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sonne ayant qualité de traiter de cette affaire, soit enfin avec les individus, qui étant disposés à émigrer, seront libres de contracter pour eux-mêmes.

A ces effets, je vous donne les instructions suivantes, et vous remets une traduction certifiée de la lettre de M. LOWRING D. DEWEY, sous la cote A, avec une copie de ma réponse cotée B, plus un exemplaire C de la Constitution, enfin une copie D de ma circulaire aux commandants des arrondissements, sous la date du 24 décembre 1823.

Art. 1. En arrivant à New-York, vous vous aboucherez avec

disposés à venir en Haïti partager avec nos citoyens, les bienfaits d'une Constitution libérale et d'un gouvernement paternel.

D'après de nombreuses communications qui m'ont été adressées par divers de vos compatriotes les plus distingués, relativement à l'émigration en Haïti de ces enfants de l'Afrique, je me suis déterminé à envoyer aux EtatsUnis le cit. GRANVILLE, substitut du commissaire du Gouvernement, près le tribunal de cassation, qui vous remettra la présente : il est porteur d'une lettre d'introduction pour M. LowRING D. DEWEY, agent général de la Société pour la colonisation africaine, qui m'a écrit lui-même à ce sujet, ainsi que de mes instructions très-détaillées qu'il doit vous communiquer. Je vous prie de l'assister de vos bons conseils et de vos recommandations auprès de nombreux amis, afin qu'il atteigne plus sûrement le but que je me suis proposé, en faisant une démarche qui tournera tout entière au profit de l'humanité dont vous soutenez la cause avec un si grand désintéressement. Je vous prierai encore de mettre à sa disposition, sur ses reçus, parmi les fonds que vous aurez pour le compte de la République, ceux qui seront jugés nécessaires à l'acquit des frais de déplacement des individus de l'intérieur qui, ne pouvant y subvenir par eux-mêmes, voudraient se rendre au lieu de l'embarquement, pour profiter de l'avantage qui leur est offert de venir exercer chez nous une honnête industrie, et laisser à leurs enfants, avec des héritages certains, la jouissance de tous les droits politiques que l'homme en société peut raisonnablement désirer.

Depuis longtemps, Monsieur, vous consacrez vos veilles à chercher les moyens d'alléger les souffrances d'une portion du genre humain, contre laquelle la prévention et le préjugé agissent avec une impitoyable rigueur. Aussi, je ne doute pas que vous ne saisissiez l'occasion qui se présente de faire triompher les efforts de votre sollicitude et ceux de vos amis. Quelle douce joie pour des cœurs comme les vôtres de voir ces rejetons de l'Afrique, si avilis aux Etats-Unis, où ils végètent, sans utilité pour eux-mêmes comme pour le sol qui les nourrit, une fois transplantés en Haïti, devenir des êtres non moins utiles qu'estimables, parce que la jouissance des droits civils et politiques les ennoblissant à leurs propres yeux, ne peut manquer

MM. LOWRING D. DEWEY et CHARLES COLLINS, auxquels vous communiquerez vos présentes instructions; vous leur demanderez leurs conseils et leurs avis, que vous suivrez autant qu'ils pourront se trouver en harmonie avec le but de votre mission; vous remettrez aussi toutes les lettres de recommandation dont vous êtes porteur. Art. 2. Vous vous informerez des lois, règlements et usages des lieux par lesquels vous passerez, afin de vous y conformer, et de n'agir en aucun cas contre ce qu'ils prescrivent.

Art. 3. Après les visites préliminaires, étal lies en l'art. 1er, vous chercherez à voir les membres des différentes sociétés religieuses et philanthropiques, pour leur donner connaissance de l'objet de votre mission, et, comme toujours il faut agir avec loyauté et bonne foi, vous ne manquerez pas de communiquer à ceux qui s'intéresseront au succès de vos démarches, la teneur de vos instructions et des documents que je vous ai remis.

Art. 4. La Constitution ayant établi par l'art. 44, que les individus issus du sang africain, qui se rendront dans la République,

de les porter à s'attacher à des mœurs régulières, à acquérir des vertus so.... ciales, et à se rendre dignes, par leur bonne conduite, de tous les bienfaits que répandra sur cux leur nouvelle patrie! Mais les émigrants ne recueilleront pas seuls le fruit de vos soins; les Etats-Unis eux-mêmes verront s'agrandir leur commerce avec Haïti, par les relations fréquentes que ces nouveaux Haïtiens devront naturellement entretenir avec le pays qu'ils auront quitté.

