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soldats romains. Des tourbillons de flammes sortirent de terre et brûlaient les travailleurs, qui, ne pouvant plus lutter contre ce terrible élément, furent forcés d'abandonner leurs travaux.

Ce qu'il y a d'incontestable, et ce que Dieu seul pouvait savoir, c'est que jusqu'à ce jour les Juifs n'ont pu être rétablis dans la Judée, et que toujours, depuis cette époque, Jérusalem a été foulée par les nations. Romains, Grecs, Perses, Sarrazins, Tartares, Mamlucks, Turcs, Egyptiens, Arabes, et Turcs encore une fois, l'ont foulée tour à tour et de siècle en 'siècle 1. Seuls, de tant de nations, les Juifs, qui chérissent jusqu'à la poussière de ce sol, n'ont jamais pu le reconquérir; et la vérité de cette déclaration sortie de la bouche de Jésus, que leurs pères ont crucifié, est une preuve irrécusable que sa religion vient de Dieu, preuve infiniment plus forte que tout ce qu'a jamais pu dire l'auteur d'une fausse religion, pour en accréditer la doctrine.

Qu'on se représente donc, d'un côté, les Juifs vivant en {sûreté dans leur pays, au fond d'une profonde paix, chaque homme sous sa vigne ou son figuier, et, de l'autre, ces mêmes Juifs dispersés parmi les nations, et traînant leur pénible existence sous le poids de leurs iniquités, et dans la terre de leurs ennemis; qu'on se représente la Judée, qui n'était jadis qu'un vaste jardin entouré de collines charmantes, cette Judée aujourd'hui transformée en un désert sauvage, d'où toute joie a été bannie; et qu'on apprenne combien grande est la différence entre les promesses et les menaces du Seigneur; entre jouir de ses grâces et s'attirer son courroux....

1 « Les perfides vignerons, disait S. Jérôme, témoin des désastres de Jérusalem, après avoir tué les serviteurs, et même le Fils de Dieu, sont exclus de la vigne: un seul jour dans l'année, ils achètent la liberté de venir pleurer sur leurs ruines, comme ils avaient acheté autrefois le sang de Jésus-Christ. Chassés de leurs foyers, privés de leurs champs, courbés par les années, couverts de haillons, ils portent les marques terribles de la colère de Dieu. Tandis que la croix brille sur le Calvaire, ce peuple aveugle ne déplore que la ruine de son temple. Un farouche soldat vient interrompre leurs cris, les menace, les frappe, et leur demande un nouveau salaire s'ils veulent obtenir la permission de verser plus longtems des larmes stériles.

CONTRÉES VOISINES DE LA JUDÉE.

Indépendamment de la Judée, il est d'autres contrées par lesquelles la désolation a passé; et plusieurs nations ennemies des Juifs ont péri, tandis que les Juifs eux-mêmes, quoique atteints par les plus terribles châtimens, n'ont pas été retranchés. Trois pays bordaient la Terre-Sainte: Ammon à l'est, Moab au sud d'Ammon, et la Philistie, ou pays des Philistins, au sudouest et sur les bords de la Méditerranée, appelée la GrandeMer dans l'Ancien-Testament 1. Dans le Psaume LXXXIII, il est parlé de ces trois pays: Ils ont dit: venez, et exterminons-les › du milieu de ces peuples, en sorte qu'ils ne soient plus une na›tion et qu'on ne se souvienne plus à l'avenir du nom d'Israël. › On a vu conspirer ensemble et faire alliance contre vous les › tentes des Iduméens et des Ismaélites; Moab, les Agaréniens, › Gébal, et Ammon, et Amalec, et les Philistins sont aussi venus › avec eux, etc. 2... ›

Tous ces pays jouissaient d'une grande fertilité naturelle, et ils abondaient en richesses et en population, longtems avant l'ère chrétienne. Mais Ammon devait être la proie des Païens; il devait subir une désolation perpétuelle, ou du moins d'une longue durée; sa capitale devait être transformée en un monceau de ruines, en une étable de chameaux ou en un parc de bestiaux, et les Ammonites devaient être retranchés et effacés de la liste des nations et de la mémoire des hommes. Moab devait prendre la fuite; toutes ses villes devaient être renversées sans qu'il y restât un seul citoyen; ceux qui y demeuraient devaient s'enfuir, pour aller habiter dans les rochers, et être semblables à la colombe qui fait son nid aux côtés de l'entrée des cavernes. Les cités d'Aroer devaient être la retraite des trou

