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Le donneur répond-il des mêmes

seur ?

331, dit que le con

risques que l'assu- trat à la grosse est sujet aux mêmes risques que la police d'assurance. M. Valin, art. 11, titre des contrats à la grosse, et art. 6, titre des assurances, et M. Pothier, no. 16, titre des contrats à la grosse, adoptent cette règle (sans préjudice des exceptions dont elle est susceptible).

Dans le présent chapitre, je me bornerai à faire quelques observations générales, au sujet des risques qui sont à la charge du donneur, et je renvoie au ch. 11 tout ce qui concerne la nullité ou extinction du contrat. Il y sera question du délaissement des effets sur lesquels les deniers ont été pris à la grosse.

CONFÉRENCE.

XXXIX. En général, le contrat à la grosse est sujet aux mêmes risques que la police d'assurance. Les risques dont le prêteur se charge sont ceux de tous les cas fortuits et fortunes de mer qui causeraient la perte des effets sur lesquels le prêt est fait, dans le tems et dans les lieux des risques. Le terme de cas fortuit comprend, observent Pothier et Valin, tous les accidens de force majeure dont sont chargés les assureurs, et qui sont détaillés par l'art. 26 đã

titre des assurances. Tout ce que nous avons dit, ajoute Pothier, par rapport aux assureurs, dans notre Traité du contrat d'assurance, reçoit application aux prêteurs à la grosse. Voyez Pothier, contrat à la grosse, no1. 16, 17 et 18, et Valin sur l'art. 11, titre des contrats à la grosse). L'art. 350 du Code de commerce a remplacé l'art. 26 de l'Ordonnance. Or, cet art. 350 met aux risques des assureurs « toutes pertes et dommages qui arrivent aux objets assurés par » tempête, naufrage, échouement, abordage fortuit, changement forcé de route, de voyage » et de vaisseau, par jet, feu, prise, pillage, arrêt par ordre de puissance, déclaration de » guerre, réprésailles, et généralement par toutes les autres fortunes de mer. »

Ainsi, il faut aussi dire que la perte qui arrive par ces divers accidens de force majeure, aux choses sur lesquelles le prêt à la grosse est affecté, est le risque auquel s'est soumis le prêteur, à la grosse, et que, par conséquent, toutes les fois que les objets de ce contrat ont péri par l'un de ces cas fortuits, le prêteur n'a rien à réclamer.

La commission du nouveau Code de commerce n'avait point d'abord pensé qu'il fût nécessaire de définir, comme l'Ordonnance, le cas qui serait ou ne serait pas fortuit, en matière de contrat à la grosse, parce qu'elle croyait qu'on s'en référerait naturellement à l'art. 550, des assurances. Mais considérant ensuite que l'esprit de chicane pourrait tirer avantage du silence de la loi nouvelle, en ce que l'intention de se référer à l'art. 550, qui ne parle que des assurances, n'était pas textuellement exprimée pour les contrats à la grosse, on crut devoir établir à ce dernier titre la disposition de l'art. 326, qui dispose: « Les déchets, diminutions et >> pertes qui arrivent par le vice propre de la chose, et les dommages causés par le fait de » l'emprunteur, ne sont point à la charge du prêteur.» Par là, il devient évident que les risques provenant des cas fortuits et fortunes de mer, sont, au contraire, à la charge du prêteur. — { Voyez Analyse des observations des tribunaux, pag. 84).

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SECTION I.

Pertes et Avaries occasionnées par fortune de mer.

LE Guidon de la mer, ch. 19, art. 5, décide que l'argent à profit n'est contribuable à aucune avarie (simple).

Cette décision a été adoptée par l'Ordonnance, art. 16, titre des contrats à la grosse. « Les donneurs à la grosse, est-il dit, ne contribueront point aux sim»ples avaries, ou dommages particuliers qui pourront arriver aux marchandises, s'il n'y a convention contraire. »

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Ainsi, pour que le donneur soit obligé de contribuer aux avaries simples, il faut qu'il s'y soit soumis par une convention expresse; tandis que l'assureur est soumis de droit à pareille contribution, si un pacte spécial ne l'en met pas à couvert. Vide mon Traité des assurances, ch. 12, sect. 39 et 40.

T. II.

67

$1.

