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la peau des hommes blancs prend une couleur plus foncée, tandis que celle des Nègres devient blanche ou plutôt jaune par l'effet des mêmes maladies. Il y a néanmoins une difficulté à cette explication qui a donné lieu à de grandes discussions entre les savans. On dit que si les Nègres descendent d'une race originairement blanche, il a dû s'écouler des millions d'années avant que l'action continue du climat ait pu rendre la couleur noire héréditaire parmi eux. Mais des monumens géologiques, indépendamment du témoignage de la révélation, montrent que l'antiquité de la race humaine ne remonte pas à beaucoup près aussi haut. Choisissez, nous disent quelques philosophes, ou admettez que les causes qui ont produit les différentes races d'hommes ont dû agir pendant une suite immense de siècles, ou reconnaissez que sielles n'existent que depuis cinq ou six mille ans, ces races ont une origine distincte. Quelque formidable que puisse paraître cette objection, il ne sera pas difficile d'y opposer des raisons et des faits très-concluans. En effet, le docteur Dwight, Américain, dans un ouvrage qui a pour titre : Voyage dans la Nouvelle-Angleterre, rapporte un changement physiologique qui s'est opéré sous ses yeux. Il dit avoir vu, dans la Virginie, un Nègre dont la couleur avait blanchi graduellement sans aucune cause apparente. Cet homme n'avait éprouvé aucune altération de santé, et sa peau était restée également saine; selon son rapport, il avait aperçu d'abord ce changement s'opérer audessous et autour de la racine des ongles, et s'étendre ensuite rapidement, surtout aux endroits où la peau n'était pas exposée à l'air. Dans l'espace de quatre ans la poitrine, les bras, les jambes et les cuisses avaient totalement blanchi; les mains, les pieds et le visage étaient couverts de taches d'un aspect très-désagréable; des taches semblables couvraient également la tête, et, en général, tous les endroits du corps où la peau avait changé. Les cheveux n'étaient plus noirs ni crépus, mais ils étaient devenus blonds et lisses. Le ci-devant Nègre était né avec une constitution robuste et vigoureuse; il conserva la même manière d'être, et il n'éprouva aucune sensation particulière, si ce n'est qu'en se décolorant, sa peau acquit un degré de sensibilité qu'elle n'avait pas auparavant. Un Indien ci

vilisé avait offert un exemple de ce phénomène, et l'on en avait observé le commencement chez trois autres Indiens.

» Le docteur Dwight conclut de ces faits et d'autres semblables, que la différence de couleur entre les hommes ne prouve pas une différence d'origine. Il observe que les Juifs ont toutes les nuances de teint, depuis le teint blanc qu'ils ont en Pologne, en Allemagne et en Angleterre, jusqu'à la couleur tout-à-fait noire des Juifs de l'Indoustan; et que les habitans de la Colchide, qui étaient noirs du tems d'Hérodote, sont maintenant aussi blancs que les européens.

» Les nombreuses variétés de chevelures dépendent également de l'action chimique des substances élémentaires dont le corps humain est composé.

» Deux lois générales, mais qui souffrent des exceptions, servent à expliquer les différences dans la stature et dans la couleur. Quant à la stature, on observe qu'elle diminue en proportion de ce que les habitans des différentes contrées se rapprochent davantage du pôle, et qu'elle augmente à mesure qu'ils sont plus près de l'équateur. Nous trouvons également que la couleur de la peau, et surtout celle des cheveux, sont plus claires lorsque nous allons vers le nord, et qu'elles prennent une teinte plus foncée lorsque nous avançons vers la zone torride. Néanmoins, il y a des faits contradictoires qui sembleraient indiquer, pour la teinte des cheveux, l'action des causes étrangères. Chez les nations civilisées de l'Europe, la couleur des cheveux devient plus claire à mesure que l'on avance vers le nord, et cette loi est invariable. Mais chez les nations barbares de l'Asie, de l'Afrique et de l'Amérique, on trouve la même couleur de cheveux dans des climats très-différens. Tandis que l'Italien aux cheveux bruns, et le blanc Scandinave, quoique appartenant à la même race, montrent les effets de l'action du climat, les Lapons d'Europe et les Samoièdes d'Asie ont les cheveux aussi noirs et aussi raides que les habitans du Mongol et la Chine.

» Les variétés dans la forme du crâne paraissent être d'une plus grande importance que toutes celles dont nous avons parlé. Mais comme les recherches des phrénologistes ont démontré que la configuration extérieure du crâne dépend de la forme du cer

veau, il est difficile de supposer qu'une substance si molle et susceptible de prendre toutes sortes de formes, puisse présenter dans aucun cas un caractère assez distinct pour marquer sans équivoque une variété d'espèces. La forme du crâne, disent les métaphysiciens, dépend autant de la physionomie que du caractère moral des individus; et quoiqu'il soit impossible d'assigner à chaque passion et à chaque faculté un organe séparé dans le cerveau, cependant il est certain que les hommes qui ont des talens supérieurs et des passions fortes, ont la tête semée de plus de protubérances que le commun des hommes.

