Page images
PDF
EPUB

une proportion fort considérable. Quant aux exportations, elles se composaient, d'après le relevé des douanes, en 1824, de valeurs présumées d'environ 8,118,700 piastres. Indépendamment des motifs naturels qui donnent lieu de croire à l'accroissement ultérieur de ce mouvement commercial, de nouvelles probabilités, à cet égard, se trouvent dans les vues de bien public dont paraît animée l'autorité locale.

L'Angleterre est la nation dont l'influence commerciale a prévalu jusqu'à ce jour dans cette république, et cette supériorité lui est acquise, de même que dans toutes les autres contrées de l'Amérique du sud, par l'immensité de ses capitaux et par l'activité de ses commerçans. Cependant leur suprématie, et c'est un fait remarquable, n'a pas suivi le mouvement de progression du commerce en général. En 1822, ils entraient pour moitié dans la masse des importations, que l'on a vues s'être élevées à 11,000,000 de piastres. Aujourd'hui que cette masse a reçu de l'accroissement, il semblerait que leur part fùt restée à peu près la même, et qu'ainsi, les progrès du commerce eussent profité aux autres peuples, c'est-à-dire aux Français, aux Allemands et aux Américains du nord.

En effet, les Français trouvent de grands élémens de succès à Buenos-Ayres, dans la disposition naturelle des esprits. Cette ville, qui approche de la civilisation des capitales européennes, donne sur beaucoup de points la préférence à nos goûts et à nos usages. Tous ceux qui l'ont visitée n'élèvent qu'une voix sur les bons traitemens avec lesquels ils y ont été reçus, et sur la faveur avec laquelle des établissemens français y seraient accueillis. Tout porte à croire que ces établissemens commerciaux ne pourraient que prospérer sous la double influence de la prédilection des habitans, et des avantages de la position centrale de Buenos-Ayres dans cette partie de l'Amérique, dont elle semble destinée à devenir l'entrepôt, lorsque les excursions des Indiens seront réprimées, que la guerre du Brésil sera terminée, et que les communications intérieures seront devenues parfaitement libres. Si le pays qui l'entoure est loin encore d'offrir à l'industrie étrangère les mêmes ressources que la ville même, on doit tout attendre de l'influence de l'exemple, secondée par les progrès de la civilisation, qui fait naître les besoins en même tems que la faculté de les satisfaire.

Au surplus, l'autorité locale annonce par tous ses actes l'intention d'entretenir avec toutes les nations de l'Europe des relations également amicales. Elles participent toutes, sur le pied d'une parfaite égalité, aux prérogatives comme aux charges du commerce étranger.

Tout semble donc se réunir pour appeler vers cette contrée l'attention des spéculateurs européens. Cependant, il ne faudrait pas se faire une idée trop exagérée de sa consommation actuelle, en produits manufacturés; il faudrait procéder avec une certaine réserve, quant au nombre et à l'importance des chargemens.

D'un autre côté, des personnes instruites ont pensé que les voyages à Buenos-Ayres devaient être indépendans de ceux que l'on entreprend à la côte sud-est, attendu que loute la rivière de Rio de la Plata est sujette à des flux continuels et à des coups de

vent qui rendent la navigation dangereuse, ou du moins fort lente, tant pour l'aller

[blocks in formation]

Enfin, toutes les saisons ne sont pas également favorables pour les expéditions à Monte-Video. C'est pendant l'été que les retours offrent le plus d'avantages, attendu que c'est l'époque à laquelle les grands approvisionnemens de peaux brutes arrivent de l'intérieur des terres.

Informations sur le choix des cargaisons.

Les principaux articles d'importation sont,

1o. Les draps très-fins ou très-ordinaires (les qualités moyennes ne sont pas demandées); les grandes largeurs sont préférées; les ballots doivent se composer, neuf de couleur bleue, et trois en noire.

2o. Les draps de casimirs de couleurs variées, qui doivent être expédiés en ballots de vingt pièces.

3. Les toiles blanches, les toiles bleues, les toiles à voiles.

4°. Le linge confectionné, c'est-à-dire les chemises et les culottes larges.

5o. Les gilets de coton tricotés, et les bretelles de coton.

6°. Les souliers, mais ceux de qualité inférieure et pour l'usage des ouvriers.

7. La verrerie de première qualité, les grandes carafes pour l'eau, les verres à vin et à bière, sont les principaux articles à envoyer; les verres à vin sont préférés en forme de cloché. On peut aussi envoyer des verres dorés, des vases à fleurs, tant en porcelaine qu'en albâtre, du goût le plus nouveau. Quant aux verres à vitre, ils doivent être expédiés en petite quantité, et avoir les dimensions de dix-huit, dix-sept, seize, quinze, quatorze pouces de longueur, sur vingt, dix-huit, dix-sept, quatorze, treize, douze de largeur.

