Page images
PDF
EPUB

finances, le premier médecin de S. A. et plusieurs autres officiers supérieurs sont chrétiens: parmi les payeurs, les trésoriers et les employés de tous grades dans les diverses administrations, on compte des chrétiens et des juifs, et dans le nombre des Européens se trouvent beaucoup de capitaines de vaisseau, de frégate, le directeur-général de l'arsenal d'Alexandrie et des constructions navales, le célèbre ingénieur français M. Cérisy, à qui S. A. a aussi décerné les insignes de bey.

Le pacha permet l'exercice des cultes étrangers à tel point, qu'on voit dans les rues d'Alexandrie et du Caire des prêtres catholiques, revêtus de leurs habits sacerdotaux, précéder ou suivre les convois funèbres, porter les sacrements en cortége, et faire des processions publiques avec la plus grande liberté.

Il a permis en outre la fondation de plusieurs églises, de divers couvens; mais un fait qui caractérise mieux encore sa tolérance, est l'ordre qu'il donne chaque année à tous les chefs de religion ou de secte, à l'époque de la crue du Nil, de se réunir dans cette ile en face du Vieux-Caire (l'ile de Rôdah), afin d'adresser des prières au Très-Haut, pour en obtenir le bienfait annuel qui fertilise l'Egypte.

Quand la guerre sera finie, disait-il dernièrement encore dans son divan à plusieurs consuls, nous irons tous ensemble faire notre pélerinage à Jérusalem... : Paroles caractéristiques, où se révèle l'âme tolérante du héros qui a signalé l'entrée de ses troupes victorieuses dans cette ville infortunée par l'abolition des taxes et des vexations que supportaient les moines et les pélerins qui s'y rendaient d'Europe pour visiter le tombeau de Jésus-Christ. »

Mœurs et coutumes des Ainos.—Notre savant voyageur, M. Siebold, a communiqué tout récemment à la Société Asiatique de Paris une dissersation très-curieuse sur des pays et des peuplades qui n'occupent pas souvent l'attention des Européens, sur l'île de Yéso, au nord du Japon, sur une partie de l'île de Karafto ou Tarrakai et sur les Kouriles, qui s'étendent vers le nord jusque dans le voisinage du Kamtchatka.

Ces iles sont habitées par des individus que les Japonais nomment Môzia, et qui se donnent à eux-mêmes le nom d'Ainos ou hommes. Ceux de l'ile de Kimum s'appellent Kimum-Aino, ceux d'Etérop, Etérop-Aino. Nous allons donner un extrait de sa dissertation.

Les huttes des Ainos contiennent des pots, un foyer, des nattes, ainsi que des instruments de chasse et de pêche. Les femmes ont le tour de la jambe peint en bleu, pour marquer qu'elles appartiennent aux classes les plus élevées. A Yéso, les femmes couvrent leurs lèvres de lames d'or, et les peignent de différentes couleurs; elles noircissent aussi leurs dents.

L'épouse de l'Aino fait des habits à son mari avec de l'écorce d'arbre, nourrit l'ours de la maison, fait sécher des saumons, etc. Pendant ce tems, le mari va à la pêche ou à la chasse, laisse ses enfans courir çà et là, lutter et se poursuivre les uns les autres.

» Les Ainos adorent le soleil, la lune, la mer, un dieu du ciel; ils croient à l'existence du diable. Les parents se marient entre eux, à l'exception toutefois des plus proches. Dans l'ile de Yéso, les femmes sont libres et considérées à Karafto elles dominent leurs maris. Elles sont fidèles, et ne témoignent aucune jalousie envers leurs rivales; seulement quand leur mari prend une autre femme, il est tenu de la loger dans une hutte un peu éloignée de la leur. Depuis Yéso jusqu'à l'extrémité septentrionale de Karafto, les jeunes gens, dès qu'ils ont atteint le terme de leur croissance, portent une espèce de chapeau, adopté jadis par les Japonais. On érige des pieux en l'honneur des morts; quand aux riches, on leur ôte les entrailles qu'on remplace par des plantes aromatiques, puis on laisse sécher les cadavres pendant un an. Les tombeaux sont universellement respectés ; la famille du défunt vient lui rendre visite tous les ans, lors de l'anniversaire de son décès. Comme on n'a pas de calendrier, on suppute les dates d'après la chute des feuilles et le dépérissement des fleurs. Il est d'usage que dans la visite rendue au tombeau, on ne fasse aucune mention du défunt. Après la mort de son époux, la veuve se retire dans les montagnes, et les plus proches parens ne paraissent pas en public tête nue avant l'espace d'un an.

Les Ainos ne connaissent ni écriture ni monnaie; ils écrivent et calculent au moyen d'incisions faites dans le bois. Ils n'ont que deux remèdes principaux, au nombre desquels il faut ranger une espèce de truffes. Ils décochent contre leurs ennemis des flèches empoisonnées. Ils sont vigoureux, mais timides: quand on fait mine de s'approcher d'eux, ils s'enfuient au plus vite. Ils jouissent, du moins auprès des Japonais, d'une réputation de vertu et de probité qu'ils méritent sans doute. Jamais les Japonais ne sont parvenus à introduire chez eux une nouvelle coiffure, encore moins la religion des bouddhistes. » (Journal Asiatique.)

Bibliographie.

Atlas géographique pour l'étude de l'histoire ancienne, par M. Poulain de Bossay, professeur d'histoire au collège de Saint-Louis, chez Mayre-Nyon, quai Conti, no 13.

