TR TO GL 4-1-88 65103 HISTOIRE DU CONSULAT ET · DE L'EMPIRE. LIVRE DIX-NEUVIÈME. L'EMPIRE. Effet produit en Europe par la mort du duc d'Enghien. La Prusse, prête à former une alliance avec la France, se rejette vers la Russie, et se lie à cette dernière puissance par une convention secrète. Quelle était en 1803 la véritable alliance de la France, et comment cette alliance se trouve manquée. La conduite de MM. Drake, Smith et Taylor dénoncée à tous les cabinets. - Le sentiment qu'elle inspire atténue l'effet produit par la mort du duc d'Enghien. Sensation éprouvée à Pétersbourg. Deuil de cour pris spon tanément. Conduite légère et irréfléchie du jeune empereur. Suicide de Pichegru. TOM. V. - 1 010769 Avril 1804. Etat de l'Europe au moment On cette agitation un retour général vers les idées monarchiques. considère l'hérédité comme un moyen de consolider l'ordre établi, et de le mettre à l'abri des conséquences d'un assassinat. Nombreuses adresses. Discours de M. de Fontanes à l'occasion de l'achèvement du Code civil. — Rôle de M. Fouché dans cette circonstance. Il est l'instrument du changement qui se prépare. - -- Disposi M. Cambacérès oppose quelque résistance à ce changement. — Ex- condamné à mort, et exécuté. — MM. Armand de Polignac et de Ri vière condamnés à mort, et graciés. Sa destinée Nouvelle phase de la Révolution française. La République convertie en monarchie militaire. et celle de Napoléon. L'effet produit par la sanglante catastrophe de Vincennes fut grand sans doute en France; il fut de la mort plus grand encore en Europe. Nous ne nous écarte du duc d'Enghien. rons pas de la vérité rigoureuse, en disant que cette catastrophe devint la principale cause d'une troisième guerre générale. La conspiration des princes français, et la mort du duc d'Enghien qui en était la suite, furent de ces coups réciproques, par lesquels la révolution et la contre-révolution s'excitèrent à une nouvelle et violente lutte, qui s'étendit bientôt depuis les Alpes et le Rhin jusqu'aux bords du Niémen. Nous avons exposé la situation respective de la France et des diverses cours, à partir du renouvellement de la guerre avec la Grande-Bretagne; les prétentions de la Russie à un arbitrage suprême, accueillies froidement par l'Angleterre, courtoisement par le Premier Consul, mais bientôt repoussées par celui-ci, dès qu'il avait reconnu les dispositions partiales du cabinet russe; les appréhensions de l'Autriche, craignant de voir la guerre redevenir générale, et cherchant à se distraire de ses inquiétudes par des excès de pouvoir dans l'Empire; les perplexités de la Prusse, tour à tour agitée par les suggestions de la Russie, ou attirée par les caresses du Premier Consul, presque séduite par les paroles de ce dernier à M. Lombard, prête enfin à sortir de ses longues hésitations en se jetant dans les bras de la France. Avril 180. Le roi de Prusse, mécontent et séduit par de la Russie, les discours tenus à le Premier Consul, Telle était la situation un peu avant la déplorable conjuration dont nous venons de raconter les tragiques phases. M. Lombard était retourné à Berlin tout plein de ce qu'il avait entendu à Bruxelles, et en communiquant ses impressions au jeune Frédéric- Bruxelles par Guillaume, il l'avait décidé à se lier définitivement avec nous. Une autre circonstance avait contribué beaucoup à produire cet heureux résultat. La Russie de la France. s'était montrée peu favorable aux idées de la Prusse, qui consistaient dans une sorte de neutralité continentale, fondée sur l'ancienne neutralité prus se décide pour l'alliance Avril 1804. sienne, et elle avait cherché à substituer à ces idées un projet de tiers-parti européen, qui, sous prétexte de contenir les puissances belligérantes, aurait abouti bientôt à une nouvelle coalition, dirigée contre la France, et soldée par l'Angleterre. Frédéric-Guillaume, blessé de l'accueil qu'avaient reçu ses propositions, des conséquences visibles que pouvait entraîner le projet russe, sentant que la force était du côté du Premier Consul, lui fit offrir, non plus une stérile amitié, comme il faisait depuis 1800, par l'insaisissable M. d'Haugwitz, mais une véritable alliance. D'abord il avait offert, à la France ainsi qu'à la Russie, une extension de la neutralité prussienne, qui devait comprendre tous les États d'Allemagne, et être payée de l'évacuation du Hanovre, ce qui n'aurait eu pour nous d'autre effet que de rouvrir le continent au commerce anglais, et de nous fermer la route de Vienne. Le Premier Consul, conférant à Bruxelles avec M. Lombard, n'avait pas voulu en entendre parler. Depuis le retour de M. Lombard à Berlin, et la conduite récente de la Russie, le roi de Prusse nous faisait proposer tout autre chose. Dans ce nouveau système, les deux puissances, la France et la Prusse, se garantissaient le status presens, comprenant, pour la Prusse, tout ce qu'elle avait acquis en Allemagne et en Pologne depuis 1789; pour la France, le Rhin, les puissances. Alpes, la réunion du Piémont, la présidence de la République italienne, la propriété de Parme et Plaisance, le maintien du royaume d'Étrurie, l'occuréciproque. pation temporaire de Tarente. Si pour l'un de ces Le roi de Prusse offre à la France une garantie réciproque des États actuellement possédés par les deux Conditions de cette garantie intérêts la paix était troublée, celle des deux puissances qui ne serait point immédiatement menacée, devait s'entremettre pour prévenir la guerre. Si ses bons offices demeuraient inefficaces, les deux puissances s'engageaient à réunir leurs forces, et à soutenir la lutte en commun. Pour prix de ce grave engagement, la Prusse demandait qu'on évacuât les bords de l'Elbe et du Weser, qu'on réduisît l'armée française en Hanovre au nombre d'hommes nécessaire pour percevoir les revenus du pays, c'està-dire à 6 mille; et enfin, si à la paix les succès de la France avaient été assez grands pour qu'elle pût en dicter les conditions, la Prusse exigeait que le sort du Hanovre fût réglé d'accord avec elle. C'était, d'une façon indirecte, stipuler que le Hanovre lui serait donné. Avril 1804. avaient décidé dans Ce qui avait décidé Frédéric-Guillaume à entrer Raisons qui aussi avant dans la politique du Premier Consul, c'était la certitude de la paix continentale, qui dépendait, à son avis, d'une solide alliance entre la Prusse et la France. Il avait vu, avec une justesse de la France. de coup d'œil honorable pour lui, honorable surtout pour M. d'Haugwitz, son véritable inspirateur, que, la Prusse et la France étant fortement unies, personne sur le continent n'oserait troubler la paix générale. Il avait reconnu en même temps qu'en enchaînant le continent, il enchaînait aussi le Premier Consul; car la garantie donnée à la situation présente des deux puissances, était une manière de fixer cette situation, et d'interdire au Premier Consul de nouvelles entreprises. Si la Prusse eût |