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Vos premiers regards doivent se porter sur le service de 1814.
Vous savez sous quels effrayans auspices il s'est ouvert.

Cette époque inouie offre le contraste d'un débordement de dépenses et d'une stagnation de recettes.

Pendant le 1er trimestre, la recette n'a pas atteint le quart des dépenses, et l'arriéré antérieur au 1er Avril s'est accru pour ce seul trimestre de plus de 230,000,000.

Les économies ordonnées par Sa Majesté ont, dès le 2nd trimestre, réduit les dépenses de près de moitié.

Les recettes ont reçu, au contraire, une impulsion progressive qui les a portées pendant ce 2nd trimestre au double de celles du premier, et a réduit à moins de 1-tiers leur disproportion avec la dépense.

L'accroissement sensible des recettes et la diminution des dépenses continueront pendant les 2 derniers trimestres.

Les recettes présumées du 3me trimestre n'atteindront pas encore les dépenses; mais nous ne croyons pas nous tromper dans nos conjectures, en annonçant qu'elles n'en différeront pas de plus de 1-huitième.

Dans le dernier trimestre, où toutes les économies auront pu être réalisées, et où les recettes auront repris un cours encore plus régulier et déjà même assez complet pour servir de base au Budget de 1815, nous espérons dépasser l'équilibre, et obtenir un excédant de recette de près de 1-cinquième qui aidera le service des trimestres précédens.

Le résultat offert par le dernier trimestre est un présage des améliorations qu'on doit attendre à mesure que nous nous éloignerons des circonstances désastreuses où nous avons été jetés.

En vous occupant des Budgets de l'Etat, Messieurs, votre fonction première sera de reconnaître la nature et l'étendue de ses besoins et d'en fixer la somme.

Votre attention se portera ensuite sur la détermination et la fixation des moyens qui devront être établis et employés pour y faire face.

Pour procéder suivant l'ordre de vos délibérations, nous allons d'abord vous présenter l'évaluation la plus exacte possible de nos besoins, c'est-à-dire, des sommes qu'il est nécessaire d'affecter à chacun des Départemens Ministériels entre lesquels ces besoins se partagent.

Nous aurons ensuite l'honneur de vous offrir l'apperçu des voies et moyens proposés pour les balancer.

Les besoins de l'année courante se ressentent nécessairement du système exagéré de dépenses qui existait au commencement de l'année, et qui n'a pu diminuer que graduellement.

con

Les services ordinaires et extraordinaires étaient montés pour sommer dans le cours de l'exercice où nous sommes......1,245,800,000 La réduction du Territoire, les économies, les réformes dans l'intérieur ont fait successivement descendre l'estimation des dépenses nécessaires, à....................... .....827,415,000

Première diminution obtenue par la transition du Régime passé au Régime actuel............. ...................................418,385,000

La somme de 827,415,000 francs est donc celle à laquelle nous vous proposons d'arrêter le Budget des dépenses de 1814.

Ce Budget général se compose des Budgets particuliers formés par les Ministres, qui n'ont pu se dispenser d'y comprendre 331,275,000 francs, montant des dépenses faites dans les 3 mois antérieurs à leur entrée en fonctions.

C'est cette dernière somme qui, ajoutée aux besoins présumés des 9 derniers mois, enfle le Budget des dépenses de 1814, au-delà des moyens probables que cette année pourra fournir.

Il en résultera un déficit sur lequel nous vous proposerons plus loin de statuer.

Chaque Ministre est garant de l'emploi régulier des fonds mis à sa disposition. Ces fonds sont dans la proportion la plus rigoureuse possible avec les besoins mûrement approfondis de son service, et nous croyons que la fixation qui vous en est présentée mérite toute votre confiance.

Si des éclaircissemens vous sont nécessaires, chaque Ministre sera empressé à vous les procurer, et à mettre sous vos yeux tous les élémens qui pourront fixer votre opinion sur la modération des résultats que nous avons l'honneur de vous présenter.

Nous devons maintenant opposer au Tableau des besoins que nous venons d'indiquer, celui des voies et moyens qui peuvent y faire face. Ce dernier Tableau est également ci-joint, divisé par nature de produits.

L'année est trop avancée pour changer le système d'Impôt. Ses débris sont les seules ressources que nous laisse un bouleversement qui a tout atteint et tout maltraité, familles, propriétés, industrie, commerce, agriculture.