Jusqu'à présent, la géographie était restée une science à part. L'axiome si commun que la chronologie et la géographie sont les deux yeux de l'histoire, n'avait point d'application réelle. On enseignait la géographie aux enfans, sans leur en faire comprendre l'utilité, et toutes les cartes ne leur présentaient autre chose qu'une description plus ou moins exacte du sol, des montagnes, des rivières, etc. M. le comte de Las Cases, dans son Atlas de Lesage, et Koch eurent les premiers l'idée de dresser des cartes historiques, où l'on pût suivre des yeux les mouvemens et les divisions des peuples et des empires. Mais cet essai, qui ne fut qu'une ébauche, laisse beaucoup à désirer pour l'exactitude, le développement et le dessin. Enfin un habile professeur d'histoire vient de publier, le premier, un atlas de géographie vraiment historique. Il publie d'abord six cartes destinées à l'étude de l'histoire ancienne: Il publiera successivement d'autres atlas pour l'histoire romaine, celle du moyen âge et des tems modernes.

Ce premier travail nous a paru excellent dans son ensemble et dans ses détails. Avec un fini d'exécution assez rare, il rassemble tous les documens les plus curieux. L'auteur, à la fois géographe et historien, présente dans chaque carte un théâtre historique où chaque événement trouve sa place, où tous les souvenirs reviennent d'eux-mêmes se ranger avcc ordre et précision. Ce sont les grandes époques mises sous les yeux avec leurs moindres détails. La première carte présente la dispersion de la famille de Noé; vous en suivez la marche, et vous voyez en quelque sorte chaque nation se poser sur le globe. La seconde est l'Egypte des Pharaons avec ses nomes, la trace des voyages d'Abraham, de Joseph, la route des Hébreux. La troisième est la Terre-Sainte, divisée en douze tribus. Tous les faits de l'ancien Testament y sont groupés sans la moindre confusion. La quatrième est autant un tableau qu'une carte des États babylonien, assyrien, mède et perse; on y retrouve les limites de l'empire de Sémiramis, de ceux de Nabuchodonosor, de Cyrus, de Darius; la marche de Sésostris, des Scythes, de Cambyse; un plan de Tyr, etc. La cinquième représente les conquêtes d'Alexandre avec les mêmes détails et la même netteté; un plan d'Alexandrie et des trois grandes batailles d'Alexandre n'est pas un médiocre secours pour l'intelligence des faits. La sixième est la Grèce, où les monumens cyclopéens sont exactement marqués, avec un petit modèle des constructions pélasgiques, helléniques, etc.

Ainsi toutes ces cartes ne sont pas moins utiles pour l'étude des antiquités que pour le simple récit historique. M. Poulain a profité habilement des découvertes modernes de Champollion et de M. Petit-Radel. Il a rendu un grand service à l'enseignement, et l'on désire vivement qu'il achève bientôt un travail si heureusement commencé. Ce sera un moyen et un attrait de plus pour l'étude de l'histoire.

-Précis de l'histoire des empereurs romains et de l'Église pendant les quatre premiers siècles, par M. Édouard Dumont, professcur d'histoire au collége royal de Saint-Louis; ouvrage adopté par le conseil royal de l'université de France, et prescrit pour l'enseignement de l'histoire dans les colléges royaux et dans les autres établissemens d'instruction publique.-Troisième édition.

M. Édouard Dumont, professeur d'histoire au collège royal de Saint-Louis, vient de faire paraître la troisième édition de son Précis de l'histoire des empereurs romains et de l'Église pendant les quatre premiers siècles. Nous recommandons vivement cet ouvrage à nos abonnés, et surtout aux directeurs des maisons d'éducation. C'est un fait, malheureusement pas assez connu, que la plupart des histoires que nous avons sur l'empire Romain sont incomplètes ou fausses. Elles n'ont été jusqu'à présent que des copies ou des abrégés de Tite-Live, ou de quelques autres historiens qui ont vu et écrit sous l'influence de nombreux préjugés. La science historique a fait dans ces derniers tems de grands progrès, et, nous oserons le dire, d'étonnantes découvertes. M. Dumont a profité de ces progrès et de ces découvertes, et a enrichi encore le champ de l'histoire de ses propres travaux. Nous pouvons assurer à tous les lecteurs de son livre, quelle que soit leur science en histoire, qu'ils y trouveront des choses nouvelles. Les enfaus surtout ne devraient pas avoir d'autre ouvrage sous les yeux. Ils seraient sûrs d'éviter de nombreuses er

reurs.

DE

PHILOSOPHIE

CHRÉTIENNE.

Numéro 29.- Novembre 1832.

Religions anciennes.

EXPOSITION DU SYSTÈME RELIGIEUX TIBÉTAIN-MONGOL

TRADUCTION LIBRE DE BENJAMAIN-BERGMANN.

Troisième Article '.

Considérations rapides sur le rapport du système tibétain-mongol avec les doctrines de l'Inde et avec la tradition générale de l'humanité.

Un historien fidèle a développé devant nous le tableau de la mythologie Bouddhique. A sa voix, les dogmes, évoqués de leurs vieux sanctuaires, tout couverts de la poussière des siècles, ont passé sous nos yeux, et les nombreuses traditions que les Lamas révèlent à leurs disciples se sont présentées comme un vaste spectacle à notre investigation.

Serait-il inutile de recueillir quelques résultats de ces recherches? serait-il impossible d'en tirer des inductions pour servir à l'histoire de l'humanité? En signalant les rapports du système Tibétain-Mongol avec celui qui repose dans les pagodes de l'Inde, avec les croyances des divers peuples semés sur la

1 Voir le 2 article au N° 25 ci-dessus, pag. 28 de la 1", et p. 34 de la 2' édition.

TOME V. N. 29. 1852. - 2o édit. 1855. 3o edit. 1857. 21

« PreviousContinue »