Avaric simple.

$ 2.

Avarie grosse.

M. Pothier, n". 42 et 47, tâche de rendre raison de cette différence. Il dit que les assureurs s'obligent d'indemniser l'assuré de toutes pertes et dom› mages qui arriveront par fortune de mer sur les effets assurés; au lieu que › par le contrat de grosse, le prêteur ne contracte aucune obligation envers l'emprunteur. On peut ajouter que l'heureuse arrivée du navire forme la condition essentielle et caractérisque du contrat de grosse. Or, les avaries, simples n'influent en rien dans l'accomplissement de cette condition. Elles sont, par conséquent, étrangères au donneur, à moins qu'il n'en soit déclaré responsable par un pacte spécial.

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M. Valin, d. loco, paraît surpris de la décision de l'Ordonnance. Il observe que l'usage des contrats à la grosse serait aboli, si l'art. 16 n'eût permis de stipuler que le donneur serait contribuable aux avaries simples. Aussi, ajoute-t-il, n'en voit-on point qui ne dérogent à cet article, c'est-à-dire › sans une clause précise par laquelle le prêteur prend sur lui tous les ris» ques et fortunes de la mer, comme l'assureur. Parmi nous, je n'ai jamais vu de clause pareille, et les donneurs ne contribuent point aux avaries simples. (A l'exception de celles qui, occasionnées par l'innavigabilité ou l'échouement du navire, mettent le preneur hors d'état de remplir ses engagemens ). Vide infrà, ch. 11, sect. 1, § 5.

Le Guidon de la mer, ch. 19, art. 5, dit que « l'argent à profit n'est con> tribuable qu'aux rachats, compositions et jets faits pour la salvation du total, et pour le soulagement et l'évasion des dangers.

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L'Ordonnance, art. 16, titre des contrats à la grosse, décide également que les donneurs à la grosse contribueront à la décharge des preneurs aux grosses

> avaries, comme rachats, compositions, jet, mâts et cordages coupés pour >> le salut commun du navire et des marchandises.

Pourquoi cette différence entre les avaries simples et les avaries grosses, visà-vis du donneur? Je l'ai déjà dit, c'est parce que l'avarie simple (laquelle arrive par cas fortuit et sans le fait de l'homme) ne concourt en rien à l'accomplissement de la condition du contrat, et à l'arrivée du navire, au lieu que, sans le secours du rachat ou du jet, le navire ne serait jamais parvenu à bon port. S'il est donc vrai qu'on ait fait une dépense, ou souffert un dommage volontaire pour sauver votre contrat, et le rendre utile en votre faveur, il est juste que vous contribuiez à l'impense commune. Si vous refusez de vous soumettre à l'action negotiorum gestorum, intentée contre vous, remettez votre sort à la rapacité des pirates, ou à l'impétuosité de la tempête : Qui utiliter gessit negotia, dominum habet obligatum negotiorum gestorum. § 1, inst.

de oblig. quæ quasi ex contract. Lois 2 et 9, ff de negot. gest. Lois 3 et 5, ff de

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Voici comme parle M. Prevot de la Janés, dans ses Principes de la jurisprudence française, tit. 20, no. 556: Les donneurs à la grosse, dit-il, doivent contribuer à la décharge des preneurs, aux grosses avaries, comme rachats, compositions, jets pour le salut commun du navire et des marchandises; • car ce n'est qu'à ces pertes qu'ils doivent la conservation de leur argent, , qui, sans cela, aurait été perdu avec le vaisseau,

Il est évident que les mots, s'il n'y a convention contraire, ne se rapportent qu'à la seconde partie de l'art. 16, dans laquelle il est parlé des avaries simples. D'où il suit qu'il n'est pas permis au donneur de stipuler qu'il sera exempt de contribuer aux avaries grosses. Telle est la doctrine de M. Valin, d. loco, et de M. Pothier, n°. 46. Un pareil pacte est absolument nul et doit être rejeté, parce qu'il blesse l'équité naturelle et l'intérêt même du donneur, pour qui tout serait perdu, si le navire n'eût pas été sauvé.

La même considération ne saurait militer contre l'assureur, attendu que celui-ci est un fidejusseur qui n'est responsable des risques que relativement à son contrat, et vis-à-vis duquel il s'agit d'une exception toujours plus favorable que l'action même.

