acceperit, solus damnum refundere, et pro qualitate rei capitaliter puniri debet. Stypmannus, L'infidélité du ca. part. 4, cap. 5, n°. 134, pag. 419. Kuricke, tit. 6, art. 3, pag. 766.

§ 3.

pitaine qui a dissipé

l'argent, ne nuit pas

Mais l'infidélité du capitaine ne nuit pas au tiers qui a contracté de bonne au tiers qui a con- foi avec lui. Ce tiers n'en a pas moins action contre les armateurs et privilége

tracté avec lui de

bonne foi.

sur le navire, pourvu que le contrat ait été causé pour les nécessités de la navigation Undè quærit Ofilius, si ad reficiendam navem mutuatus nummos in suos usus converterit, an in exercitorem detur actio? Et ait, si hâc lege accepit quasi in navem impensurus, mox mutavit voluntatem, teneri exercitorem, imputaturum cur talem proposuerit. Loi 1, § 9, ff de exercit. act. Vinnius, ad leg. 7, ff cod. pag. 182 et 184. Stypmannus, part. 4, cap. 15, no. 144, pag. 545. Marquardus, lib. 2, cap. 5, no. 27. Loccenius, lib. 3, cap. 7, no. 7 et 8, pag. 1032. Valin, art. 19, titre des capitaines.

Il suit de ce principe que celui qui, dans le cours de la navigation, a prêté de l'argent au capitaine pour les nécessités du navire, n'est pas obligé de suivre ses deniers, ni d'en prouver l'utile emploi. Il a été fondé à croire que le capitaine était honnête; et d'ailleurs, il faut être du métier, pour juger de la nécessité et de la nature des dépenses faites ou à faire en pareille occasion: Non oportet creditorem ad hoc adstringi, ut ipse reficiendæ navis curam suscipiat, et negotium domini gerat; quod certè futurum sit, si necesse habeat probare pecuniam in refectionem errogatam esse. Loi 7, ff de exercit. act. Ibiq. Glosa, Cujas et Godefroy. Scotanus, ff eod., pag. 322. Casaregis, disc. 71,

n°. 1.

Les armateurs sont recevables à prouver que le billet de grosse, souscrit par le capitaine en cours de voyage, et conçu pour nécessité du navire, a été dressé par simulation. C'est ainsi que la question fut décidée par les magistrats de Suède, dans un cas dont parle Loccenius, lib. 2, cap. 6, no. 12. (Mais il ne suffit pas que le capitaine ait été de mauvaise foi; il faut prouver que le prêteur a été complice de la fraude). Suprà, SS 3 et 4. Vide la section

suivante.

CONFÉRENCE.

XXIII. Voyez ci-dessus ce que nous avons dit sur la sect. 5 de ce chapitre. Voyez aussi l'article 236 du Code de commerce.

D'ailleurs, tout capitaine qui se rend coupable d'infidélité contre les devoirs de sa charge, mérite punition. C'est, en effet, une prévarication criminelle d'emprunter, sans nécessité, de l'argent en cours de voyage, ou de vendre et engager des marchandises et des victuailles, etc. Le droit anséatique voulait que la peine de telles prévarications pût aller jusqu'à la mort, suivant les circonstances. L'art. 20, titre du capitaine, de l'Ordonnance, voulait que, dans ce cas, le capitaine prévaricateur fût déclaré indigne de la maîtrise, et banni du port de sa demeure ordinaire. L'art. 236 de la loi nouvelle porte, sans préjudice de la poursuite criminelle, s'il y a lieu. (Voyez Kuricke, fol. 766; Valin sur l'art. 20, titre du capitaine, de l'Ordonnance ).

Ainsi, sous l'empire du Code de commerce, quoique les infidélités commises par le capitaine

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Le donneur n'est

pas obligé de prou

ver l'utile emploi.

