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LES

TRAMWAYS

ET LES

CHEMINS DE FER SUR ROUTES

PREMIÈRE PARTIE

CONSTRUCTION

CHAPITRE PREMIER

1. Différence entre les tramways
et les chemins de fer sur routes.

Les tramways ne doivent pas être confondus avec les chemins de fer sur routes.

En Angleterre, on donne le nom de tramway à toute voie ferrée, posée dans une rue ou sur une route, quelle que soit la forme des rails employés, plats ou saillants.

En France, il n'en est pas de même.

Le Conseil général des ponts et chaussées établit une différence entre les deux, en les définissant ainsi :

« Un tramway est une voie ferrée à rails non saillants, établie « sur une route, qui n'enlève pas la partie de la voie qu'elle « occupe à sa destination primitive.

« Un chemin de fer sur route est une voie ferrée, dont les « rails sont généralement en saillie, établie sur une route ou un « chemin et qui, tout en restant accessible aux piétons, enlève à a la circulation des voitures ordinaires la zone réservée aux « voitures spéciales du chemin de fer. »

Il suit de là que les tramways peuvent occuper le milieu des chaussées, tandis que les chemins de fer sur routes doivent être relégués sur les accotements.

2. Origine du mot tramway.

On n'est pas d'accord sur l'origine du mot tramway.

M. D. Kinnear Clark, dans son ouvrage : Tramways, their construction and working, dit à ce propos :

« Un tram, selon Nuttal, est le brancard d'une charrette ou << d'une voiture; c'est aussi le nom d'un wagon à charbon: d'où << est dérivé le mot composé tramway ou tramroad, route formée « de barres étroites en bois, pierre ou fer, pour trams ou << wagons. »

Suivant un autre auteur, le mot tramway viendrait de Outram, qui construisait au dix-huitième siècle, dans les houillères d'Angleterre, des voies à rails plats en fonte, munis d'un rebord, qu'on appelait des Outramroads ou des Outramways et, par abréviation, des tramways.

Cette étymologie diffère essentiellement de la précédente. Elle ne fait remonter l'origine des tramways qu'au dix-huitième siècle, tandis qu'on les voit apparaître pour la première fois, dans les environs de Newcastle, au milieu du dix-septième.

3. Historique des tramways.

Vers 1630, le bois devenant rare en Angleterre, on chercha à le remplacer par la houille qui se trouvait en abondance dans plusieurs comtés, notamment dans le Northumberland. Mais les routes formées du sol naturel, qui conduisaient des usines aux ports d'embarquement sur la Tyne, étaient dans un état tel qu'un cheval ne pouvait traîner que 8 à 900 kilog. de charbon. Aussi les dépenses de charriage étaient-elles considérables. Pour les diminuer, on eut l'idée de placer dans les ornières des routes, des files de madriers en chêne bien parallèles, à l'écartement de 90 centimètres à 1m, 20, sur lesquels roulaient les roues en bois, très basses et à jantes plates, des grands wagons à charbon. Ces madriers avaient généralement 10 centimètres d'épaisseur et de 10 à 13 centimètres de largeur. Afin de les maintenir à l'écartement et au niveau de la route, on les fit reposer, tous les 60 centimètres environ, sur des traverses également en chêne et ayant les mêmes dimensions que les madriers. Ceux-ci étaient fixés aux extrémités de leurs supports par des chevilles en bois ; mais, comme les traverses à fleur du sol se détérioraient sous les pieds des chevaux, et que la surface des madriers s'usait vite au contact des roues grossières des wagons, on prit le parti de clouer sur les rails des pièces de bois d'essence dure, ayant le même équarrissage qu'eux. Ces pièces remplissaient ainsi l'office de rails fixés sur des longrines;

seulement, par raison d'économie, on n'employait que des bois tendres pour les supports longitudinaux et transversaux. Longrines et traverses étaient enterrées dans une sorte de balast formé de poussier de mines, ou de toute autre matière de cet genre, et fortement bourrées; sauf la matière employée pour les rails, ces voies primitives offraient la même disposition que nos tramways actuels. Elles rendaient, au reste, de grands services aux propriétaires des mines, car elles permettaient à un cheval de traîner de 2 à 3 tonnes de charbon, soit environ trois fois plus que sur une route ordinaire.

4. Chemins en bois.

Ces chemins en bois existent encore au Canada et dans l'Amérique du Sud, pour le service des mines et des exploitations forestières. Dans le Nord, les rails sont en érable, et leur face supérieure est profilée suivant le bandage des roues. Plusieurs de ces chemins sont desservis par des locomotives légêres, dont le poids, en charge, varie de 5,000 à 8,000 kilogrammes.

Les rails en bois sont glissants. Ils ne conviennent pas pour les fortes rampes et les courbes raides. Les machines doivent déployer la moitié, quelquefois même les deux tiers, de plus de puissance que sur les rails en fer. Lorsque l'eau pénètre le bois, la résistance à la traction augmente sensiblement, surtout sur les parties accidentées. Aussi prit-on le parti, vers 1716, de recouvrir les rails de bandes en fer malléable de 5 centimètres de large sur 12 millimètres d'épaisseur, en les fixant par des clous à tête fraisée. Ce perfectionnement donna de bons résultats partout où il fut appliqué. Il le fut notamment à SaintEtienne.

