Page images
PDF
EPUB

se réduire à la formule suivante : « De quel poids ne me sentais-je pas accablé par la grièveté de mes péchés! Quelles té>> nèbres épaisses environnaient mon âme ! Dans quel abîme ne >> m'avait pas fait tomber mon désespoir! Mais tout-à-coup je me »sentis soulagé du fardeau qui m'accablait ; l'espérance rentra >> au fond de mon cœur, et c'est ainsi que j'eus la parfaite assu»rance que mes péchés étaient pardonnés.» Après que toutes ces belles imaginations ont été débitées gravement, on passe aux voix, et si les dispositions du postulant paraissent satisfaisantes, on procède immédiatement au baptême.

Les Méthodistes, qui en 1823 étaient au nombre de 312,540, répandus dans les Etats-Unis, sont beaucoup moins nombreux que les Baptistes dans le Kentucky. Les sectes principales dans lesquelles ils se divisent, sont celles des Wesséiens, des Witfieldiens et des Kilamites. Les premiers s'attachèrent aux erreurs de Wessey, dont les seconds s'écartèrent pour embrasser celles de Calvin, enseignées par Witfield. Les Kilamites, appelés aussi Méthodistes de la nouvelle réunion, se séparèrent en 1797 des Méthodistes anciens, qui datent de 1729, pour établir une nouvelle forme de gouvernement que les simples membres de la secte partagent avec les ministres.

De toutes les pratiques des Méthodistes, la plus remarquable est celle qu'ils observent tous les ans pendant l'automne. C'est une réunion à peine croyable qui se nomme assemblée du camp, camp meetings. Elles se tiennent dans un lieu préparé à cet effet dans les bois et loin des villes. Le camp peut avoir un demi-arpent ou plus d'étendue. Il est entouré de maisons de bois, formées de troncs d'arbres, au milieu desquelles se trouve une espèce d'échafaud couvert, d'où les ministres, qui se rendent à ces assemblées en grand nombre, parlent à la multitude qui les environne; ils demeurent tous quatre jours et quatre nuits dans ce camp, et se logent dans les maisons de bois dont on vient de parler, et qui sont bientôt remplies de personnes des deux sexes. Ils ont eu soin de faire transporter sur des charriots leurs lits, des vivres, et en un mot, tout ce qui leur est nécessaire. Il se fait quatre ou cinq discours par jour, surtout le soir, tems plus favorable à la conversion de ceux qui ont besoin de se convertir. La nature de ces conver

sions s'entendra mieux par le récit de ce qui est arrivé l'année dernière dans le comté de Washington; mais il est à propos d'observer d'abord que dans le camp se trouve une espèce d'enceinte, de forme circulaire, appelée, je ne sais pourquoi, l'autel, ou, avec plus de raison, le parc, The pen or attar. Cette enceinte sert à recevoir les convertis.

Dans le discours du soir, le ministre élève extraordinairement la voix. Il invite tous les pécheurs à pleurer leurs péchés, et, pour cet effet, à entrer dans le parc. L'esprit de Dieu, dit-il, est dans le camp. Venez, ô pécheurs! ne rougissez pas de pleurer vos fautes. Poussez vos soupirs vers le ciel, et implorez la miséricorde divine. A ces paroles, des jeunes gens des deux sexes s'avancent tout-à-coup. Ils entrent dans le parc, se jettent sur la paille préparée pour les recevoir, poussent de longs gémissemens accompagnés de hurlemens horribles, et tombent enfin en convulsions. De jeunes filles, d'une complexion faible et délicate, se donnent des mouvemens si violens, que quatre femmes peuvent à peine les retenir, et sauver, s'il est possible, les apparences de la pudeur. Tout ceci cependant s'appelle opérations surnaturelles de l'Esprit. Il n'est pas, au reste, trèsétonnant que des personnes d'un esprit faible et d'une imagination vive éprouvent des convulsions dans des circonstances semblables. Tout concourt à la produire. Cinquante, et quelque fois plus de cent de ces sectaires s'occupent à la fois aux exercices que leur dicte une piété imaginaire. Le ministre fait retentir sa voix; d'autres, que l'on appelle exhortateurs, adressent les paroles les plus vives et les plus remplies d'enthousiasme à ceux qui se trouvent près du parc. Ceux-ci font entendre ces cris: miséricorde ! miséricorde! Ceux-là prient à haute voix; les uns chantent des hymnes, les autres poussent des hurlemens affreux; de sorte qu'il est presque impossible de ne point céder au torrent, et de résister à cette fermentation universelle. Il est évident que ce séjour, au milieu des bois, et dans des maisons foulées de monde, doit être la source des plus grands désordres. Aussi, quoique le prétexte de la religion soit mis en avant pour justifier de telles assemblées, l'opinion publique les réprouve, comme provoquant aux excès les plus révoltans une jeunesse licencieuse.

Les Trembleurs, shakers, possèdent dans le comté de Mercer, un établissement qui ressemble à une petite ville, habitée par des hommes et des femmes en grand nombre. Ces Trembleurs sont une secte de quakers. Dans un de leurs livres, im-. primé en 1808 à Lebanon, ville de l'Etat de l'Ohio, ils reconnaissent eux-mêmes que leur origine est postérieure à l'année 1756. Anne Lee, née en Angleterre, est considérée comme la mère de leur religion. Ils sont gouvernés actuellement par un homme et par une femme qui porte, comme la fondatrice, le nom de mère, et pour laquelle ils ont la vénération la plus profonde lorsqu'elle sort de sa maison, ce qui n'arrive que rarement, ils la prennent et l'enlèvent entre leurs bras, afin qu'on l'aperçoive à une plus grande distance.