La Contribution directe, malgré les dommages qu'a soufferts la matière imposable qui la produit, est la branche de Revenus qui nous offre encore le plus d'espérance.

Nous évaluons son produit pour l'année 1814, tant en principal qu'en centimes additionnels, à .......291,266,000

Cette Contribution, assise et perçue en vertu d'Actes qui n'ont point eu la sanction Législative, a besoin d'être votée par vous pour devenir légale. Cette légalisation résultera de l'adoption du projet de Loi que nous vous présentons, si vous l'approuvez.

Les Droits d'enrégistrement, les produits des domaines et bois présentent l'apparence d'un recouvrement de.................114,715,000

Si les Contributions indirectes n'éprouvent point de nouvelles atteintes par le refus de se soumettre à une perception dont la réformation ne peut avoir d'effet qu'en 1815, cette branche pourra produire cette année environ........... ............86,500,000

Les loteries, les postes, les salines de l'Est, l'octroi de navigation et diverses recettes accidentelles présentent, y compris un fonds de 4,000,000 francs à fournir par la Ville de Paris, l'espoir d'un recouvrement de........... ........27,519,000

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Vous avez vu que le Budget des dépenses s'élevait, à 827,415,000 Celui des recettes ne paraît pas devoir s'élever au-delà

de.........

Déficit....................

520,000,000

.........307,415,000

Ce déficit appartenant au système des dépenses existant avant le 1er Avril, 1814, rentre dans la classe des dettes arriérées pour lesquelles nous vous proposerons des moyens de paiement.

Nous n'avons pas fait ressortir dans le Budget des recettes les centimes extraordinaires sur les Contributions directes, parce que, se trouvant absorbés par les réquisitions ou compensés par les nonvaleurs, ils n'offrent point de ressources réelles pour le service ordinaire.

Le produit des Contributions directes porté à 291,266,000 francs, est, nous le sentons, une charge encore pesante pour les Contribuables, fatigués de tant de pertes. Mais les modérations dont elles sont susceptibles ne peuvent venir qu'avec le tems. Ce n'est pas immédiatement après la Guerre qu'il est possible de jouir de tous les bienfaits de la Paix. La Guerre exige dans les premières années qui en suivent le terme, une prolongation de sacrifices pour la réparation des maux qu'elle a faits.

Nous passons au Budget de 1815, qu'il est nécessaire de décréter 4 ou 5 mois à l'avance, afin de donner le tems de confectionner les rôles des Contributions directes, de préparer l'exécution des dispositions que vous arrêterez sur le Régime des Impositions indirectes, et d'être en mesure de commencer les recouvremens avec l'exercice.

L'année 1815 s'ouvre sous des auspices bien différens de ceux de

1814.

La Paix et l'Ordre font mieux sentir leur influence, les proportions entre les recettes et les dépenses sont mieux déterminées, l'action du Gouvernement est plus facile, sa prévoyance plus sûre, sa proportion plus efficace; l'esprit public se rassure et se fortifie. Mais on n'a pu perdre encore ni le souvenir des malheurs de la Guerre, ni le sentiment des efforts qu'il faut faire pour en effacer les traces.

Les dépenses ordinaires pour l'année 1815 ont pu être évaluées avec plus de précision. Le service débarassé des restes de charges qui pèsent sur celui de 1814, doit marcher avec plus d'économie et

d'aisance.

Les Ministres, en calculant scrupuleusement les fonds dont ils

auraient indispensablement besoin, ont eu en vue les ménagemens qui étaient dûs aux Contribuables malheureux, et se sont attachés à se renfermer dans les plus étroites limites de la nécessité.

Vous en serez convaincus, Messieurs: en jettant les yeux sur l'état ci-joint du Budget des dépenses de 1815; il s'élève à ......547,700,000 Nous proposons d'y ajouter pour l'arriéré exigible une

somme de

70,300,000

Total du Budget que nous vous proposons de déterminer pour les dépenses du Gouvernement, en 1815.........................618,000,000

Les élémens partiels dont la réunion forme le montant de chacun des crédits Ministériels énoncés dans ces Budgets seront, quand vous le demanderez, soumis à votre vérification. Ils ont tous été soigneusement examinés et débattus dans le Conseil du Roi, et Sa Majesté n'a permis qu'ils vous fussent proposés qu'après avoir acquis la certitude qu'on ne pourrait porter plus loin la modération sans compromettre le service du Gouvernement.

