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Recherches médico-légales nécessaires pour

la constatation de l'infanticide.

A l'exemple de M. Martin-Damourette, nous diviserons les questions médico-légales relatives à l'infanticide en questions principales et en questions secondaires. Dans les premières nous traiterons des caractères fondamentaux qui peuvent prouver que l'enfant est né vivant, qu'il a vécu et qu'il a respiré, qu'il a péri de mort violente; dans les secondes nous étudierons les questions relatives à l'âge du fœtus à l'époque de la mort et les circonstances relatives à la femme.

I.

Questions principales.

- L'ENFANT EST-IL NÉ VIVANT? A-T-IL RESPIRÉ ?

M. Devergie a beaucoup insisté sur la distinction qu'il convient d'établir entre ces deux questions. En effet, le crime d'infanticide peut être commis sur un enfant qui, quoiqu'étant né vivant n'a pas respiré. La doctrine de cet éminent médecin légiste a, du reste, été sanctionnée par plusieurs faits et nous l'acceptons sans réserve.

Mais on comprendra qu'il est difficile de scinder l'étude médico-légale de ces deux questions. Nous procéderons done à un examen général et nous étudierons successivement les différents moyens proposés jusqu'à ce jour pour reconnaître 1° que l'enfant est né vivant; 2° qu'il n'est pas mort pendant ou immédiatement après l'accouchement ; 3° que la respiration a eu lieu.

A. L'enfant est né vivant. L'aspect extérieur du cadavre suffit souvent pour établir à priori que l'enfant avait cessé d'exister au moment de la naissance. Mais, comme le fait remarquer M. Tardieu, tous les enfants mort-nés ne portent pas avec eux les signes extérieurs propres à les faire reconnaître, il faut pour cela que la mort ait précédé la naissance de plusieurs jours au moins.

MM. Santez et Lempereur ont parfaitement décrit les caractères que présente le foetus qui a subi la putréfaction utérine, caractères qui avaient déjà été bien étudiés par Chaussier et Orfila. Après quelques jours de macération dans les eaux de l'amnios, le fœtus est infiltré d'une sérosité roussâtre, l'abdomen est aplati et flasque; la peau prend en certains points et surtout à l'abdomen et aux parties sexuelles une coloration d'un rouge brun qui bientôt s'étend uniformément surtout le corps. L'épiderme est détaché en plusieurs endroits; il se détache au moindre frottement et laisse à nu le derme humide et gluant. Les os du crâne sont mobiles les uns sur les autres et la tête est tuméfiée et aplatie comme celle des noyés (Tardieu). Le cordon n'est plus tordu sur lui-même et forme un cylindre mollasse rougeâtre et infiltré d'un fluide brun. Les viscères sont ramollis et présentent à l'examen histologique les granulations caractéristiques de la dégénérescence graisseuse. Il est inutile d'ajouter que si la mort remonte à une époque éloignée, les tissus présentent la dessiccation, la momification et la saponification qu'on a quelquefois observée dans les cas où le fœtus mort avait longtemps séjourné dans l'utérus.

Il est évident que lorsque les caractères, que nous venons de signaler, sont manifestes, les autres recherches seront inutiles et que l'accusation d'infanticide sera immédiatement écartée.

B. L'enfant est mort pendant le travail ou immédiatement après L'expert doit avoir présentes à l'esprit toutes les causes qui ont pu déterminer la mort de l'enfant pendant l'accouchement. On trouvera ces causes longuement décrites dans les traités d'accouchement, il est donc à peine, nécessaire de les rappeler ici. Elles peuvent se résumer ainsi :

1° Longueur du travail. La mort peut provenir dans ce cas ou de l'interruption de la circulation par le fait de la compression du cordon ombilical ou de la compression du placenta. Les moyens de la reconnaître sont assez incertains. Les auteurs signalent une tumeur séreuse ou sérosanguinolente située dans le voisinage du sommet de la

tête, mais cette tumeur existe sur beaucoup d'enfants de femmes primipares, c'est donc par son étendue qu'on pourra apprécier la durée et la difficulté du travail. Cette tumeur peut avoir de 10 à 15 millimètres d'épaisseur; elle se laisse facilement déprimer pendant la vie, mais elle est plus rémittente après la mort. Son étendue en largeur peut avoir jusqu'à 6 centimètres de diamètre; sa couleur est quelquefois violacée, mais la peau qui l'environne conserve sa couleur naturelle (Devergie). On signale encore l'allongement et la difformité de la tête. Ce caractère peut avoir quelque valeur, surtout s'il coïncide avec l'existence de la tumeur.

2° Procidence du cordon. Entortillement du cordon ombilical autour du cou de l'enfant.- Dans le premier cas la mort est due à la compression du cordon et par suite à l'asphyxie; on trouve alors à l'autopsie des ecchymoses souspleurales et les autres indices de l'asphyxie; dans le second la mort peut être due soit à la compression du cordon, soit à l'étranglement par l'anse du cordon passée autour du cou de l'enfant. Sur 685 étranglements observés à la clinique de Nogelé, il y eut 18 décès seulement, tandis que sur 743 cas de compression du cordon, il y eut 408 enfants mort-nés.

