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Cette décision (beaucoup douteuse, considérée en elle-même) n'a pas lieu, lorsque la clause de fairé échelle a été stipulée. Cleirac, Guidon de la mer ch. 2, art. 1, entend par escale, les ports où le navire touche pour décharger partie de la marchandise, ou pour la recevoir d'où il suit que le risque court non seulement à l'égard des marchandises chargées au lieu du départ du vaisseau, mais encore à l'égard de celles qui sont chargées dans les ports de relâche. Pothier, n°. 63, titre des assurances.

Cela est si vrai, que l'assurance est légitime, quoique l'entier chargement L'entier chargeassuré ait été fait dans un lieu d'échelle.

Au ch. 12, sect. 20, j'ai rapporté l'arrêt rendu en 1746, en faveur des sieurs Arnaud, Lamagnière et Bernard Laparade, de Bayonne.

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La chambre du commerce du pays d'Aunis avait donné un parère conçu en ces termes : Il est certain que l'assurance porte sur les marchandises › chargées à Saint-Sébastien, comme sur celles qui auraient été prises à Bayonne; la raison en est, que la faculté accordée indéfiniment au capitaine, de faire toutes échelles de route, lui a donné le droit d'y négocier et d'y faire des achats. L'obligation de désigner le lieu du chargement, portée par l'art. 3, se trouve remplie par la permission de faire échelle. Les échelles » où le navire s'arrête, deviennent le lieu du chargement; et il y est très-lit› téralement exprimé, quoique sous un nom générique. » La maxime attestée par ce parère n'est pas susceptible de doute.

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Autre arrêt. Les sieurs Vague père et fils firent assurer 24,000 liv., de sortie de Vinaros jusqu'à Marseille, sur les facultés du canary le Saint-François, capitaine Durand, touchant et faisant échelle en tous les lieux et endroits que bon semblera au capitaine. Le navire partit vide de Vinaros, port situé dans le royaume de Valence. Il prit son chargement à Alcanar, rade de la principauté de Catalogne. Pendant sa route, il fit naufrage. Arrêt du 14 juin 1779, au rapport de M. de Franc, qui condamna les assureurs à payer la perte.

Si le navire touche à quelque port dans sa route, et que le capitaine y décharge des marchandises pour en prendre d'autres, ces dernières marchandises sont subrogées aux premières. Les assureurs en courent les risques comme de celles qui sont restées dans le navire. Ainsi jugé par les deux sentences de notre amirauté, que M. Valin rapporte sur l'art. 27, titre des assurances, de l'Ordonnance.

Il y a lieu à l'avarie grosse, si les marchandises nouvellement chargées en une échelle, sont jetées à la mer pour le salut commun, parce qu'il s'était

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ment peut-il être fait dans un lieu de relâche ?

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$ 3.

Si l'assuré a déchargé en une échel

chandises assurées,

déjà opéré une espèce de société entre ces márchandises et les premières. Weytsen, S 29. (Vide suprà, ch. 12, sect. 42, §.4).

En 1761, la question suivante me fut proposée :

Jacques a fait faire diverses assurances sur le corps et facultés du vaisseau le partie de ses marle Colibry; les unes, d'entrée et sortie des Iles françaises, jusqu'à Cadix et le risque se conso- Bordeaux, et les autres, de sortie seulement desdites Iles jusqu'à Cadix ou Bordeaux. Le tout franc d'avarie, avec la clause de pouvoir faire échelle.

lide-t-il dans celles laissées à bord?

Le vaisseau à son retour, a relâché à Saint-Ander, côte de Biscaye, éloigné d'environ soixante lieues de Bordeaux.

L'assuré est-il en droit de faire décharger à Saint-Ander partie de ses marchandises, de n'en laisser dans le bord que la valeur qu'il faut pour faire face aux assurances, et ordonner au capitaine de continuer le voyage jusqu'à Bordeaux? Les assureurs pourraient-ils, en cas de sinistre, se plaindre de cette opération?

Je répondis que les assureurs ne pourraient se plaindre de rien, pourvu que, dans le navire, il restât des marchandises capables de fournir l'aliment du risque.

Cette détermination est établie sur une foule d'articles de l'Ordonnance maritime. L'art. 22, titre des assurances, défend de faire assurer des effets audelà de leur valeur. Les art. 24 et 25 parlent des cas où la police monte ou ne monte pas à la valeur des effets chargés. Les art. 23, 54 et 55, parlent encore des cas où la police excède la valeur des effets assurés. Enfin, l'art. 26 décide que « les assureurs sur le chargement ne pourront être contraints au paie› ment des sommes par eux assurées, que jusqu'à concurrence de la valeur › des effets, dont l'assuré justifiera le chargement et la perte. »

Il suffit donc, dans tous ces cas, que l'assuré justifie qu'il y avait, dans le navire, des marchandises jusqu'à concurrence des sommes assurées. D'où il suit que, suivant l'esprit de l'Ordonnance, peu importe que dans le cours du voyage, partie des marchandises aient été déchargées à terre, pourvu que, dans le navire, il en reste assez pour faire face aux assurances.

