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et du fret, et qui fut mis hors de Cour et de procès, par sentence'd novembre 1772. J'écrivais pour le sieur Talon.

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2;

Il résulte de cette nouvelle jurisprudence, 1°. qu'en règle générale, le capitaine, en cours de voyage, n'a pas droit de tirer des lettres de change sur ses armateurs, et qu'en cas de protêt, il est obligé de payer les lettres en so propre, parce qu'il a excédé le pouvoir que l'Ordonnance lui avait déféré; 2o. que s'il a fait des dépenses utiles, soit pour le corps, soit pour la cargaison, il a droit de s'en rembourser par privilége sur l'un ou sur l'au l'autre ; 5°. que si, malgré la prise ou le naufrage, les armateurs ont reçu ou partie des nolis, ou quelques retraits, ils sont obligés de faire honneur aux lettres de change de leur capitaine, jusqu'à concurrence de ce qu'ils ont en main. On voit par là que c'est une grande imprudence de la part des capitaines, de tirer des lettres de change sur l'armateur, qui, dans le raccord, ne leur en a pas donné un pouvoir spécial. Cependant rien de si ordinaire qu'une pareille imprudence, laquelle rend les capitaines victimes de l'événement.

Quatrième décision. En 1779, le senaut la Nymphe, capitaine Mouriés, arriva à Boston. Le capitaine resta sur le pays pour gérer la cargaison d'entrée, et remit à Thomas Roux, son second, le commandement du navire, dans lequel il chargea des planches, des douves et des drogues. Arrivé à la Martinique, le capitaine Roux vendit son chargement, le convertit en sucré et en café. 11 remplit son vide par des marchandises à fret. Il partit sous l'escorte de M. le comte d'Estaing, et relâcha au Cap-Français, où il fut forcé de séjourner pendant plus d'un mois. Il fallut renouveler les provisions. Le capitaine Roux fit assembler son état-major, et par un verbal du 10 août 1779, il fut délibéré que pour acheter des vivres on prendrait de l'argent à emprunt, et qu'on tirerait des lettres de change sur le sieur Lazare Peyrier, armateur. Le lendemain, le capitaine présenta requête au juge du Cap. II exposa le besoin où il était d'acheter des vivres, et il requit d'être autorisé à tirer sur » son armateur pour 3,000 liv., argent des îles, vu l'impossibilité où il est » de faire vendre des marchandises de sa cargaison, attendu qu'elles se

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se trou» vent les premières embarquées, et qu'il a complété son chargement avec » des marchandises prises à fret. »

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Décret rendu en suite des conclusions du procureur du roi, qui autorise » le capitaine Roux à emprunter la somme de 3,000 liv., argent de la colonie,

» pour l'avictuaillement de son navire; et pour ce, tirer sur son armateur des lettres de change, au meilleur terme qu'il pourra trouver.

Si ce juge eût été instruit de notre nouvelle jurisprudence, il çût dit au

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capitaine Ou empruntez à la grosse, ou vendez partie de votre cargaison, sans vous exposer à un protêt qui pourra retomber sur vous, en cas de sinistre.

En conséquence du décret de juge, le capitaine Roux tira sur le sieur Lazare Peyrier une lettre de 2,000 liv. tournois, à l'ordre de Jourdan frères et Jubellin, valeur reçue en 3,000 liv., argent de la colonie, pour pourvoir aux avictuaillemens du vaisseau la Nymphe.

Le senaut, parti du Cap, fut pris par les Anglais. La lettre de change fut protestée, faute d'acceptation et de paiement.

Le sieur Louis Jubellin, porteur de cette lettre, vint me consulter. Je lui répondis que, suivant notre jurisprudence actuelle, il n'avait aucune action personnelle contre l'armateur, mais qu'il avait une action réelle sur les effets de la cargaison qui étaient restés à Boston, ou qui seraient envoyés en France.

