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moyens, quelles ressources il lui faut pour assurer les subsistances de la capitale; donnons-lui ces moyens, et qu'à l'instant il en soit responsable ».

L'assemblée nationale rendit un décret conformément à cet avis, et auquel elle ajouta la disposition de commettre provisoirement le châtelet à l'effet de juger les crimes de lèze-nation.

Les deux projets de loi contre les attroupemens proposés, l'un par Mirabeau (1), l'autre par M. Target, furent réduits à un

seul.

23 octobre. Ce jour étant destiné aux finances, M. le président proposa de continuer la discussion ajournée de la motion de Mirabeau (2) sur les biens du clergé. Elle consistoit à décréter ces deux principes : 1°. Que la propriété des biens ecclésiastiques appartient à la nation. 2°. Que le traitement des curés devoit être porté à 1200 liv. au moins, avec le logement.

M. l'abbé Maury essaya de retarder cette discussion. Il soutint que la division de la

(1) Dans la séance du 14.

(2) Proposée le 12 octobre 1789.

motion de M. l'évêque d'Autun, demandée. par Mirabeau, étoit illusoire.

Ce dernier, en lui répondant et en déclarant la haute opinion qu'il avoit de sa dialectique, crut cependant qu'il étoit difficile, même pour lui, de prouver que le principe étoit la même chose que la conséquence. Il demanda que l'on ne renvoyât plus cette discussion, comme si les finances étoient étrangères à la constitution, comme si la science du pot au feu n'étoit pas aussi essentielle à un empire qu'à une famille. L'assemblée décida que cet objet formeroit l'ordre du jour.

Il étoit bien important que la question sur le principe de la propriété des biens du clergé fût envisagée sous tous ses rapports, qu'on ne donnât pas le plus léger prétexte à cette classe n'aguere privilégiée de se plaindre de n'avoir pas été entendue. La manière claire et lumineuse avec laquelle quelques orateurs avoient établi les droits de la nation, relativement aux biens ecclésiastiques, firent desirer d'accélérer la délibération.

Au milieu des applaudissemens qu'avoit reçus M. Garat le jeune entr'autres, plusieurs

personnes s'étoient levées pour demander qu'on allât aux voix.

Mirabeau s'y opposa.

« Plusieurs ecclésiatiques, dit-il, peuvent desirer de répondre aux argumens qui ont paru les plus pressans contre leur cause, il scroit injuste de ne pas les entendre. Dailleurs, la question des fonctions religieuses ne me paroît point asssez discutée. Je demande à édifier entièrement l'assemblée sur cet objet ; une matière aussi délicate, et en même-temps aussi importante, ne sauroit être traitée avec trop d'étendue et de soin ».

Cette observation détermina l'assemblée à continuer sa délibération à un autre jour.

26 octobre. Une question du plus grand intérêt s'éleva à la lecture d'une lettre des officiers municipaux de Saint-Marcelin en Dauphiné, au sujet de la convocation des états avec doublement (1). La municipalité

(1) D'après la constitution provisoire de la ci-devant province du Dauphiné, la convocation par doublement avoit pour objet la nomination des députés aux étatsgénéraux,

demandoit à l'assemblée nationale si elle devoit envoyer des députés à ces états.

M. Duport vouloit qu'on s'informât d'abord si c'étoit avec le consentement du roi que les états du Dauphiné avoient été convoqués ; et dans le cas où ce consentement n'auroit pas été donné, on devoit demander aux ministres quelles mesures ils prendroient pour empêcher cette convocation.

M. Dupont étoit d'avis de ne rien faire sans être bien instruits; suivant lui ce n'étoit pas des décrets qu'il falloit envoyer contre les provinces, pour les empêcher de s'assem bler, c'etoit que le président, que les députés écrivissent amiablement pour donner l'assurance de la liberté dont jouissoit l'assemblée nationale.

Mirabeau répondit :

« Nous sommes assez instruits du fait important qui nous occupe, puisqu'il est public et notoire. Nous le sommes du principe que nulle convocation ne peut être légale, juste, légitime, tant que nous n'aurons pas établi les formes des assemblées des provinces. Ce principe doit être ajouté au

décret conforme à la proposition de M. Duport ».

Il refuta ensuite la seconde partie de l'opinion du préopinant.

le

« La convocation des diverses provinces, dit-il, est irrégulière ; l'irrégularité est notoire, il y a donc lieu à délibérer sur cette irrégularité. Il n'est pas question des motifs des convocations; il ne s'agit ni d'accuser ni de justifier. Quand le décret porte le mot empêcher, il ne dit que ce qu'il doit dire ; pouvoir exécutif ne peut-il pas enjoindre, permettre, défendre ? Ne diroit-on pas que nous avons déjà vomi des bataillons et des décrêts contre ces provinces? On propose d'écrire amiablement ; il le faut, et une adresse, dans ces vues, avoit déjà été demandée; mais agissons pour empêcher des convocations irrégulières qui lanceroient de nouveaux désordres dans le royaume »..

MM. Cazalès et Virieux soutinrent, le premier, que les états du Dauphiné ne faisoient qu'exercer le droit de pétition; le second, , que ces états étoient convoqués suivant les formes approuvées par un décret, celui qui a jugé de la validité d'une députation.

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