D'ailleurs, ainsi que nous l'avons déjà dit, la responsabilité des Ministres est, pour la régularité de l'emploi des fonds dont ils sont les Ordonnateurs, une garantie faite pour vous rassurer.

Vous voudrez, et le Roi le veut comme vous, que les tributs de vos Concitoyens et de ses Sujets reçoivent, sous cette garantie qui ne sera point illusoire, une application conforme au vœu qui les fait imposer, et que cette application, dont le Tableau sera soumis annuellement à votre examen, porte avec elle l'évidence et la preuve de son utilité publique.

Ces tributs ont pour objet de payer avec ponctualité les rentes et pensions inscrites, de ne pas laisser sans récompenses le Militaire qui a si dignement soutenu la renommée de nos armes, ni le Fonctionnaire qui a servi avec zèle et probité, d'environner le Trône d'une splendeur sans faste, d'assurer partout l'administration de la justice, de maintenir dans toutes les parties du Royaume une Police qui protège la sécurité de chacun, et l'exécution des Lois, de rendre de l'activité aux travaux publics d'une utilité générale, de veiller aux besoins des cultes et de l'éducation publique, d'assister les hôpitaux, d'aider les Communes détruites à se relever, d'entretenir une Armée digne de la France et de sa gloire, de redonner à la Marine une consistance analogue à notre position Continentale et à nos rapports commerciaux, de pourvoir sans parcimonie et sans prodigalité à tous les besoins de l'Administration générale, de procurer des encouragemens aux sciences, aux arts et à l'industrie, enfin de faciliter l'exécution de toutes les dispositions qui auront pour but l'accroissement ou la consolidation du bien-être de l'Etat.

Le Budget des dépenses de 1815 étant réglé à 618,000,000, voici les moyens que nous vous proposons, Messieurs, pour composer le Budget des recettes.

...

Contributions directes, y compris les centimes additionnels ordinaires et ceux qui étaient précédemment rangés dans la classe des fonds spéciaux ................................340,000,000 Cette fixation, comparée à celle qui avait été arrêté pour 1814 pour les mêmes produits, présente une diminution de plus de 80,000,000.

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Enrégistrement, domaines et bois ........120,000,000 Nous proposons de laisser subsister encore pour 1815, les Tarifs de l'enregistrement. Ils ont besoin d'être revus; plusieurs sont exagérés, et conséquemment éludés. Nous espérons acquérir une augmentation de Revenus par une diminution de Droits. Mais le travail qu'exige cette réformation nous force à remettre à l'année prochaine les améliorations que nous entrevoyons, et nous ne pouvons nous flatter d'obtenir en 1815, un produit supérieur à notre évaluation.

Postes, loterie, salines de l'Est, droits de navigation et recettes accidentelles ......... ...................................28,000,000

Nous ignorons si la Paix influera sur l'amélioration des produits des postes et de la loterie; mais avant que les diverses correspondances aient repris tout leur développement, et que l'aisance du Peuple ait redonné plus d'essor au jeu de la loterie, il est difficile d'attendre de ces 2 administrations un accroissement de Revenu de quelque import

ance.

Les produits ci-dessus ne présentent qu'une somme de 488,000,000 Nous ne pouvons chercher que dans les Contributions indirectes le complément des moyens qui nous sont nécessaires, et il faudrait qu'elles nous rendîssent pour cet effet.......

...130,000,000

Somme à laquelle nous proposons de régler le Budget de 1815

.....

618,000,000 Les Douanes n'offrent rien de bien déterminé après 22 ans de Guerre et d'un système outré dont il ne peut rien rester.

Elles sont moins une ressource fiscale qu'un moyen de favoriser notre industrie.

Les Douanes ont d'ailleurs cela de particulier, c'est que leur produit baisse dans les circonstances où l'on aurait le plus besoin qu'il s'élevât, la moindre Guerre les frappant de stérilité.

Il y a donc peu de fonds à faire sur un tel genre d'Impôt. Dans cet état, vous verrez, Messieurs, s'il ne devient pas nécessaire de chercher dans les Droits sur les boissons un secours que nous ne pouvons trouver ailleurs, et qui est indispensable.

Le Roi, dans sa retraite, gémissait depuis long-tems sur les vexations aux quelles le Peuple était livré par les vices de perception des Droits-réunis. Son premier soin a été d'en annoncer la destruction, par l'organe des Princes de sa Famille qui l'ont précédé.

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