1 Nombres, xxxiv, 6. Josué, xv, 12.

2 Les passages de l'Ancien Testament, indiqués ci-après, contiennent de plus amples notions sur ces trois peuples. Exode, x1, 17. Nombres, XXII-XXV. Josué, XIII, 1-3. Juges, III, X; XI, XIII, XVI. 1 Samuel, IV-VII, XI, XIII, XIV, XVII, XVIII, XXVIII, XXXI. 2 Samuel, v, VIII, X-XII, XXI. 1 Rois, x1, 7. 2 Rois, 1, III, XXIII, 13. XXIV, 2. 2 Parali., xx, XXVI, 1-8; XXVIII, 18. Jér., xxvII, 1–11.

peaux qui s'y reposeraient, sans que personne les épouvantât. Moab devait être en dérision, et ses filles, au gué de l'Arnon, comme des oiseaux égarés qu'on a jetés hors du nid.- La terre des Philistins devait aussi être saccagée; il était dit que les côtes de la mer deviendraient des habitations de bergers et des parcs pour les troupeaux ; qu'on ôterait à Gaza son roi, ses richesses et ses fortifications; que les habitans d'Ashdod seraient retranchés; qu'il n'en resterait pas un seul à Ascalon désolé, et qu'Ekron serait arraché de ses fondemens.- Quant au Liban, il était prédit que ses branches tomberaient, que ses cèdres seraient dévorés, et (quoique, buit cents ans après la prophétie, il fut encore couvert de cèdres) que les arbres de cette forêt seraient en si petit nombre qu'un enfant pourrait les compter. En un mot, on peut dire que, quelques merveilleuses que fussent toutes ces prophéties, les preuves les plus multipliées prouvent qu'elles sont aujourd'hui accomplies à la lettre. Nous allons maintenant rapporter un certain nombre de passages de ces prophéties, relatifs à Ammon, à Moab, à la Philistie et au Liban.

AMMON.

Ammon fut pendant plusieurs siècles une des plus populeuses et des plus fertiles contrées de cette partie de l'Asie. Les Ammonites faisaient de fréquentes invasions sur les terres d'Israël, et, s'étant alliés une fois avec les Moabites, ils tinrent pendant dixhuit ans les Israélites sous leur joug. Dans la suite, Ammon continua d'être un pays très-peuplé et d'un riche produit; ce fut dans cet état que le trouvèrent les Romains quand ils en firent la conquête. Plusieurs de ces dix villes dont se composait la Dé-capole étaient renfermées dans ses limites. A une époque encore moins éloignée et plusieurs siècles après Jésus-Christ, les histo riens nous disent que cette contrée tirait de grandes richesses de son commerce, qu'elle était défendue par une ligne de forteresses, et possédait plusieurs cités fortes et populeuses. Volney dit que, dans les immenses plaines de l'Hauran, on rencontre des ruines presque à chaque pas, et que ce qu'on dit de sa fertilité s'accorde parfaitement avec l'idée qu'en donnent les Son ancienne livres hébreux, c'est-à-dire l'Ancien Testament.

fécondité est attestée par tous les voyageurs qui l'ont visitée; et Burckhardt, qui y était il n'y a que quelques années, observe qu'il fallait bien que dans ce pays l'agriculture fût poussée à un haut point de perfection, pour qu'on y pût nourrir les habitans de tant de villes dont aujourd'hui on ne voit plus que les débris. - Un autre voyageur aussi judicieux que digne de confiance, Seetzen, assure que, dans quelque sens que l'on parcoure ce pays, on y rencontre des ruines.