Sentence du 20 décembre 1780, rendue par notre amirauté, « qui déboute, » en l'état, Louis Jubellin de la requête principale qu'il avait présentée contre » Lazare Peyrier; qui condamne le capitaine Louis-Thomas Roux à payer > audit Jubellin les 2,000 liv. tournois, valeur de ladite lettre de change, et qui, faisant droit à la requête incidente du capitaine Roux, accorde audit capitaine son recours sur les marchandises de la cargaison, qu'il avait laissées à Boston et à la Martinique, ou sur leur produit, jusqu'au concurrent desdites 2,000 liv., en principal, intérêt et dépens; enjoint, à cet effet, audit » Lazare Peyrier, de lui donner compte de l'état et valeur desdites marchan› dises, ou du produit qu'il peut en avoir reçu, et ce, jusqu'audit concurrent, à quoi faire ledit Peyrier sera contraint par toutes voies; le condamnant > aux dépens de cette qualité..

Il serait à souhaiter que cette matière fût éclaircie par un réglement qui servit d'instruction aux capitaines et aux officiers de justice établis aux îles, où la nouvelle jurisprudence est ignorée, et où l'on est induit à erreur par la doctrine de M. Valin. Vide infrà, ch. 12, sect. 8, § 2.

$ 6.

Forme de l'abandon fait par les ar

mateurs, pour n'être

pas tenus des faits

L'Ordonnance dit que les propriétaires demeureront déchargés des faits du maître, en abandonnant le bâtiment et le fret. Mais elle n'établit aucune forme pour faire ce délaissement. Il suffit donc qu'on le fasse de quelque manière que ce soit. Elle ne prescrit aucun tems. On est donc reçu à faire l'abandon du capitaine. en tout état de cause. Si les propriétaires plaident mal à propos au sujet des faits du capitaine, ils doivent être condamnés à la garantie et aux dépens, jusqu'à ce qu'ils aient abandonné le navire et le fret. Il est juste qu'ils soient 62

T. II.

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admis à cet abandon, par le jugement même qui prononce les adjudications contre eux demandées. Ainsi décidé par sentence du 4 avril 1770, dans la cause du capitaine P***, commandant le vaisseau le Prince de Lamballe, accusé de vol et de baraterie. Les adjudications prononcées contre ce capitaine furent dé» clarées communes et solidairement exécutoires en principal, intérêts et dépens, › contre ceux des intéressés au vaisseau qui n'avaient pas déclaré faire aban» don, si mieux (est-il dit) ils n'aiment faire abandon de leur intérêt; ce qu'ils » déclareront dans les deux mois de la signification de notre sentence, et en » ce cas, ils seront déchargés de la commune exécution prononcée contre » eux, et condamnés tant seulement aux dépens des qualités les concernant; › et faute par eux de faire ladite déclaration dans ledit tems, et icelui passé, ⚫ dès maintenant comme pour lors, et sans autre jugement, ils seront déchus » de l'option; et attendu que les autres intéressés audit vaisseau ont déclaré » faire abandon de leur intérêt, nous les avons mis, sur les demandes des propriétaires des piastres rondes, hors de Cour et de procès; les condam› nant néanmoins aux dépens des qualités les concernant, jusqu'au jour de » l'abandon. »

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Tout ce que j'ai dit dans la présente section cesse, lorsqu'il s'agit de procurer la liberté à l'ôtage donné pour le rachat du navire. La faveur de la liberté l'emporte aisément sur la rigueur des règles générales. Vide mon Traité des assurances, ch. 12, sect. 21, S7, et sect. 41, S 9.

CONFÉRENCE.