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Billet de grosse simulé.

doivent toujours engager sa responsabilité civile, cependant elles deviennent, suivant les circonstances, des prévarications qui méritent un châtiment plus ou moins grave. Ces distinctions sont abandonnées à la sagesse des magistrats. Dans tous les cas, soit au civil, soit au criminel, la condamnation pécuniaire qui interviendra contre le capitaine, emportera la contrainte par corps. Par cela seul que le capitaine n'a point rempli les formalités prescrites par l'art. 234, qu'il n'a point satisfait aux obligations qui lui sont imposées par le législateur, l'armateur n'est point obligé de prouver la fraude et le dol. C'est au capitaine à prouver qu'ils n'existent pas, car il est suspect d'infidélité dans l'esprit du Code.

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Faut-il que, lors du prêt, les besoins

du navire aient été réels?

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l'emprunt.

SECTION VIII.

Du Fournisseur imprudent.

La loi Lucius Titius 7, ff de exercit. act., veut que du moins celui qui a prêté son argent au capitaine infidèle, ait apporté en la chose quelque diligence In summâ aliquam diligentiam in eâ creditorem præstare.

Le créancier, dit cette loi, aura action contre les armateurs, si, lors du prêt fait au capitaine, le navire avait réellement besoin de radoub: Creditorem utiliter acturum, si cùm pecunia crederetur, navis in eâ causâ fuisset, ut refici deberet. Il faut, suivant ce texte, non seulement qu'on prête pour réparer le navire, mais il faut encore qu'on sache que l'argent est nécessaire pour faire cette réparation : Si illud quoque sciverit necessariam refectioni pecuniam esse. De sorte que, suivant ce texte, si les besoins du navire avaient été imaginaires, les armateurs ne seraient responsables de rien.

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Je conviens què la nécessité a produit l'action exercitoire; mais, suivant notre Ordonnance, le maître qui aura pris sans nécessité de l'argent sur le › corps, sera tenu de payer en son nom, déclaré indigne de la maîtrise, et > banni du port de sa demeure. » Voilà tout. Le contrat, s'il est en due forme, et que le créancier ne soit pas convaincu de fraude, n'en sera pas moins valable vis-à-vis du navire. Telle est notre jurisprudence, ainsi qu'on l'a vu par les décisions rapportées suprà, sect. 5.

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Cette même loi 7 ajoute que si l'on prête au capitaine plus qu'il ne lui est S'il y a excès dans nécessaire, on n'aura, pour l'excédant, aucune action contre les armateurs : Si in eâ causa fuerit navis, ut refici deberet, multò tamen major pecunia credita fuerit, quàm ad eam rem esset necessaria, non deberet in solidum adversùs dominum navis actionem dari. Mais cela n'a lieu que dans le cas où le donneur

savait que le capitaine n'avait pas besoin d'une si forte somme. Car si le donneur a agi de bonne foi, l'action contre les propriétaires ne lui sera pas déniée: Sed et si in pretiis rerum emptarum fefellit magister, exercitoris erit damnum, non creditoris. Loi 1, § 10, ff de exercit. act. Vinnius, ibid., pag. 186. Stypmannus, d. locis.

Si l'on se trouve dans un pays où

ne puisse se faire.

La même loi 7, ff de exercit. act., refuse encore toute action contre les armateurs, si l'argent a été prêté au capitaine dans un lieu où l'emploi ne pou- l'emploi des deniers vait en être fait: Interdùm etiam illud æstimandum an in eo loco pecunia credita sit, in quo id, propter quod credebatur, comparari poterit? Mais si l'emploi ne peut se faire dans ce lieu, il suffit qu'il puisse être fait dans un autre, et que le donneur, dont le titre est en due forme, ne soit pas convaincu de fraude, pour que l'action soit ouverte contre les propriétaires, malgré le défaut d'emploi.

Si la faculté de prendre des deniers à la grosse pendant le cours du voyage avait été expressément prohibée au capitaine, ceux qui lui ont fourni de l'argent auront-ils action contre les armateurs?

Il semble d'abord que, dans ce cas, toute action devrait être déniée aux prêteurs contre les propriétaires, au bénéfice de qui l'argent n'a pas été employé : Qui cum alio contrahit, vel est, vel debet esse non ignarus conditionis ejus. ff de reg. juris. Divers textes paraissent se réunir pour établir ce sen

Loi 19,

timent.

Loi 7, ff de exercit. act. Sciat ut in hoc se credere, cui rei magister quis sit præpositus.

