Page images
PDF
EPUB

» a toujours été présente à l'esprit des peuples qui ont > inventé les perfectionnements de la céramique et qui > en ont créé la langue. (1)

"

Ce qui manque aux vases (dit un article du Fanfulla), c'est le cœur; mais les artistes grecs n'ont-ils » pas montré par là combien ils sont profonds penseurs? Ils fabriquaient leurs vases de cette même terre dont Prométhée avait tenté de faire des hommes ; mais ils lés voulaient inconscients et insensibles à la douleur. > Vous pouvez vous en servir sans crainte, les mettre > au feu, les mutiler, les vases ne se plaignent jamais; plus la marmite brûle, plus elle chante joyeusement. - Combien elle est plus heureuse que nous!

[ocr errors]

Horace attribue aux vases des défauts ou des qualités morales; il les appelle menteurs ou sincères, » tristes ou riants...

"

Ceramus, Arsus, Ciatus, Cantarus, étaient des » noms d'hommes et de vases, Orca et Cotila des noms

» de femmes et de vases; de même les Français ont la dame-jeanne... (2)

"

Du goût de la On sait avec quelle passion les princes italiens se céramique livrèrent, dès le XVe siècle, à la fabrication de la faïence et à la recherche de la porcelaine.

chez les prin

ces.

Les rois de Saxe et de Prusse se firent porcelainiers; en France, les princes du sang protégeaient les fabriques; la reine Marie-Antoinette avait la sienne; Louis XV faisait chaque année, le 1er janvier, une vente de

(1) Charles Blanc, Grammaire des Arts décoratifs

(2) Fanfulla della Domenica, 5 marzo 1882. Antropologia dei vasi antichi.

porcelaines de Sèvres au palais de Versailles. Dans les Pays-Bas, le prince de Lorraine établit une fabrique de porcelaines à Tervueren et prit part à ses travaux,

Est-il un art, une industrie, qui puisse s'enorgueillir d'aussi illustres artisans? On ne connaît point de roi hautelisseur, orfèvre ou peintre.

On aimait, aux siècles passés, à s'entourer des pro- Salles de porduits des usines en renom.

Toute la vaisselle qu'elles fabriquaient n'était pas destinée aux usages de la table; les plus beaux plats garnissaient, comme pièces de parade, les dressoirs, très en faveur dans les anciens mobiliers, ou s'accrochaient aux murs, aux plafonds, comme motifs de décoration. (1)

En Allemagne, il était d'usage d'avoir, dans les palais, une salle de Porcelaines. Des dressoirs et des tablettes supportaient les plats et les assiettes; sur la table était disposé tout un service, comme pour un banquet. (2)

celaines.

On sait enfin quelle place tint la porcelaine dans les La porcelaine mobiliers luxueux du XVIIIe siècle. Sous Louis XV,

[merged small][ocr errors][ocr errors][ocr errors]

dit Albert Jacquemart, (3) la porcelaine s'impose partout; c'est le moment de l'épanouissement de notre manufacture nationale et de la découverte en Saxe

de la pâte dure semblable à celle des Chinois. Non

(1) Les plus beaux plats de faïence portent, dans le pied, un œillet destiné à recevoir une corde pour les suspendre.

(2) Marryat.

(3) Histoire du mobilier.

au

XVIIIe siècle.

Protection accordée aux

et six mille francs; des groupes de Saxe, trois à neuf mille francs.

Les faïences de Palissy et d'Oiron valent, quand elles sont authentiques, ce qui est rare, de deux à cinq mille francs; à la vente Hamilton à Londres, en juillet 1882, les produits céramiques ont été adjugés à des prix exorbitants.

Et pour parler de la porcelaine de Tournay, un amateur n'a-t-il pas acheté, d'après les on dit, soixante mille francs, un service de table... œuvre habile d'un faussaire.