Ainsi modifié, ce mode de transport ne tarda pas à être adopté dans la plupart des districts houillers de l'Angleterre. Il resta pendant plus de soixante ans sans recevoir de modification sensible.

5. Emploi des rails en fonte.

Vers 1738, on essaya des rails en fonte; mais les barres que l'on fondit étaient trop faibles et cédaient sous le poids des wagons. Ces ruptures avaient lieu le plus souvent parce que la charge de 2 à 3 tonnes que traînait un cheval n'occupait qu'un wagon. L'essai fut repris en 1767, aux forges de ColbrookeDale, dans le Shropshire, par William Reynolds, ingénieur, et l'un des propriétaires.

Il divisa le chargement dans ruptures devinrent plus rares.

plusieurs petits wagons, et les

Les propriétaires, voyant le prix de la fonte baisser sensiblement, prirent le parti, pour conserver leurs rails en service, de garnir leur surface des gueuses qu'ils avaient en magasin, avec l'intention de les enlever et de les vendre au moment de la hausse. Ces barres avaient 1m,50 de long, 10 centimètres de large et 3 centimètres d'épaisseur. Elles étaient percées de trois trous par barre, à l'aide desquels on les fixait sur les rails.

Les résultats qu'elles donnèrent furent tels qu'on les adopta dans la plupart des districts houillers.

6. Rails à rebord vertical.

Neuf ans plus tard, vers 1776, M. Carr, directeur des charbonnages du duc de Norfolk, à Sheffield, construisit une voie destinée à desservir des mines, avec des barres en fonte munies d'un rebord vertical afin de retenir les roues des wagons. Ces barres présentaient en section la forme d'un L. On les fixait sur les traverses comme les rails plats en fonte.

Elles étaient désignées sous le nom de trams, et l'ensemble de la voie s'appelait un tramway.

Ces trams avaient le grave inconvénient de retenir la boue et la poussière à l'intérieur du rebord, et d'augmenter ainsi le tirage.

Néanmoins la forme en L fut longtemps employée pour les tramways, ainsi que nous le verrons plus loin.

7. Rails saillants en fonte.

A l'époque où James Watt cherchait à appliquer la vapeur au transport du charbon dans les mines, on commençait à fondre des barres rectangulaires en fonte assez résistantes pourne plus nécessiter l'appui des longrines. On les plaçait de champ sur les traverses entaillées, et on armait les roues de boudins pris dans le bandage lui-même. En 1789, Jessop les fixait sur des dés en pierre à l'aide de coussinets en fonte.

8. Rails en fer malléable.

Seize ans plus tard (1805), Nexon proposa de remplacer les barres en fonte par des barres en fer malléable, d'une longueur de 60 à 90 centimètres et d'une section de 2 à 3 centimètres carrés seulement. Ces rails étaient trop minces et entamaient les roues. Les rails plats en fonte étaient encore en usage, car nous voyons à cette époque M. Woodhouse prendre un brevet pour une voie métallique composée de plateaux en fonte légè

rement concaves, posés sur des dés ou des longrines de niveau avec la chaussée, et maintenus à l'écartement par des traverses en bois ou des entretoises en fer. Cette voie était destinée aux routes ordinaires. Un spécimen fut établi, en 1821, aux environs de Leicester.

Les rails en fonte et les rails en fer étaient concurremment employés pour les petites voies ferrées des mines, les seules alors en usage.

C'est sur l'une d'elles, le Tram-Road de Merthyr-Tydvil, dans le sud du comté de Galles, que Trevithick et Vivian essayèrent leur locomotive, la première qui ait pu remorquer sur un chemin de fer, à la vitesse de 8 kilomètres à l'heure, un wagon chargé de 10 tonnes de minerai.

A la suite des essais qui eurent lieu dans les houillères de lord Carlisle, dans le Cumberland, on finit par reconnaître la supériorité des rails en fer sur les rails en fonte dont le coeffi

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cient de frottement est plus élevé; mais on n'avait pas encore trouvé le moyen de fabriquer les premiers dans des dimensions plus grandes que celles que leur avait assignées Nexon. Aussi, pour établir en 1809 le tramway de Cheltenham à Glowcester, d'une longueur de 14 kilomètres, on crut devoir revenir aux rails en fonte à rebord, ainsi que le montre la figure 1. C'est la première voie de ce genre qui ait transporté des voyageurs.

Quelques années plus tard, un autre tramway, de Stratfordsur-Avon à Moreton, fut établi pour le transport des charbons et des grains; de 1825 à 1832, il transporta également des voyageurs.

On peut ranger dans la classe des tramways les voies composées de deux bandes en granit parallèles, que M. Walker. ingénieur, posa en 1829 dans Commercial Road, à l'est de Londres.

En 1833, sir John Macneil forma une Compagnie au capital

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