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dans la quatrième, la cinquième et la huitième section, et une grande majorité dans les autres, ont adopté cette forme de gouvernement.

Quelques votes cependant n'ont été que conditionnels; quatre membres de la troisième section, quelques-uns de la cinquième, ont déclaré ne voter pour la monarchie, qu'à la condition que jamais le chef de l'État ne serait pris dans la famille d'Orange-Nassau. Trois d'entre eux ont ajouté, que plutôt que de subir un tel chef, ils voteraient pour la république; dans d'autres sections quelques membres ont aussi suspendu leur vote; dans la septième section, an membre a voté pour un gouvernement constitutionnel représentatif, dont le chef serait amovible et périodiquement rééligible.

La forme républicaine n'a obtenu dans les sections qu'un petit nombre de suffrages: deux membres de la première section, deux de la seconde, deux de la troisième, deux de la septième, un de la neuvième et un de la dixième se sont déclarés pour la république avec un président électif.

La section centrale a adopté à l'unanimité l'avis de la majorité des sections; en conséquence elle propose au congrès national de décréter comme forme de gouvernement pour la Belgique indépendante, la monarchie constitutionnelle représentative sous un chef héréditaire.

Elle a entendu, comme plusieurs sections l'ont fait, que cette monarchie soit établie sur des bases libérales et fortes qui mettent à jamais hors d'atteinte les droits et les libertés de la nation.»

M. Raikem fit ensuite, au nom de la même section, le rapport sur la proposition de M. Rodenbach, relative à l'exclusion de la maison de Nassau de tout pouvoir en Belgique. Dans toutes les sections, excepté dans la dixième, où douze voix s'étaient prononcées pour l'ajournement, la grande majorité s'était réunie pour l'adoption pure et simple; quelques membres seulement avaient demandé la suppression des mots à perpétuité. En résumé, ou en conséquence des opinions émises, la section ou commission centrale était d'avis d'adopter la proposition dans les termes suivans: « Le congrès national déclare tous les membres de la famille d'Orange-Nassau déchue à perpétuité de tout pouvoir en Belgique.»> Il s'agissait d'abord de discuter la forme du gouvernement. La discussion fut longue; elle ramena des argumens et des raisonnemens rebattus sur les avantages ou les inconvéniens des systèmes monarchique, ou républicain, ou mixte, dans leur application à des peuples grands ou petits, riches ou pauvres. Nous en écartons tout ce qui n'est que de pure théorie. Deux des premiers orateurs entendus, M. Liedtz et M. Nothomb, se prononcèrent pour une monarchie héréditaire fondée sur les intentions les plus libérales. ..En étudiant l'époque où nous vivons et les dispositions géné

raies des esprits, M. Nothomb y reconnaissait deux grands besoins le besoin de la stabilité et celui du mouvement. Le premier, sans lequel il n'y avait ni ordre ni sécurité; le second, sans lequel il n'y avait ni progrès ni amélioration. Le problème à résoudre pour les sociétés modernes était de combiner ces deux élémens, de manière à les faire servir tous deux à leur prospérité. Il n'y a dans le monde « que trois partis et que trois espèces d'hommes, disait-il, « les hommes du mouvement et les hommes de la stabilité, et ceux qui s'efforcent d'associer, de combiner ces deux principes. Je souhaite, pour le repos de l'Europe, que ces derniers restent en « majorité. C'est assez dire l'opinion de M. Nothomb. Il n'y avait, suivant lui, pour la Belgique, que deux modes d'existence; il fallait qu'elle se réunît à la France, ou qu'elle constituât une monarchie avec un prince indigène. L'hypothèse de la réunion avec la France avait été repoussée, comme devant être le signal d'une guerre générale, et la Belgique né traverserait la république que pour retomber sous la domination étrangère.

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M. Seron convenait bien que l'établissement de la république en Belgique pourrait amener la guerre : « Majs cette guerre, disait-il, républicanisera l'Europe; » et il votait pour la république.

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Ainsi ne pensaient nì M. Ch. Vilain XIV, ni le baron de Stassart, qui voulaient l'un et l'autre une monarchie avec des institutions vraiment libérales, « presque républicaines, disait le dernier

orateur.

