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Besançon, où il reçut l'ordre de son licencie

ment.

Tels furent les principaux événements qui, sur les divers points du royaume, signalèrent l'apparition des ordonnances de juillet. En comparant avec soin ces événements entr'eux, on est frappé des caractères d'uniformité qu'ils présentent. Partout un sentiment marqué d'irritation contre le coup-d'état et d'incrédulité dans son succès; partout une disposition spontanée ou inspirée à légaliser la révolte populaire par l'intervention de la garde nationale, cette armée des classes moyennes de la société. Mais, disons-le, l'état des esprits y décèle plus d'intention de résister aux mesures extra-légales que de volonté réelle de renverser la dynastie de Charles X. L'attitude des chefs politiques, si décidée, si énergique presqu'au début de l'insurrection parisienne, est ici circonspecte et incertaine. C'est évidemment d'en haut qu'ils attendent une impulsion définitive; les masses populaires s'ébranlent au seul cri de Vive la Charte; la résistance est partout; la Révolution n'est qu'à Paris. L'avénement du nouveau pouvoir, qui calme rapidement sur presque tous les points les tempêtes soulevées par les ordonnances, est généralement accueilli dans les provinces avec plus de do

cilité que d'entraînement véritable. On l'accepte comme un moyen plausible d'ordre et de pacification dans des circonstances difficiles, comme une transaction naturelle entre la royauté vaincue et la République qui effraie, plutôt que comme un événement national, ou même une victoire de parti. Ainsi la Révolution de juillet s'imprégnait dès son origine de ce caractère de soumission et de nécessité qui n'a cessé d'être invoqué depuis comme le principe par lequel elle s'est consommée, et qui, par la force des choses, est insensiblement devenu l'élément le plus solide de sa puissance et de sa stabilité.

CHAPITRE TROISIÈME.

Ouverture de la session législative par le lieutenant-général. Proposition de M. Bérard. Discussion aux deux Chambres sur cette proposition. Discours de MM. de Conny, B. Constant, Delaborde, de Podenas, de Martignac, Berryer, Dupin aîné, Mauguin, à la Chambre des députés. - De M. de Châteaubriand à la Chambre des pairs.- Séance du 9 août. - Louis-Philippe prête serment à la Charte comme roi des Français. - Réflexions sur son avénement au trône.

Le duc d'Orléans ouvrit la session législative le 3 août, en sa qualité de lieutenant-général du royaume, sur les lettres closes envoyées peu de jours avant, au nom de Charles X. La réunion eut lieu au palais de la Chambre des députés. Elle se composait de 60 pairs et de 240 députés environ, tous en costume de ville. Le cérémonial se fit avec la même solennité qu'au temps de la Restauration. L'estrade du trône était couverte de vastes draperies de velours cramoisi encore parsemées de fleurs de lys d'or; la couronne était surmontée

d'un drapeau tricolore. La duchesse d'Orléans, Madame Adélaïde et les jeunes princesses assistèrent à la séance dans une tribune réservée. Un tabouret, placé à droite du trône, était destiné au lieutenant-général; le duc de Nemours, son second fils, s'assit à sa gauche. Le duc d'Orléans salua l'assemblée avec émotion, et après avoir invité, sans distinction, les pairs et les députés à s'asseoir, il prononça un discours dont nous reproduirons quelques passages (1):

«< Paris, dit-il, troublé dans son repos par une déplorable violation de la Charte et des lois, les défendait avec un courage héroïque. Au milieu de cette lutte sanglante, aucune des garanties de l'ordre social ne subsistait plus : les personnes, les propriétés, les droits, tout ce qui est précieux et cher à des hommes et à des citoyens, courait les plus graves dangers. Dans cette absence de tout pouvoir public, le vœu de mes concitoyens s'est tourné vers moi ; ils m'ont jugé digne de concourir avec eux au salut de la patrie; il m'ont invité à exercer les fonctions de lieutenant- général du royaume. Leur cause m'a paru juste, le péril immense, la nécessité impérieuse, mon devoir sacré.

(1) Voyez, aux Documents justificatifs, pièce Y, le texte de ce discours.

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