Si vous jugez à propos de donner de la publicité à ma démarche, vous serez libre de le faire. Je m'en repose là-dessus entièrement sur votre prudence, bien persuadé que vous prendrez les mesures les plus convenables pour intéresser vos amis à la réussite de la présente affaire, non-seulement dans l'Etat de New-York, mais encore dans les Etats du Nord et de la Pensylvanie.

Que de droits n'aurez-vous pas, Monsieur, vous et vos honorables amis, à la reconnaissance de ceux dont vous allez tarir les larmes en leur procurant une douce hospitalité au milieu de leurs semblables, de leurs frères, de leurs amis naturels! Je vous conjure donc de ne rien négliger, pour concourir avec moi à soustraire ces infortunés aux humiliations et aux vexations de tout genre qui les accablent. Dans une si louable entreprise, Dieu qui est le père de tous les hommes, secondera aussi nos efforts.

Je vous salue avec une considération bien distinguée.

Signé : BOYER.

jouiront, après une année de résidence, de tous les droits civils et politiques et de la qualité de citoyens, vous inviterez soit par vousmême, soit par l'entremise de M. LOWRING D. DEWEY, de M. CHARLES COLLINS et de toutes autres personnes avec lesquelles vous vous serez abouché, ceux d'entre eux qui seraient disposés à quitter les EtatsUnis pour venir s'établir dans la République, à se déterminer le plus tôt possible à entreprendre le voyage, en leur faisant connaître les avantages qui leur sont assurés par la Constitution, et de plus ceux que le gouvernement est prêt à leur accorder pour les tirer de l'état humiliant et des misères où ils sont plongés.

Art. 5. Ces avantages qui attendent les émigrants sont: 4° qu'ils jouiront en Haïti de tous les droits civils et politiques (art. 44 de la Constitution); 2° qu'ils auront une entière liberté de conscience dans leurs pratiques religieuses (art. 49, Const.); 3° qu'ils pourront obtenir des concessions de terres en pleine propriété, lorsqu'ils auront établi lesdites terres (copie de ma circulaire aux commandants des arrondissements); le tout, pourvu qu'ils s'engagent à être fidèles aux lois de la République dont ils deviendront les enfants et les citoyens, et qu'ils n'entreprennent jamais rien de contraire à sa tranquillité et à sa prospérité.

Art. 6. Comme pour mieux régler les intérêts des émigrants, il conviendra de leur faire connaître en détail tout ce que le gouvernement de la République est disposé à faire pour assurer leur bien-être futur et celui de leurs enfants, à la seule condition qu'ils soient des citoyens soumis et laborieux, vous êtes autorisé à prendre, de concert avec les agents des différentes sociétés, et par-devant unc autorité civile, des arrangements avec des chefs de famille ou autres émigrants qui pourront réunir douze personnes en état de travailler, ainsi qu'à stipuler que le gouvernement leur donnera une quantité de terrain suffisante pour occuper douze personnes, et susceptible d'être cultivée en cafiers, cotons, maïs, pois ou autres légumes et vivres, et qu'après qu'ils auront bien établi ladite quantité de terrain, qui ne pourra avoir en superficie moins de 36 acres ou 12 carreaux (le carreau étant de 100 pas carrés, et le pas de 3 pieds et demi), le gouvernement donnera en toute propriété et à perpétuité la concession dudit terrain à ces douze personnes, pour elles, leurs hoirs ou ayants cause.

Art. 7. Ceux des émigrants qui préféreront se livrer individuellement à la culture des terres, soit en affermant des terrains déjà établis qu'ils se chargeront de faire valoir, soit en travaillant

des champs de société avec les propriétaires, devront également s'engager, par un acte authentique, qu'en arrivant en Haïti ils prendront les arrangements ci-dessus mentionnés, et ce, par-devant les juges de paix, afin qu'à leur arrivée ici ils soient obligés de se consacrer à l'agriculture, et ne soient pas exposés à vivre dans le vagabondage.

