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CHAMBRE DES DÉPUTÉS.

PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.

Comité secret du 8 janvier 1816.

Après la lecture du procès-verbal du comité secret du 5. il s'élève une discussion sur l'adresse lue dans la mème séance.

M. le Président dit que la Chambre, en adoptant l'adresse, a semblé désirer qu'elle fût abrégée. Il annonce que Sa Majesté n ayant pas encore indiqué le jour où elle permettra qu'elle lui soit présentée, la Chambre pourra en entendre une seconde lecture dans une autre séance.

M. le Président propose et la Chambre vote la réimpression des budgets des contributions directes, des douanes et des contributions indirectes de l'année dernière, tirés du Bulletin des lois.

M. le Président fait ensuite savoir à la Chambre que, sur la demande qui lui en a été faite, M. le ministre des finances a envoyé les budgets particuliers des différents ministères, et qu'ils seront déposés dans un lieu où tous les inembres pourront en prendre connaissance. La même mesure aura lieu pour le bilan de la caisse d'amortissement et pour toutes les autres pièces originales relatives au budget.

On procède au renouvellement des bureaux. Cette opération étant terminée, M. Lachèze-Murel est appelé à la tribune pour le développement de la proposition tendante à faire rendre aux curés et desservants les fonctions d'officiers de l'état civil, et attribuer les mêmes fonctions aux ministres des autres cultes chrétiens.

M. Lachèze-Murel. Messieurs, je n'ai pas à examiner si les prêtres, dispensateurs des sacrements, ont toujours tenu registre des baptêmes, mariages et sépultures.

Mais je sais que, par la nature des choses, ils ont dû le faire.

Ils ont dù le faire à l'égard du baptême, parce que ce sacrement, qui imprime le caractère auguste de chrétien, ne se réitère pas, et que si on peut le conférer une seconde fois, ce n'est que sous condition, et en cas de doute sur le premier.

Ils ont dù le faire à l'égard du mariage, parce que l'Evangile défend à un mari d'avoir plusieurs femmes, comme à une femme d'avoir plusieurs maris.

La nécessité de tenir registre pour les décès

T. XVI.

des chrétiens n'était pas moins indiquée; elle dérivait également de la défense de la polygamie et de la bigamie, puisqu'il devait être constant que l'époux qui avait survécu était libre, et pouvait former un nouveau lien.

Je crois voir que les ministres de la religion tenaient les registres longtemps avant que la puissance publique s'aperçut que l'état des individus tenait a la constitution des familles, et la constitution des familles à l'ordre social; qu'ainsi la matière était mixte et du domaine de la puissance religieuse sous le rapport religieux, comme du domaine de la puissance civile en ce qui regardait l'ordre social.

La plus ancienne de nos ordonnances où je trouve quelques dispositions à ce sujet, est celle de 1539, aux articles 50 et 51.

L'ordonnance de Blois 1579, article 81, confirma l'ordonnance de 1539, et l'ordonnance de 1667 ajouta plusieurs dispositions à celles des ordonnances précédentes, et fixa, si je puis m'exprimer ainsi, l'économie de la tenue des regis

tres.

La déclaration du 9 avril 1736, ouvrage du grand chancelier d'Aguesseau, était la dernière loi que nous eussions sur cette matière, et je ne dirai rien de trop en disant que de mesure en mesure, de précaution en précaution, on était arrivé à ce point que cette partie de la législation française était la plus belle et la mieux exécutée de l'Europe.

Ici je dois remarquer que, jusqu'à la déclaration du 9 avril 1736, les curés et desservants n'étaient obligés que de remettre, au commencement de chaque année, des copies collationnées de leurs registres, et que ce fut le chancelier d'Aguesseau qui les soumit à les tenir en double minute, faisant original l'une et l'autre.

Ici je dois encore admirer la sagesse de nos rois, alors seuls législateurs; ils savaient fort bien que les preuves de l'état civil intéressaient éminemment l'ordre social, et que, sous ce rapport, c'était à eux à y pourvoir.

