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palpitante. C'est d'hier qu'elle a brisé trois couronnes; c'est d'hier qu'elle s'est fait une constitution dont on se dispute encore le principe et les conséquences; c'est d'hier qu'elle a appelé un nouveau Roi pour la préserver de l'anarchie intérieure et de la guerre étrangère : les choses en sont au même point... l'anarchie gronde encore à nos foyers; la guerre est toujours à nos portes.

Au dehors, la Belgique, fille aînée de notre révolution, se débat encore dans les protocoles de la Conférence de Londres; et la malheureuse Pologne, dont l'indépendance a été noyée dans des flots de sang, on la voit déjà perdue en 1830, dans les désordres d'une liberté qui commence par la dictature.

Ainsi nous sommes encore dans la nouveauté, on pourrait dire sous le poids de ces grands événemens, et mon travail finit à point.

J'ai commencé par en exposer les difficultés "matérielles; mais j'ai passé sur la plus grave.

«La composition d'une histoire est en tout temps << une chose bien pénible, disais-je en commençant << mon entreprise (1); mais l'écrire, sous les yeux « des contemporains, en sortant d'une révolution, <«< encore au milieu de la lutte des intérêts qu'elle a « créés ou blessés, en présence des acteurs toujours « échauffés de leur querelle, parler des grandeurs << tombées sans insulter au malheur, et des gran«< deurs existantes sans flatter le pouvoir, voilà le « difficile..... » Je me retrouve, après douze ans,

(1) Préface de l'Annuaire historique pour 1818, pag, vi.

dans la même situation, dans une révolution qué le progrès des idées et des passions politiques rendait inévitable, mais qui n'en a pas moins ses victimes et ses ennemis, ses fautes comme sa gloire. Ce que je promettais alors, c'était un récit impartial des faits, c'était de mettre sous les yeux de mes lecteurs tonteś les pièces d'un procès que l'histoire contemporainé ne juge pas en dernier ressort. J'ai temu ma promesse, et j'accomplis encore aujourd'hui le même devoir, sine odio, sine cura.

Peut-être qu'à ce compte aucun parti ne sera cóntent de moi je pourrais bien, comme dit Montaigne, être pelaudé à toutes mains C'est le sort d'un honnète homme qui ne croit pas que toutes les vertus, toutes les raisons et tous les droits soient de son côté; et pour moi, qui veux que ce livre aille au-delà des passions et des intérêts d'un jour, je le présente comme vrai, comme juste, et pour tous et dans tout.

Maintenant que j'ai justifié, sans le vouloir, la cause du retard de cette publication, il faut pourtant rassurer mes lecteurs sur celles de l'avenir; il faut leur dire que j'ai senti la nécesité d'en rapprocher désormais les époques, et qu'il a été pris des mesures certaines pour y parvenir.

Des hommes de talent et d'un bon esprit ont été chargés, pendant que je terminais l'Annuaire historique pour 1830, de préparer ceux de 1831 et de 1832, en sorte qu'il puissent paraître, à quelques mois de distance, dans le cours de 1833. Leur coopération me Honnera le temps de faire un volume qui servira d'in

troduction à la collection, de manière à remplacer les quatre premières années de la Restauration (1814 à 1817), que je m'étais proposé de publier, mais dontla révolution de juillet à beaucoup affaibli l'intérêt.

J'ai cru que, dans l'état actuel des choses, il suffirait de recueillir les faits et les documens les plus importans de la Restauration pour compléter l'histoire de cette époque, qui se trouvera composée de quatorze volu mes, pour lesquels il sera fait une table alphabétique générale des matières.

L'Annuaire historique pour 1830 pourra former ainsi le dernier volume de la première série, et commencer la seconde, à laquelle je ne cesserai pas de donner mes soins et ma surveillance.

Paris, 10 novembre 1832.

C.-L. L.

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