XXVII. Nous avons vu ci-dessus, sur la sect. 2 de ce chapitre, que, d'après l'art. 216 du Code de commerce, tout propriétaire de navire est civilement responsable des faits du capitaine, pour ce qui est relatif au navire et à l'expédition. Il n'y a pas de doute que cette responsabilité ne soit solidaire entre tous les propriétaires. (Loi 1, S fin.; loi 2, ff de exerc. act.) Cette obligation solidaire a encore un autre fondement parmi nous, savoir: l'art. 22 du Code de commerce, qui déclare les associés obligés solidairement à toutes les dettes de la société. Il ne faut pas perdre de vue que le mot faits est un terme générique qui comprend tout ce qu'il est possible de faire : Verbum facere omnem omnino faciendi causam complectitur, dandi, solvendi, numerandi, judicandi, ambulandi. (Loi 218, ff de verb. signif.) On voit que le mot faits, employé dans la loi, ne se borne pas seulement à exprimer une action, un mouvement physique; qu'il embrasse aussi les actes de la volonté, et que, dans ce sens, on peut faire un contrat, un emprunt, de même que l'on peut faire ou commettre un délit ou quasi-délit.

« Mais, porte le même art. 216, la responsabilité du propriétaire cesse par l'abandon du navire et du fret. » Elle cesse pour tous les engagemens civils du capitaine. Il y a une chose particulière au propriétaire d'un navire, dit Pothier: « Tous les autres commettans sont tenus

» indéfiniment de toutes les obligations que leur préposé a contractées pour les affaires aux» quelles ils l'ont préposé; au lieu que les propriétaires de navires ne sont tenus des obligations » du maître que jusqu'à concurrence de l'intérêt qu'ils ont au navire, etc. » De sorte donc que si le navire périt, ou si les propriétaires abdiquent leurs intérêts, en abandonnant le navire et le fret, ils ne sont garans de rien. (Voyez Pothier, charte-partie, no, 51, et Traité des obligations, no. 451 ).

Néanmoins, ces principes ne sont applicables qu'à ce qui est relatif au navire et à l'expédition. Il en serait autrement si le capitaine réunissait les deux fonctions de maître et de géreur de la cargaison. Dans ce cas, le propriétaire ne serait pas libéré par l'abandon du navire et du fret. Ici, il est tenu des faits du capitaine à qui il a déféré une semblable gestion, non seulement jusqu'à la valeur du navire et du fret, mais encore jusqu'à la valeur des marchandises confiées à ses soins, et des retraits qui en proviennent. Ainsi, comme observe Emérigon au texte, si le propriétaire refuse de remplir les engagemens contractés par son capitaine géreur, il doit faire abandon du navire, du fret et de la cargaison, tant d'entrée que de sortie, ou du moins en tenir compte; car la formalité de l'abandon n'ayant pas été prescrite à ce sujet par la loi nouvelle, ni par l'Ordonnance, il suffit que le propriétaire n'ait pas profité des engagemens de son capitaine, et que sa fortune de terre n'en soit pas devenue plus opulente.

Cependant si le capitaine était expédié pour un pays quelconque, afin d'y faire, pour ses armateurs, des opérations de commerce, et de s'y livrer à des spéculations qui lui auraient été spécifiées avant le départ, alors ses armateurs seraient responsables indéfiniment de tous ses faits, en raison de cette mission particulière. Ils ne seraient plus reçus à faire abandon, parce que son mandat n'étant plus circonscrit dans les limites de la navigation, tous ses engagemens tombent sous l'empire du droit commun.

Mais le propriétaire ne serait pas responsable de l'engagement pris par son capitaine, de porter en France une marchandise prohibée, parce qu'un pareil traité est illicite et contraire aux lois du royaume. Lorsque l'on contracte au mépris des lois de son pays, elles doivent être sans force pour faire exécuter les accords consentis. En se plaçant hors de la disposition des lois, les chargeurs se sont fiés au capitaine, mais ils n'ont pu compter sur la garantie du bâtiment; garantie qui n'est donnée qu'à ceux qui ne transgressent point les lois du pays.

Dans le tom. 1, tit. 3, sect. 1, pag. 293 de notre Cours de droit commercial maritime, nous avons examiné l'importante question de savoir si le propriétaire qui a fait le délaissement de son navire et du fret aux assureurs, qui l'ont accepté, peut ensuite faire l'abandon du même navire et du fret aux chargeurs de la marchandise, et nous avons décidé l'affirmative.