Ils rejettent le mystère de la Sainte-Trinité, les mérites et la divinité de Jésus-Christ, la maternité de la Sainte-Vierge, la résurrection de la chair, et les autres articles de foi. Ils poussent même le blasphême jusqu'à soutenir que le Père et le SaintEsprit sont deux êtres incompréhensibles, unis dans la même essence, comme mâle et femelle, quoiqu'ils ne forment pas deux personnes. Suivant eux, le Saint-Esprit est du genre féminin, et mère de Jésus-Christ. Ils affirment encore que le Verbe divin se communiqua à l'homme Jésus, et que, pour cette raison, il fut appelé le Fils de Dieu, et que le Saint-Esprit se communiqua de même à Anne Lee, et qu'elle devint ainsi fille de Dieu. Ils condamnent aussi le mariage comme illicite; et cependant, indépendamment des danses qu'ils forment avec les femmes, ils vivent en communauté avec elles, dans l'établissement dont on a parlé. Ils s'y appliquent beaucoup au travail et excellent dans différens métiers. Il y en a parmi eux qui maintiennent la nécessité de la confession, mais non aux prétres, ni en secret.

Le culte des Trembleurs consiste principalement en danses religieuses, assez singulières. Les hommes sont rangés sur une ligne, et les femmes, placées vis-à-vis, en forment une seconde; tous sont disposés avec beaucoup d'ordre et de régularité : un homme bat la mesure en frappant ses mains l'une contre l'autre. Comme le mouvement est d'abord très-modéré, et qu'il est fidèlement suivi par ceux qui dansent, ils ne font

au commencement que jeter les pieds à droite et à gauche sans les croiser, comme dans les danses ordinaires. Mais ensuite le mouvement devenant de plus en plus vif, ils sautent aussi haut qu'il leur est possible, quelquefois jusqu'à trois ou quatre pieds de terre. Cet exercice ne finit que lorsque ceux et celles qui y prennent part sont épuisés de fatigue, et baignés de sueur. C'est alors qu'ils sont pleins de l'esprit. Dans le fort de l'action, les hommes se dépouillent de leurs habits et de leurs gilets, tandis que les robes des femmes voltigent à droite et à gauche. Il semble que le même esprit qui a inspiré les camp-meetings doit avoir suggéré l'idée de ces danses.

Il faudrait des volumes pour décrire les autres sectes et rapporter les erreurs qu'elles professent. Les Nouvelles-Lumières, appelés aussi Stonites, du nom de Stone, leur chef, suivent la doctrine des Ariens. Les Universalistes nient l'éternité des peines ; d'autres, sans nombre, maintiennent des extravagances semblables.

Enfin, dans l'Indiana, un homme, nommé Owens, se propose de former une nouvelle société. Il a réussi pendant quelque tems à se former quatre cents disciples, hommes et femmes vivant ensemble. Il prétend que, pour détruire le péché, il faut abolir la trinité du mal, c'est-à-dire toute religion, toute propriété, et le mariage. Un système aussi impie, et tout à la fois aussi destructif de toute société, ne rencontre aucune opposition de la part du gouvernement, qui ne s'occupe ni des erreurs spéculatives, ni de celles qui peuvent avoir des conséquences pratiques, si ce n'est lorsqu'elles se manifestent par quelque tumulte ou des désordres publics.

Histaire.

ORIGINE DE LA HIERARCHIE DES LAMAS.

[ocr errors]

Objections tirées du Lamisme contre le Christianisme. Réfutation Bouddha; son origine. Ne meurt jamais, mais se transforme. Etabli d'abord dans l'Inde. - Passe en Chine au 5e siècle. — Origine de sa hériarchie au 6a siècle.—Bévues historiques de Voltaire.-Comment et quand les sectateurs de Bouddha ont emprunté des pratiques et des cérémonies au Christianisme. Origine du titre de Dalai-Lama au 16° siècle. Divisions intestincs. Le dieu Lama soumis à l'empereur chinois.--Résumé de son histoire, par M. Balbi.

La ressemblance frappante de quelques symboles extérieurs du culte des Tibétains avec ceux du culte catholique, avait fait naître parmi nos soi-disant philosophes' l'idée de retrouver sur les plateaux de la Tartarie l'origine du Christianisme, et par conséquent de renverser la vérité historique des Evangiles.

En effet, les premiers missionnaires qui ont eu connaissance de la branche du culte Samanéen, établi au Tibet sous la suprême direction du grand Lama, n'avaient pas été peu surpris de retrouver, au centre de l'Asie, des monastères nombreux, des processions solennelles, des pélerinages, des fêtes religieuses, une cour pontificale, des colléges de Lamas supérieurs élisant leur chef, souverain ecclésiastique et père spirituel des Tibétains et des Tartares. Mais comme la bonne foi n'était pas moins une vertu de leur tems qu'un devoir de leur profession, ils n'avaient pas même songé à dissimuler des rapports si singuliers, et, pour les expliquer, ils s'étaient bornés à considérer le Lamisme comme une sorte de Christianisme dégénéré, et les traits qui les avaient frappés, comme autant de vestiges du séjour que les sectes syriennes avaient fait autre

1 Voltaire, Volaey, Paraud, Langlès, Bailly et plusieurs autres écrivains de l'école philosophique.

TOM. VI. N° 32. 1833.-2° édition 1836.

[ocr errors]
« PreviousContinue »