Loi 1, S7, ff eod. Non autem ex omni causâ, prætor dat in exercitorem actionem, sed ejus rei nomine cujus ibi præpositus fuerit.

D. lege, S 12. Præpositio certam legem dat contrahentibus; modum egressus non obligabit exercitorem.

Si sic præposuit, ne alter sine altero quid gerat, qui contraxit cum uno, sibi imputabit. D. lege 1, § 14.

Tout cela est vrai, si le prêteur était instruit des défenses faites au capitaine; mais s'il ignorait les défenses, l'action sera ouverte contre les propriétaires, attendu la foi publique. Tout capitaine est présumé mattre et jouir du libre exercice des pouvoirs que cette qualité lui défère. Ceux qui contractent avec lui en pays étranger ne sont pas obligés de lui faire exhiber ses titres, et il peut aisément les leur cacher. Le § 5 de la loi ci-dessus citée, après avoir décidé que le contrat passé avec celui que le capitaine a subrogé en sa place, est obligatoire vis-à-vis des propriétaires, ajoute qu'il en serait de même,

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Du capitaine à qui il a été défendu de prendre à la grosse.

On

S 4.

peut, suivant

adopter les excep

tions établies par la

loi Lucius Titius.

quoiqu'ils eussent nommément prohibé à leur capitaine d'en subroger un autre Dicendum erit eò usquè producendam utilitatem navigantium.

Je conviens qu'il y a une grande différence entre celui qui s'embarque dans un navire qu qui y charge des marchandises, et celui qui prête de l'argent au capitaine. Mais le motif de la loi, fondé sur l'erreur commune, doit être admis dans tous les cas.

Je crois donc que, malgré la prohibition faite au capitaine de prendre des deniers à la grosse en cours de voyage, ceux qui de bonne foi auront donné leur argent à ce capitaine infidèle, n'auront pas moins action contre les propriétaires et privilége sur le navire. Il faudrait que la prohibition leur eût été auparavant intimée, ou que du moins elle cût été rendue publique dans le lieu du contrat. Lois 11 et 17, ff de inst. act. Vide Stypmannus, part. 4, cap. 15, no. 135, pag. 543. Loccenius, lib. 3, tit. 7, n°. 9, pag. 1033. Peckius et Vinnius, pag. 88, 103 et 111. Roccus, de navib., not. 12. Casaregis, disc. 71, no. 8. Pothier, des obligations, no. 79, tom. 1, pag. 39.

Duarenus, ff de exercit. act., pag. 1297, expliquant la loi Lucius Titius, dit les circonstances, qu'il suffit que celui qui prête de l'argent au capitaine infidèle se soit comporté avec quelque diligence, de manière à n'être soupçonné coupable d'aucune fraude: Satis est eum adhibere aliquam diligentiam, ut non appareat eum malo animo mutuam pecuniam dedisse. D'où il suit que si la négligence est extrême, et qu'il y ait faute grave, on peut, suivant les circonstances, lui refuser toute action contre les armateurs : Gravis culpa dolo æquiparatur.

M. Valin, art. 19, titre du capitaine, rappelle la disposition de la même loi Lucius Titius. Mais tout cela, dit-il, comme trop subtil et trop pointilleux, » a été rejeté dans l'usage du commerce, et il suffit, pour autoriser le créancier prêteur à agir contre le propriétaire du navire, qu'il ait prêté la somme › de bonne foi au capitaine, c'est-à-dire qu'il n'y ait ni preuve, ni présomp» tion suffisante de collusion entre le capitaine et lui, »

Cet auteur n'exclut pas les présomptions suffisantes de collusion, lesquelles dépendent des circonstances du fait, qui varient à l'infini. Celui qui veut s'embarquer ou charger des marchandises, n'a pas souvent le choix du vaisseau. Il est forcé, propter navigandi necessitatem, de se servir du premier navire qui se présente. Mais celui qui prête son argent à un capitaine le fait volontairement, et sans y être contraint; le motif de l'édit du préteur cesse à son égard. Il est donc juste qu'il y apporte la prudence commune : Aliquam diligentiam. Vide Cujas, Vinnius, Faber et autres docteurs sur ladite loi Lucius

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