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leur liberté et franchise; et si la publication a lieu, ce n'é tait, ni de l'ordonnance, ni du consentement de la cour, mais par le commandement du Roi, force et impressions cidessus déclarées; que ce n'était point leur intention de juger les procès conformément au concordat, mais de garder, observer comme auparavant les saints décrets et la pragmatique-sanction; qu'attendu que la cour a été duement avertie que l'assemblée, qu'on dit le concile de Latran, s'est efforcée d'annuller la pragmatique-sanction dont le procureur du roi aurait appelé, tant pour et au nom de la cour, que de tous les sujets du royaume, la cour, adhérant à ce premier appel, et y persistant, appelle de nouveau au Pape, mieux informé, au premier concile général, à celui ou à ceux auxquels il appartiendra.

Cette protestation fut renouvelée deux fois par le parlement, même après l'enregistrement.

Le 16 mars 1517, les gens du roi donnèrent leurs conclusions pour obéir, attendu les menaces et le danger d'un plus grand mal (1); mais ils joignirent à leur consentement, qui n'était pas même bien formel, des modifications, moyennant lesquelles le concordat serait enregistré quant au nom, et rejeté en effet.

Le lundi 22, jour convenu avec le seigneur de la Tréj mouille, il se rendit au parlement, pour l'enregistrement : le doyen du chapitre et plusieurs chanoines se rendirent de bonne heure au parlement, demandant que les droits de l'église fussent conservés, et protestant que tout ce qui se ferait à cet égard ne pourrait nuire ni préjudicier à l'église.

Le seigneur de la Trémouille entra; l'affaire fut consommée, et l'on mit sur le concordat: Lu, publié et enregistré de très exprès commandement du roi, notre souverain seigner, plusieurs fois réitéré en présence dudit seigneur Lav

trémouille, premier chambellan dudit seigneur-roi, envoyé par lui pour cet effet' spécialement.

L'université ne céda sur aucun point et fut fidelle à ses protestations. Elle tint une assemblée générale aux Bernardins, où elle appela les plus célèbres avocats, accusa le parlement de trahison, de collusion, de lâcheté, etc.; fit défendre d'imprimer, vendre ou afficher le concordat, priva les contrevenans de leurs priviléges. Les combats que l'université a soutenus lui font honneur; ses intérêts propres loin d'étre blessés par le nouvel arrangement, étaient trèsfavorisés, elle agissait par un zèle pour la pragmatique qui lui était commun avec le parlement et le clergé qui n'en ont jamais consenti l'abolition et qui en conserve précieusement le souvenir. (1) Ainsi, ce concile assemblé pour examiner, pour réformer l'église dans son chef et dans ses membres, ne servit, par l'adresse de Léon X, qu'à renverser la plus sûre digue qui entretienne l'autorité pontificale. L'acquiescement pur et simple du Roi à cet arrangement, faisait retomber la France dans tous les inconvéniens contre lesquels elle avait voulu se prémunir par la pragmatique sanction. Ainsi, il fallait que la nécessité réduisît François Ier. à traiter avec Léon X. Ces considérations furent alléguées par le Roi, pour justifier. à ses peuples la négociation qui aboutit au concordat; mais quand on fait réflexion que la première condition de ce traité fut de transporter au Roi le droit de nomination à tous les évêchés et à la plupart des grands bénéfices du royaume,' il est douteux que ce motif n'ait pas influé sur sa résolution plus que les raisons de bien public dont il faisait parade.

(1) Crevier, Histoire de l'Université de Paris, t. 5, p. 123.

Extrait de l'Abrégé Chronologique de l'Histoire de France par MÉZERAY.

Afin qu'il ne semblât pas que le Concordat fait entre le Pape et le Roi, fût une simple convention d'entre deux particuliers, le Concile de Latran l'ayant fait lire à sa dernière session, qui fut le 15 de décembre, le confirma par son autorité; mais le clergé de France, les Universités, les parlemens et tous les gens de biens y opposaient plainte, remon trances, protestations, appels au futur concile. Toutefois au bout de deux ans il fallut céder à l'autorité absolue, et enregistrer le Concordat au parlement. Ainsi, sous couleur d'ôter les inconvéniens des élections qui pouvaient bien avoir du remède, on en autorisa d'autres qui sont beaucoup plus grandes et qui n'en peuvent jamais avoir.