Mais ea maintenant les droits de la puissance publique, ils en déléguèrent l'exercice à ceux qui étaient chargés de pourvoir à la même chose, sous un autre rapport.

Le motif de cette délégation était tout entier dans l'intérêt des mœurs, et avait pour objet de donner une plus grande influence à la religion. Nos rois maintinrent si bien les droits de la puissance publique, que, comme officiers de

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l'état civil, les curés et desservants étaient justiciables de cette puissance, et punissables par les tribunaux, s'il y avait eu malversation de leur part, ou négligence, même pour simple retard à remettre au greffe des tribunaux royaux une des doubles minutes de leur registre, dans le premier mois ou les cinq premières semaines de chaque année.

Hélas! la France avait mérité par ses crimes de perdre le bonheur dont elle jouissait, et cette preinière Assemblée, tant exaltée par les apôtres de l'impiété et les ennemis de tout ordre, mais contre laquelle l'histoire formulera une si terrible accusation, dérangea l'ordre des choses que j'ai rappelé, et décréta qu'il serait établi, pour tous les Français sans distinction, un mode uniforme de constater les naissances, mariages et décès.

La première Assemblée ne posa que le principe. La loi du 20 septembre 1792 lui donna son développement, et ordonna que les conseils généraux des communes nommeraient parmi leurs membres, suivant l'étendue et la population des lieux, une ou plusieurs personnes qui seraient chargées des fonctions d'officiers de l'état civil.

Le désordre fut bientôt à son comble. Pour y remédier on fit plusieurs lois. Ce sont celles des 19 novembre 1792, 28 nivôse, 14 et 21 fructidor an II, 3 ventôse an III et 19 vendémiaire an IV. Enfin la loi du 28 pluviose an VIII chargea les maires de remplir les fonctions d'officiers de l'état civil.

Je ne rappellerai pas les dispositions de ce nombre, plus qu'effrayant, de lois sur la même matière, portées dans un si court espace de temps; mais s'il est vrai qu'on puisse juger des mœurs d'une nation d'après les lois sous lesquelles elle vit, il est peut-être plus vrai qu'on peut juger l'esprit et les mœurs des législateurs d'après les lois qu'ils ont portées.

Eh! pouvaient-ils mieux, ces législateurs, signaler leur folie, qu'en signalant leur haine contre toute religion, et mieux signaler leur baine contre toute religion, qu'en défendant d'avoir égard aux registres tenus par les ministres des cultes, et en condamnant à des amendes et à l'emprisonnement tout officier de l'état public qui aurait seulement fait mention sur son registre de l'observation de quelques cérémonies religieuses.

Je vous supplie, Messieurs, de retenir que ces lois sont encore dans toute leur force.

Les auteurs du Code civil trouvèrent les choses dans l'état où les avait placées la loi du 28 pluviôse an VIII: et, ce qui est digne de remarque, c'est que les mêmes hommes qui consacrèrent le divorce, furent cependant frappés de tous les inconvénients qui résultaient de la confiance que la loi avait accordée aux maires de campagne, presque tous non lettrés, et de toutes les malversations qui devaient en être la suite. Ils laissèrent entrevoir la nécessité de rendre la confiance de la loi à ceux qui l'auraient justifiée ; mais ne trouvant pas les esprits assez disposés à ce changement, ils se bornèrent à s'énoncer de manière qu'il pût être opéré lorsque les circonstances le permettraient.

Qu'il me soit permis de citer ici, en preuve de ce que j'annonce, ce passage de M. Siméon, dans l'un de ses discours.

« L'Assemblée constituante, dit-il, trouva les « registres de l'état civil entre les mains des «< curés. Il était assez naturel que les mêmes << hommes dont on allait demander les bénédic«tions et les prières aux époques de la naissance,

« du mariage et des décès, en constatassent les « dates, et en rédigeassent les procès-verbaux. « La société ajouta sa confiance à celle que leur << avait accordée la piété chrétienne. Seulement << on les soumit à remettre le double de leurs « registres aux greffes des tribunaux, protecteurs « et juges de l'état civil, dont les prêtres ne pou<< vaient être que les premiers dépositaires.

