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quirataires ne sont pas obligés, à moins qu'ils ne lui eussent donné à ce sujet un pouvoir suffisant: Ma li detti compagni, ne altri lor boni, non sono obligati, se il detto patrono non ha avuto procura, o altro poder sufficienti de obligarli. Au ch. 236, il est dit que si le navire périt, c'est assez que cette perte soit pour le compte des quirataires: Che il compagno assay perde.

$3. Du capitaine gé

L'Ordonnance, en l'art. 2, titre des propriétaires, parle du capitaine simple conducteur du navire, et à qui la gestion de la cargaison n'a pas été déférée, reur de la cargaison. Les armateurs, en abandonnant le bâtiment et le fret, sont déchargés des obligations contractées par ce capitaine, parce que son mandat était circonscrit au fait de la navigation, sans s'étendre au-delà. Il en est autrement du capitaine géreur de la cargaison. Les armateurs sont tenus de ses faits, non seulement jusqu'à la valeur du navire et du fret, mais encore jusqu'à la valeur des marchandises confiées à ses soins, et des retraits qui en proviennent.

On se trouve alors, à certains égards, dans le cas de l'action institoire. Or, 1o. en vertu de cette action, le commettant est obligé envers le tiers qui a contracté avec le préposé (loi 1, ff de inst. act.), pourvu que ce soit pour un objet concernant la gestion déférée. Loi 5, § 11, ff eod. Le commettant est même tenu des délits que le préposé commet dans ses fonctions. Loi 5, § 8 ff eod. Loi 1, S9, ff de exercit. act. Loi 31, ff de negot. gest. Loi 10, Cod. de procur. Cujas, sur la loi 58, ff de procuratoribus, au liv. 71 Pauli ad edictum. Pothier, des obligations, no. 453.

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2o. En vertu de cette même action, le commissionnaire acquiert, pour ses avances et fournitures, un privilége sur la chose acquise ou conservée par le moyen de ses avances. Loi 30, ff de procuratoribus. Casaregis, disc. 22, no. 12. Despeisses, tom. 1, pag. 159 et 162. Valin, Coutume de la Rochelle, tom. 3 pag. 368. Pothier, Traité du mandat, no. 59 et 86. Bezieux, pag. 158.

Il suit de ces principes, que si les armateurs refusent de remplir les engagemens contractés par leur capitaine géreur, ils doivent abandonner le navire et la cargaison, tant d'entrée que de sortie, ou du moins en tenir compte; (car la formalité du délaissement n'ayant pas été prescrite à ce sujet, elle n'est pas de rigueur). Il suffit qu'ils n'aient pas profité des engagemens de leur capitaine, et que leur fortune de terre n'en soit pas devenue plus opulente. Cela est relatif à la disposition du droit romain. Lois 10 et 17, ff de inst. act. (Nota.. Lorsque je parle du cas où les propriétaires abandonnent le navire et le fret, je considère le capitaine comme simple maître, et non comme préposé à la marchandise. Cette dernière qualité modifie la disposition de l'Ordonnance). Vide infrà, § 5.

$4.

Si les propriétaires

timent et le fret ?

Si les propriétaires abandonnent le bâtiment et le fret, les engagemens que le abandonnent le bâ- capitaine a contractés en cours de voyage et en nom qualifié, lui restent-ils propres vis-à-vis du tiers? L'art. 2, titre des propriétaires, paraît décider l'affirmative; mais cela doit s'entendre, sauf les distinctions que je ferai dans la sect. 12 du présent chapitre. Kuricke, tit. 6, art. 2, pag. 766, parle du cas où un capitaine, en cours de voyage, aurait pris à la grosse des sommes pour au-delà de la valeur du navire et du fret; et il décide, d'après le Statut de Hambourg, que le capitaine répond en son propre de pareils engagemens, pour tout ce qui excède la valeur du navire et du fret: Sed, quid si nauclerus in locis exteris tantùm pecuniæ trajectitiæ seu nautica in carinam recipiat, ut illi exsolvendæ nec navis, nec naulum, nec vectura, nec armamenta navalia sufficiant? Eo in casu, secundum Statutum Hamburg, exercitores non sunt obligati pecuniam hanc reddere; sed qui pecuniam suam in carinam crediderunt, nauclerum, ejusque bona tantummodò obligata habebunt. Cette doctrine est bonne, si le capitaine est coupable de fraude, ou qu'il se soit obligé en son propre nom. Infrà, ́sect. 12.

$ 5.

de change?

Si le navire se perd dans le cours du voyage, les contrats à la grosse s'évanouissent. Les chargeurs dont les marchandises ont été vendues pour les nécessités du vaisseau, n'ont rien à prétendre, parce que si elles fussent restées dans le bord, elles auraient été enveloppées dans le même sinistre. Tel est l'esprit de l'art. 19, titre du capitaine; et l'on doit rejeter à cet égard la décision de l'Ordonnance de Wisbuy, art. 68, ainsi que je l'ai dit en la section précédente.

