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évêque de Paris, ardent zélateur de la discipline ecclésiastique et de la vraie foi, excitant le goût des arts et des études, agrandissant le vaste hôpital de la capitale, et mettant ainsi en exé cution la pensée qu'avait eue autrefois S. Jean Chrysostome; un S. Thomas d'Aquin, surnommé l'ange de l'école, à cause de sa grande et saine doctrine; un S. Bonaventure, cardinal, évêque d'Albane, que sa tendre piété a fait appeler le docteur séraphique; un Robert de Sorbon, jetant les fondemens de la fameuse Sorbonne de Paris; et encore, un S. Vincent Ferrier, un S. François de Paule, le premier évangélisant l'Espagne, la France, l'Italie, l'Angleterre et l'Ecosse; le second, fondant un ordre fameux par son humilité', et s'attirant par sa seule vertu la confiance des souverains et la vénération des peuples; un Thomas à Kempis ou plus probablement un Gerson, qui composa le plus beau des livres qui soient sortis de la main des hommes, puisque l'Evangile n'en vient pas '; un cardinal d'Amboise, le conseil et l'ami de son roi, le nourricier des pauvres et des orphelins, fameux ministre, et prélat plus fameux encore; enfin ce tant renommé cardinal Ximénès, régent de Castille, administrateur des Espagnes, protecteur de la foi, des lettres et des sciences, le plus grand homme que l'Espagne ait produit ? Il est donc bien vrai qu'en parcourant seize siècles chrétiens on rencontre partout les immenses bienfaits du sacerdoce; seul il lutte essentiellement contre le vice, l'ignorance, la barbarie et la mort ; seul il défend la science, la civi‹ lisation, la vertu et la vie; seul il instruit les rois et soumet les peuples, il rétablit l'ordre et fait vivre le monde. Aussi, nous le disons sans crainte, nous le disons à tous, et nous le dirons toujours, oui, c'est au sacerdoce catholique que nous devons ce que nous possédons de lumières, de vertu et de véritable liberté.

L'ordre des Mineurs.

› Fontenelle.

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Liffèrature sacrée.

LA BIBLE,

CONSIDÉRÉE SOUS LE RAPPORT RELIGIEUX, MORAL, HISTORIQUI ET LITTÉRAIRE.

Beuxième Article '.

M. de Treneuil sur les lamentations de Jérémie. —Job sur la sagesse.— Salomon sur la création. Herder sur Job. —Les Proverbes de Salomon.-Amar sur les livres saints. — Isaïe. — David sur la miséricorde et la loi de Dieu. — M. de Maistre sur les psaumes.

Dans un premier article nous avons considéré les Livres saints comme monumens religieux et historiques, et nous n'avons pas craint de dire que la Bible, sous ce double point de vue, comme aussi dans ses considérations politiques et morales, l'emportait infiniment sur tout ce qu'il a été possible de faire et d'écrire en ce genre. Dans cet article, nous allons examiner si ce livre par excellence n'est pas aussi le plus attrayant, le plus beau de tous les livres par la hauteur des pensées, la sublimité des sentimens et la magnificence de la plus riche poésie.

La Bible sous le rapport poétique,

« Quoi de plus beau en effet, et de plus noble que la conduite de Joseph envers ses frères! Quoi de plus touchant que le moment de sa reconnaissance, ego sum frater vester! Quels accens plus douloureux que ceux d'Israël sur les bords du fleuve étranger? Quelles plaintes égalèrent jamais ces cris de douleur, cette voix de Rachel, qui pleure ses enfans dans Rama, et qui rejette loin d'elle toute consolation parce qu'ils ne sont plus 1? Qui jamais, comme Jérémie, sera capable d'égaler les lamentations aux calamités, dit Bossuet dans son Oraison funèbre Voir le 1 article au numéro 31, p. 5 de ce volume.

Et nolentis consolari super eis, quià non sunt, Quelle admirable et touchante simplicité!

d'Henriette d'Angleterre ! Il est bien remarquable, dit M. de Treneuil dans son Discours, que nous avons cité plus haut, que la poésie, chez le peuple de Dieu, ne connut point cet état de faiblesse, ces progrès plus ou moins rapides, et cette décadence qui signalent les diverses époques des arts et des sciences profanes. Le commencement fut, comme le milieu et la fin de sa carrière, marqué par des chefs-d'œuvre. Fille du ciel, elle s'éleva, du premier vol, au sommet de la perfection, ce qui prouve la divinité de son origine et l'importance de sa mission sur la terre.

. Il n'est personne qui ne connaisse les Lamentations de Jérémie; elles sont le sujet de nos chants élégiaques dans les jours qui précèdent la fête de Pâques. Ce sont des cantiques de deuil composés à l'occasion des divers malheurs de Jérusalem. Jérémie, dont le suprême talent était d'exciter l'attendrissement et la pitié, n'a jamais été surpassé dans ce genre d'élégie lyrique.