« Il faut avouer, continuait M. Siméon, que << les registres étaient bien et fidèlement tenus « par des hommes dont le ministère exigeait de << l'instruction et une probité scrupueluse. Leur «< conduite, surveillée par les lois, comme celle « des autres citoyens, était garantie par la sanc«<tion plus spéciale de la religion qu'ils ensei«< gnent. »>

M. Siméon avouait ailleurs, que les curés n'auraient pas toujours été heureusement remplacés. Il se plaignait d'omissions, d'inexactitudes et d'infidélités.

Aussi le Code civil s'est-il borné à laisser les maires en possession d'exercer les fonctions de l'état civil, sans leur faire une attribution de ces fonctions. Jamais on n'a parlé des maires, comme devant toujours les exercer. Le Code se borne à prononcer que les actes de naissance, mariage et décès, seront reçus par des officiers de l'état civil, sans désigner ces officiers ni déléguer leurs fonctious à personne. Aussi tous ceux qui ont écrit sur cette matière conviennent que le déplacement de ces fonctions est purement réglementaire.

Il faut envisager les choses sous leur véritable point de vue. J'entends accuser des individus, critiquer des mesures, s'indigner contre des fautes.

Mais est-ce là la véritable source de nos malheurs? Non, Messieurs, et vous jugerez avec moi que tous les malheurs qui ont accablé et qui accablent encore la France, sont l'effet inévitable de la dépravation des mœurs.

Vous vous êtes prêtés à tout ce que le gouvernement a voulu. Il peut être fort et redoutable quand il voudra, et il a besoin de le devenir; mais en politiques habiles, nous devons attaquer la cause du mal.

Ce n'est pas une chose aisée que de rendre des mœurs à une nation, et s'il est possible d'y parvenir, ce ne peut être que par l'influence de la religion.

Pour obtenir de cette influence, ce précieux résultat, il faut avoir de bons prêtres; et pour avoir de bons prêtres, il faut les élever au-dessus du besoin, il faut leur témoigner que l'on sait apprécier leurs vertus et leurs services; il faut leur donner un rang, il faut enfin forcer d'avoir recours à eux, aux grandes époques de la vie.

Nos pères étaient bien plus habiles dans l'art de gouverner les hommes; au lieu d'avilir les prêtres, ils avaient fait du clergé le premier ordre de l'Etat, et ce n'était pas pour les individus qui étaient leurs enfants, leurs voisins, leurs amis, qu'ils l'avaient fait, mais afin de rendre la religion plus recommandable par l'hommage qu'ils lui rendaient dans la personne de ses ministres.

Quel est le père, quelle est la mère qui ne soient disposés à chérir celui qui appelle sur leur nouveau-né toutes les bénédictions du ciel!

Quel est l'époux, quelle est l'épouse qui ne chérissent aussi celui qui, recevant leur promesse mutuelle, forme des voeux si ardents pour leur bonheur et le bonheur de leurs enfants!

Et cet homme, livré à la douleur par la perte

de son père, de son fils, de son ami, ne voit-il pas avec reconnaissance que son pasteur la partage, et qu'il ne suspend la sienne que pour implorer la miséricorde de Celui qui tient dans ses mains la destinée de tous les hommes ?

Daignez considérer, Messieurs, combien ces rapports sont touchants, combien ils sont propres à faire obtenir la confiance; et que ne peut un véritable pasteur investi de la confiance de ses paroissiens, pour les porter au bien et les détourner du mal!

Non, Messieurs, non, jamais je ne me persuaderai qu'une promesse faite aux pieds des autels, dans un recueillement religieux, devant Dieu dont on adore la présence, ne soit une chose bien plus sacrée, et ne soit regardée comme plus digne de respect, que si elle était seulement faite au milieu d'un festin de noces, ou sous le simple toit d'un maire de village, ou même quelquefois au milieu d'une orgie.

