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accidentel en France; mais il n'en est pas de même dans la Grande-Bretagne. Un médecin légiste éminent, M. Gallard, a rapporté plusieurs cas d'empoisonnements criminels, suicides et accidentels, qui ont eu lieu en Angleterre, à l'aide d'une préparation vermicide désignée sous le nom de Battle's vermin Killer (1), et contenant une quantité notable de

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Fève de Saint-Ignace. FIG. 23. Coupe de la même graine.

strychnine. Un seul cas d'empoisonnement criminel par la strychnine a été observé en France et a été jugé devant la cour d'assises de la Seine-Inférieure (août 1865).

La strychnine est extrêmement amère et produit la mort chez l'adulte à la dose de 1 à 2 centigrammes.

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Symptômes. Aussitôt après l'ingestion du poison, on observe une angoisse et une agitation promptement suivies de spasmes et de contractions toniques. Une raideur générale s'empare des muscles; le corps est renversé dans la position de l'opisthotonos, la parole est entrecoupée, l'intelligence nette, les membres sont agités de secousses plus ou moins violentes. Cette contraction se dissipe après un temps variable, pour faire place à un instant de calme qui est suivi d'un second accès plus violent que le premier, puis d'un troisième plus violent encore; enfin la mort arrive après un nombre d'accès variable, mais qui augmentent toujours en intensité. Il n'existe pas, chez l'homme, un

(1) De l'empoisonnement par la strychnine, par M. T. Gallard. (Ann.. d'hyg.et de méd. lég., 2e série, t. XXIV, 1865.

seul exemple d'empoisonnement dans lequel la mort n'ait été précédée de plusieurs accès convulsifs.

Lesions cadaveriques. - Aussitôt après la mort, survient une rigidité cadavérique remarquable, On trouve à l'au

FIG. 24.

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Physostigma venenosum. 1. tige, feuilles, fleurs et fruits; 2, fève réduite à la moitié de sa grandeur.

topsie une congestion prononcée des vaisseaux du cerveau, de ses membranes et de la moelle épinière. Le cœur est tantôt rempli de sang, tantôt vide; le sang est fluide. C'est à tort qu'on a avancé que les individus tués par la strychnine présentaient les lésions de l'asphyxie; on ne trouve

aucune altération particulière dans le poumon et dans les organes digestifs.

Traitement. Évacuer l'estomac par les vomitifs et la pompe gastrique et administrer les antidotes. Les principaux sont le tannin, le chlore et l'iode; le tannin forme un précipité de tannate de strychnine; le chlore, un précipité blanc de trichlorostrychnine; l'iodure de potassium précipite la strychnine ainsi que la plupart des alcaloïdes.

C'est le

2o Acide cyanhydrique (Acide prussique). plus énergique des poisons connus. A l'état de pureté, une seule goutte suffit pour tuer un chien vigoureux et il est probable que deux ou trois gouttes donneraient la mort à un homme. L'acide cyanhydrique dit médicinal contient une partie d'acide anhydre pour 8,5 parties d'eau; c'est celui qui est le plus souvent employé dans les empoisonnements suicides, accidentels ou criminels. A l'état de vapeur, l'acide cyanhydrique peut également déterminer la mort, et c'est à l'inspiration accidentelle de ces vapeurs qu'on attribue la perte du chimiste Scheele.

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Symptômes. Lorsque le poison n'a pas été administré en quantité suffisante pour produire instantanément la mort, on observe immédiatement les symptômes suivants : perte de connaissance, du sentiment et du mouvement; pupilles fixes, dilatées; respiration bruyante, convulsive; anxiété précordiale, crampes alternant avec un relâchement complet des sphincters. Le corps se refroidit, le pouls devient insensible, et la mort a lieu dans l'espace de dix à quinze minutes, au plus dans l'espace de trois quarts d'heure.

L'acide cyanhydrique est un poison hématique qui tue les globules et supprime la fonction de l'hématose.

Lésions cadaveriques. Les tissus exhalent une odeur d'amandes amères et les muscles présentent en général une rigidité plus prononcée qu'à l'ordinaire; les yeux ont un aspect brillant et cristallin. L'estomac et les intestins présentent çà et là des plaques rouges; le cerveau, la moelle, les poumons, le foie, la rate, les reins sont congestionnés ; le sang est fluide et le plus souvent coloré en rouge.