J'ai observé ci-dessus que le titre du Digeste de exercit. act., ne disait pas I emprunter à jour, le mot de l'argent trajectice, et que l'édit du préteur autorisait les maîtres à ou tirer des lettres avoir recours à l'emprunt simple pendant le cours de la navigation, pour survenir aux nécessités du navire: Si fuerit mutuatus, dandam actionem. Loi 1, SS 7 et 8, ff eod. Loccenius, lib. 3, cup. 7, n°. 6. Vinnius, pag. 94 et 185. Targa, pag. 29.

Le Réglement d'Anvers, art. 19, ne permettait au capitaine de prendre des deniers à la grosse, que dans le cas où il ne trouverait pas argent au change.

La nouvelle Ordonnance teutonique, tit. 6, art. 2, veut que si le capitaine qui a besoin d'argent pendant le voyage, ne trouve aucune lettre de change sur ses armateurs, si nullum cambium ad exercitores transmittendum obtinere queat, et qu'il ne soit pas avantageux de vendre des marchandises, alors, dans ce cas de nécessité, il puisse prendre deniers à la grosse: Tunc, in casu necessitatis, habeat potestatem tantùm pecuniæ sub fænore nautico accipiendi, quan

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Kuricke, sur cet article, pag. 765, observe que dans le pays étranger, le capitaine peut prendre des deniers à la grosse, 1°. s'il en a besoin; 2°. s'il ne trouve aucune lettre de change sur ses armateurs: Si isthic loci, cambio sub fide exercitorum, pecuniam ab exercitoribus solvendam comparare non queat; 3°. si la vente des marchandises de la cargaison était plus onéreuse que le change maritime. Stypmannus, part. 4, cap. 5, no. 107, pag. 417, tient le même langage, et dit que dans ce cas, le capitaine doit tirer lettres sur ses armateurs, pecuniam collybo parare, quam exercitores solvant, plutôt que de prendre des deniers à la grosse sous un change considérable.

Mais notre Ordonnance a réduit le pouvoir du capitaine, en cours de voyage, ou à prendre deniers sur le corps, ou à mettre des apparaux en gage, ou à vendre des marchandises de son chargement pour les nécessités du navire. S'il tire des lettres de change sur ses armateurs, cet engagement, quoique conçu en nom qualifié, lui devient personnel, attendu qu'il a excédé son mandat légal. Il ne doit contracter aucune obligation qui ne soit inhérente au navire même, et qui ne dépende du succès de l'expédition maritime. C'est à quoi se borne l'autorité que sa qualité de maître lui défère (à moins que son raccord, ou le droit commun, en certains cas, ne lui donnent un pouvoir plus étendu). Voici à ce sujet des décisions très-remarquables :

Première décision. Le capitaine Pierre-Joseph Babin, commandant le navire le Raphaël, se trouvant au Cap-Français, cut besoin d'argent pour provisions, paiement des droits, et remplacement d'équipage. Il tira sur le sieur François Raphel, son armateur, deux lettres de change de 1,750 liv., valeur reçue pour biscuits, farine, et dernières expéditions du navire. Il mit à la voile. Il rencontra un corsaire anglais contre qui il se battit. Le feu prit aux poudres; Babin eut le malheur de sauter en l'air.

Les deux lettres furent protestées faute d'acceptation et de paiement. Le sieur Pellissier, qui en était porteur, attaqua en notre amirauté le sieur Raphel, et présenta requête contre le tuteur des enfans du capitaine Babin, en assistance de cause et condamnation personnelle. Le sieur Pellissier et le tuteur disaient que les lettres avaient été tirées pour besoin urgent du navire; que le capitaine n'avait pas trouvé à prendre des deniers à la grosse; qu'il n'avait pas dû vendre les agrès qui lui étaient nécessaires; qu'il n'aurait pu vendre des marchandises pour du comptant, qu'à des conditions très-onéreuses; que le sieur Raphel trouvait dans les assurances de sortie, le plus grand bénéfice; qu'en refusant de payer les lettres, il devait du moins abandonner les assurances; que ce serait une injustice des plus odieuses que de

ruiner entièrement deux pauvres pupilles, dont le père s'était glorieusement sacrifié pour remplir ses devoirs, etc. etc.

Le sieur Raphel répondait que si les capitaines étaient autorisés à tirer des lettres sur leurs armateurs, la fortune de ceux-ci n'aurait plus rien de certain. L'Ordonnance a circonscrit le pouvoir du maître, en cours de voyage, dans les limites du navire. Un capitaine ne peut hypothéquer que le bâtiment, le fret et les choses qui sont sous sa direction, et nullement les assurances, qui lui sont étrangères, et qui intéressent uniquement la fortune de terre de l'armateur. Il est essentiel pour le commerce qu'un négociant ait la liberté de mettre des bornes à ses risques, et qu'en expédiant un navire il puisse, par une sage prévoyance, modérer les hasards auxquels il s'expose; au lieu qu'en admettant le systême contraire, les armateurs se verraient accablés en même tems et par le sinistre et par des traites ruineuses. On ajoutait que rien n'était resté sur le pays de la cargaison d'entrée.

