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Sur ce point, il y a un accord parfait entre tous nos philosophes, surtout ceux des temps modernes ; mais, il n'en est plus de même dès qu'il s'agit de fixer une règle de croyance et de conduite. Les uns détruisent, renversent ce que les autres édifient, de sorte que ceux qui sont de bonne foi n'hésitent point aujourd'hui à reconnaître que « la philosophie n'est pas même d'accord sur les vérités essentielles et qu'il y a toujours lutte sur les mots et sur les choses ». « Pauvre sagesse des sages! elle est condamnée à passer son temps à démolir ce qu'elle a bâti, et à déranger ce qu'elle a arrangé ».2 Aussi dirons-nous avec saint Eucher, dont le témoignage est parfaitement approprié au caractère de notre époque, sont-ils seulement dignes du titre de philosophes, ces faux sages, ces prétendus savants qui ne savent pas même ce que c'est que science et sagesse? Quelle morale peuvent-ils enseigner, quelle règle de vie peuvent-ils donner, eux qui méconnaissent la source de toute vertu et de toute justice; qui, ignorants de leur origine et insouciants de leur fin, marchent à l'aventure, n'entrant, par hasard, dans la voie de la vérité, que pour s'en écarter aussitôt ; et tombant de faux pas

4 Le journal le Siècle, numéro du 8 septembre 1855, article de M. Léon Plée.

2 Amédée Achard, lettres parisiennes, février 1856.

en faux pas, d'erreurs en erreurs, dans un scepticisme stupide qu'ils nomment raison philosophique? Que si parfois il se rencontre çà et là, dans leurs enseignements, quelques maximes louables et bonnes, ce n'est encore que vanité et ostentation de vertu qui cherche à surprendre notre estime et à s'attirer nos éloges; de sorte qu'en combattant nos passions, ils demeurent eux-mêmes esclaves de la plus détestable des passions, de l'orgueil, et qu'ils n'échappent à un vice que pour tomber dans un autre vice.

Oh! fuyez, fuyez ces écoles empestées où parle l'esprit de mensonge et de ténèbres ! fuyez ces faux docteurs qui, comme dit l'apôtre, « n'ont goûté que les choses de la terre; » et rendus à la raison et à la vérité, appliquez l'heureuse pénétration de votre esprit à l'étude et à la méditation de nos saints auteurs. Vous ne tarderez pas à reconnaître qu'eux seuls ont possédé la vraie sagesse, la vraie lumière, la vraie science; et que, tandis que les païens n'étaient philosophes que de nom, eux, au contraire, l'étaient réellement par la pureté de leurs mœurs, l'élévation de leurs sentiments, et l'étendue de leurs connaissances. Quelques paroles

1 Philippiens, 3. 19.

de leurs livres vous en apprendront plus que tous les ouvrages des écrivains profanes : car ils renferment tout le dogme et toute la morale.

y

Plus on approfondit la divine Ecriture, plus on

découvre de beautés secrètes ; et vous n'admirerez pas moins la sublimité des mystères qu'elle renferme, que la clarté des préceptes qu'elle enseigne. Aussi l'on peut dire que l'Ecriture sainte est entièrement remplie d'une lumière toute céleste, que Dieu cache aux superbes sous le voile d'une apparente simplicité, mais qu'il laisse briller aux yeux des humbles qui la cherchent avec foi et la reçoivent avec amour. Pour ceux-là, les livres sacrés sont semblables à un diamant étincelant de feux si vifs et si brillants, qu'ils paraissent jaillir autant du fond que de la surface. Cependant que votre ame n'en soit pas éblouie et n'en craigne pas l'éclat : elle ne tardera pas à s'y accoutumer, et une fois qu'elle sera faite à cette divine lumière, elle voudra la regarder sans cesse, et ne pourra plus en regarder d'autre.

II.

Après la sainte Ecriture, ce sont les Pères de l'Eglise qui méritent le plus l'attention de tout homme qui a le désir de connaître la vérité et la morale du Christianisme.

Unis par la même foi, ils enseignent tous de siècle en siècle une doctrine immuable. Elle n'est point à eux, mais à tous les hommes; ils ne l'ont point inventée, ils l'ont reçue pour la transmettre fidèlement comme un dépôt sacré : et, traitant des plus hautes questions, de Dieu et de sa nature, de l'homme et de ses devoirs, des lois universelles de l'ordre du monde présent et du monde à venir, semblent n'avoir qu'une seule pensée, tant l'accord qui règne entre eux est parfait c'est que tous étaient instruits par cet esprit un, cet esprit divin, qui devait, aux moments fixés, remplir et renouveler la terre.1

ils

Quelle autorité, quel poids dans l'enseignement unanime des Pères ! Malgré la différence des peuples, la distance des siècles, l'éloignement des

1 Sagesse, 1. 7. Ps. 103.

lieux, leur doctrine reste uniforme, invincible, rien ne l'altère ni ne la modifie. Cette unité d'enseignement et de foi est une chose merveilleuse ; c'est le signe infaillible de la vérité.

Deux autres caractères distinguent encore la doctrine des Pères, c'est une tendresse pénétrante qu'on a nommée onction, et une foi qui se communique, et triomphe de l'esprit. On est persuadé, entraîné par la conviction de l'écrivain, et par le désir de convaincre que l'on sent dans tous ses discours. Ce n'est pas un rhéteur qui disserte pour éblouir, c'est un ami qui vous entretient avec une émotion profonde de vos plus grands intérêts, et dont le bonheur serait d'assurer le vôtre. Ce qu'il dit remue le cœur, parce qu'il part du cœur ; sa voix a des accents qui étonnent l'ame et qui la ravissent, une grâce attirante, une douceur dont le charme céleste peut à peine se comprendre et ne saurait être peint. Que voit-on presque toujours dans les orateurs que l'antiquité nous vante? L'orgueil s'efforçant de vaincre et de se soumettre les esprits. Ici, c'est un homme qui s'abaisse, qui s'humilie, qui prie, qui conjure, et pour qui? pour ceux mêmes à qui s'adressent ces pressantes supplications, content d'être oublié pourvu qu'il les sauve. On ne connaissait, avant le Christianisme, rien de sem

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