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>>> proposition de complot contre le gouvernement, » et il a été établi au procès qu'il n'avait fait que suivre l'instigation de deux misérables agens de police. Cepen»dant il fut condamné à dix ans de bannissement: c'est » le maximum de la peine.

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>> Apparemment, Monsieur, vous la jugeâtes encore trop douce, puisque, d'après une ordonnance du 2 avril 1817, » rendue sur votre rapport, les condamnés au bannissement, » c'est-à-dire à une peine que le code appelle seulement » infamante, furent envoyés dans la prison de Pierre-Châ» tel, pour y subir la peine de la réclusion qui est infa» mante et afflictive.

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>> Je n'ai cessé de réclamer contre cet odieux abus du > pouvoir, contre cet acte de l'arbitraire le plus mons» trueux (1). Hélas! mes démarches ont été vaines, et il »> ne m'est plus permis de rien espérer..........

» Mon malheureux frère, après avoir été mis aux fers » et traîné de cachots en cachots à 200 lieues de sa ville » natale, vient de succomber à la maladie qu'il avait con» tractée dans la prison de Pierre-Châtel (2)................. Si tel était votre but, Monsieur, soyez satisfait.

» La culpabilité de mon jeune frère, fut l'ouvrage des » agens de la pólice; et sa mort.. Je souhaite,

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(1) Après toutes les tentatives qu'il m'avait été possible de faire auprès des ministres, j'avais présenté une pétition à la Chambre des Députés : elle fut renvoyée au Ministre de l'Intérieur. La police défendit aux journaux de parler de cette pétition; lorsqu'elle fut publiée, ils ne purent même aunoncer qu'elle se vendait au profit des condamnés.

(2) Mon frère, quoique sous la garde de plusieurs gendarmes, fut conduit enchaîné jusqu'à V........... où j'obtins, non de l'autorité su périeure, mais de l'humanité d'un brigadier de gendarmerie, qu'il cesserait d'éprouver cette gêne épouvantable qu'on lui infligeait par ordre supérieur. Il arriva à Pierre-Châtel sans aucun symptôme de

maladie.

» Monsieur, que votre conscience ne vous reproche rien; » mais je n'oublierai jamais que c'est sur le rapport de » M. Lainé, ministre de l'intérieur, que fut rendne l'or» donnance qui, par le fait, a condamné mon frère à la » peine capitale, tandis que ses juges, en lui appliquant » toute la rigueur de la loi, ne l'avaient condamné qu'à » l'exil....... Je n'oublierai jamais que c'est M. Lainé » qui, à la tribune des Députés, le 6 décembre 1817, a » cherché à justifier les rigueurs innouies exercées sur les » condamnés au bannissement. »

Je n'oublierai jamais que c'est M. Lainé qui, étant supplié, il y a deux jours, de permettre qu'on transportât mon frère moribond dans une maison de santé à Lyon, n'a voulu accorder cette grâce que sous caution. (1)

Ch.- Ph. MARCHAND.

Réponse de M. LAINE à la lettre de M. MARCHAND. Paris, le 27 février 18 18.

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» Monsieur, je n'attribue qu'à la douleur ce que vous. » avez imprimé et ce que vous venez d'écrire contre moi. » Il ne m'appartient pas de juger les tribunaux (2). Lorsqu'ils ont prononcé la peine du bannissement, le devoir » du Ministre est de s'occuper de faire transférer les con» damnés. A mon entrée au ministère, ignorant les obs>> tacles opposés par tous les gouvernemens à l'exécution » des jugemens relatifs aux bannis, je donnai des ordres » pour en conduire aux frontières; bientôt des plaintes

(1) C'est M. D'argenson, Député du Haut-Rhin, et qu'on est toujours sûr de trouver partout où il y a des malheureux à secourir, qui a fait, avec un généreux empressement, cette demande au Ministre, et qui s'etait rendu caution du jeune Marchand.

(2) Il ne s'agissait pas de juger les tribunaux ; il s'agissait de bannir des hommes condamnés au bannissement. Les condamnés eux-mêmes ne demandaient que l'exécution des jugemens rendus par les tribunaux, et ils l'invoquaient comme une grâce.

» s'élevèrent de toutes parts et on garda les bannis dans » les prisons (1). Ce fut ensuite une nécessité de choisir une » maison pour les y retenir. On a choisi la plus saine et la » plus spacieuse qui soit en France. Les détenus y jouissent » d'une cour immense, du vaste cloître dont elle est en» tourée, de grandes salles communes (2).