8°. Les armes, c'est-à-dire les pistolets et les sabres. Les armes à feu doivent être légères, avec de bonnes batteries; les sabres doivent être à la hussarde, avec des fourreaux en fer.

9°. Même l'eau de Cologne en petite caisse.

10°. Les soieries de France, qui sont en général très-recherchées, et qui doivent être, autant que possible, en paquets d'un faible volume.

Les armateurs auront soin de disposer dans un côté particulier les échantillons de tous les articles de la cargaison, afin qu'on puisse les débarquer aussitôt après l'arrivée.

Mais indépendamment de ces principaux articles d'importation, tous autres articles de marchandises sont susceptibles d'être envoyés à Buenos-Ayres, vif- argent, bois de charpente, instrumens pour l'agriculture, les arts et les sciences, gravures, tableaux, statues, melasse pour distiller, chaux, briques, charbon, bijouterie d'or et d'argent, armes, pierres à fusil, poudre à tirer, poix, goudron, cordages, sucre, café, thé, meu

bles, glaces, voitures, sellerie, habillemens, bottes, vins, bière, cidre, liqueurs, tabac, etc. etc. Les marchandises importées peuvent être mises en entrepôt pendant six mois, terme après lequel elles doivent acquitter les droits ou être réexportées.

Marchandises de retour.

QUANT aux marchandises de retour, ce sont les cuirs de bœuf, vache et cheval, la viande salée, les peaux de chincilla, de tigre et de loup, les crins, les cornes et les plumes d'autruche, les laines de vigogne et de gunacos.

Navigation.

Le droit de tonnage, pour les bâtimens chargés, est de deux réaux par tonneau à l'entrée, et autant à la sortie, y compris les droits de jaugeage, balin, et tous autres, excepté ceux de déclarations à la douane, qui sont très-faibles. Les bâtimens sur lest ne paient que moitié.

Au reste, nous ne donnons point le tarif de tous les droits perçus sur chaque article de marchandises à l'entrée et à la sortie, parce que ces droits peuvent changer, suivant les circonstances et les besoins du Gouvernement, et d'après les traités de commerce passés avec les puissances étrangères.

BRÉSIL.

Le Brésil, borné au nord par le fleuve des Amazones, à l'est par l'Océan atlantique, au sud par le Rio de la Plata, et à l'ouest par le Paraguay et le Pérou; le Brésil, qui a huit cent soixante-quinze lieues de long et six cent vingt-cinq lieues de large, est un pays où l'on cultive avec succès toutes les différentes productions de la terre. Il n'existe peutêtre pas au monde de contrée où le climat soit plus beau et le sol plus fertile que ce grand pays de l'Amérique méridionale. Sa population, évaluée à environ deux millions cinq cent mille habitans, ne répond pas à son étendue.

On connaît assez en Europe toutes les ressources que le Brésil pourra offrir un jour au commerce extérieur, sous le double rapport de la consommation de nos marchandises et de l'abondance des objets d'échange que produit son territoire. Cependant, ce pays ne s'avance qu'à pas lents, au milieu de ses discordes civiles et de ses guerres avec ses voisins, vers l'état de prospérité auquel tant d'avantages naturels lui donnent le droit de prétendre.

Une vérité qui ressort de l'état moral de la contrée, c'est que les Brésiliens, par une conséquence de leurs prétentions à l'indépendance politique, ne consultent, quant à

leurs rapports commerciaux, que les avantages matériels, qui offrent naturellement de leur part un traitement uniforme à tous les étrangers.

Les Anglais, au moyen de conventions préexistantes, ont pu devancer leurs rivaux dans plusieurs branches de l'approvisionnement du Brésil, et il est de fait que leur influence prévaut jusqu'à ce jour sur ce marché.

Après eux, la marine marchande des Américains du nord a dû quelque succès à l'interruption des rapports avec le Portugal. C'est, en effet, le pavillon des Etats-Unis qui est en possession de transporter au Brésil les productions de son ancienne métropole.

Quant au commerce français, il est favorisé au Brésil, comme partout ailleurs, dans l'Amérique du sud, par la bienveillance des habitans et des personnes exerçant l'autorité. Mais deux causes principales s'opposent à l'essor qu'il pourrait prendre à la faveur de la bonne réputation de nos produits et de la préférence que les gens du pays leur ac

cordent.