20 novembre. Plusieurs orateurs, MM. David, l'abbé de Haërn, et de Robaulx, se prononcèrent encore pour la république. L'abbé de Haërn préférait cette forme de gouvernement, où l'Europe entière lui semblait tendre, comme plus favorable que toute autre à la religion catholique; et, ce qui ne paraîtra pas moins bizarre, il se flattait que le droit davin revivrait dans la république. Il observait que les Eelges n'étaient pas galicans, mais catholiques; enfin ik aimait à croire que l'établissement d'une république serait d'un exemple utile à la France, et que l'union des libéraux et des catholiques sauverait le monde, si le monde pouvait être sauvé. M de Robaulx, moins tolérant dans ses idées républicaines, atta

qua l'opinion de la majorité avec une violence qui le fit rappeler à l'ordre.

⚫ On nous a présenté, disait-il, la monarchie représentative comme une transaction, une heureuse combinaison d'élémeus contraires. C'est d'après moi le plus mauvais gouvernement; un perpétuel confit, une suite d'ébranlemens. Il n'y a pas de pacte possible entre le principe de l'absolutisme et celui de la liberté. La royauté a été vaincue dans les journées de septembré, il ne faut pas la rét.blie aujourd'hui. Il ne faut pas calomnier le people qui a vaincu et qui n'est pas aussi ignorant qu'on le soppose. On a pensé qu'il fallait l'apprentissage d'une liberté mixte; cet apprentissage, nous l'avons fait depuis 1815. Établir une monarchie représentative, sous l'espoir néanmoins d'atteindre plus tard à la république, c'est compter sur une nouvelle révolution Il y a une considération sur laquelle on n'a pas assez appuyé. La création d'une monarchie rend impossible notre réunion à la France, et cette réunion peut devenir nécessaire si la France nous refuse un traité de commerce. Nous ne voulons pas de république démagogique, nous ne voulons renouveler ni Sparte ni Athènes Si le chef temporaire convient à la nation, il sera maintenu à chaque élection nouvelle. L'election ne sera pas accompagnée de si grands désordres qu'on le dit. Les désordres proviennent des vices du mode électif. Je ne suis pas fatigué de la liberté républicaine dont nous jouissons sons notre gouvernement provisoire. L'orateur propose un amendement, c'est de soumettre la constitation à l'acceptation du peuple. Toutes les constitutions de la révolution française ont été soumises à l'acceptation du peuple. Il faút que nous soyons sûrs que notre opinion est celle de la nation et qu'elle ne sera pas cassée Voici l'amendement: Cette forme de gouvernement sera présentée à l'acceptation du peuple de la manière qui sera indiquée par le congrès. Signé DE ROBAULX..

L'orateur allait poursuivre, mais l'irritation qu'excitait son discours ne lui permit pas d'aller plus loin; il se contenta de déposer son amendement sur le bureau, et il quitta la tribune, où se précipita M. Forgeur.

■ Vous avez entendu, dit-il, avec une émotion pleine de chaleur, un langage inusité, le langage des passions. On a cherché un appui hors de cette enceinte; on a fait un appel aux masses, à la force brutale, à la révolte. On vous a montré dans l'avenir vos décisions annulées; on vous à contesté votre mandat; on a refusé de vous reconnaître comme pouvoir constitúant; on a traité avec une espèce de dédain tous les orateurs qui, à cette tribune, ont défendu la monarchie représentative. On s'est obstiné avec une véritable mauvaise foi ne comprendre aucun de leurs argumens; on vons a parlé de cette jepnesse tonte républicaine qui a fait la révolution. Je ne répondrai qu'à cette dernière partie de l'araque, Par mon âge, par ntes sentimens, påt mes etu les, japparti-us à cette génération uonveke dont on vous a palė, Je viens protester in son nom à cette tribune. La republique n'a qu'îne fail le minorité dans la nation, ainsi que dans cette ass- iúblée. C trẻ geuerationi në rëgaidė pas lá je gression comme incompatible avec le vejos, Elie vent, cogime on vous ka dit, e» gonveru-ment qui associe la stabilite et le mouvement. La no archie, telle que nous l'eutendous, est bien préférable à la république qui ne serait que le të

·gime de quelque turbulentes incapacités. La progression sera continue, mais gans secousse. Nons aurons toutes les garanties d'ordre et de liberté. L'héré. dité réduira an silence toutes les ambitions, on les forcera à descendre dans une sphère inférieure. Je ne sais si la légistature se composera de deux Chambres. Quoi qu'il en soit, il y aura une représentation nationale directement élue. Pas de redressement de griefs, pas de subsides, sera la loi suprême. Le chef de l'État n'aura qu'un pouvoir neutre; il rectifiera l'action de tons les pouvoirs. L'exécution sera daus le ministère : si le ministère est inhabile il sera privé des moyens de gouvernement; s'il est coupable, il sera puni. Chaque commune, chaque province s'administrera elle-même par les hommes de son choix. Voilà la monarchie comme nous l'entendons, comme l'entendent tous ceux qui ont l'intelligence des temps et à qui l'histoire et les faits ont appris quelque chose.