On se plaint, et avec raison, des progrès effrayants de l'immoralité dans nos campagnes; ces progrès peuvent avoir plusieurs causes, mais je ne balance pas à indiquer comme la principale de ces causes, la funeste division des deux pouvoirs, civil et religieux, pour les actes de naissance, mariage et décès.

Si vous les parcouriez, ces campagnes, vous y rencontreriez des hommes nés depuis 1792, encore hors du christianisme, mariés, déjà pères de famille, qui, s'ils croient à l'existence de Dieu, ne lui ont jamais rendu et ne lui rendront peut-être jamais ni adorations ni hommages; qui ne peuvent avoir d'autre frein que celui de la loi, frein le plus souvent insuffisant quand on peut se dérober aux regards et qu'on croit pouvoir être méchant avec impunité. De là, tous ces crimes dont le nombre et l'atrocité effrayent l'imagination. Les enfants de ces hommes seront pires que leurs pères; ils le seront par l'effet de la corruption toujours croissante; ils le seront par l'effet de l'exemple de leurs pères, et je vous supplie de considérer si de cet état de choses, il y a un grand espace à parcourir pour arriver à la barbarie.

D'après la législation actuelle, le mariage civil doit précéder le mariage religieux, et il faut que le mariage civil précède le mariage religieux, à peine d'amende contre le prêtre, même à peine de déportation, en cas de récidive; et si, ce qui est arrivé plusieurs fois, après avoir célébré le mariage civil, l'une des parties ne veut pas célébrer le mariage religieux, dans quelle situation terrible ne se trouve pas placée celle des parties qui croit à sa religion et veut l'observer?

Supposons que ce soit le mari qui ne veuille pas célébrer le mariage religieux, et que la femme le veuille; alors celle-ci est épouse sans l'être; elle a cependant voulu l'être, et ne peut le devenir, et si l'homme veut user de la faculté que lui accorde la loi, de forcer la femme à venir habiter avec lui, alors cette victime de sa conscience est obligée de vivre dans une union que sa religion condamne, qui la dégrade à ses propres yeux, et peut même la flétrir dans l'esprit de ceux qui partagent sa croyance.

Elle ne peut même espérer de sortir de cet état déplorable, à moins que la mort de celui qu'elle ne regarda jamais comme son époux légitime ne vienne briser les liens civils du mariage, ou que les sévices et mauvais traitements qu'elle peut avoir éprouvés, ou autres causes déterminées, ne l'autorisent à former une demande en divorce. J'observe encore que cette triste et dernière res

source peut lui répugner, à cause du scandale qu'elle amènerait.

Et voilà l'un des développements du sens que nos faiseurs de révolutions attachaient au mot de liberté.

Toute liberté de n'avoir pas de religion, contrainte et torture pour ceux qui voulaient la suivre et la mettre en pratique.

Des avantages moraux que renferme ma proposition, je passe aux avantages politiques.

Le premier de ces avantages est d'avoir des registres régulièrement tenus, et sur lesquels seront rapportés les naissances, mariages et décès à l'instant même que les baptêmes, mariages et sépultures auront été faits.

Comment sont tenus aujourd'hui les registres, au moins dans les campagnes? Un enfant naît; un homme meurt. Je veux qu'on en donne avis au maire. Mais on le trouve occupé de ses travaux champêtres. Se dérangera-t-il pour aller faire l'acte? Non, Messieurs; et ce sera tout au plus le dimanche d'après, si toutefois il ne l'oublie pas, qu'il rédigera cet acte, et dans l'ordre que sa mémoire, peut-être infidèle, pourra lui fournir.

De là combien d'actes dont la dale est avancée ou reculée! de là combien d'actes de naissance et de décès qui ne se trouvent même pas rapportés ? de là enfin combien d'embarras et de difficultés, de frais et de procès !