Arrêt du 20 juin 1760, rendu par le Parlement d'Aix, au rapport de M. de Montvallon, qui, réformant la sentence de notre amirauté, mit le sieur Raphel (pour qui M. Pazery écrivait) hors de Cour et de procès, et condamna les héritiers de Babin à payer les lettres de change.

Seconde décision. En 1759, le sieur Dominique Pauquet arma la barque le Saint-Jean-Baptiste, capitaine André-Gabriel Jauffret, pour un voyage d'entrée à la Grenade et de retour à Marseille. La direction de la cargaison fut convertie en lettres de change sur Copenhague, à l'ordre de Pauquet, qui en reçut la valeur. Le reste des retraits fut chargé dans le navire. Le capitaine ayant besoin d'argent pour ses dernières expéditions, prit sur le pays 12,000 liv., argent des îles, et tira à ce sujet sur son armateur des lettres de change conçues en ces termes: Il vous plaira payer la somme de......... valeur reçue comptant de........, pour mes dernières expéditions de la barque, droits payés » au domaine, et traversée des matelots; faute de quoi je n'aurais pu partir. › Les lettres furent présentées à Pauquet, qui déclara les accepter, pour les payer un mois après l'heureuse arrivée à Marseille de la barque le Saint-Jean-Baptiste.

Cette barque, à son retour, fut prise par les Anglais. Requête de la part du sieur Jean-Baptiste Rey, porteur des lettres, contre Pauquet et le capitaine Jauffret. Requête de ce dernier en garantie contre Pauquet. Pauquet soutenait que le capitaine avait mis à l'écart divers fonds, qui auraient amplement suffi, à la Grenade, pour les dernières expéditions du navire. Il s'élevait contre la demande du sieur Rey, en disant qu'en aucun cas les capitaines ne pouvaient tirer des lettres de change sur leurs armateurs. Sentence de notre ami

rauté, rendue le 15 janvier 1760, qui condamna Pauquet à payer les lettres de change. Voici la teneur de l'arrêt, au rapport de M. de Boutassy, qui réforma cette sentence:

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« La Cour a mis et met l'appellation, et ce dont est appel, au néant; et par › nouveau jugement, sans s'arrêter à la requête principale dudit Rey, du 3 décembre 1759, ni à celles incidentes du capitaine Jauffret, des 14 février 1760 et 6 février dernier, a mis et met sur icelles ledit Pauquet hors de Cour , et de procès, condamne lesdits Rey et Jauffret aux dépens; et de même » suite, faisant droit à la requête d'assistance en cause et garantie dudit Rey, » du 7 novembre 1760, a condamné et condamne, le capitaine Jauffret au paiement de 8,000 liv. (argent de France), du montant des deux lettres » de change dont il s'agit, avec intérêts, frais de protêt et dépens actifs, passifs, et de la garantie, avec contrainte par corps. Ordonne en outre que le compte du capitaine vu, il sera pourvu à la restitution du montant desdites lettres de change en total ou en partie, s'il y échoit ; et en cet état, a renvoyé les parties et matière au lieutenant, autre que celui qui a jugé, pour ⚫ faire exécuter le présent arrêt selon sa forme et teneur. Délibéré en Parle› ment, le 18 mai 1761.» M. Pazery écrivait pour Pauquet. J'écrivais au contraire. Ces deux arrêts forcèrent notre tribunal à corriger sa jurisprudence, laquelle avait été canonisée par M. Valin, art. 3, titre des prescriptions, art. 19, titre du capitaine, et art. 2, titre des propriétaires.

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Troisième décision. En 1760, la pinque le Saint-Joseph, capitaine Michel Talon, était à la Grenade. Le capitaine mourut. Le capitaine Donde, qui se trouvait dans l'île, prit le commandement de ce navire, et tira, sur le sieur Jean-Pierre Talon, armateur, une lettre de 4,000 liv. tournois, pour parvenir à l'armement de la pinque Saint-Joseph. Ce navire partit de la Grenade. Il relâcha aux Canaries, où il fut déclaré innavigable. Les débris et le fret furent absorbés par les salaires et autres dépenses.

Le sieur Talon exigea de ses assureurs les sommes assurées, et laissa protester la lettre de change, laquelle fut renvoyée à la Grenade.

En 1764, le capitaine Donde, étant retourné à la Grenade ( qui appartenait alors aux Anglais), fut actionné en paiement de ladite lettre, et fut mis hors de Cour et de procès par le magistrat anglais, qui crut que la chose concernait l'armateur.

Huit ans après, le porteur de cette même lettre se pourvut en notre amirauté contre le sieur Talon, qui répondit qu'il avait fait abandon du navire

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