Page images
PDF
EPUB

causes antérieures au voyage assuré. — (Arrêt de Rouen, du 14 mai 1824; voyez Dalloz, 1824, 2. part., pag. 170).

Mais les assureurs ne peuvent défalquer de la valeur assurée les sommes empruntées à la grosse, lorsque cet emprunt a été nécessité par les événemens survenus pendant le voyage qui a donné lieu à l'assurance, par le motif que l'emprunt a été contracté pour la conservation de la chose, et conséquemment dans l'intérêt des assureurs eux-mêmes. ( Arrêt du 17 février 1817; voyez Dalloz, 1817).

$ 1.

La loi interdum a

SECTION II.

Droit français au sujet des priviléges sur le navire et sur les

facultés.

Nous avons en divers cas adapté à nos usages les textes qui viennent d'être été adaptée à nos cités, ainsi qu'on le verra bientôt. Le privilege personnel dont parlent les lois

usages.

Le navire a-t-il suite par bypothè que?

[ocr errors]

romaines, est inconnu dans notre jurisprudence. Tout privilége emporte avec soi hypothèque tacite et privilégiée, du moins sur la chose qui en est l'objet. Livonière, Règles du droit, ch. 4, sect. 1, pag. 439, dit que l'hypothèque › commune, se règle par la date de l'obligation, et que le privilége se règle par la faveur de la cause, et l'emporte sur l'hypothèque commune, quoiqu'antérieure. »

[ocr errors]

Il n'est pas douteux que les navires ne soient meubles (1). Cleirac, pag. 399,

(1) Un arrêt rendu le 7 décembre 1674, par la Cour des comptes, aides et finances de Provence, rapporté dans Boniface, tom. 5, pag. 666, confirma une délibération de la communauté de Saint-Tropez, qui avait soumis à la taille les bâtimens de mer et les filets des pêcheurs.

M. Jullien, sur le Statut, tom. 2, pag. 293, rapporte des arrêts contraires rendus par la même Cour. La question se présenta de nouveau dans l'hypothèse suivante : Le capitaine Hermieu, commandant le brigantin le Diamant, partit de Saint-Tropez en 1774, pour faire la caravane en Levant. Son navire fut pris par les Anglais en 1780. Ce capitaine, revenu à SaintTropez, sa patrie, fut attaqué en paiement de la taille échue en 1779, au sujet de son navire. Il refusa de la payer, 1o. parce que son navire était devenu la proie des Anglais; 2°. parce que les bâtimens de mer sont des meubles incapables d'être mis à la taille, et qu'en Provence les tailles sont réelles et prédiales. Arrêt du 20 février 1782, rendu par la Cour des comptes, aides et finances de Provence, qui donna au capitaine Hermieu gain de cause, avec dépens. Plaidant M. Gaffier, pour la communauté de Saint-Tropez, et M. Guérin, pour le capitaine Hermieu.

n°. 11. Furgole, sur l'ordonnance de 1731, art. 23, pag. 100. Valin, art. 1, titre des navires, etc. D'où il suit qu'en bonne règle, ils n'ont pas suite par hypothèque. Brodeau, Coutume de Paris, art. 90, no. 4. Catelan, tom. 2, pag. 285. Graverol, pag. 159. Daix, pag. 683. En effet, par un édit du mois de décembre 1666, qu'on trouve dans Boniface, tom. 4, pag. 691, et qui fut donné sur les instances de notre chambre du commerce, il fut ordonné que tous navires seront censes meubles, sans qu'ils puissent être pris ni considérés comme immeubles, dans les ventes qui pourront en être faites, ni être chargés d'aucune hypothèque.

Cette règle a été modifiée par l'Ordonnance de 1681, titre des navires. Après avoir décidé, en l'art. 1, que tous navires et autres bâtimens de mer seront rẻputés meubles, elle ajoute, en l'art. 2: Seront néanmoins tous vaisseaux af» fectés aux dettes du vendeur, jusqu'à ce qu'ils aient fait un voyage sous le » nom et aux risques du nouvel acquéreur, si ce n'est qu'ils aient été vendus ▾ par décret. » L'art. 3 du même titre décide que « la vente d'un vaisseau » étant en voyage, ou faite sur son seing privé, ne pourra préjudicier aux » créanciers du vendeur. »

M. Valin fait de longues dissertations sur ces deux derniers articles. Mais, 1o. le navire vendu est affecté aux dettes du vendeur, jusques à ce qu'il ait mis à la voile sous le nom et aux risques du nouvel acquéreur.

2o. Puisque la formalité du décret est inconnue en Provence, les hypothèques des créanciers du vendeur subsistent, quand même le navire serait vendu aux enchères pardevant le lieutenant de l'amirauté; car, parmi nous, les enchères judiciaires, non précédées d'une instance générale de discussions, ne purgent pas les hypothèques.

3o. Si le navire est vendu aux enchères judiciaires, ou par contrat public, l'acheteur exclura les créanciers simplement chirographaires.

4. Une fois que le vaisseau est parti sous le nom et aux risques du nouvel acquéreur, toutes les dettes du vendeur sont effacées vis-à-vis du navire.