Malgré cette grande prospérité, il était prédit, dans la prophétie qui concerne Ammon, que Rabba, capitale du pays, serait la demeure des chameaux et la retraite des brebis.-J'ai › étendu ma main sur toi, je te livrerai en proie aux nations, ⚫ et je t'effacerai du nombre des peuples; je t'exterminerai de › dessus la terre et je te livrerai aux peuples de l'Orient, afin que › tu deviennes leur héritage 1. Rabba, capitale des enfans › d'Ammon, sera réduite en un monceau de ruines 2. › ‹ La terre › des enfans d'Ammon sera à jamais, comme Gomorrhe, un › amas d'épines sèches, de monceaux de sel et une vaste soli› tude 3. ›

Des voyageurs modernes, qui n'exploraient la Syrie que pour en étudier les antiquités et la géographie, et qui ne pensaient nullement à y chercher de quoi confirmer ou expliquer les Ecritures, nous ont fourni les preuves les plus claires et les plus concluantes de l'accomplissement de ces prophéties.

Toute cette contrée, dit Seetzen, autrefois si peuplée et si florissante, est changée aujourd'hui en un vaste désert. La plus grande partie en est entièrement inhabitée; on n'y rencontre. que des Arabes vagabonds, et les villes et les villages ne sont que des monceaux de ruines. Ce célèbre voyageur dit encore que le pays est partagé entre les Turcs et les Arabes; que ces derniers en ont la partie la plus considérable, et que les extorsions des uns et les brigandages des autres le tiennent dans une désolation permanente, et en font la proie des païens. - A chaque pas, dit Burckhardt, on rencontre des vestiges d'anciennes villes, des restes de temples, d'édifices publics et d'églises grecques. Un 1 Ezéch., xxv, 4, 5, 7, 10.

2 Jérém., XLIX, 2.

3 Sophron., 11, 9.

grand nombre de ces ruines n'offrent rien d'intéressant. Ce sont des murs d'habitations particulières, des tas de pierres, des fondations d'édifices publics et quelques citernes comblées. On n'y trouve rien d'entier; mais, à en juger par les pierres énormes dont se composent ces débris, il parait que le mode de construction alors en usage était d'une grande solidité. Dans le voisinage d'Ammon est une plaine fertile, semée de petites éminences dont la plupart sont couvertes de ruines 1.

Tandis que le pays est ainsi nu et désolé, on y trouve çà et là quelques vallées verdoyantes qui servent de retraites aux Bédouins, et où ils font paître leurs chameaux et leurs moutons. M. Buckingham, à qui nous empruntons ce fait, rapporte aussi qu'il coucha au milieu des troupeaux de brebis et de chèvres, tout près des ruines d'Ammon, et que, pendant la nuit, il put à peine prendre un instant de sommeil à cause des bêlemens des moutons. Sur toute la route que nous suivîmes, dit Seetzen, nous vîmes des villages ruinés, et nous rencontrâmes nombre d'Arabes avec leurs chameaux, etc. Burckhardt atteste aussi ce fait, qui est l'accomplissement d'une prophétie prononcée à l'époque où Rabba était une ville florissante et populeuse.

« On ne se souviendra plus des enfans d'Ammon parmi les nations, dit la prophétie. Les Juifs, quoique dispersés parmi toutes les nations, en sont aussi distincts et aussi séparés que jamais partout on peut les reconnaître, tandis qu'il ne reste aucune trace des enfans d'Ammon. Un ancien auteur chrétien nous apprend qu'ils conservaient leur nom, et formaient encore un peuple nombreux plus de cent ans après la mort du Sauveur. Mais, cinq cent quatre-vingts ans avant la naissance de Jésus-Christ, leur destruction avait été prédite par le prophète Ezechiel. Et aujourd'hui Ammon a été effacé du nombre des peuples; il a disparu de la terre; il est détruit. Aucun peuple n'est attaché à son sol; aucun peuple ne le regarde comme sa patrie, ou ne porte son nom: ce sont des tribus errantes, d'une autre origine et d'un autre nom, qui l'occupent en passant.

Six cents ans avant Jésus-Christ, Jérémie avait écrit: Rabba sera réduite en un monceau de ruines. Il y avait alors plusieurs

Voyage en Nubie et en Syrie.

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