LUTAUD, Méd. lég.

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Traitement. Évacuer l'estomac avec la pompe gastrique et chercher à neutraliser le poison. On a conseillé pour cela un mélange à parties égales de sulfate ferreux et de carbonate de soude (Smith), qui peut donner naissance à un bleu de Prusse inoffensif.

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Plusieurs autres substances, le laurier-cerise, les cyanures alcalins, doivent leurs propriétés toxiques à l'acide cyanhydrique Le cyanure de potassium a produit fréquemment des empoisonnements accidentels. Dans un cas d'empoisonnement par une potion contenant quatre grammes de cette substance, le malade succomba dès la première cuillerée et le médecin qui avait fait l'ordonnance fut condamné à 50 francs d'amende et trois mois de prison.

Pour la recherche de l'acide cyanhydrique, voy. p. 504

3° Nitrobenzine. Quoique l'action physiologique de la nitrobenzine soit loin d'être identique avec celle de l'acide cyanhydrique, MM. Briand et Chaudé rapprochent ces deux substances en raison des caractères extérieurs qu'elles ont de commun et des substitutions que l'industrie en fait journellement. En effet, les pharmaciens vendent sous le nom d'essence de mirbane de la nitroglycérine que les parfumeurs emploient de préférence à l'essence d'amandes amères dont le prix est beaucoup plus élevé.

Symptômes. Voici ce qu'on observa dans deux cas d'empoisonnement accidentel qui ont été récemment publiés par M. Strohl (1). Dix minutes après l'ingestion de 9 ou 10 grammes de nitrobenzine: vertiges, anxiété, nausées, vomissements, mouvements spasmodiques; pupilles dilatées, respiration difficile, intelligence obtuse. Un des individus succomba, l'autre fut sauvé après quarante-huit heures, temps probable de la durée de l'élimination.

Lésions cadavériques. « L'autopsie de M. Strohl fit voir de l'hyperhémie du cerveau, des poumons et du foie, la réplétion des deux ventricules du coeur par du sang noir, liquide; l'estomac était absolument intact. » Des symptômes

(1) Ann. d'hyg. et de méd. lég., avril 1867, p. 449.

et des lésions analogues ont été observés dans un cas d'empoisonnement par la nitrobenzine, publié par Letheby.

4° Cantharides.

C'est le seul poison énergique que présente le règne animal. L'empoisonnement par les cantharides occupe le dixième rang dans la stastitique criminelle, et on en a observé vingt-trois cas de 1851 à 1863.

Les propriétés aphrodisiaques de cet agent, qui étaient déjà bien connues dans l'antiquité, augmentent encore la fréquence de l'empoisonnement criminel et accidentel par les cantharides.

Les cantharides doivent leurs propriétés toxiques et vésicantes à un principe vénéneux très-énergique : la cantharidine. Cinq centigrammes de cantharidine suffisent pour produire des accidents mortels, tandis qu'il faut 4 à 8 grammes de poudre pour produire la mort.

Symptômes. Aussitôt après l'injection du toxique, on observe une sensation de brûlure dans la bouche et dans la gorge; des vomissements de matières sanguinolentes dans lesquelles on trouve souvent des parcelles de poison sous forme de points brillants d'un vert bronzé ; la langue et les glandes sous-maxillaires se gonflent; l'haleine, les matières vomies et les selles exhalent l'odeur de la cantharide; les urines deviennent albumineuses, sanguinolentes et même purulentes. Les symtômes observés du côté des organes génitaux sont des plus remarquables: l'homme éprouve un priapisme opiniâtre et extrêmement douloureux; l'organe érectile de la femme devient lui-même turgide, la vulve est enflammée par suite de son contact avec la cantharidine qui s'élimine par les urines. On observe ensuite du délire, des convulsions, des accès tétaniques; le pouls, qui était d'abord accéléré, se ralentit; les malades s'affaiblissent de plus en plus, les parties génitales tombent quelquefois en gangrène, et la mort arrive du premier au cinquième jour.

Lésions cadavériques. La muqueuse de l'estomac est injectée et présente une coloration d'un rouge noirâtre; les méninges et le cerveau sont injectés, les ventricules renferment une sérosité abondante; les reins sont hyperhémiés, la vessie contractée; les corps caverneux sont gorgés d'un

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