$2.

Le navire est af

5o. La vente faite en cours de voyage, ou faite sous signature privée avant le départ, ne peut préjudicier aux créanciers du vendeur, même chirographaires, lesquels viennent en concours avec l'acheteur qui en a payé le prix. Le navire, ses agrès et apparaux, armement, victuailles, même le fret, seront affectés par privilége aux principal et intérêts de l'argent donné sur le corps fecté aux donneurs et quille du vaisseau, pour les nécessités du voyage. Art. 7, titre des contrats à la grosse. Ce privilége est acquis au donneur, soit que les deniers aient été fournis aux armateurs eux-mêmes, soit qu'ils l'aient été au capitaine, dans

sur le corps.

Quid, si le navire ne met pas à la voile?

Le fret est affecté

les cas permis par l'art. 8, titre des contrats à la grosse, et ci-dessus expliqués au ch. 4.

Pour que ce privilége soit acquis au donneur, il suffit que les deniers aient été donnés de bonne foi sur le corps, pour les nécessités du voyage, quoique le voyage soit rompu, et que le navire ait été saisi avant d'avoir mis à la voile. Il est vrai que dans ce cas, il ne sera dû aucun change nautique, attendu le défaut de risque. Suprà, ch. 1, sect. 4. Mais le privilége ne laissera pas d'être acquis sur le corps, suivant les art. 7 et 8, titre des contrats à la grosse, dont la décision est générale.

Dans la section suivante, j'examinerai quel rang doit être donné à ce priaux donneurs sur le vilége. Dans mon Traité des assurances, ch. 17, sect. 9, j'ai examiné la question si le privilége du donneur s'étend sur le nolis déjà perçu dans le cours de la caravane.

corps.

Quid, si le preneur

dispensé de rapporter le fret?

Le pacte qui décharge l'assuré de rapporter le fret, a été autorisé par la sur le corps a été déclaration de 1779. Vide mon Traité des assurances, ch. 17, sect. 9. Je ne crois pas que ce pacte fût autorisé entre le donneur et le preneur. L'assurance est susceptible de toutes les conditions dont les parties veulent convenir. L'assureur peut ne se soumettre qu'à une partie des risques, et la déclaration de 1779 a permis à l'assuré de s'obliger, en cas de sinistre, à un abandon partiel. Mais la nature du contrat de grosse soumet le donneur à tout sinistre majeur sans exception, et même aux avaries grosses: d'où il suit, par réciprocité de raison, que les débris sauvés, et le fret dû au navire, sont affectés en entier au donneur sur le corps. Son argent a procuré l'être à la chose. Sans le secours de cet argent, l'entreprise maritime n'aurait pas eu lieu : d'où il suit que la dispense de rapporter le fret serait contraire à l'équité naturelle; elle rendrait, en certains cas, le naufrage fructueux au preneur. En un mot, il suffit que ce pacte n'ait pas été autorisé vis-à-vis du preneur, pour qu'on doive s'en tenir à la disposition du droit commun.

Le privilége a-t-il

Si les deniers ont été donnés au capitaine, pendant le voyage, pour les nélieu sur la totalité du cessités du navire, le privilége compétera au donneur sur la totalité du navire et du fret. Art. 7, titre des contrats à la grosse.

navire et du fret ?

Mais si les deniers ont été donnés au capitaine, dans le lieu de la demeure des propriétaires, sans leur consentement, le privilége ne compétera que sur la portion que le maître pourra avoir au vaisseau et au fret. Art. 8, titre des contrats à la grosse.

Si la fourniture a été faite au capitaine chargé par les propriétaires du soin

de gréer, radouber, ou construire le navire, le privilége des fournisseurs embrassera la totalité du vaisseau. Infrà, sect. 3.

Les deniers fournis à un des quirataires, ne sont affectés que sur sa portion du navire et du fret.

$3. Privilége du donneur sur les facultés.

Effets débarqués

Le chargement sera affecté, par privilége, au paiement des deniers pris pour le faire. Art. 7, titre des contrats à la grosse. Lorsque le prêt à la grosse a été fait pour l'aller et le retour, les retraits chargés volontairement dans le même navire, pour compte du preneur, sont soumis au même privilége. Pothier, no. 34. Stypmannus, part. 4, cap. 2, no. 20, pag. 378. Suprà, ch. 5, sect. 1, § 2. Le preneur n'est obligé de mettre des effets en risque, que jusqu'à concur- avant le sinistre. rence de la somme reçue à la grosse. S'il en met davantage, il accroît volontairement le gage du donneur; mais cet accroissement volontaire de sa part n'est pas irrévocable. Il dépend du preneur, dans le cours du voyage, de décharger à terre ce surcroît de marchandises, sans que le donneur puisse jamais s'en plaindre.

[ocr errors]

L'art. 14, titre des contrats à la grosse, dit que « le chargeur qui aura pris » de l'argent à la grosse sur marchandises, ne sera point libéré par la perte du > navire et de son chargement, s'il ne justifie qu'il y avait pour son compte des effets jusques à concurrence de pareille somme. » D'où il suit que si le preneur justifie que lors du sinistre il y avait pour son compte des effets jusques à concurrence de la somme reçue à la grosse, il est libéré de toute obligation, et le contrat sera réduit vis-à-vis du donneur, à la valeur des effets sauvés du naufrage même.

