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que, dans le nouvel établissement, à Paris, il 11.o Ep. n'y aurait plus de distinction de place, et que les députés de tous les ordres siégeraient indistinctement; cette résolution n'était qu'une suite de celle prise quelques jours auparavant, pour que les suppléants aux députés démissionnaires fussent nommés dans les assemblées de bailliage, par les ordres réunis et votant individuellement par tête ainsi la constitution se trouvait faite plus tôt qu'elle ne se faisait; on conserva encore, par une sorte de ménagement plus politique que conséquent, la division hiérarchique des ordres dans l'appel nominal qui avait lieu pour connaître la majorité, lorsque la forme de voter, par et levé, la laissait douteuse; on apprivoisait ainsi doucement les préjugés avec les principes, et cette marche plus lente, et peut-être moins compatible avec la dignité de la loi, eut du moins cet avantage, qu'elle prévint des secousses, et qu'un reste d'espérance se mêlant toujours aux craintes et aux inquiétudes, elle éloignait les emportements du désespoir, toujours dangereux quand il ne voit plus rien à ménager.

assis

Tome I.

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TROISIÈME ÉPOQUE.

III. Ep.

Translation de l'assemblée à Paris. Les biens

du clergé déclarés propriété nationale. Troubles dans les départements du Midi. Droit de paix et de guerre. Première Fédération au 14 juillet 90. Procédure sur les événements du 6 octobre. Révolte des troupes à Nanci. Troubles des Colonies. Serment à la constitution civile du Clergé. Mort de Mirabeau. État des sociétés des Jacobins.

LE. local, des séances de l'assemblée avait été 1789. préparé dans les salles de l'archevêché de Paris, le même local qui avait servi aux séances de l'assemblée électorale; ce lieu, situé dans une île de la Seine, entre les faubourgs Saint-Antoine et Saint-Marcel, les quartiers les plus populeux de Paris, auquel conduit un seul chemin sans issue, n'avait pas été choisi sans dessein. On s'y porta cependant toujours assez gaiement; le caractère national se trouva toujours parfaitement

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représenté, et l'assemblée fut bien quelquefois III. Ep. effrayée, mais jamais intimidée.

Les séances s'ouvraient sous des auspices fa- 19 oct. vorables: les partis étaient abattus par leurs derniers mécomptes; les succès du roi à Paris leur avaient ôté de l'assurance, et lui en avaient donné. La garde nationale parisienne était animée du meilleur esprit, et disposée également à défendre la puissance du roi et la liberté des délibérations. Lafayette venait d'être nommé, par le roi, commandant militaire dans tout l'arrondissement de la capitale. La cour, encore étonnée de son déplacement, restait muette; un incident léger, dans toute autre circonstance, avait attiré de la confiance et de la bienveillance au roi.

Le général Bouillé, commandant à Metz, et que l'on regardait déja comme le point d'appui de la cour, que l'on soupçonnait déja, que l'on avait même accusé d'avoir voulu attirer et recueillir le roi dans sa ville, à l'époque du 6 octobre, lorsque sa fuite prévue ou prétendue servit de motif à l'invasión de Versailles; Bouillé avait rendu compte du serment prêté par les troupes à ses ordres, sans faire mention du sien; l'assemblée avait décrété qu'il prêtérait son serment individuel, et le roi avait ordonné l'exécution du décret. Les représentants de la commune de Paris, qui communiquaient journellement et directe

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I. Ep. ment avec l'assemblée, et luttaient quelquefo's avec elle, avaient ajourné toutes leurs prétentions, et sentant l'importance du séjour de l'assemblée dans leur ville, ne montraient que déférence et bonne volonté. Cette assemblée représentative de la commune était enfin constituée : chacun des soixante districts avait nommé cinq représentants, cent vingt choisis parmi eux formaient le corps administratif, les deux cent quatre-vingts formaient un grand - conseil municipal, ayant droit de surveillance et de révision sur le premier.

(1).

On n'avait pas été très-tranquille sur l'effet que ferait, dans les provinces, les événements du 6 Pièces j. octobre; on fut bientôt rassuré par les adresses de félicitation et d'adhésion, venant incessamment de toutes les parties de la France; le séjour du roi à Paris ne fut vu que, comme il était en effet, un moyen d'accélération des travaux de l'assemblée, et les actes de violence, tempérés toujours à-propos par des formes adoucies des dépositaires de l'autorité publique,contribuèrent à calmer et à rassurer: d'ailleurs, l'esprit public, avait une expression plus prononcée dans les provinces, parce que le caractère de l'imitation est toujours de renchérir; continuellement l'assemblée était obligée de renvoyer au pouvoir exécutif, les actes de patriotisme exagéré; et, dans les circonstances, les renvoyer à l'autorité royale, c'était les improuver; c'était, d'ailleurs, à peu

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près la seule fonction qu'elle eût à exercer. L'as- III. Ep. semblée s'était organisée en différents comités, tous correspondants aux différents départements de l'administration. Il y avait un comité des finances, de soixante membres; un comité de la guerre, de la marine, de législation, de jurisprudence, des domaines nationaux, comité ecclésiastique, etc.; le comité des recherches établi à l'arrivée de l'assemblée à Paris, et dont l'objet était de veiller à la sûreté publique, et de connaître de tout ce qui intéressait la révolution; enfin, le comité de constitution, chargé de présenter à l'assemblée ses travaux sur les lois constitutionnelles : les membres de ce comité, seul permanent, furent Mirabeau, Target, Duport, Chapelier, Desmeuniers, Talleyrand, Barnave, Lameth et Sieyes, qui réduisit trop tôt ses fonctions à celle d'improuver, trop tôt découragé par la contradiction. L'œuvre de la constitution s'avançait on avait déja posé les bases de ce grand édifice; mais le plan n'ayant pu être arrêté d'avance, et ne se déterminant que par la construction, il arriva que les parties, isolément belles, manquèrent de proportion et d'ensemble, et les défauts de l'ouvrage achevé ne devinrent sensibles que par l'usage et l'expérience. Chaque jour les affaires éventuelles et accessoires détournaient de l'objet principal: l'assemblée se livrait aux soins de l'administration journalière,

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