21 novembre. La discussion fut suspendue le dimanche ; mais ce jour doit être marqué dans l'histoire, par le consentement que donna le gouvernement provisoire de la Belgique, en conséquence d'un nouveau protocole de la conférence de Londres (du 17 novembre), à suspendre immédiatement toutes les hostilités, suspension d'armes qui devait durer, comme mesure provisoire, jusqu'à la fin de la délibération sur l'armistice, Sous condition que les troupes conserveraient leurs positions actuelles, et que dans l'intervalle on aurait de part et d'autre la faculté de communiquer librement, par terre et par mer, avec les territoires, places et points que les troupes respectives occupaient hors des limites qui séparaient la Belgique des provinces-unies des Pays-Bas avant le traité de Paris du 30 mai 1814; le tout sous réciprocité parfaite de la part de la Hollande, tant par terre que par mer, y compris la levée du blocus des ports et des fleuves.

22 novembre. Cette résolution, communiquée au congrès national dans la séance du lendemain, ne servit pas peu à rendre la discussion plus calme et plus courte. On revint de part et d'autre sur les avantages ou sur les inconvéniens des deux formes de gouvernement proposé. Quelques partisans de la monarchie constitutionnelle (MM. de Meulenaëre, Gendebien, Van de Weyer, etc.), en disant qu'ils faisaient un sacrifice à leurs opinions républicaines, par la conviction qu'ils avaient de l'impossibilité d'établir solidement la république; les républicains, en désavouant la pensée de vouloir faire de la démagogie, et quelques-uns en déclarant

qu'ils préféraient la république, comme une transition à la réunion à la France, que la sympathie des deux peuples devait inévitablement opérer.

La clôture, qu'on réclamait de toutes parts, adoptée, on souleva la question de savoir si la proposition de MM. de Robaulx et Seron (l'appel au peuple ) serait considérée comme un amendement ou comme une proposition additionnelle; mais il fut décidé qu'on voterait d'abord sur la question principale. Le dépouillement du scrutin, auquel on procéda par appel nominal, offrit le résultat suivant :

Nombre des votans, 187; pour la monarchie, 174; pour la république, 13. C'étaient, a-t-on dit, MM. Seron, Lardinois, de Robaulx, J. Goethals, David, Cam. de Smet, l'abbé Haërn, F. Goffint, Labbeville, Franssman, Delwaërt, Pirson et de Thier, qui, presque tous, avaient figuré dans la discussion.

Quant à la proposition de soumettre à l'appel au peuple cette résolution du congrès, personne ne demanda le renvoi aux sections, et l'assemblée entière se leva, moins une dixaine de membres, pour l'écarter par la question préalable.

23 novembre. Restait, enfin, des trois propositions qui tenaient deux peuples ennemis dans l'attente, celle de M. Ch. Rodenbach, amendée en ces termes par la section centrale :

«Le congrès national déclare les membres de la famille d'OrangeNassau exclus à perpétuité de tout pouvoir en Belgique. »

M. Rodenbach, qui prit le premier la parole pour développer sa proposition, regardait l'exclusion comme le complément, la conséquence de la déclaration d'indépendance, et comme une condition nécessaire de paix et de tranquillité dans la Belgique.

"La famille des Nassau est à jamais déchue, disait l'honorable membre; jamais un Belge digne de ce nom n'entrera en transaction avec la famille d'an roi sanguinaire. Le pacte qui nous unissait à la maison d'Orange a été rompu le jour où son chef a voulu substituer à la loi sa volonté et son opinion personnelle. Guillaume ne se montra jamais roi que de la Hollande; il ne fut que l'oppresseur de la Belgique.

• Ceux qui admettent la possibilité de l'élection du prince d'Orange ont-ils réfléchi à la position fâcheuse où ce prince se trouverait? Comment viendraitil dans cette capitale, au milieu de ce people trop confiant, envers lequel il a

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