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>> et fait venir de puissans secours qui ruinent cet assiégeant, » soit en lui coupant les rivières, soit en forçant ses lignes. » Combien de grands capitaines ont échoué devant un château >> bien fortifié; combien de belles et puissantes armées se sont » entièrement ruinées devant les remparts d'une citadelle! » Elles ont alors à combattre non-seulement le soldat, mais les » injures de l'air, le froid et le chaud, les pluies, les neiges, la » grêle, la disette, les maladies, le désespoir. Qui ne sait quels >> avantages les Impériaux retirèrent de la prise de François Ier, » qui ne tomba entre leurs mains, que parce que Pavie, bien >>fortifiée et bien défendue, l'arrêta long-temps. Charles-Quint, >> presque toujours victorieux en rase campagne, trouva devant » Metz, les bornes de sa victoire et de sa fortune, et fut obligé » de lâcher le pied avec une perte très-considérable. »

CHAPITRE III.

Les menaces de l'enneini, les bombardemens, les surprises, les attaques partielles annoncent ordinairement l'impuissance où il est de former une attaque régulière. Tous ces moyens doivent être repoussés avec mépris.

IL n'est aucun Militaire, sans doute, qui ne soit bien convaincu maintenant, qu'en obéissant à la loi qui lui prescrit de défendre son poste jusqu'à la dernière extrémité, il remplit un devoir important envers sa patrie; ainsi on le trouvera toujours disposé à repousser de son énergie les plus violentes attaques. De quel oil une garnison valeureuse se verra-t-elle donc insultée par de simples bravades, par de vaines menaces qui décèlent presque toujours l'impuissance de former un siége régulier?

Si l'on réfléchissait sur les immenses préparatifs qu'exige le siége en forme d'une place lorsqu'elle est bien défendue, on serait bien rassuré par un triple rang de forteresses, telles que celles dont la France est entourée; car à peine l'ennemi en aurait-il pris une, en la supposant vaillamment défendue, qu'il ne lui resterait plus de moyens matériels, au moins à proximité, pour en attaquer une seconde, et encore moins une troisième. Il est donc tout simple qu'avant de s'engager dans une pareille entreprise, il essaie tous les moyens de parvenir plus promptement et plus économiquement à son but. Ainsi, il fait jouer d'abord les ressorts de la terreur, de la surprise, des attaques de vive-force de la corruption; il entretient des intelligences dans la place, il y fomente des divisions, il paralyse les forces du dedans par la

défiance; il déploie au dehors un appareil fictif de troupes et d'artillerie; il menace, il bombarde les habitans, pour que l'épouvante et la confusion les porte à se rendre tout de suite.

Sans une grande prévoyance de la part des chefs pour prévenir un semblable désordre, sans une vigilance extrême pour dépister dès le principe les mal-intentionnés, sans la plus vigoureuse fermeté au milieu de la crise, le danger de perdre la place dans ces circonstances, est souvent plus grand qu'au moment même d'un assaut auquel on s'attend, et dont la défense est préparée; ce danger pourtant n'est réel que par le défaut d'ensemble dans les mesures, et parce qu'on ignore que les précautions les plus simples suffisent pour dissiper ce nuage. Les places de Lille, de Thionville, de Landau, nous ont donné un bel exemple de la conduite à tenir en pareil cas, au commencement de la révolution, et lorsque ces sortes d'attaques étaient, pour ainsi dire, encore toutes nouvelles pour nous.

Mais les expéditions de ce genre nous ont mieux réussi qu'aux ennemis; car il n'était car il n'était presque aucune de leurs places qu'on ne pût enlever au moyen de quelques bombes jetées, en y joignant la menace d'en jeter davantage. On pencha donc alors pour l'opinion du maréchal de Saxe, qui ne veut de fortifications que dans les lieux où il n'y a point de bourgeoisie, c'est-à-dire, que M. de Saxe ne voudrait que de simples camps fortifiés, dans des lieux où l'on n'entretiendrait que de la troupe régulière, pour qu'elle puisse se défendre à toute extrémité, et faire des retranchemens successifs, sur toute l'étendue du terrain renfermé dans l'enceinte. Ce système mériterait d'ètre discuté, s'il était question de construire de nouvelles places fortes; mais on n'ira pas détruire tout ce qui existe pour s'établir sur une nouvelle base qui a aussi ses inconvéniens, ainsi que l'a judicieusement observé le général d'Arçon. Voici comment il s'exprime à ce sujet:

