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ou le juge car, dit un missionnaire, il n'est rien qu'on ne puisse obtenir d'un Chinois avec de l'argent.

Il y a en Chine trois sectes principales ; celle de Confucius, celle de Lao-kium et celle de Foë. Confucius naquit environ 520 ans avant J.-C., sa doctrine est un véritable déisme; il reconnut un Dieu unique et souverainement parfait, mais il ne combattit point l'idolâtrie de ses contemporains; il se tut sur les récompenses et les peines de l'autre vie, et prêcha une morale aussi peu complète que celle des philosophes grecs et romains. Ses disciples célèbrent des fêtes en son honneur, lui offrent des sacrifices, l'adorent enfin comme un Dieu.

Lao-kium et Foë ont enseigné tous deux le polythéisme et l'idolâtrie; ils ont dit que l'homme est sorti du néant et qu'il devait y rentrer un jour, mais non pas tout de suite après la mort, car Foë est l'inventeur du dogme de la métempsychose. Leurs doctrines ne diffèrent entr'elles que dans quelques points peu importans; leurs disciples les ont déifiés et leur ont élevé des temples. Ces temples, qu'on nomme pagodes, sont remplis de statues de bois, de pierre, d'argile, plus difformes les unes que les autres; c'est à de pareilles divinités que les Chinois offrent leurs prières. Les prêtres de Lao-kium se mêlent d'astrologie, de divination, de magie, et cherchent depuis longtems le secret de rendre les hommes immortels.

Il a des mahométans en Chine. Au commencement du siècle dernier, M. Basset, missionnaire au Su-Tchuen, écrivait qu'il y en avait 80,000 dans une seule ville de cette province. Il y en a qui deviennent mandarins. Il y a aussi quelques juifs, mais ils n'ont conservé qu'un léger souvenir de leur religion, et ils ne font pas de prosélytes. On ne compte pas plus de 200,000 chrétiens dans toute l'étendue de l'empire; au tems des jésuites, il y en avait près d'un million. Là, comme ailleurs, on s'aperçoit du vide immense qu'a causé la destruction de la Société. Ce qui s'oppose le plus au progrès de l'Evangile, c'est, après les édits de persécution, la polygamie et le culte des ancêtres. A certaines époques, chaque famille se rassemble dans un lieu uniquement destiné à ces sortes de cérémonies; le chef de la branche aînée, quand bien même il serait le plus pauvre, est le pontife de ce culte. On brûle du papier-monnaie en l'honneur

des ancêtres, on leur offre des libations, etc., avec la croyance que ces sacrifices leur sont utiles et agréables. Toutes les fausses religions, répandues dans la Chine, admettent ce rit superstitieux; on y est d'autant plus attaché, qu'il a été établi par Confucius.

Ce respect exagéré des Chinois pour leurs ancêtres est cause qu'ils ne perfectionnent rien. Ils ne croient pas qu'on puisse faire mieux que ce qu'ont fait leurs pères. Les arts sont chez eux dans le même état qu'à l'époque de leur découverte. Leur imprimerie est stéréotype et sur planches de bois ; ils connaissent la boussole, mais leurs vaisseaux sont lourds et informes; ils sont émerveillés en voyant les nôtres ; si on leur dit d'en construire de semblables ils s'écrient d'un air étonné : Oh! ce n'est pas l'usage en Chine. Toujours novices dans les sciences, ils ne savent pas les appliquer aux arts mécaniques; c'est pourquoi ils ont des artisans, mais point de mécaniciens. La grande muraille, qui a 25 pieds de haut et 400 lieues de long, sépare la Chine de la Tartarie; il a fallu, pour la construire, plus de patience que d'habileté ; c'est moins une fortification qu'un mur de séparation peu propre à la défense, et qui n'a pas arrêté les nombreuses invasions des Tartares.

Le commerce intérieur est très-actif; tout le pays est coupé de rivières et de canaux qui facilitent la circulation; mais le commerce extérieur languit : le port seul de Canton est ouvert aux Européens, qui viennent échanger du coton, du drap, de la verrerie, des fourrures, contre des soieries, de la rhubarbe, du thé et des porcelaines.

La terre en Chine est fertile, elle produit du riz et du blé en abondance. Nous terminerons cette notice par la description des honneurs que le gouvernement rend à l'agriculture. Tous les ans, au commencement de mars, l'empereur fait en personne la cérémonie de l'ouverture des terres. Il se transporte, accompagné des princes de sa famille et des grands officiers de la couronne, dans le champ destiné à cette cérémonie : lorsqu'il y est arrivé, il se prosterne et appuie neuf fois la tête contre terre, pour adorer le Seigneur du ciel; il implore à haute voix la protection divine sur son travail et sur celui de son peuple. Ensuite, en qualité de pontife suprême, il offre un

boeuf en sacrifice. Pendant que la victime est immolée sur un autel préparé d'avance, le prince quitte ses habits impériaux, saisit le manche d'une charrue, et trace quelques sillons. Les mandarins présens lui succèdent, et rivalisent entr'eux de dextérité.