En 1776, le capitaine Jean-Baptiste-Joseph Reyne, commandant le vaisseau l'Heureux Joseph, reçut à la grosse, du sieur Jean-Baptiste Scipion Fabre, 16,000 liv., cumulativement sur corps et facultés dudit navire, d'entrée et sortie des lles françaises, au change de quinze pour cent, franc d'avarie. П reçut 4,000 liv. du sieur André Vaille, sur corps et facultés du même vaisseau, d'entrée et sortie, et au change de quinze pour cent, franc d'avarie et d'abandon, en cas d'innavigabilité. Il fit faire des assurances sur corps et cargaison, avec clause franc d'avarie, etc.

Le navire arriva heureusement à la Martinique. Il mit à la voile pour revenir à Marseille. Le 29 septembre 1777, il essuya un ouragan. Les mâts furent coupés. On fit jet. On aborda au Cap-Français, où le vaisseau fut déclaré innavigable. Les marchandises, transvasées dans un autre navire, arrivèrent à Marseille.

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Le capitaine Reyne présenta requête contre les propriétaires et consignataires du chargement du vaisseau l'Heureux Joseph, les assureurs sur le corps et facultés, et les donneurs à la grosse, en réglement d'avarie commune. Les sieurs Fabre et Vaille présentèrent requête contre le capitaine Reyne, en

$3. Pacte franc d'avarie,

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condamnation des sommes données à la grosse, du change maritime et ac

cessoires.

On se disputa long-tems pour savoir si la clause franc d'avarie était légitime vis-à-vis des donneurs, et s'il avait été loisible à Vale de stipuler de plus la franchise d'abandon, en cas d'innavigabilité.

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Première sentence du 15 mai 1778, qui, sans préjudice du droit des parties, ordonne les pièces portées dans trois jours, pour être statué sur » le tout et être procédé au réglement des avaries, s'il y échoit, sans retar»dation néanmoins du paiement des sommes à la grosse dues à Fabre et à • Vaille, en capital, change maritime et intérêts de terre, au paiement de quoi le capitaine Reyne sera contraint, même par corps. » Sentence définitive du 3 août 1779, qui,

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sans s'arrêter à la requête du capitaine Reyne, aux chefs concernant les assureurs sur facultés, les met » hors de Cour et de procès, avec dépens; et faisant droit aux autres chefs » de ladite requête, condamne, 1°. les donneurs à la grosse à contribuer, au » sou la livre, à l'avurie générale, tant sur les marchandises que sur le corps » du vaisseau l'Heureux Joseph, à la décharge du capitaine Reyne, avec dé» pens; 2°. condamne les assureurs sur le corps à contribuer à l'avarie géné› rale et aux avaries particulières souffertes par le vaisseau, aussi avec dél'abandon du vaisseau a été fait au Cap, par le capitaine, pens, attendu que l'abandon du vaisseau a été fait

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le 15 novembre 1777, et signifié aux assureurs sur le corps avec l'inventaire » de production, du 27 juillet 1778........ La même sentence déclara défini»tives les adjudications prononcées par la précédente sentence, en faveur » desdits Vaille et Fabre, pour le montant des billets de grosse, leur change ma» ritime et intérêts de terre. »

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M. Pazery, consulté sur cette sentence de la part des donneurs, répondit que leurs pactes franc d'avarie et d'abandon, en cas d'innavigabilité, étaient nuls et contraires à l'Ordonnance. En conséquence de cet avis, les donneurs acquiescèrent à la sentence. Les assureurs sur le corps, vis-à-vis desquels le délaissement n'avait pas été poursuivi, y acquiescèrent également.

Dans mon Traité des assurances, ch. 12, sect. 1, on a vu qu'il est permis aux assureurs de déterminer les risques dont ils seront garans, et d'exclure ceux dont ils ne veulent pas être responsables. Les Italiens admettent un pareil pacte dans les contrats de grosse. Casaregis, disc. 62, no. 2; disc. 64,

nos. 1 et suivans.

Ce pacte est réprouvé par Targa, ch. 32, no. 17 et 27, pag. 137, et ne serait pas admis parmi nous, malgré l'avis contraire de M. Pothier, n°. 24, titre des

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