« On dira, par exemple, qu'à la manière dont on attaque

>> les places aujourd'hui, avec des moyens d'artillerie mons>> trueux, des bombes foudroyantes, des projectiles incendiaires, » des pluies de pierres et de feu, etc., il n'est plus permis, en » cet état de choses, de faire participer les citoyens des villes à » ces désastres; que la masse des habitans, dans les villes plus » ou moins peuplées, pourroit se soulever et forcer la partie » militaire à des redditions prématurées ; qu'en conséquence il >> faut abandonner toutes les communes fortifiées, raser ces >> remparts qui leur attirent tant de calamités, se porter en des >> lieux inhabités, y élever des fortifications, et fonder ainsi des >> places toutes militaires et rien que militaires.

» Loin d'affoiblir l'objection, je ne sais si elle a été présentée » sous des dehors aussi favorables; quoi qu'il en soit, ces asser>>>tions paroissent assez fortes pour mériter un examen. Nous » observerons d'abord, que les partisans de cette opinion ont » peut-être trop affecté de grossir la somme des calamités aux>> quelles les villes assiégées se trouvent exposées; que ce n'est » pas d'aujourd'hui que l'on pratique l'usage des bombardemens » et des matières incendiaires; que ces moyens de destruction >> furent anciennement très - accrédités; ce qui n'empêcha pas » que du sein de ces villes embrasées on ne vît sortir les plus >> vigoureuses défenses; que dans ces temps-là on savoit très» bien parer et remédier à ces accidens, et qu'à l'avenir les » progrès de l'industrie conservatrice, dont nous parlerons à la >> suite, fourniront pour s'en garantir, des ressources bien au>> trement effectives. On observe d'ailleurs, qu'en jetant les yeux » sur toutes les villes qui ont éprouvé ces malheurs pendant laisse de les retrouver >> cette guerre (de la révolution), on ne pas >> encore florissantes. Nous ne parlons pas d'un grand nombre » de communes, grandes ou petites, qui ont éprouvé de vé>> ritables désastres; mais ce n'étoit pas assurément comme » places de guerre, puisque celles-là précisément ne sont point » fortifiées ; ce sont les feux empoisonnés de la discorde,

cent

>> fois

:

» fois plus violens et plus désastreux que tous ceux des guerres » extérieures. Mais nous citerons les bombardemens de Lille, » Thionville, Landau et d'autres encore peu de temps après, >> tout étoit réparé. Les indemnités nationales ont effacé ces >> malheurs du moment, et les citoyens, loin de s'en plaindre, » s'enorgueillissent de leurs pertes et de leurs dangers, et les » citoyens, loin de provoquer des redditions, ont contribué es>> sentiellement à leur défense.

» Mais ce qu'il faut surtout observer, ce sont les communes » des villes de guerre, qui ont été respectées parce qu'elles étoient » fortifiées, tandis que les villes ouvertes, à portée des frontières » ont été doublement saccagées, et à plusieurs reprises, ruinées, » pillées, brûlées, et les notables entraînés en ôtage pour caution » de contributions énormes, et auxquelles même il étoit im» possible de satisfaire. Remarquez que ces calamités sembloient » être confusément prévues; car il n'existe peut-être pas une » de ces communes ouvertes, dans le voisinage des frontières » qui, dès le commencement de cette guerre, n'ait réclamé en » général quelque moyen pour s'en garantir, et c'étoit, par le » fait, demander des fortifications.

» Il faut observer que les pertes occasionnées par les bombes » et autres projectiles, se réduisent à très-peu de chose. Dans » une petite place telle que Landau, lors des siéges de l'autre » siècle, où les attaques les plus violentes se sont prolongées >> pendant 70 et 80 jours, où les citoyens étoient dépourvus des » abris que l'on réservoit aux défenseurs; on voit au total cinq >> habitans tués ou blessés par accident. Les derniers bombar» demens de Landau, Lille, Thionville et autres places, n'ont » pas occasionné de plus grandes pertes à proportion : mais il >> faut distinguer les accidens provenant des incendies; ces ac» cidens furent fréquens et terribles dans les premiers jours du » dernier bombardement de Lille; mais c'est qu'on y avoit ou» blié les plus simples précautions. Les citoyens, bientôt revenus

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