Je n'ai reproché aux maires de campagne que des erreurs et des inexactitudes; mais en est-il un seul d'entre nousà la connaissance duquel ne soient parvenues des prévarications à prix d'argent? Les lois relatives à la conscription ont été pour plusieurs une mine d'or qu'ils ont exploitée avec un heureux succès. Cette occasion de corruption se trouve heureusement retranchée; mais s'il s'en présentait quelque autre, vous auriez la conviction de cette triste vérité, que l'occasion du mal manque plutôt à un très-grand nombre de personnes, qu'un très-grand nombre de personnes manquera l'occasion du mal.

L'Evangile ne détermine aucune forme de gouvernement. Comment en aurait-il déterminé lorsque son divin auteur disait que son royaume n'était pas de ce monde ? Il les approuve toutes; il oblige seulement à respecter le gouvernement qui est établi, et à obéir à ceux qui sont les dépositaires de la puissance, non par le fait, mais lorsqu'ils ont pour eux la sanction du temps.

Et cette obéissance ne doit pas être rendue seulement par motif de crainte, mais son principe doit être dans la conscience.

Ce qui est monarchique dans la religion, c'est le régime catholique. Voyez cette échelle en haut de laquelle se trouve le souverain pontife, et le simple vicaire au dernier échelon; et c'est dans ce sens qu'il est vrai que la religion catholique est la religion des monarchies.

Tout prêtre qui aime son état, qui en a l'esprit et les vertus, doit naturellement aimer la monarchie.

Il y a eu des mauvais prêtres, j'en conviens; mais en combien plus grand nombre ne sont pas ceux qui sont demeurés fidèles à Dieu et au Roi, et qui sont encore aujourd'hui si utiles! et combien n'y en a-t-il pas eu qui se sont estimés heureux de verser leur sang pour leur foi religieuse et politique!

Il faut ramener le peuple que l'ignorance et la crédulité mettent à la disposition du premier imposteur qui veut s'en emparer. Les faits parlent la plupart des maires l'ont égaré. Les prètres feront leur devoir; ils le font, et, certes, vous

avez plus à compter sur eux que sur les maires. D'après ce que j'ai pu recueillir, on reconnaît assez généralement l'avantage de la mesure; mais on craint que les esprits ne soient pas assez disposés, et on objecte qu'il y a en France beaucoup de paroisses où il n'y a pas de desservants.

La première considération arrêta, comme je l'ai dit, les auteurs du Code civil; mais il s'est écoulé plus de douze ans depuis sa promulgation; et quand les esprits seront-ils donc assez disposés, s'ils ne le sont après un temps aussi considérable, et surtout après les terribles leçons que les événements nous ont donnés?

Ceux qui expriment cette crainte sont loin de connaitre toute la force de l'opinion que votre attitude et la mesure que vous avez mise dans votre conduite vous ont donnée. Déjà plusieurs écrivains distingués se sont prononcés sur ma proposition, et m'ont devancé dans le public. J'ai la confiance que si vous l'accueillez, vous vous concilierez une plus haute estime; que les bons vous en béniront, et que s'il se trouve des personnes qui ne partagent pas l'acclamation universelle, elles auront assez de pudeur pour se condamner au silence.

Il est vrai que la hache des bourreaux, la misère et le temps ont beaucoup diminué le nombre des ecclésiastiques.

D'un autre côté, la jeunesse n'ayant en perspective, dans cet etat, que des humiliations, des privations et des souffrances, il a fallu une vocation bien prononcée pour se décider à l'embrasser.

Cependant, je crois qu'en prenant en masse tout s les paroisses de France, on en trouverait les trois quarts, et peut-être un plus grand nombre, qui sont pourvues de desservants.

Priverez-vous les trois quarts des paroisses de France d'un bienfait, parce que l'autre quart a le malheur accidentel de ne pouvoir en profiter?

Et ce n'est pas qu'il n'y ait toujours des officiers de l'état civil pour celles-ci, puisqu'à défaut de prêtres, les maires pourront continuer à exercer les fonctions qu'ils exercent aujourd'hui.

Prenez garde d'ailleurs, Messieurs, que la mesure proposée n'est pas seulement une mesure d'ordre public, et une mesure qui doit rendre le ministère ecclésiastique plus utile, mais encore elle doit faire concevoir l'espérance d'un meilleur avenir pour les prêtres; et ce sera un puissant encouragement pour chercher à mériter d'être élevé au sacerdoce.