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Depuis que les condamnés au bannissement se trouvent » à Pierre-Châtel, j'y ai envoyé un homme connu par sa >> douceur et son humanité (5). Un rapport adressé par lui, m'ayant appris que M. votre frère était fort malade, » j'ai été autorisé à écrire à M. le Préfet de le faire trans>>-porter dans toute autre maison qu'il préférerait. J'at>> tendais l'effet de ma lettre, lorsqu'un député m'annon»çant les progrès de la maladie, m'invita à donner l'or» dre de placer M. votre frère dans une maison parti» culière. C'est lui-même qui m'a offert d'être caution de >> représenter M. Marchand après son rétablissement. Sur » la seule parole de ce député, j'ai donné à l'instant des » ordres au Fréfet. Ma deuxième lettre était partie depuis

(1) Le banni Marchand a-t-il été conduit aux frontières avant d'être gardé dans la prison de Pierre-Châtel ? Cependant le Ministre avouait, le 6 décembre 1817, que, malgré les difficultés, plusieurs avaient obtenu un refuge à l'étranger.....`

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(2) La plus saine !.. quelle triste preuve de contraire! Cinq mois de séjour à Pierre-Châtel opt suffi pour voir enlever le jeune Marchand, qui, jusqu'à son arrivée dans cette prison, n'avait donné aucun signe de mal die, quoiqu'il eût auparavant passé un an dans les prisons d'Alençon...

(3) Cette personne a été envoyée seulement dans le mois de janvier dernier, c'est-à-dire, qu'on a attendu les plaintes réitérées des condamnés pour envoyer savoir quels étaient à Pierre-Châtel leur traitement et leur position, qu'on ignorait absolument au ministère, et le premier rapport a annoncé des maladies contre lesquelles il n'y avait déjà plus de remède.

» trois jours, lorsque j'ai reçu de vous hier celle par la>> quelle vous m'annoncez un malheur que je déplore, et >> que vous reconnaîtrez plus tard injustej de m'imputer. » Le Ministre, Secrétaire d'Etat de l'Intérieur,

Signé LAINÉ.

DEPARTEMENT DE L'EURE-EVREUX.

Prime pour la saisie des Journaux d'un mauvais esprit.

No. 551. De la correspondance de M. le Préfet, année 1815.

Nous préfet du département de l'Eure, maître des requêtes du conseil du du roi, chevalier de la légion d'hon

neur;

Vu les lois des 29 octobre et 13 novembre 1815;

Considérant que quelques malveillans osent encore faire circuler des bruits absurdes qui ne tendent qu'à effrayer les esprits timides et crédules; que ces nouvelles mensongères, enfantées par le désir de nuire, sont souvent accompagnées de propos outrageans contre la personne du Roi, ou contre son gouvernement, et amènent toujours un résultat fâcheux, en faisant naître des inquiétudes mal fondées; considérant que ces propagateurs sont de vrais ennemis du repos public, et que nous devons à notre attachement au Roi, et à la confiance dont nous honorent le habitans de ce département, d'assurer leur tranquillité par tous les moyens qui sont en notre pouvoir, avons arrêté et arrêtons ce qui suit :

Art. I. Les maires, adjoints, commissaires de police et gardes champêtres, sont astreints à exercer une surveillance plus stricte que jamais, à l'effet d'empêcher les habitans, étrangers, ou passans, de faire circuler des nouvelles absurdes dont le but est d'allarmer les esprits, ainsi que de colporter des écrits désavoués qui auraient le même objet; cette surveillance doit également s'étendre à tous les propos

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par

qui pourraient être tenus contre la personne du Roi, d'un des menbres de sa famille, ou contre le gouvernement; les auteurs de ces délits doivent être arrétés à l'heure même, les soins des autorités et agens mentionnés ci-dessus. Art. II. Les fonctionnaires et agens désignés dans l'article précédent, qui, ayant connaissance des délits ci-dessus spécifiés, ne les dénonceraient pas à l'autorité compétente ainsi que leurs auteurs, et n'auraient pas employé toutes les mesures convenables pour les arrêter ou faire arrêter, seront par nous suspendus de leurs fonctions au moment même, sans préjudice des peines plus graves qu'ils pourraient encourir conformément aux lois.

Art. III. Il sera accordé par nous, sur le rapport qui nous en sera fait par MM. les souss-préfets, et jusqu'à ce que nous en ayons ordonné autrement, une gratification de cinq francs au moins, et plus considérable si nous le jugeons convenable, aux gendarmes, gardes champêtres, gardes nationaux et autres agens de police, qui auront de leur propre mouvement arrêté et amené sans ordre supérieur devant l'autorité compétente, tout individu qui aurait colporté des écrits ou journaux rédigés dans un mauvais esprit, ou tenu des propos contre le roi, un des membres de sa famille ou contre le gouvernement.

Art. IV. La garde nationale et la gendarmerie royale, concourront de tous leurs moyens à l'exécution des présentes dispositions, et nous nous réservons à faire à leurs Excellence les Ministres de l'intérieur et de la guerre, des rapports à l'avantage de ceux qui auront fait preuve de zèle, et de provoquer des punitions sévères contre ceux qui auraient négligé leurs devoirs.

Art. V. Le présent sera imprimé et affiché dans les principales communes de notre département, transmi à M. le général, commandant le département, à M. le capitaine de la gendarmerie royale; qui sont invités à nous seconder, et

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