La première cause, c'est, il faut le dire, la déloyauté de certains pacotilleurs qui, par la mauvaise qualité de leurs marchandises, ont produit chez un grand nombre d'acheteurs des sentimens de défiance et de dégoût. La seconde cause, c'est le défaut d'établissement de quelques maisons de commerce françaises dans les principaux points du Brésil. Saint-Louis de Maragnon, par exemple, appelle un entrepôt de marchandises françaises dans l'intérieur du pays. Cet établissement aurait d'heureux résultats pour le développement de nos relations, et serait très-profitable à ses auteurs. On cite un négociant français qui, étant venu se fixer à Saint-Louis avec un capital de 150,000 fr., paraît avoir réalisé dans le terme de peu de mois un bénéfice de 70,000 fr.

Informations sur le choix des cargaisons.

LES modes, la bijouterie, les meubles précieux, les chapeaux, les souliers, les soieries sur-tout, sont les articles que la France peut envoyer avec avantage dans les diverses provinces du Brésil. Nous n'avons pas encore de rivaux pour les modes; mais si l'on continue à n'envoyer que des rebuts de magasins, cette prépondérance sera bientôt perdue. Les savons de Marseille obtiendraient la préférence dans ce pays sur les savons anglais, si l'on pouvait en abaisser le prix.

La morue serait un article d'une grande importance, sous le rapport de la navigation à laquelle elle donne lieu. Importée au Brésil depuis octobre jusqu'en mai, elle se vend au prix moyen de 50 fr. les cent quatorze livres, poids de marc.

[ocr errors]

Les objets de France qui conviennent particulièrement dans la capitainerie du Para, l'embouchure orientale de la rivière des Amazones, sont les draps, les soieries, les rouenneries, dont les besoins se font souvent sentir par la rare apparition de navires français dans cette province, où l'on prendrait en échange du cacao, du café, de la vanille, du sucre, du coton. Ces articles offrent des bénéfices certains.

Si le Brésil reçoit une quantité remarquable de toiles fabriquées chez les Anglais, la France pourrait, pour cet article, lutter avantageusement avec l'Angleterre, en adoptant le mode de fabrication imaginé par elle. C'est par la légèreté des tissus de leurs indiennes que les Anglais peuvent établir leurs marchandises à un prix très-modique. Cependant, ils reconnaissent la supériorité de nos toiles de bonne qualité, car ils en fabriquent au timbre de nos manufactures. On cite une maison anglaise de Saint-Louis de Maragnon qui a frété un bâtiment au Hâvre, n'hésitant pas à faire venir une cargaison d'objets de nos manufactures dans un moment où leurs magasins étaient encombrés de marchandises anglaises.

Un nouveau genre de papiers nommé almasse a parfaitement réussi dans la consom

mation.

On observera enfin qu'en général tous les objets de fabrique française, par l'élégance des dessins et le fini des tissus, l'emportent sur ceux des autres nations; mais que travaillés avec trop de soin, ils ne peuvent être livrés au même prix que les objets anglais.

Si ceux-ci sont de moins de durée, cette durée est suffisante dans un pays où le changement plaît, et où les femmes mettent du prix à conserver une immense quantité de

toilette.

Nous ne parlerons point non plus du tarif des douanes, dont les pratiques sont tellement variables, abusives et arbitraires, qu'il en résulte des inconvéniens graves pour le commerce français, au point qu'ils ont nécessité des représentations de la part des ministres du roi. Le gouvernement local a donné des ordres positifs pour que les intérêts des négocians français fussent ménagés autant que peuvent le permettre les réglemens brésiliens, et de prochaines améliorations dans ces réglemens ont été annoncées dès le 16 novembre 1824, par un décret publié à Rio-Janeiro.

LA COLOMBIE.

LA Colombie, nouvelle république de l'Amérique méridionale, qui se compose de l'ancienne vice-royauté de Vénézuella, du royaume de la Nouvelle-Grenade, y compris l'isthme de Panama, et des provinces de Cumana, de Gyanna et de Maracaybo, s'étend d'un côté, depuis la mer des Caraïbes jusqu'aux frontières du Pérou, au fleuve des Amazones et aux rivières Noire et Blanche, et de l'autre, depuis l'Atlantique jusqu'à l'Océan pacifique. Ces diverses provinces se sont réunies en décembre 1819, sous un même gouvernement, qui prit le nom de république de Colombie. Sa capitale est SantaFé de Bogota, qui jusqu'ici a été aussi le siége du gouvernement. Les documens officiels publiés par le gouvernement du pays, en portent la population à deux millions six cent quarante-quatre mille six cents âmes.

Le gouvernement de cette république s'est occupé d'abord d'opérer les améliorations qu'on peut se promettre de la fertilité de la contrée et de sa position géographique, en

« PreviousContinue »