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cet affranchissement n'est pas requis dans le but unique de se soustraire à l'obligation de servir. La perte de la nationalité par l'affranchissement se produit au moment même de la délivrance de l'acte d'affranchissement (Entlassungsurkunde). Mais l'affranchissement demeure sans effet et la nationalité allemande renait pour celui qui l'avait perdue, si, dans les six mois qui suivent la délivrance de l'acte d'affranchissement, il n'a pas transporté son domicile hors du territoire de l'Empire §18 de la loi du 1er juin 1870).

Dans deux cas, la faculté de retirer la nationalité d'État est abandonnée à l'appréciation de l'autorité administrative supérieure. Il lui appartient de déclarer déchu de la nationalité d'Etat soit l'Allemand qui est entré, sans autorisation de son gouvernement, au service d'un État étranger (§ 22), soit l'Allemand qui, séjournant en pays étranger, n'est pas, en cas de guerre ou de menace de guerre, rentré en Allemagne dans le délai indiqué par une ordonnance émanée de l'empereur § 20 de la loi du 1er juin 1870). Il en était encore ainsi dans une troisième hypothèse, prévue par la loi impériale du 4 mai 1874 qui était intervenue à l'occasion du conflit entre l'État et l'Église en Prusse; cette loi permettait de déclarer déchus de leur nationalité d'Etat les ecclésiastiques qui auraient exercé des fonctions ecclésiastiques indûment, c'està-dire contrairement aux lois de l'État; mais cette disposition avait cessé d'être appliquée dès avant l'abrogation de la loi. Il convient de remarquer seulement que dans le § 4 de cette loi on a prévu expressément un cas dont ne parlent point les §§ 20 et 22 de la loi du 1er juin 1870, le cas où celui contre lequel il serait fait usage de ce pouvoir possèderait la nationalité d'État dans plusieurs États de l'Empire: le fait d'avoir été déclaré déchu de sa nationalité dans l'un de ces États devait entraîner pour lui la même déchéance dans les autres Etats. Maintenant les professeurs de droit public agitent la question de savoir s'il y a lieu d'admettre la même doctrine dans les hypothèses des §§ 20 et 22 de la loi du 1er juin 1870. L'affirmative est enseignée par Zorn (1, p. 271; Meyer se prononce pour la négative (p. 174); Laband (I, p. 168) hésite, mais invoque en faveur de la première interprétation cette raison décisive que, si on ne l'admettait pas, les dispositions des §§ 20 et 22 resteraient lettre morte. Si en effet l'individu, qui a été déclaré déchu de sa nationalité dans un État déter

miné, peut la conserver dans un autre État, il a le droit, en invoquant cette dernière, d'obtenir à toute époque, conformément au § 7 de la loi, l'admission dans l'Etat même où la déchéance avait été prononcée contre lui.

L'Allemand qui a quitté le territoire de l'Empire et fait en pays étranger un séjour ininterrompu de dix années perd sat nationalité à l'expiration de ce délai (§ 21 de la loi du 1er juin 1870). Mais s'il a quitté le territoire de l'Empire avec un passeport ou un certificat de domicile, le délai de dix ans ne court qu'à partir du jour où ces pièces ont cessé d'être valables. Quant à la durée de validité de ces pièces, une résolution du Conseil fédéral, en date du 20 janvier 1881, décide qu'en règle générale elles ne devront être délivrées pour plus de cinq années. Les individus qui, avant la résolution précitée, s'étaient pourvus de certificats de domicile délivrés pour une durée indéterminée, sont garantis, en ce qui les concerne personnellement, contre la perte éventuelle de leur nationalité; il n'en est pas de même pour les mineurs, membres de leurs familles, et dont il était fait mention sur ces certificats le délai commence à courir pour ces derniers à partir du jour où ils ont atteint leur majorité (Cahn, p. 164). Le délai de déchéance est interrompu dès que l'Allemand revient sur le territoire de l'Empire, fût-ce d'une manière passagère; de sorte que le délai recommence à courir chaque fois à partir du jour où il a quitté le territoire pour la dernière fois (Cahn, p. 159). Le délai est également interrompu, selon la disposition expresse du § 21, par l'inscription sur le registre matricule d'un consulat de l'Empire; il ne recommence à courir dans ce cas qu'à partir du jour qui suit la radiation du registre matricule; et aux termes de l'Instruction adressée aux Consuls le 6 juin 1871, cette radiation a lieu, même sans l'intervention de l'individu immatriculé, lorsque celui-ci a abandonné d'une manière durable la circonscription du consulat.

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Le délai de dix ans peut, selon le § 21, al. 3, être réduit à cinq ans par des traités, à l'égard des Allemands qui ont séjourné pendant cinq années au moins sur le territoire de l'État avec lequel ce traité a été conclu et y ont obtenu la naturalisation; ce délai abrégé commence à courir à partir du jour où l'Allemand a quitté le territoire de l'Empire, sans distinguer s'il s'est vu ou non muni d'un passeport ou d'un

certificat de domicile. Cette disposition de la loi a été motivée par les traités que les États-Unis ont conclus avec la Confédération de l'Allemagne du Nord le 28 février 1868 et avec la Confédération de l'Allemagne du Sud dans le courant de la même année; aux termes de ces traités, tous les États de l'Allemagne, à l'exception du grand duché de Bade, ont renoncé à exercer toute poursuite contre ceux de leurs sujets qui se seraient soustraits par l'émigration à l'accomplissement de leurs devoirs militaires et auraient obtenu leur naturalisation aux États-Unis ; c'est ce qu'a reconnu expressément l'Instruction ministérielle prussienne du 6 juillet 1868. Aucun traité analogue n'a pourtant été conclu avec quelque autre Etat; et le gouvernement impérial n'a pas accédé jusqu'à ce jour à la proposition faite par les États-Unis de substituer aux traités de 1868 un traité applicable à toute l'étendue de l'Empire allemand. Il suit de là que les dispositions des traités de 1868 ne sont nullement valables pour l'Alsace-Lorraine ; les habitants du pays d'Empire, qui émigrent aux États-Unis sans acte d'affranchissement de la nationalité allemande, subiront donc, au point de vue de la perte de la nationalité allemande et des poursuites pour s'être soustraits à leurs obligations militaires, le même traitement que tous les Allemands qui émigrent dans tout autre pays.