» Il est remarquable que chez les peuples dont les individus ont entre eux les traits de ressemblance les plus prononcés, ct qui se sont le moins mêlés avec d'autres races, il semble que les crânes ont été jetés dans un même moule qui est, en quelque sorte, national. Quand nous voyons la tête d'un Hindou, nous voyons les têtes de toute la nation. En Europe, au contraire, où il règne une si grande variété de caractères et de physionomies, nous trouvons mille formes de crânes, et même celle qui s'éloigne le plus de ce que nous estimons être le type régulier.

» Indépendamment de cette cause générale, à laquelle il faudrait ajouter les effets de la nourriture et du climat, il arrive fréquemment que la forme de la tête est modifiée par des moyens artificiels. En tenant comprimées, pendant plusieurs années, la tête des enfans, on donne aux os encore tendres une forme particulière, qui, avec le tems, peut devenir nationale. Cet effet est quelquefois produit par la manière dont on place les enfans dans le berceau, et d'autres fois par la simple pression de la main prolongée pendant long-tems. On dit que les Allemands, il y a plusieurs siècles, avaient la tête applatie par derrièrc, tandis que les côtés en étaient élargis, parce que dans le berceau ils étaient toujours couchés sur le dos. Les Belges, au contraire, accoutumés dès l'enfance à dormir sur le côté, avaient la tête d'une longueur remarquable. En Amérique, les Sauvages, depuis la Caroline du Sud jusqu'au Nouveau-Mexique, ont tous le crâne déprimé, parce qu'ils placent leurs enfans dans le berceau de manière que le sommet de la tête, portant sur un

sac rempli de sable, soutient presque tout le poids du corps. Un usage fort commun autrefois, et qui existe encore aujourd'hui, était de donner à la tête d'un enfant une forme nationale, au moyen de bandes et d'instrumens, ou bien en la pétrissant avec les mains. Si barbare que paraisse cette coutume, on l'observe encore dans plusieurs parties de l'Allemagne, chez les Belges et les Français, dans certains cantons de l'Italie, parmi les insulaires de l'Archipel grec et chez les Turcs. Elle existait aussi chez les anciens habitans des rivages du Pont-Euxin ; elle a régné jusqu'à ce jour parmi les habitans de Sumatra et des autres îles des Indes Orientales; parmi les Chactas, les Géorgiens, les Waclaws de la Caroline, les Caraïbes, les Péruviens et les Nègres des Antilles. A la vérité, elle fut interdite dans l'Amérique espagnole, par un décret d'un concile national. Des voyageurs, dont l'autorité est irrécusable, ayant attesté le fait, il ne reste plus qu'à déterminer si la forme de la tête, obtenue par ces moyens artificiels, devient naturelle et héréditaire après une longue suite de générations. »

(Glasg. Mech. Magaz.)

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Vous avez publié dans votre dernier N° un excellent article du pieux et savant M. S. Foisset, sur l'Enseignement de la philosophie au XIV siècle, par M. Bautain. J'espère que vous voudrez bien insérer dans le prochain numéro, quelques réflexions critiques sur le même écrit, qui, à raison de son importance extrême, et de la brillante réputation de l'auteur, mérite une sérieuse attention. Je désire que ma lettre provoque des explications ou des modifications qui me paraissent nécessaires. Quel bonheur. si ces deux génies qui font aujourd'hui la gloire du clergé de France, pouvaient s'entendre sur le moyen philosophique de convertir au christianisme cette multitude d'hommes, de jeunes gens surtout qui le dédaignent, faute de bien le connaître!

La philosophie étant l'amour et la recherche de la vraie sagesse, implique la nécessité d'un principe de certitude ou d'un moyen infaillible de trouver la vérité. Mais quel est ce moyen? Est-ce la raison de l'individu, ou la raison du genre humain? En d'autres termes, faut-il admettre en philosophie la méthode et le Criterium protestans, ou la méthode et le Criterium catholiques formulés par Tertullien dans son livre des Prescriptions, ou par S. Vincent de Lérins, dans son Commonitoire ? Le génie le plus transcendant ne saurait ni se passer d'un principe de certitude bien déterminé, ni trouver un milieu entre le sens privé et le sens commun. Eh bien! M. Bautain attaque l'un et l'autre comme également insuffisans, dangereux, en un mot,

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