Les auteurs ont longuement étudié les caractères qui peuvent faire distinguer la mort par enroulement du cordon de la strangulation criminelle, mais M. Tardieu n'attache aucune importance à cette distinction. Il pense du reste que, dans ces cas, la mort doit être attribuée non pas à la strangulation mais simplement à l'arrêt de la circulation par suite de la compression du cordon pendant le travail. Quoi qu'il en soit, il est certain que le cordon peut laisser sur le cou et même sur la poitrine et le ventre du nouveauné une empreinte sous forme de sillon légèrement ecchy'mosé. Nous verrons plus loin, à l'article strangulation, les caractères qui feront distinguer ce sillon de celui qu'on observe dans les cas de strangulation véritable. Nous ferons seulement remarquer que le seul point véritablement important c'est que, lorsque l'enfant naît étranglé par le cordon, il n'y a jamais respiration complète, ni surnatation des poumons et que, par conséquent, si l'on trouve la respiration complétement établié, on a la preuve que la strangu

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2 Honoremoga remittat, du dercüurment du piacenta. — §. penfest a subtotube à use betontage par décollement di placenta, le calavre sera påle, décoloré, à peau cireuse et diaphane; les viscènes semot detolorés, le cœur et les principaux vaisseaux vides et afaissés. On observera également (bez la mère des symptines qui confirmeront l'existence de l'hémorrhagie.

C. L enfant a-t-il respiré ? — Les modifications apportées dans les organes du fœtus par l'établissement de la respiration sont les seules qui peuvent permettre d'affirmer d'une manière certaine que l'enfant a vécu. Ces modifications portent sur le colume du thorax, la situation, l'aspect extérieur, la structure, le volume, le poids et la densité des poumons.

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1 Volume du thorax.- La respiration ne pouvant s'exécuter sans produire une certaine dilatation de la poitrine, les anciens auteurs avaient cherché à utiliser cette circonstance dans les constatations médico-légales relatives à l'infanticide, mais M. Tardieu fait justement remarquer que, s'il est constant que le volume du thorax augmente chez l'enfant qui a respiré, il faudrait pouvoir prendre les mesures chez le même enfant avant et après l'entrée de l'air dans la poitrine, ce qui est impossible. Il faut encore ajouter que la voussure du thorax, qui était plus ou moins marquée pendant la vie, subit un certain affaissement après la mort. Nous dirons donc avec Casper que la voussure de la poitrine comme signe diagnostique n'a aucune valeur en médecine légale et nous nous dispenserons de reproduire les tableaux où sont indiqués, dans les traités classiques, les dimensions du thorax avant et après l'établissement de la respiration.

2 Situation des poumons. Avant l'établissement de la respiration ces organes occupent la partie la plus profonde de la poitrine et sont placés dans la gouttière costovertébrale, de sorte qu'ils sont presque complétement recouverts par le thymus et le cœur. Selon Casper, ils ne

remplissent que le tiers de la cavité thoracique. Lorsque la respiration a eu lieu, les poumons remplissent la cage thoracique et recouvrent le péricarde. M. Devergie fait remarquer que, dans des cas très-rares, des poumons trèspetits et enfoncés dans la poitrine peuvent appartenir à des enfants qui ont respiré.

3° Aspect extérieur. Les poumons qui n'ont pas respiré présentent une surface lisse où l'on aperçoit à peine les lignes celluleuses qui séparent les lobules pulmonaires, mais sans apparence de vésicules distinctes. La couleur est rouge brun, couleur de foie d'adulte et les bords paraissent d'un rouge un peu plus clair (Devergie, Casper); elle est le plus souvent d'un rouge lie de vin rappelant la teinte de la rate et d'une coloration uniforme sur toute la surface de l'organe (Tardieu). Chez l'enfant qui a respiré les poumons ont un aspect tout différent. La couleur est d'un rose vif ou d'un rouge bleuâtre marbré de taches circonscrites et nombreuses, quelquefois d'une couleur rouge vermeil avec des taches rouge bleu foncé, mais la teinte n'est jamais égale et est toujours nuancée et marbrée. La surface de l'organe est lobulée et partagée en petites cellules polygonales dilatées par l'air et souvent visibles à l'œil nu.

4° Structure. Les poumons non pénétrés par l'air sont constitués par un tissu compacte et spongieux à peine réticulé, ce tissu est formé par des lobules denses, charnus et d'autant plus unis entre eux que l'enfant approche plus du terme de neuf mois (Devergie). Après l'établissement de la respiration les poumons sont dilatés et les vésicules apparaissent très-distinctement. Si l'on comprime le tissu pulmonaire on sent une espèce de crépitation caractéristique qui n'existe jamais dans le poumon fœtal.

5° Poids, volume et densité. Les épreuves auxquelles on soumet les poumons de l'enfant nouveau-né pour constater les modifications de poids et de densité sont des plus importantes. Leur ensemble constitue la docimasie pulmonaire (Sexetv, éprouver).

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