Notre doctrine nous paraît d'autant plus sûre, qu'elle a été professée un an après par nos savans jurisconsultes, MM. Toullier, Lesbaupin et Carré, dans l'affaire d'un sieur Tirevert, négociant à Nantes, et consacrée par arrêt de la Cour royale de Rennes, en date du 12 août 1822. Voyez ci-après jurisprudence).

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Du reste, il faut dire maintenant qu'il n'y a plus de doute que le capitaine ne puisse emprunter au taux courant du commerce, et en paiement, tirer une lettre de change sur le propriétaire ou armateur du navire. Le nouveau Code est revenu à l'ancienne législation nautique à cet égard. Mais alors il faut que le capitaine donne avis de la lettre de change à son armateur, le plus promptement possible, afin que celui-ci puisse ajouter la somme à la valeur qu'il a

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donnée au navire, et la faire assurer, s'il le juge à propos. Il faut d'ailleurs que cette lettre de *** change énonce formellement que c'est pour les besoins du navire légalement constatés, d'après Part: 234ldo ang aire sa o amor for ou earbuds stamen coup, jebut.

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Le propriétaire qui a fait le délaissement du navire et du fret aux assureurs, qui l'ont ac-but cepté, peut ensuite faire l'abandon du même navire et du fret aux chargeurs de la marchandise. TOLOTNO Ju itzongis up snor88357alai Da mɔ 98

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Considérant que l'abandon ou délaissement accepté par les assureurs les rend, soit à gain, » soit à perte, propriétaires de l'objet assuré (art. 585); qu'au contraire, l'abandon autorisé » par l'art. 216, du navire et du fret, n'en transmet pas la propriété aux chargeurs à fret; il ne » les rend que créanciers, ayant droit de se pourvoir à l'effet d'être indemnisés par le navire de >> tout ce qui peut leur être dû, sans pouvoir jamais faire de bénéfice sur l'abandon.

» Considérant que les assureurs, en acceptant le délaissement du navire, en sont devenus » propriétaires, sous la condition d'acquitter les charges dont il était grevé, et de répondre » des faits du capitaine, dont ils ont garanti la baraterie, sauf à faire eux-mêmes abandon, s'ils » voulaient se dégager de toute responsabilité, etc. »>- (Voyez l'arrêt de la Cour royale de Rennes, du 12 août 1822, rapporté sect. 7 du tit. 11, pag. 380 et suiv., tom. 4 de notre Cours de droit commercial maritime).

SECTION XII.

1

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tracte en qualité de

personnellement ?

Le Capitaine est-il personnellement tenu des obligations qu'il contracte en sa qualité de maître ?

هم.

En règle générale, le commissionnaire qui promet, qui stipule, qui agit Celui qui con- en sa qualité de préposé, ne s'oblige pas en son nom propre. Il est simple préposé est-il tenu ministre et exécuteur. Il n'est tenu à rien de plus qu'à exhiber son mandat. Vide mon Traité des assurances, ch. 5, sect. 3. Le tuteur qui agit tutorio nomine, ne contracte aucune obligation personnelle. Loi 43, § 1, ff de admin. tut. Loi 15, Cod. eod. Loi 12, ff de his qui ut indign. Loi 30, § 1, ff de inoff. test. Loi 5, § 1, ff quandò ex facto.

Mais le commissionnaire qui contracte en son nom s'oblige, sans distinction, vis-à-vis du tiers avec qui il contracte, parce qu'on ignore sa qualité, et qu'il est censé plutôt agir pour soi que pour autrui : Potiùs meo nomine quàm pro alio. Loi 4, ff de solutionib. Casaregis, disc. 78, no. 8 et seq.; disc. 199, no. 31. D'Argentré, art. 96, not. 2, n°. 3. Ansaldus, disc. 30, no. 32. Despeisses, tom. 1, pag. 51, n°. 25. Mantica, de tacitis, lib. 7, tit. 18.

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