La cérémonie se termine par une distribution faite aux laboureurs accourus des provinces environnantes, pour être témoins des honneurs rendus à leur art, par le chef même de l'empire.

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Traditions septentrionales.

CROYANCES ET SUPERSTITIONS

DES GROENLANDAIS.

Notions vagues sur un être suprême.—Sur l'immortalité de l'âme.
Les esprits. Funérailles. - Peur des spectres.

Sur

Les habitans sauvages de ce grand pays des terres arctiques, qui fut découvert en 982, sont petits; ils ont à peine cinq pieds; leurs mœurs, leur habillement et leurs figures ressemblent à ceux des Esquimaux, dont on les croit les ancêtres. Ils croient à un Être supérieur qu'ils appellent Torngarsuk, dont la nature est plutôt méchante que bonne; mais il n'est ni aimé ni redouté, et on manifeste pour lui fort peu de respect. Quand un Groënlandais est en bonne santé ou que sa chasse est productive, il ne s'occupe en aucune façon de Torngarsuk, et ne lui adresse ni offrandes, ni prières; mais quand il est affecté de quelque maladie ou de quelque chagrin, et que le poisson abandonne les côtes, il a recours au sorcier, qu'on regarde dans ce pays comme en relation avec la Divinité.

Les Groenlandais croient à l'immortalité de l'âme, si l'on peut appeler de ce nom l'idée qu'ils ont de deux résidences, l'une dans le ciel et l'autre sous terre. Mais il faut ajouter que la demeure qui est sous terre est la plus heureuse et la seule désirable, parce que, selon eux, elle jouit d'une température plus douce et plus chaude, et que la glace et la neige n'y pénètrent jamais. La partie la plus gracieuse de leur religion, c'est qu'ils s'imaginent que les lumières qui brillent au ciel sont les âmes des morts qui furent vertueux durant toute leur vie.

Ces peuples redoutent singulièrement les apparitions noctur

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nes. La solitude dans laquelle ils vivent, et la longue obscurité qui couvre ces régions arctiques, pendant laquelle le sens de la vue est si borné, et le sens de l'ouïe si souvent frappé par des sons inconnus et effrayans, ont conduit ces peuples à la croyance des apparitions surnaturelles. Il n'y a pas de doute que les fréquens accidens qui mettent fin à la vie d'un grand nombre de Groënlandais, pendant les tempêtes et leurs longues pêches, ont dû surprendre leur imagination. On entend, disent-ils, au milieu des ténèbres de la nuit, les esprits de ceux qui ont péri dans la mer, s'approcher de la grève en frappant la glace avec leurs bâtons, du fond de leur barque, et pousser ensuite un profond gémissement; car c'est pour la dernière fois qu'ils montent dans leur kajak (barque) favorite. Souvent aussi on les aperçoit dans leur hutte, tristement assis sur les peaux qui leur servent de lit, comme s'ils veillaient à la faible lueur de leurs lampes, ou s'ils voulaient encore une fois se livrer à l'allégresse et au plaisir.

Les rochers qui bordent ces côtes sauvages possèdent aussi leurs esprits, qui sont d'une nature fort dangereuse, car ils viennent pendant la nuit dans les huttes, et volent les provisions; mais quelques naturels croient aussi que ces derniers sont des Groënlandais qui, soit par caractère, soit par suite de mauvais traitemens, ont abandonné la société pour toujours, et ont cherché un asile dans les montagnes. Il n'y a pas de doute que ceux-ci profitent des craintes de ces sauvages pour vivre à leurs dépens.

A la mort d'un Groënlandais, on a coutume de lui attacher ensemble les jambes et de les mettre dans la tombe, en hiver, à travers la fenêtre, et, en été, derrière la hutte, afin que les spectres ne puissent pas l'exhumer.

Ces peuples croient en outre au spectre de mer, qui est bien plus redoutable. Ce spectre apparaît avant quelque catastrophe; on le rencontre enveloppé d'une longue robe blanche, dans un champ de glace, quelquefois sur le bord de la mer, et ses tristes gémissemens se font entendre à une grande distance. Ceux qui le rencontrent savent que quelque grand malheur les menace; on dit qu'on lui a entendu proférer des paroles, et c'étaient toujours des paroles de mort.

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