Extrait de l'Essai sur les Mœurs et l'Esprit des Nations, par VOLTAIRE,

Les Français, depuis Charles VII, étaient regardés à Rome comme des schismatiques, à cause de la pragmatique sanction faite à Bourges, conformément au décret du concile de Bâle, ennemi de la papauté. Le plus grand objet de cette pragmatique était l'usage des élections parmi les ecclésiastiques, usage encourageant à la vertu et à la doctrine en de meilleurs temps; mais source de faction, Il était cher aux peuples par ces deux endroits; il l'était aux esprits rigides comme au reste de la primitive église, aux Universités, comme récompense de leurs travaux. Les papes, cependant, malgré cette pragmatique qui abolissait les annates et les autres exactions, les recevaient presque toujours. Fromenteau nous dit que dans les dix-sept années du règne de Louis XII, ils tirèrent du diocèse de Paris, la somme

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exorbitante de trois millions trois cents mille livres numéraire de ce temps-là.

Lorsque François Ier. alla faire en 1515 ses expéditions d'Italie, brillantes au commencement, comme celles de Charles VIII et de Louis XII, et ensuite plus malheureuses eneore, Léon X qui s'était d'abord opposé à lui, en eut besoin, et lui fut nécessaire.

Le chancelier Duprat, qui fut depuis Cardinal, fit avec les ministres de Léon X, ce fameux concordat par lequel on disait que le Roi et le Pape se donnèrent ce qui ne leur appartenait pas. Le Roi obtint la nomination des bénéfices,' et le Pape eut, par un article secret, le revenu de la première année, en renonçant aux mandats, aux réserves, aux expectatives, à la prévention, droits que Rome avait longtemps prétendus. Le Pape, immédiatement après la signature du concordat se réserva les annates par une bulle. L'Université de Paris, qui perdait un de ses droits, s'en attribua un qu'à peine un parlement d'Angleterre pourrait prétendre; elle fit une défense d'imprimer le concordat du roi et de lui obéir. Cependant les Universités ne sont pas si maltraitées par cet accord du Roi et du Pape, puisque la troisième partie des bénéfices leur est réservée, et qu'elles peuvent les impétrer pendant quatre mois de l'année, jan1 vier, avril, juillet et octobre, qu'on nomme les mois des gradués.

Le clergé et surtout les chapitres, à qui on ôtait le droit de nommer leurs évêques en murmuraient; l'espérance d'obtenir des bénéfices de la cour les appaisa. Le parlement qui n'attendait pas de grâce de la cour, fut inébranlable dans sa fermeté à soutenir les anciens usages et les libertés de l'église gallicane dont il était le conservateur; il résista respectueusement à plusieurs lettres de jussion, et enfin, forcó

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d'enregistrer le concordat, il protesta que c'était par le com mandement du Roi, réïtéré plusieurs fois.

Cependant le parlement dans ses remontrances, l'université dans ses plaintes, semblaient oublier un service essentiel que François Ier. rendait à la nation en accordant les annates; elles avaient été payées avant lui sur un pied exorbitant, ainsi qu'en Angleterre : il les modéra; elles ne montent pas aujourd'hui à plus de 400,000 fr., année commune; mais enfin, les voeux de toute la nation étaient qu'on ne payât point du tout d'annates à Rome.

. On souhaiterait un Concordat au moins semblable au concordat germanique. Les Allemands, toujours jaloux de leurs droits, avaient stipulé, avec Nicolas V, que l'élection canonique serait en vigueur dans toute l'Allemagne, qu'on ne payerait point d'annates à Rome, que seulement le Pape pourrait nommer à certains canonicats pendant six mois de l'année, et que ces pourvus payeraient au pape une somme dont on convint. Ces riches canonicats allemands étaient encore un grand abus aux yeux des Jurisconsultes, et cette redevance à Rome une simonie. C'était, selon eux, un marché onéreux et scandaleux de payer en Italie, pour obtenir un revenu dans la Germanie et dans la Gaule. Ce trafic paraissait la honte de la religion; et les calculateurs politiques faisaient voir que c'était une faute capitale en France d'envoyer tous les ans à Rome environ 400,000 livres, dans un temps où l'on n'en regagnait point par le commerce, et que l'on perdait par ce contrat pernicieux. Si le Pape exigeait cet argent comme un tribuț, il était odieux; comme une aumône, elle était trop forte. Mais enfin aucun accord ne s'est jamais fait que pour de l'argent; reliques, indulgences, dispenses, bénéfices, tout a été vendu.

S'il fallait mettre ainsi la religion à l'encan, il valait mieux, sans doute, faire servir cette simonie au bien de l'Etat

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