§ 4. Privilége du donfacultés.

Le donneur n'est tenu des fortunes de mer qu'à l'égard des marchandises qui, lors du sinistre, se trouvaient dans le navire : Suscipiens periculum pro neur sur corps et iis solùm tenetur, quæ tempore periculi aut naufragii in navi fuerunt. Loccenius, lib. 2, cap. 5, no. 7, pag. 982. On doit donc s'arrêter à ce seul et unique objet, Vide mon Traité des assurances, ch. 17, sect. 8, § 2.

Le donneur sur corps et facultés jouit d'un privilége solidaire sur l'un et sur l'autre. Le corps et les facultés forment une seule masse vis-à-vis de lui. Le preneur, par une conjonction re et verbis, n'a établi qu'un seul capital de l'intérêt qu'il avait au navire et aux marchandises. Ce capital est affecté par privilége et sans division au donneur, qui peut se payer sur l'un ou sur l'autre des deux objets, ou sur les deux pris ensemble. Vide mon Traité des assurances, ch. 17, sect. 14.

$ 5.

Le privilége com.

Le privilége est accordé au donneur pour le principal, l'intérêt et autres accessoires. Art. 7, titre des contrats à la grosse. Ibiq. Valin, au titre de la saisie, pète pour le capital

et

pour le change.

art. 16. Pothier, n°. 48 et 57. En effet, l'obligation pour le principal et les intérêts naissant d'une même cause et d'un même contrat, le même privilége compète pour le tout. Non tantùm sortis, sed etiam usurarum potior est, dit la loi 18, ff qui potior in pign. Ibiq. Cujas, lib. 1, resp. Scævola. Charondas, resp. 202, folio 266. Brodeau, sur Louet, v°. dépens, n°. 2, tom. 1, pag. 538. Le privilége n'en compète pas moins au donneur, quoique le billet soit pète, quoique le bil privé. Basnage, des hypothèques, pag. 318. Valin sur l'art. 16, titre de la saisie. Suprà, ch. 2, sect. 1, et ch. 4, sect. 5.

$ 6.

Le privilege com

let soit privé.

Et quoique le por teur ne prouve pas l'utile emploi.

Le donneur, pour avoir privilége vis-à-vis du tiers, n'est pas obligé de prouver l'utile emploi. Il suffit que son titre soit en règle. Valin, art. 7, titre des contrats à la grosse. Pothier, n°. 52. Suprà, ch. 4, sect. 7, § 4, et ch. 6, sect. 3, § 2.

CONFERENCE.

LXI. Depuis long-tems les navires sont considérés comme meubles parmi nous. Les biens sont meubles par leur nature, ou par la détermination de la loi. (Art. 527 du Code civil). Sont meubles par leur nature les corps qui peuvent se transporter d'un lieu à un autre, soit par eux-mêmes, soit par l'effet d'une force étrangère. (Art. 528 du Code civil). Ainsi, sont meubles par leur nature les bateaux, bois, navires, etc. (Art. 531 du Code civil).

Néanmoins, les navires et autres bâtimens de mer sont affectés aux dettes du vendeur, et spécialement à celles que la loi déclare privilégiées. (Art. 190 du Code de commerce). Aujourd'hui, comme autrefois, les navires ne sont susceptibles d'aucun hypothèque, et cette règle ne reçoit aucune exception. Les navires ne sont plus que passifs de priviléges qui sont indépendans de l'hypothèque.

En effet, il faut bien faire attention que l'art. 190 porte que les navires sont affectés aux dettes du vendeur, et spécialement à celles que la loi déclare privilégiées, et que la loi se sert du mot affectés, et non de celui hypothéqués. L'effet de l'affectation est de donner au créancier, tant chirographaire que privilégié, le droit de poursuivre l'objet affecté entre les mains des tiers détenteurs, dans certains cas, et sous certaines conditions, et cet effet a lieu à l'égard des navires. L'effet de l'hypothèque serait, en outre, d'établir un ordre de préférence résultant de l'ancienneté de la créance; ce qui n'a pas lieu ici. La loi ne reconnaît que deux sortes de créanciers sur les navires, les privilégiés, dont le rang est fixé par l'art. 191 du Code de commerce, et les non privilégiés, qui sont payés par contribution entre eux.

Ainsi, les navires, quoique réputés meubles, sont, comme tous les autres biens du débiteur, affectés au paiement de ses dettes. Ils sont le gage commun de ses créanciers, qui peuvent les faire vendre suivant les formalités qui sont prescrites par le tit. 2 du liv. 2 du Code de commerce, et s'en distribuer le prix au prorata de leurs créances, sauf les causes légitimes de préférences. (Art. 2093 du Code civil).

Les causes légitimes de préférence sont ici ce que l'on appelle en droit les priviléges. (Voyez les art. 2094, 2095 et 2096 ).

« PreviousContinue »