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1728. Le preneur est tenu de deux obligations principales: 1° d'user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d'après les circonstances, à défaut de convention; 2o de payer le

prix du bail aux termes convenus.

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1729. Si le preneur emploie la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée, ou dont il puisse résulter un dommage pour le bailleur, celui-ci peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail.

1730. S'il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu'il l'a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure.

1731. S'il n'a pas été fait d'état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire.

1732. Il répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute.

1733. Il répond de l'incendie, à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou par vice de construction; ou que le feu a été communiqué par une mai

son voisine.

1734. S'il y a plusieurs locataires, tous sont solidairement responsables de l'incendie; à moins qu'ils ne prouvent que l'incendie a commencé dans l'habitation de l'un d'eux, auquel cas celui-là seul en est tenu; ou que quelques-uns ne prouvent que l'incendie n'a pu commencer chez eux, auquel cas ceux-là n'en sont pas

tenus.

1735. Le preneur est tenu des dégradations et des pertes qui arrivent par le fait des personnes de sa maison ou de ses sous-locataires.

1736. Si le bail a été fait sans écrit, l'une des parties ne pourra donner congé à l'autre qu'en observant les délais fixés par l'usage des lieux.

1737. Le bail cesse de plein droit à l'expiration du terme fixé, lorsqu'il a été fait par écrit, sans qu'il soit nécessaire de donner congé.

1738. Si, à l'expiration des baux écrits, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un nouveau bail dont l'effet est réglé par l'article relatif aux locations faites sans écrit.

1739. Lorsqu'il y a un congé signifié, le preneur, quoiqu'il ait continué sa jouissance, ne peut invoquer la tacite réconduction.

1740. Dans le cas des deux articles précédents, la caution donnée pour le bail ne s'étend pas aux obligations résultant de la prolongation.

1741. Le contrat de louage se résout par la perte de la chose louée, et par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements.

1742. Le contrat de louage n'est point résolu par la mort du bailleur ni par celle du preneur.

1743. Si le bailleur vend la chose louée, l'acquéreur ne peut expulser le fermier ou le locataire qui a un bail authentique ou dont la date est certaine, à moins qu'il ne se soit réservé ce droit par le contrat de bail.

1744. S'il a été convenu, lors du bail, qu'en cas de vente l'acquéreur pourrait expulser le fermier ou locataire, et qu'il n'ait été fait aucune stipulation sur les dommages et intérêts, le bailleur est tenu d'indemniser le fermier ou le locataire de la manière suivante.

1745. S'il s'agit d'une maison, appartement ou boutique, le bailleur paye, à titre de dommages et intérêts, au locataire évincé, une somme égale au prix du loyer, pendant le temps qui, suivant l'usage des lieux, est accordé entre le congé et la sortie.

1746. S'il s'agit de biens ruraux, l'indemnité que le bailleur doit payer au fermier est du tiers du prix du bail, pour tout le temps qui reste à courir.

1747. L'indemnité se réglera par experts, s'il s'agit de manufactures, usines ou autres établissements qui exigent de grandes

avances.

1748. L'acquéreur qui veut user de la faculté réservée par le bail d'expulser le fermier ou locataire en cas de vente, est, en outre, tenu d'avertir le locataire au temps d'avance usité dans le lieu pour les congés. Il doit aussi avertir le fermier de biens ruraux au moins un an à l'avance.

1749. Les fermiers ou les locataires ne peuvent être expulsés qu'ils ne soient payés par le bailleur, ou, à son défaut, par le nouvel acquéreur, des dommages et intérêts ci-dessus expliqués.

1750. Si le bail n'est pas fait par acte authentique, ou n'a point de date certaine, l'acquéreur n'est tenu d'aucuns dommages et intérêts. 1751. L'acquéreur à pacte de rachat ne peut user de la faculté d'expulser le preneur jusqu'à ce que, par l'expiration du délai fixé pour le réméré, il devienne propriétaire incommutable.

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De la PREUVE des baux. sensuel, mais un écrit est nécessaire pour en prouver l'existence. Contrairement au droit commun, la loi écarte la preuve testimoniale pour les baux dont le prix est inférieur à 150 fr. La fréquence du contrat, et, en cas de contestation, l'urgence d'une solution, tant pour le bailleur que pour le preneur, expliquent et justifient cette dérogation aux règles générales.

Le louage est un contrat con

Toutefois, nul doute que l'aveu des parties ou le serment décisoire ne soient recevables comme preuve du contrat, car la loi a eu pour but unique d'exclure la longueur des enquêtes. L'exécution du bail en est une preuve complète.

Ainsi quand le locataire ou le fermier a pris possession des lieux loués, ni lui ni le bailleur ne sont recevables à contester l'existence du contrat; et la seule question qui puisse les diviser est celle relative aux clauses et conditions.

