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pacta, dummodò justa et licita sunt. Et prout similiter sequitur in cambio maritimo, etc. Casaregis, disc. 201, n°. 3. Suprà, ch. 1, sect. 6.

Première décision. En 1756, la veuve Floret et fils armèrent la barque la Marseillaise, capitaine Eydin, et la destinèrent pour Saint-Domingue. Le capitaine et ses officiers signèrent une écrite conçue en ces termes : « Nous dé» clarons avoir reçu des sieurs veuve Floret et fils, armateurs de la barque la Marseillaise, la somme de 11,000 liv. en un cinquième d'intérêt qu'ils » nous cèdent sur la cargaison de cette barque, montant, suivant la facture, » à 55,000 liv., consentant qu'à notre heureux retour en Europe, ils se paient > par eux-mêmes sur le produit des effets achetés pour le compte de la cargaison, tant des 11,000 liv., que de 9,000 liv. en sus que nous leur accor› dons, en représentation du change maritime. Au moyen de quoi les sieurs » veuve Floret et fils courent les risques, péril et fortune de la mer, et nous » nous obligeons, pour la validité du présent billet de grosse, à la solidaire » les uns pour les autres. »

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La barque arriva à Jacmel. Elle fut ensuite aux Cayes. La cargaison d'entrée produisit 178,496 liv. Le capitaine, d'après les ordres de ses armateurs, distribua la plus grande partie des retraits sur quinze navires français. Il chargea dans la barque la Marseillaise des sucres et indigos pour 49,795 liv. Il partit, et il arriva heureusement à Marseille. Des quinze vaisseaux sur lesquels le reste des retraits avait été réparti, il n'y en eut que deux qui arrivèrent heureusement en France. Les autres furent pris par les Anglais. Les effets chargés dans la Marseillaise produisirent.....

77,340 liv.

dont le quint, pour le capitaine et ses officiers, montait à....... 15,468 Ils consentaient à déduire, pour le prorata des 20,000 liv. du capital et de change maritime par eux dus.........

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5,579 9,889

Ils proposaient la même opération au sujet des retraits des deux autres navires arrivés en Ponent, et ils soutenaient que la perte occasionnée par la prise des Anglais devenait commune aux associés et participes, à proportion de leur intérêt.

La veuve Floret et fils prétendaient que, la barque la Marseillaise étant revenue à bon port, le capital et le change maritime leur étaient acquis en entier, et qu'ainsi, ils étaient fondés à retenir les 15,468 liv. déjà liquidées, à compte des 20,000 liv. à eux dues.

Sentence arbitrale rendue par M. Brés et moi, le 11 mars 1760, qui, «

T. H.

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, sant droit à la demandé du capitaine Eydin et de ses officiers, décida que le risque des 11,000 liv. de l'intérêt cédé, et le change maritime en dépendant, devaient être répartis tant sur la barque la Marseillaise, que sur les quinze autres navires; le tout à proportion des marchandises chargées dans › lesdits bâtimens, pour le compte commun de la veuve Floret et fils et de » leurs cointéressés, suivant le compte qui en sera fait par règle de proportion, eu égard au capital donné à la grosse et au change maritime, d'une part, et à la valeur des retraits qui ont été chargés dans chacun des autres » bâtimens, d'autre. » Arrêt du Parlement d'Aix, rendu dans le mois de février 1762, qui confirma cette sentence, avec dépens.

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Si, dans l'espèce de cette cause, le contrat de grosse eût été pur et simple, le capital de 11,000 liv. et le change maritime auraient été acquis en entier à la veuve Floret et fils, par le seul heureux retour de la barque, quoique tous les retraits n'y eussent pas été chargés. Mais c'était ici un contrat de grosse subordonné à une véritable société contractée entre les armateurs et les officiers du navire, laquelle devait par conséquent être régie par les règles mixtes des sociétés et des contrats à la grosse.

