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Première révolution.

La colonie envoie spontanément des députés aux états généraux. — De la représentation directe des colonies dans la métropole. Détails sur cette représentation depuis 1789 jusqu'à l'an VIII. Manière intelligente

dont les colonies savaient alors composer leur représentation. - Scission dans la population blanche. Formation d'une assemblée coloniale. Premiers mouvements des noirs en juillet 1791. Les assemblées paroissiales proclament l'égalité politique des hommes de couleur. - Lutte et dispersion de l'assemblée coloniale. . L'insurrection est complète. La tranquillité se rétablit un moment.

Une nouvelle scission de la population blanche la fait reparaître plus terrible. - Sonthonax proclame l'affranchissement général. — Invasion étrangère. — Combat de l'Artibonite. Toussaint-Louverture. - Expulsion des Anglais. Commencement de la lutte entre les noirs et les sang-mêlés. Toussaint et Rigaud. - Mission de Hédouville, Autocratie momenta. née de Toussaint-Louverture. Il fait frapper monnaie à son effigie.

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Telle était la situation économique de ce beau pays, lorsque s'ouvrit la grande ère de 89. Les brises de l'Atlantique lui arrivaient, si l'on peut dire, toutes chargées de germes dont l'ardente nature des tropiques devait hâter l'éclosion. L'acte du 27 décembre 1788, qui ouvrait au tiers le droit d'envoyer aux états généraux un nombre de représentants égal à celui des deux ordres, fit courir un frémissement électrique chez des hommes qui étaient alors trop

mêlés aux choses de leur métropole, pour demeurer étrangers à ses passions. Aussitôt, sans attendre qu'un appel régulier lui soit fait, et malgré les efforts du gouverneur, toute la colonie se formant en assemblées paroissiales et provinciales, décide qu'elle a droit d'être représentée aux états géné– raux; puis, passant du principe à l'application, nomme dix-huit députés qui s'embarquent aussitôt, et vont rappeler à la France, étonnée de cette spontanéité, qu'elle avait, au fond de la mer des Antilles, une fille dont à ce coup elle ne pouvait renier l'affinité.

Il importe, pour plus d'un intérêt, de s'arrêter un moment dès ce premier pas, et de constater avec quelques détails le fait de cette première représentation coloniale dans la métropole.

Ce fut le 8 juin 1789 que les dix-huit députés de Saint-Domingue se présentèrent aux états généraux. Aucune difficulté ne leur fut faite quant à leur droit de siéger: seulement leur nombre fut trouvé trop considérable. Il fut réduit à six titulaires qui, le 27 du même mois, et à l'unanimité, furent admis à faire partie de l'assemblée. Quant aux douze éliminés, ils reçurent le titre de députés suppléants, par assimilation complète à ce qui existait alors pour les autres provinces du royaume.

Suivant l'exemple de Saint-Domingue, la Guadeloupe, la Martinique et Pondichéry envoyèrent leurs représentants. Ceux de la Guadeloupe furent admis le 22 septembre 1789, au nombre de cinq, dont un pour Marie-Galante. Ceux de la Martinique furent admis le 14 octobre de la même année, au nombre de deux. Ceux de Pondichéry furent également admis au nombre de deux, le 19 septembre 1790. Ceux de Bourbon ne siégèrent qu'en 1791.

L'instruction pour les colonies, du 15 juin-10 juillet 1791, déclare Saint-Domingue partie intégrante du territoire français, et règle sa représentation au corps législatif.

La constitution du 3 septembre 1791 déclare que, quoique les colonies fassent partie du territoire français, elles ne sont pas comprises dans là constitution. Néanmoins, elle reconnaît en principe que les colonies ont droit à la représentation directe.'.

Le décret constitutionnel du 24 du même mois régla les matières à réserver au corps législatif, et celles dévolues aux assemblées locales.

Le décret du 22 août 1792 vint régler définitivement le nombre des députés que les colonies enverraient à la convention. Ils furent ainsi répartis :

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Ce qui donne pour la représentation réelle des colonies françaises un total de 34 députés titulaires et 21 suppléants.

La constitution de l'an III déclara que les colonies françaises faisaient partie intégrante de la république, et étaient soumises à la même loi constitutionnelle. Elle les organisa en départements. Il se produisit alors un fait intéressant et qui doit être soigneusement mis en relief: les colonies n'ayant pu faire leurs élections dans l'intervalle de la promulgation. de la constitution nouvelle et de la réunion du nouveau corps législatif, un décret du 1er vendémiaire an IV maintint provisoirement les députés des

colonies dans l'exercice de leur mandat expiré, jusqu'à ce que les élections coloniales se fussent effectuées..

Enfin, ce fut la constitution de l'an VIII qui viņt abolir la représentation directe des colonies en France, en déclarant qu'elles seraient régies par des lois spéciales.

Ainsi, on n'avait pas encore, à cette époque, trouvé la grande idée de l'incompatibilité des distances transmaritimes avec la représentation centrale. On n'avait pas encore, sacrifiant l'avenir aux embarras du présent, proclamé l'irrationalité en principe et l'impraticabilité en fait. Enfin, Galilée nouveau mesurant le globe d'un compas fantastique, la Tactique coloniale n'avait pas encore découvert que nos établissements d'outre-mer s'étaient par un sourd déplacement considérablement éloignés de leur mé– tropole continentale depuis 1789, à ce point que ce qui était possible et praticable il y a un demi-siècle à l'aide d'une navigation irrégulière, sans autre propulsion que la voile, devenait irréalisable aujourd'hui que la vapeur nous place à quinze jours de la mer des Antilles et à un mois de l'océan Indien..... Une dernière remarque sur cette importante matière: tant que les colonies furent représentées en France par

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