Au surplus, je ne propose que la consécration du principe; et ce sera au gouvernement, lorsqu'on travaillera à la rédaction de la loi, à s'occuper des détails.

Il est possible qu'on objecte encore que, si, dans certaines paroisses, les registres sont tenus par les curés, il n'y aura plus unité et uniformité. Uniformité! théorie vaine et quelquefois nui

sible!

On a porté une loi pour régler le partage des successions d'une manière uniforme; et cette loi est désastreuse pour nos départements pauvres. Elle me donne la douleur de prévoir que mes petits-enfants pourront n'avoir pas de pain.

C'est à la stricte exécution de la loi qu'il faut s'attacher, et non à l'uniformité, et il n'y a pas surtout à confondre l'uniformité dans la chose avec l'identité des agents.

L'uniformité dans la chose, qui est ici sans aucun inconvénient, existera tout entière, puisque prêtres, ministres et maires, seront tous sou

mis aux mêmes rêgles, et auront tous les mêmes formules à remplir.

Il y aura seulement diversité dans les agents, puisque les uns peuvent être prêtres, les autres ministres, les autres maires. Mais qu'importe ! et cela présentera-t-il même quelque chose de nouveau? Les hôpitaux n'avaient-ils pas des registres particuliers, quoique les curés eussent les leurs? Les maires ne tenaient-ils pas des registres, en conséquence de la loi de 1787, qui détermina un mode pour constater les naissances, mariages et décès des non catholiques, lorsque les curés tenaient les leurs pour les catholiques?

Cet état de choses a subsisté depuis 1787 jusqu'à la loi de 20 septembre 1792, sans confusion, et sans que personne se soit jamais plaint qu'il en résultât des inconvénients.

En proposant d'attribuer les fonctions d'officiers de l'état civil aux ministres des chrétiens non catholiques, c'est une faveur que je propose pour ceux-ci, mais qui me paraît résulter de l'article 5 de la Charte, d'après lequel: « Chacun professe « sa religion avec une égale liberté, et obtient « pour son culte la même protection. »

L'Evangile est le code des non catholiques, comme le nôtre. Leurs ministres sont des prédicateurs de morale, et si leur ministère ne peut pas être aussi efficace que celui de nos prêtres, du moins il sera plus utile que celui des officiers actuels de l'état civil.

On répare les pertes d'argent; on répare les pertes d'hommes; mais ce qu'il y a de plus difficile à réparer, c'est la perte des mœurs. Vous étes tous pénétrés de cette vérité, que c'est vers leur rétablissement que tous vos efforts doivent être dirigés. J'ai depuis longtemps la conviction que la mesure que j'ai l'honneur de vous proposer peut produire les effets les plus salutaires. Dès lors je nai pas dû hésiter à vous en entretenir, et j'ai la confiance que vous daignerez la prendre en considération.

Après une discussion dans laquelle quatre membres sont entendus, la Chambre décide que la proposition sera prise en considération et que les développements seront imprimés.

La séance est levée.

KENOUVELLEMENT DES BUREAUX DU 8 JANVIER 1816.

1er bureau.

2e bureau.

3e bureau.

4e bureau.

5e bureau.

Ge bureau.

7e bureau.

M. Chilhaud de la Rigaudie, président.
M. le comte Charles de Vogué, secrétaire.
M. le comte de Béthisy, président.
M. Feuillant (Etienne), secrétaire.

M. de Bonald, président.

M. Fornier de Clauzelles, secrétaire. (M. le prince de Broglie, président.

M. le chevalier Cardonnel, secrétaire.

M. de Grosbois, président.

M. de Villèle, secrétaire.

M. le prince de La Trémoille, président. M. le comte de Bruyère Chalabre, secrétaire. M. Corbière, président.

M. Amariton de Montfleury, secrétaire.

M. Pardessus, président.

M. le vicomte de Castelbajac, secrétaire.

8e bureau.

9o bureau.

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