On voit par là, 1°. qu'il est permis de donner à la grosse toute autre chose que de l'argent; 2°. que ce contrat peut se réunir avec un autre, et qu'il est susceptible de toutes les modifications qu'il plaît aux parties d'y apporter. Vide infrà, ch. 12, sect. 9, § 4.

Seconde décision. Jean-Joseph Marseille, maître cafetier, fournit à la chambre et à la cuisine du vaisseau du roi Notre-Dame de Santé, capitaine Contrepont, divers ustensiles, qui furent estimés 1,043 liv. Il en fut dressé un état, au bas duquel le sieur Pierre Pinel, armateur du vaisseau, signa les accords que voici : « Je ferai rendre à l'arrivée du vaisseau, à M. Marseille, les articles » ci-dessus (et lui paierai, deux mois après le désarmement dudit vaisseau, » tems auquel le risque dudit sieur sera fini, cent dix pour cent, sur l'éva»luation à 1,043 liv.), qu'il prendra tels quels ils se trouveront; m'obligeant » seulement de lui payer ceux qui se trouveront perdus, sur le pied de l'éva »luation susdite, et moyennant le susdit change de cent dix pour cent, payés » seulement après le désarmement du vaisseau; lesdits articles seront aux risques, péril et fortune quelconque dudit sieur Marseille. Les sieurs Guis et Remuzat, d'ordre et pour compte de Marseille, firent assurer 800 liv. sur lesdits ustensiles. Le 15 avril 1761, le vaisseau Notre-Dame de Santé partit de Toulon. La crainte des Anglais qui le poursuivaient l'obligea de relâcher à Oran, ensuite à Carthagène; d'où, après un long séjour, il revint à Toulon.

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Marseille présenta requête contre le sieur Pinel, en restitution des ustensiles et argenterie dont l'usage avait été donné à la grosse, et en adjudication du change maritime stipulé. Le sieur Pinel prétendit que le voyage avait été rompu par force majeure, et déclara faire abandon. Marseille présenta contre le sieur Laval, son assureur, une requête en assistance de cause, aux fins que, dans le cas où l'abandon fait par le sieur Pinel serait admis, le sieur Laval fût condamné à payer la somme assurée. Le sieur Laval soutint qu'on n'était pas au cas du délaissement, et requit le paiement de la prime, tant contre Marseille que contre les sieurs Guis et Remuzat, qui avaient fait faire l'assurance.

Sentence du 22 décembre 1764, qui, « faisant droit à la requête de JeanJoseph Marseille, condamna Pierre Pinel à restituer par tout le jour audit > Marseille tous les ustensiles de cuisine et argenterie que ledit Marseille lui › avait donnés à retour de voyage, et détaillés dans l'état communiqué au › procès; autrement, et faute par ledit Pinel de remettre lesdits effets par » tout le jour, dès maintenant comme pour lors, et sans qu'il soit besoin › d'autre jugement, le condamne au paiement de 1,043 liv. 3 s. du prix desdits ustensiles et argenterie, ou au prix des articles desdits ustensiles › et argenterie qui n'auront pas été remis, sur le pied de la valeur convenue › dans le susdit état; comme aussi condamne ledit Pinel au paiement de la » somme de 1,247 liv. 6 s. 6 d., pour le montant du change maritime, avec in» térêts depuis la demeure, et dépens desdites deux qualités; le tout avec » contrainte par corps, sauf huitaine. Et ayant tel égard que de raison aux requêtes dudit Laval, des 26 juillet et 1. octobre 1762, condamne ledit » Marseille au paiement des deux tiers de la prime des assurances faites sur , ledit retour de voyage, avec intérêts, dépens de cette qualité et contrainte par › corps, sauf huitaine; et en outre, déclare l'adjudication de ladite prime › commune et exécutoire contre Remuzat et Guis, en principal, intérêt et ⚫ contrainte par corps, sauf huitaine, et à l'égard de la requête en assistance > en cause dudit Marseille, du 9 avril 1762, a mis ledit Laval hors de Cour et › de procès; condamne ledit Pinel aux dépens.