» Si quelques écrivains sacrés l'emportent sur lui par la pureté de la diction, il s'élève quelquefois à la hauteur d'Isaïe lui-même, et personne ne l'égale dans l'art de peindre la douleur et d'exciter la compassion. Il tient sur le Parnasse sacré le sceptre de l'élégie, et ses chants ne sauraient être trop médités par ceux que la nature de leur caractère et de leur talent appelle à déplorer les grandes infortunes. Sans nous répandre en éloges superflus sur les beautés dont étincelle ce poète, nous rappellerons au lecteur que ce morceau d'inspiration vraiment divine, où Joab peint dans Athalie la désolation de la ville sainte : Comment en un plomb vil, etc., se trouve presque tout entier dans Jérémie, qui a fourni à Racine les traits, les couleurs et le mouvement de ce pathétique tableau. »

Quels objets plus propres à enflammer l'imagination que cette mer entr'ouverte et suspendue, qui engloutit Pharaon et son armée ? que cette nuée de feu, et ces murailles qui s'écroulent avec fracas au seul bruit des trompettes? qui dira le nom de Jérusalem, ce nom tout à la fois si poétique et si douloureux dans la bouche des prophètes? Quoi de plus profond que les réflexions de Job sur la brièveté de la vie et sur l'instabilité des choses humaines? Quoi de plus vrai que le tableau du cheval de bataille dans le livre du même Job, tableau où il n'y a

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pas un seul trait dont la beauté n'exige un commentaire particulier ?

Nous avons reproduit dans le précédent article la belle description du cheval; nous ne quitterons pas Job sans donner va extrait de la Recherche de la Sagesse. Le début en est singulier, et l'on n'imagine pas où tend le poète en suivant une telle voie.

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• Il est un lieu où se forine l'argent; il est une retraite où se trouve l'or.-Le fer est tiré du sein de la terre; l'airain est arraché à la pierre.-L'homme recule les confins des ténèbres; » il a découvert jusqu'à ces roches ténébreuses qui avoisinent les » ombres de la mort. — Il creuse dans les montagnes des vallées » qui n'ont jamais porté l'empreinte de ses pas; il s'enfonce dans » les entrailles de la terre. — Cetle terre où s'élèvent les mois■sons, est déchirée intérieurement par un incendie.— Là croit le saphir, là se forme l'or. L'oiseau ne connaît point cette »voie, et l'œil du vautour ne l'a point aperçue. Elle est ignorée des bêtes sauvages; les lions n'y pénètrent jamais. — » L'homme brise les rochers, renverse les montagnes jusqu'à ■ leurs racines,—Il fend les rochers du rivage et découvre leurs » trésors les plus cachés. — Il arrête le cours des fleuves, et montre leur profondeur à la lumière. Mais la Sagesse,

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» la trouvera-t-on ? et quelle est la demeure de la Prudence ?— » L'homme ignore son prix; elle n'habite pas la terre des vivars »—L'abîme dit: Elle n'est point en moi; et la mer : Je ne la » connais pas. On ne l'achète pas au poids de l'or; on ne >l'obtient point pour l'argent le plus pur. L'or d'Ophir n'en Légale pas le prix, elle surpasse l'onyx et le saphir-Le cristal, »l'éméraude ne sont rien auprès d'elle, ni les ornemens les plus beaux. Le corail et l'escarboucle s'effacent en sa pré»sence; elle l'emporte sur les perles de la mer. — La topaze de »Kousola ne lui sera point comparée; on ne l'échangera point pour les tissus les plus précieux - D'où vient donc la Sa»gesse? et quelle est la demeure de la Prudence? Elle est cachée aux yeux des mortels, elle est inconnue aux oiseaux du » ciel. L'enfer et la mort ont dit: Nous en avons entendu parler.-Dieu connaît ses voies; et seul il sait où elle kabite. »Car son regard, pénètre jusqu'aux extrémités de la terre; il avoit tout ce qui existe sous le ciel Quand il pesait la force

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des vents, et qu'il mesurait les eaux de l'abîme; quand il » donnait des lois à la pluie, et qu'il traçait une route à la foudre et aux tempêtes, alors il vit la Sagesse, alors il la fit » connaître : il la renfermait en lui, il en sondait les profon deurs. - Et il a dit à l'homme: Craindre le Seigneur, voilà la Sagesse; et s'éloigner du mal, voilà la Prudence. »

Cette conclusion est belle et digne des plus grandes choses qui ont précédé. Dans un autre passage de Job, la Sagesse dit qu'elle était traitée par le Seigneur comme un nourrisson chéri, et quelle se jouait sur ses genoux '.

Tout le monde connaît cette superbe prosopopée, dans laquelle la Sagesse (dans Salomon) raconte les merveilles de la création: « Les montagnes n'étaient pas encore affermies; j'étais engen» drée avant les collines.... Lorsque l'Eternel étendait les cieux, j'étais là; lorsqu'il entourait l'abîme d'une digue, lorsqu'il » suspendait les nuées, lorsqu'il fermait les sources de l'abime, » lorsqu'il donnait à la mer des limites (et les eaux ne les dé» passeront pas ), lorsqu'il pesait les fondemens de la terre, >> alors j'étais auprès de lui; nourrie par lui, j'étais tous les » jours ses délices, me jouant sans cesse devant lui, me jouant » dans l'univers; et mes délices sont d'habiter avec les enfans » des hommes. »

On ne trouve rien, dit M. de Bonald, qui puisse être comparé à cette description étonnante de pompes et de magnifi

cence.

La lecture de Job faisait les délices de Herder, et lui arrachait des larmes. «Qù te chercher, s'écrie cet illustre orienta>> liste dans des strophes pleines d'élévation et de verve, où » trouver ta tombe, poète sublime, confident des conseils de Dieu, des pensées des hommes et du ministère des anges? Tu >> embrasses d'un regard le ciel et la terre. Tour-à-tour pathé >tique et sublime, ton génie soupire avec le malheureux dans le royaume des larmes; et, plus rapide que la lumière, il s'é»lève au-dessus des merveilles de la création. Un cyprès tour. » jours vert ombrage-t-il, ta tombe ?, ou bien est-elle ignorée >> comme ton berceau ? Du moins tu as laissé un monument

› De Montbron. Essai, pag. 282.

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