Art. 8. A tous, et à ceux-là seulement qui s'engageront comme il est prescrit en l'art. 6, vous serez autorisé, toujours en agissant de concert avec les différentes sociétés, de contracter que leurs frais de passage et de nourriture pendant la traversée seront payés, à leur arrivée en Haïti, par le gouvernement, qui leur assurera les moyens de subsistance pendant quatre mois après leur débarquement et placement sur le terrain qu'ils devront cultiver, délai suffisant pour qu'ils se procurent, par leurs travaux et leurs établissements, les moyens de soutenir eux-mêmes leur existence. Il ne leur sera rien réclamé pour ce qui aura été payé pour ces frais de passage et de nourriture, qui sont une donation que leur fait la République.

Art. 9. Quant à ceux qui voudront venir en Haïti pour y exercer une industrie mécanique ou commerciale, vous serez autorisé à leur assurer que leurs frais de passage et de nourriture dans la traversée seront payés en Haïti, pourvu qu'ils s'obligent, pardevant une autorité civile, aux Etats-Unis, de restituer au gouvernement de la République, six mois après leur arrivée en Haïti, l'avance qui leur sera faite.

La même facilité d'avance, à charge de remboursement, pourra être accordée à ceux qui viendraient, soit pour acheter, affermer ou travailler de société des terres établies ou à établir; soit pour s'engager comme domestiques, ouvriers ou travailleurs: la loi accordant la faculté à tout Haïtien d'exercer son industrie comme il l'entend, pourvu qu'il ne commette aucune action contraire à l'ordre public.

Art. 10. S'il se trouvait des familles du sang africain disposées à émigrer en Haïti, mais à qui leur position malheureuse ne permît pas de subvenir à leurs frais de déplacement pour se rendre au lieu de l'embarquement, vous serez autorisé, en agissant avec beaucoup de précaution et avec connaissance de cause, et toujours en consultant les agents des différentes commissions, à leur faire des avances, pourvu qu'elles n'excèdent pas six gourdes par tête pour les adolescents et autres individus jusqu'à l'âge mûr, avances

qu seront remboursables six mois après leur arrivée dans la République, ainsi qu'il devra être stipulé dans les obligations contractées par ceux qui les recevront.

Art. 11. Le but que je me suis proposé étant de favoriser en Haïti l'émigration de ceux qui sont habiles à devenir, d'après nos lois, citoyens du pays, vous ne devez pas manquer de consulter toutes les personnes dévouées à la cause de l'humanité, qui seront susceptibles de vous donner des avis salutaires; et, après leur opinion écrite et bien débattue, vous serez autorisé à convertir les petites dépenses que je n'aurai pu prévoir, et dont la nécessité serait reconnue urgente et telle qu'elle dût faciliter l'exécution de l'entreprise.

Art. 12. Vous déclarerez à tous ceux qu'il appartiendra d'en connaître, qu'il ne sera jamais accordé en Haïti, aux émigrants, d'autres priviléges que ceux établis en faveur de tous les citoyens de l'État; qu'ainsi ils ne doivent venir parmi nous qu'avec la résolution de se conformer et d'obéir à nos lois qui sont toutes protectrices et libérales, et qui garantissent à chacun sa liberté de conscience, pourvu qu'il ne trouble pas l'ordre public.

Art. 13. Vous prendrez les mesures que vous jugerez les plus efficaces pour faire parvenir à la presqu'île de Samana une quarantaine d'ouvriers (toujours du sang africain), tels que charpentiers, constructeurs, scieurs de bois, forgerons, calfats, cordiers et voiliers, qui seraient capables d'occuper un chantier de construction de petits bâtiments pour garde-côtes et pour le cabotage du pays, lesquels leur seront achetés par le gouvernement. Si ces ouvriers ont des épouses et des enfants, le gouvernement leur donnera des terres propres à la culture des cafiers, cannes, et toute espèce de vivres, grains et légumes, ce qui sera pour eux un avantage considérable.

Art. 14. Afin de ne pas être exposé à payer à des prix exorbitants les frais de passage et de nourriture pendant la traversée, il serait peut-être à propos, non-seulement de faire les approvisionnements du voyage, mais encore de fréter des bâtiments capables de porter un certain nombre d'individus, à moins que l'on ne trouvât, par les bâtiments qui font ordinairement le commerce, des occasions pour faire passer les émigrants. Je pense que 14 gourdes par tête, y compris la nourriture pendant le voyage, serait un prix raisonnable pour les adolescents, les jeunes gens et les hommes faits, et que la moitié de cette somme suffirait pour les enfants qui ont quitté la mamelle, jusqu'à ceux qui entrent dans leur douzième année. Il est bien entendu que le coût des approvisionnements, les

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