Lorsque l'existence du bail est démontrée, et que le montant du prix seul est contesté, le propriétaire est, à défaut de quittances de loyer ou de fermage, cru sur son serment. Mais la loi laisse au preneur la faculté de demander une estimation par experts, dont les frais resteront à sa charge, si cette estimation excède le prix offert par lui au bailleur.

Qui supportera les frais, si l'estimation excédant le prix déclaré par le preneur est cependant inférieure au prix réclamé par le propriétaire? Malgré le texte de l'article 1716, qui semble les mettre à la charge du preneur, il est juste et rationnel de les mettre pour moitié à la charge de chacun ; car leur double déclaration était également inexacte.

Les motifs qui ont fait prohiber le témoignage comme preuve principale doivent aussi le faire écarter, lorsqu'il viendrait corroborer un commencement de preuve par écrit. Toutes les clauses et conditions d'un bail doivent donc, comme le bail lui-même, être prouvées par écrit . A défaut

1 Massé et Vergé, t. IV. § 690, p. 357, note 6.

Marcadé, art. 1715, n° 2.

de cette preuve on applique les règles générales tracées dans le titre du louage. Ainsi le preneur doit payer ses loyers et il peut donner ou recevoir congé dans les termes d'usage, quand même d'autres stipulations non écrites seraient intervenues entre lui et le bailleur.

Si le fait même de l'exécution du bail est contesté, il pourra être prouvé par témoins; car les dérogations au droit commun ne se présument pas, et celles que nous venons de signaler en ce qui concerne l'existence du bail ou le quantum des loyers et fermages, ne sauraient être, selon nous, étendues aux faits d'exécution du bail qui ont pu être accomplis. Ainsi le bailleur pourra parfaitement prouver par témoins que le preneur a pris possession de la chose, dont il nie avoir eu la jouissance, et le contraindre ainsi an payement de ses loyers ou fermages. La jurisprudence s'est cependant prononcée pour la solution contraire 1.

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De la sous-LOCATION et de la CESSION du bail. Sauf convention contraire, le preneur a le droit de sous-louer, et même de céder son bail. La différence qui existe entre ces deux opérations est plus ou moins étendue suivant les au

teurs.

D'après les uns, sous-louer consiste à louer à une autre personne une partie des lieux qu'on a loués soi-même, et céder son bail consiste à lui en louer la totalité.

D'après les autres, sous-louer signifie louer à une autre personne, soit une partie, soit même la totalité des lieux qu'on a loués soi-même. Les rapports du sous-locateur avec le sous-locataire sont alors régis par les mêmes règles que les rapports du bailleur originaire et du preneur principal.

Céder son bail signifie, au contraire, vendre à autrui tous les droits que l'on a acquis du propriétaire, avec les obligations y afférentes. D'où il résulte que le cédant n'a pas sur les meubles du cessionnaire le privilége d'un bailleur, qu'il

1 Cass., 12 janv. 1864.

n'est pas tenu des réparations nécessaires à la jouissance, ni de l'indemnité que le fermier peut exiger du bailleur, si un cas fortuit enlève plus de la moitié de la récolte; en un mot, le cessionnaire du bail n'est pas en relation avec son cédant, mais avec le propriétaire lui-même, de telle sorte que le cédant est, pour ainsi dire, supprimé; tandis que, dans l'hypothèse de la sous-location, le bailleur principal et le sous-locataire ne connaissent que le sous-locateur, sans se connaître l'un l'autre.

Cette seconde manière d'entendre la cession des baux et de la distinguer des simples sous-locations est la seule exacte. Effectivement, en quoi la circonstance que la sous-location s'applique à une partie ou à la totalité de la chose, peut-elle modifier les droits ou les engagements respectifs des parties? Et n'est-ce pas dans la nature même de ces droits ou de ces engagements qu'il faut trouver la différence qui sépare la cession de la sous-location? Nous dirons donc que le cessionnaire d'un bail est aux lieu et place de son cédant, tandis que le sous-locataire ne connaît et ne doit connaître que le locataire principal.

La substitution du cessionnaire à son cédant est-elle complète et absolue? Elle l'est certainement au point de vue des droits actifs du preneur contre le bailleur, puisque ces droits sont, comme toutes les créances, susceptibles d'un véritable transport. Mais elle ne l'est pas au point de vue des obligations du preneur, car nul ne peut se soustraire à l'exécution de ses propres engagements. Le propriétaire conservera donc, malgré la cession du bail, le droit d'agir contre le cédant, si mieux il n'aime agir directement contre le cessionnaire qui est en possession des lieux loués.

Dans la pratique, les cessions de baux sont assez fréquentes, quoiqu'elles le soient moins que les sous-locations. Elles accompagnent habituellement les ventes de fonds de commerce ou de clientèle, car l'achalandage des commerçants est souvent plus attaché à la maison où ils exercent

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