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Arrêt du Parlement d'Aix, rendu le 28 juin 1765, au rapport de M. de Mons, qui met l'appellation et ce dont est appel au néant, quant à ce; et › par nouveau jugement, ayant tel égard que de raison à la requête de Mar› seille, du 17 mai 1762, ordonne qu'il ne sera payé audit Marseille, par Pinel, › d'autre change maritime que le montant de la prime d'assurance que ledit ⚫ Marseille doit à Laval, sur le pied fixé par ladite sentence; les dépens de

ladite qualité compensés. Et pour le surplus des appellations de ladite sen»tence de la part de Pinel envers Marseille, ensemble, celle dudit Marseille » envers Laval, a mis lesdites appellations au néant; ordonne que ce dont » est appel tiendra son plein et entier effet; condamne Marscille à l'amende » du fol appel, et de même suite, faisant droit à la requête dudit Laval, du 22 mars 1765, en assistance en cause, déclare le présent arrêt commun et exécutoire contre Remuzat et Guis solidairement; condamne ledit Pinel aux dépens desdites qualités. ›

L'on voit par cet arrêt (dont je tâcherai de développer les motifs infrà, ch. 11, sect. 3, S 2), qu'on peut donner à la grosse toute autre chose que de l'argent, et qu'il est même permis de stipuler que le donneur continuera d'être propriétaire des effets par lui donnés à la grosse et à ses risques. Ce dernier cas embrasse deux contrats, qui, réunis ensemble, forment un louage à grosse aventure. Mon frère était l'avocat de Jean-Joseph Marseille.

CONFÉRENCE.

XXXIV. La jurisprudence a toujours été pour l'affirmative de la question proposée, et la doctrine d'Emérigon et de Pothier est toujours suivie. On peut donner à la grosse toute autre chose que de l'argent, et ce contrat peut être modifié par des pactes particuliers. Il est susceptible de toutes les choses dont l'est le contrat mutuum. Mais, dans l'usage, on ne donne véritablement que de l'argent.

CHAPITRE VI.

DU RISTOURNE EN MATIÈRE DE CONTRATS A LA GROSSE.

SOMMAIRE.

SECT. I. Du ristourne opéré par le défaut de risque.

S1. Point de risque, point de change maritime.

S 2. Peu importe que le preneur n'ait pu ou n'ait voulu charger des effets.

Le preneur peut se repentir et résoudre le contrat par son propre fait.

S 3. Le contrat n'est à la grosse qu'à proportion du chargé.

Change de terre.

Droit de signature des assureurs.

SECT. II. Du preneur infidèle.

S 1. Qui prend au-delà de son intérêt est-il présumé frauduleux ?

S 2. Peine du preneur frauduleux.

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Il doit restituer l'argent, malgré la perte du
navire?

Doit-il le change maritime?
Doit-il le change de terre?

Si le navire revient à bon port, le preneur
frauduleux doit-il payer le change mari-

time?

SECT. III. Preuve du charge.

S1. En cas de perte du navire, le preneur
doit prouver le chargé.

Le preneur doit-il courir le dixième ?
Si le preneur embarque l'argent avec soi.
Faut-il prouver l'emploi spécial?

Faut-il prouver que les deniers ont été fournis
avant le risque commencé ?

S 2. La preuve de l'utile emploi n'est jamais à la charge du donneur.

Le risque maritime est de l'essence du contrat à la grosse, ainsi qu'on l'a vu ci-dessus, ch. 1, sect. 3: il faut donc que l'argent ait été réellement employé à l'objet pour lequel il a été emprunté. Si l'emploi n'en a pas été fait, il n'y a point eu de risque; le contrat ne saurait subsister comme contrat de grosse; il est résolu de plein droit: Causâ non secutâ. Le défaut de départ du navire donne également lieu, suivant les cas, au ristourne du contrat; mais une fois que le risque a commencé, le contrat doit avoir tout l'effet que les circonstances peuvent comporter.

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