La clause qui permet au capitaine de faire échelle, lui défère le droit de relâcher dans les ports de la route, pour y décharger partie de la marchandise, ou pour en recevoir. C'est ainsi que parle Cleirac, Guidor de la mer, ch. 2, n°. 1. Et par conséquent, l'assurance qui contient une pareille clause, subsiste en son entier, quoique le découvert ait été déchargé dans le cours du voyage

assuré.

M. Valin, art. 36, titre des assurances, agite fort au long la même question.

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Jean, de Marseille, dit-il, s'est fait assurer 1,000 liv. sur les facultés de son › vaisseau, de sortie de l'Amérique jusqu'à Marseille. Le vaisseau arrive à Ca, dix. Jean, qui y avait des effets pour 3,000 liv., en fait décharger à Cadix les deux tiers, et laisse aux risques de l'assureur l'autre tiers dans le vais› seau, jusqu'à l'arrivée du navire à Marseille. L'assureur prétend qu'au moyen › de la décharge faite à Cadix, des deux tiers du chargement, il a gagné les. › deux tiers de la prime, attendu qu'il était assureur du tiers de la totalite › de ce chargement; qu'ainsi il ne courait plus risque que du tiers des 1,000 liv. › restées dans le navire. » L'auteur se détermine pour l'assuré, et condamne l'idée de l'assureur, vis-à-vis duquel il ne s'agit jamais que d'un risque de 1,000 liv., soit que ce risque se répande sur la totalité du chargement, soit qu'il soit borné à ce qui reste dans le navire après la relâche. Il ajoute que si la question était décidée autrement, il en résulterait de très-fâcheuses conséquences pour le commerce qui se fait par escales. Un capitaine s'arrête en tous les endroits qui conviennent le mieux à l'intérêt de ses armateurs. Il faudrait donc que la prime fût acquise aux assureurs, à proportion des effets déchargés d'escale en escale, jusqu'à ce que le navire fût arrivé au lieu de son reste. Ce qui serait aussi injuste qu'impraticable.

Supposons qu'après avoir chargé dans un navire qui est dans notre port, des marchandises de la valeur, par exemple, de 3,000 fiv., je me fasse assurer pareille somme sur les facultés qui sont ou seront chargées dans ce navire. Il est sensible qu'en l'état des choses, cette assurance ne porterait que sur les effets que j'ai chargés. Mais si je charge de nouveaux effets, l'assurance déjà faite les embrassera également, jusqu'à la concurrence des 3,000 liv.

Or, s'il m'est permis d'augmenter le chargement, il m'est permis de le diminuer, pourvu que le risque de l'assurance ne soit point aggravé.

Tous les jours nos caravaneurs en Levant chargent et déchargent des marchandises dans les diverses échelles qu'ils font. En cas de sinistre, les assureurs se bornent à examiner si les effets qui, lors de la perte, étaient dans le navire, se montent à la valeur assurée. S'ils se montent à cette valeur, ils paient la perte, sans s'enquérir des effets déchargés à terre dans les relâches intermédiaires.

M. Pothier, no. 80, des assurances, soutient la même thèse. J'ai fait assurer, dit-il, 45,000 liv. sur un chargement qui est de valeur de........ 60,000 liv. Dans le cours du voyage, je retire du vaisseau des effets pour.. 15,000

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L'assureur court-il le risque du total des marchandises restantes ?

Il n'y a pas lieu, ajoute cet auteur, à la question, dans le cas de la perte totale du chargement, puisque, dans le cas d'une perte totale, soit que

→ l'assuré eût retiré partie des marchandises, soit qu'il ne l'eût pas retirée, > l'assureur devrait toujours la même somme de 45,000 liv. Il y a lieu à la question dans le cas des pertes particulières et avaries. L'assureur a intérêt, » pour ne pas les supporter seul, que la partie non assurée reste dans le › vaisseau, afin de partager ces pertes et avaries avec l'assuré ou avec un second assureur, à qui l'assuré aurait fait assurer cette partie qui restait à

» assurer.