Les porcelaines trouvèrent encore d'autres protecteurs que les rois. Les villes aidaient de leur crédit, de porcelaines. leurs finances, les fabricants qui s'établissaient dans

fabriques de

Importance de la fabrique de Tournay.

leurs murs.

Lorsque Peterinck vint se fixer à Tournay, il obtint d'emblée une pension, plus tard des prêts d'argent, des exemptions d'impôt de tout genre, des gratifications sans cesse renouvelées. Les magistrats vantent sans cesse cette grande, cette illustre fabrique, qui apportait à la cité honneur et profit. L'attention publique suit ses progrès, et ne ménage pas les louanges et les encouragements.

Et certes, si la céramique mérite d'être étudiée et de voir ses produits occuper les places d'honneur dans les collections, nulle fabrique de porcelaines n'est plus digne de fixer l'attention, que celle qui fut fondée dans nos murs en l'an 1750.

C'est la première en date et longtemps l'unique des

anciens Pays-Bas et de la Belgique actuelle (qui n'en compta que deux, Tournay et Bruxelles.)

Ce fut la fabrique de poteries la plus considérable de toute la région, car lorsque Tournay employait quatre cents ouvriers, Valenciennes n'en comptait pas quarante, Bruxelles (les deux usines), soixante-dix; Bruges, trente-six à soixante; Andenne, cent vingttrois; et Lille, moins encore.

Enfin elle fut très supérieure à ses rivales par la perfection et le caractère artistique de ses produits. Ajoutons que son histoire est intimement liée à l'histoire locale et présente, comme elle, le plus vif intérêt.

Les sources où nous avons puisé les éléments de cette étude sont peu nombreuses. Les papiers privés de la manufacture ont disparu, ou se trouvent entre les mains de personnes qui ne désirent point les faire connaître; par contre, nous avons trouvé une riche moisson de documents dans les procès-verbaux des séances de nos magistrats communaux, et dans les papiers du Conseil des finances des Pays-Bas.

Les nombreuses demandes de subsides adressées par Peterinck au gouvernement et à la ville, les démêlés qu'il eut avec ses associés et ses ouvriers, le mirent souvent dans le cas d'exposer la situation de sa fabrique et d'y joindre certains documents qui nous aideront grandement à faire l'histoire externe de la manufacture, et même à y ajouter certains détails d'organisation intérieure des plus intéressants.

La partie technique nous a coûté beaucoup plus de

Sources de cette étude.

Protection

et six mille francs; des groupes de Saxe, trois à neuf mille francs.

Les faïences de Palissy et d'Oiron valent, quand elles sont authentiques, ce qui est rare, de deux à cinq mille francs; à la vente Hamilton à Londres, en juillet 1882, les produits céramiques ont été adjugés à des prix exorbitants.

Et pour parler de la porcelaine de Tournay, un amateur n'a-t-il pas acheté, d'après les on dit, soixante mille francs, un service de table... œuvre habile d'un faussaire.

Les porcelaines trouvèrent encore d'autres protecteurs les rois. Les villes aidaient de leur crédit, de que porcelaines. leurs finances, les fabricants qui s'établissaient dans

accordée aux fabriques de

Importance

de la fabrique

leurs murs.

Lorsque Peterinck vint se fixer à Tournay, il obtint d'emblée une pension, plus tard des prêts d'argent, des exemptions d'impôt de tout genre, des gratifications sans cesse renouvelées. Les magistrats vantent sans cesse cette grande, cette illustre fabrique, qui apportait à la cité honneur et profit. L'attention publique suit ses progrès, et ne ménage pas les louanges et les encouragements.

Et certes, si la céramique mérite d'être étudiée et de Tournay. de voir ses produits occuper les places d'honneur dans les collections, nulle fabrique de porcelaines n'est plus digne de fixer l'attention, que celle qui fut fondée dans nos murs en l'an 1750.

C'est la première en date et longtemps l'unique des

« PreviousContinue »