La perte de la nationalité allemande par le séjour de dix années en pays étranger s'étend, aux termes du § 21, al. 2, à la femme et aux enfants soumis à la puissance paternelle, s'ils se trouvent à l'étranger avec leur mari et leur père. Pour les enfants, il suffit qu'ils se trouvent chez leur père au moment même où celui-ci est déchu de la nationalité allemande. Quant à la femme, on admet au contraire (Cahn, p. 169) que la perte de la nationalité ne l'atteint que si elle a partagé pendant toute la durée des dix années le séjour de son mari en pays étranger. Si le mari meurt à l'étranger avant l'expiration du délai, un nouveau délai recommence à courir pour la femme, car ce n'est qu'à partir de ce moment qu'elle est capable de perdre sa nationalité d'une manière indépendante. Il doit en être de même pour les enfants après la mort du père; mais le point de départ du délai ne peut se placer qu'au jour de leur majorité, puisqu'on admet que le délai du § 21 ne court point contre les mineurs qui séjournent seuls en pays étranger (Cahn, p. 170).

La déchéance de la nationalité d'État, prononcée par application des §§ 20 et 22 de la loi du 1er juin 1870, s'étend également à la femme et aux enfants mineurs (Cahn, p. 149, 188). Le § 19 dispose de même pour l'affranchissement de la nationalité (Entlassung), sous réserve des cas où il serait fait une dérogation à cet égard. Dans les cas prévus aux §§ 20 et 22, on doit également pouvoir stipuler une dérogation expresse, analogue à celle dont il vient d'être parlé; car la perte de la nationalité ne se produit dans ces hypothèses que sur une décision des autorités.

La loi allemande ne connaît pas la perte de la nationalité par l'effet d'une naturalisation acquise en pays étranger, abstraction faite d'ailleurs de la stipulation précitée des traités conclus avec les Etats-Unis.

(A suivre.)

Dr KLEPPEL

Rechtsanwalt au Tribunal d'Empire, Privat-docent à l'Université de Leipsig.

Traduit et annoté par MM. Louis LE SUEUR et Eugène DREYFUS, docteurs en droit, attachés au Ministère de la Justice.

Règles internationales à observer pour éviter les abordages entre les bateaux-pilotes et les navires à piloter.

Des cas multiples de collision entre bateaux-pilotes et voiliers ou vapeurs ont donné lieu à des jugements du See-Amt et des Cours de Hambourg, dans lesquels est établi le principe suivant :

«Il est du devoir des bateaux-pilotes, étant sous voile pour le service du pilotage, de s'écarter de la route poursuivie pour tous bâtiments quelconques, voiliers ou vapeurs. »

Ces jugements reposent sur l'idée que les règles 14 à 22 du règlement', concernant les mesures préventives pour éviter les collisions en mer, ne sont pas destinées à être appliquées à des bateaux-pilotes se trouvant dans les conditions susdites.

1. Règlement international de 1884, Clunet 1884, p. 671.

Les arguments sont les suivants : Il est dit que les règles en question n'ont été établies que pour des navires capables, à raison de l'éloignement réciproque de la route poursuivie par chacun d'eux à de grandes distances, de diriger leur course de manière à éviter des collisions.

Les règles ne sont pas applicables dans le cas où, lorsqu'il s'agit des bateaux-pilotes qui nous occupent, il est de l'intention d'un navire d'approcher un autre le plus possible.

Tel est le sens du règlement; il en ressort ce qui suit :

1o Les règles prescrites concernant les feux exigent que ceux-ci soient de nature à mettre à même tous les navires de se rendre compte le plus distinctement possible, à de grandes distances, de la route que doivent suivre ceux qui viennent à leur rencontre.

Par ce motif, il est exigé que tous les navires soient munis de feux de côté, ceux-ci devant être tels qu'ils soient aperçus à une distance de deux milles au moins par une nuit obscure avec atmosphère claire.

Afin de distinguer vapeurs et voiliers, il a été, en outre, prescrit que les vapeurs seraient munis d'un feu de hune visible à cinq milles au moins par une nuit obscure avec atmosphère claire.

2o L'article 17 établit que, si deux navires, dont l'un est voilier et l'autre vapeur, poursuivent des directions telles qu'il peut en résulter à un moment donné le danger de collision, il appartient au vapeur de s'écarter de la route du voilier pour laisser à celui-ci passage libre.

L'article 18, au contraire, dit que tout vapeur, s'approchant d'un navire dans des conditions telles qu'il y a à craindre le danger d'une collision, est tenu de ralentir sa vitesse ou d'arrêter et de renverser ses machines, si toutefois ceci est nécessaire.

Ces deux articles démontrent clairement que le devoir du vapeur, de s'écarter de la route d'un autre navire voilier (soit en changeant de route, soit en ralentissant ou augmentant sa vitesse), lui incombe avant qu'il soit question de se conformer aux manœuvres prescrites par l'article 18 (ralentissement de la vitesse, arrêt ou renversement des machines, si nécessaire; car, si les premières prescriptions ne devaient être observées qu'au moment où les secondes devraient déjà être appliquées, l'art. 17 ne serait jamais d'actualité, tandis que

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