. Cet intérêt qu'a l'assureur, que la partie qu'il n'a pas assurée reste dans » le navire, lui fournit-il un moyen suffisant pour soutenir que, dans le cas auquel l'assuré l'a retirée du vaisseau, il ne doit supporter les pertes et › avaries survenues depuis, que pour la même part qu'il les aurait supportées, si cette partie n'eût pas été retirée? Valin, sur l'art. 36, tient la négative. La raison est que ce n'est qu'ex accidenti que l'assureur eût partagé » les pertes et avaries avec l'assuré, si la partie qu'il n'a pas assurée fût restée » dans le navire; l'assuré n'est pas obligé envers lui de l'y laisser, et il ne s'est › ́pas interdit la faculté de débiter partie de ses marchandises dans le cours ⚫ de son voyage, dans les ports où le navire relâcherait. L'assureur n'est donc » pas fondé à refuser de porter seul les pertes et avaries survenues depuis, lorsqu'il n'y avait plus dans le vaisseau que la partic assurée. »

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Cette question se présenta parmi nous, au sujet d'un contrat à la grosse, Lambert père et fils, officiers de la frégate l'Aigle, capitaine Bonnegrace, avaient pris du sieur Simon Gilly 3,800 liv. à la grosse, sur les facultés de ladite frégate, d'entrée à l'île Maurice, et de sortie jusqu'à Lorient, moyennant le change maritime de deux pour cent par mois. La frégate arriva heureusement à l'île Maurice, où, après que la plus grande partie des effets fut déchargée à-terre, le navire périt. Sentence rendue par notre amirauté, le 17 mai 1776, qui condamna les preneurs au paiement du capital et du change maritime, sous la déduction du montant des effets que les preneurs justifieraient s'être trouvés à bord pour leur compte, lors du naufrage.

Il fut décidé par cette sentence, 1o. que le droit du donneur est réduit aux seuls effets qui, lors du sinistre, se trouvent matériellement dans le navire même, sans qu'il ait aucun privilége réel sur les effets auparavant déchargés terre en cours de voyage;

2o. Que, si la somme due pour le capital et le change maritime excède

le

la valeur des effets absorbés par le sinistre, cet excédant est dû par preneur, lequel, en déchargeant à terre partie de ses effets, a fait cesser à cet égard le risque du donneur;

3°. Que si, lors du sinistre, l'entier aliment du risque s'était trouvé dans le navire, le donneur n'aurait rien à demander, et ne pourrait révendiquer la partie des effets déchargés à terre dans un tems utile, parce que cette partie des effets lui était devenue étrangère. Vide infrà, ch. 17, sect. 8.

4. Il suit de ce qui vient d'être dit, qu'il est superflu de stipuler la permission de décharger des marchandises dans les diverses escales que le navire aura faites. M. Valin, art. 36, nous apprend que, pour prévenir les contestations, les négocians de la Rochelle imaginèrent cette clause; mais elle est implicitement comprise dans celle de faire échelle. Les dissertations insérées dans le Mercure de France, en août et octobre 1756, et dont M. Valin fait l'analyse, étaient des essais toujours louables et très-propres à fournir des lumières.

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5°. Il suit encore des mêmes principes, qu'on doit rejeter la distinction qui fut suggérée à M. Pothier, et dont il parle en l'endroit cité, n°. 8o. « J'ai en› tendu, dit-il, faire à cet égard une distinction qui m'a paru assez plausible. Lorsque c'est dans le cours du voyage, et pour l'intérêt de son commerce, » que l'assuré a retiré une partie de ses marchandises pour les débiter dans › les ports où le navire relâchait, l'assureur ne peut pas s'en plaindre. Mais » si le navire, étant prêt à arriver au port de sa destination, l'assuré avait fait décharger partie de ses marchandises, dans la vue uniquement de soustraire au danger des avaries qu'il y avait lieu de craindre la partie non assurée, et › de faire tomber en entier ces avaries sur la partie assurées en ce cas, on pour» rait dire que l'assureur ne doit porter dans l'avarie que la même part qu'il › eût portée, si la partie qui eût été retirée fût restée dans le navire. »

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En supposant que ce cas métaphysique arrivât jamais, je pense qu'on devrait se déterminer contre les assureurs. Il est libre au marchand de mettre son découvert en lieu de sûreté, et de laisser dans le navire la seule portion assurée; car il n'avait eu recours à l'assurance que pour se garantir des risques maritimes, et il n'avait contracté avec ses assureurs aucune société proprement dite. En agissant de la sorte, il a usé de son droit: Nullus videtur dolo facere, qui jure suo utitur. Loi 55, ff de regul. jur.

CONFÉRENCE.

CLXV. Quoiqu'en règle générale, l'assurance sur des marchandises à prendre dans un lieu désigné soit nulle, si elles sont chargées ailleurs, cependant nous croyons que cette décision

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