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bloquer ensuite Brest où Gantheaume l'attendait avec 21 vaisseaux, ceux-ci reçurent l'ordre de sortir en rade pour prendre part à la bataille, si elle avait lieu.

Instruit, en même temps, de l'arrivée de Nelson à la Barbade, Villeneuve, s'appuyant sur l'ordre qui le rappelait, appareilla le 10 août, sans même se donner le temps de mettre à terre les troupes de débarquement qu'il avait emmenées et que j'ordonnais de laisser à la Martinique, pour pousser avec succès la guerre dans les Antilles.

vient aussi

en Angle

terre.

Nelson, ayant appris son départ, ne douta Nelson renullement qu'il n'attaquât la Trinité, et courut au secours de cette île. Désabusé, il revint sur Antigoa ce ne fut que plusieurs jours après qu'il sut enfin que Villeneuve reprenait la route d'Europe. Alors il se dirigea vers Cadix, envoya en toute hâte des avisos pour en prévenir les stations et l'amirauté; puis, après avoir vainement cherché des renseignements sur la marche de notre escadre, il retourna avec deux vaisseaux en Angleterre, et envoya les 9 autres renforcer la flotte de Cornwallis devant Brest, persuadé un peu tard que la réunion de toutes nos forces sur ce point était notre unique objet.

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Origine

velle coali

CHAPITRE VIII.

Projet de Pitt
pour abaisser la France. Troisième coalition.
Campagne de 1805. Batailles d'Ulm et d'Austerlitz. Opé–
rations en Italie et Tyrol. Démêlés avec la Prusse. Traités
de Vienne et de Presbourg. Les électeurs de Bavière et de
Wurtemberg prennent le titre de roi. Masséna envahit
le royaume de Naples. Guerre maritime. Bataille navale
de Trafalgar.

La sortie de forces navales si considérables, et d'une nou- la présence de 160 mille braves en face et à vingt tion. lieues de ses ports, étaient bien faites pour inspirer de justes alarmes à l'Angleterre; elle sentit le besoin de s'en débarrasser à tout prix. A peine Pitt fut-il replacé à la tête du ministère, que cet infatigable ennemi de la France chercha dans toutes les cours de l'Europe des alliés à nous

opposer.

Le voile qui couvre l'origine de la troisième coalition n'a été jusqu'à ce jour soulevé qu'à demi; la Russie paraît en avoir donné l'impulsion ; d'autres l'attribuent au cabinet de Londres, et quoi qu'il en soit, tous deux ne pouvaient tarder à s'entendre, dès que l'ambassade russe avait quitté Paris sans que j'eusse satisfait à aucun de

ses griefs, et que celle de Suède venait d'imiter son exemple.

Le cabinet de St.-James travaillait de tout son pouvoir à envenimer ces ressentiments: le prince Czartorinski, ministre des affaires étrangères, ayant laissé entrevoir au ministère anglais les dispositions où l'empereur Alexandre était de s'opposer, à main armée, à tout empiétement ultérieur de ma part, Pitt saisit avec avidité cette ouverture, et une négociation fut entamée à l'instant pour ourdir une coalition formidable, seul moyen de détourner l'orage prêt à fondre sur l'Angleterre. On a dit que ces communications de Czartorinski étaient une manoeuvre concertée d'avance par des hommes dont l'attachement à l'Angleterre n'était point un secret.

Il ne suffisait plus à notre implacable rival d'imposer des limites à la puissance française; il voulait encore contester celles qui venaient d'être sanctionnées par des traités, nous faire rétrograder dans les limites de 1792. Sans cela, comment promettre à l'Autriche un agrandissement qui pût l'entraîner à la guerre? comment y décider la Prusse ?

Projet de

nous relé

La fameuse note du 16 janvier, qui proposait Pitt pour à l'Europe le partage de nos dépouilles, est un monument curieux, et qui justifie tout ce que de 1792.

guer dans les limites

j'ai pu faire pour mettre la France en état de résister à de semblables projets (1).

Pitt proposait de rendre la Lombardie à l'Autriche; le roi de Sardaigne ne recouvrerait pas seulement le Piémont, la Savoie et Nice, on lui donnerait encore la république de Gênes pour le fortifier contre nous. La Prusse obtiendrait la Belgique pour me séparer de la Hollande, et arracher celle-ci à mon influence. Les petits états de la rive gauche du Rhin, qui nous avaient été cédés à Campo-Formio, à Lunéville, seraient donnés à la Prusse, à l'Autriche ou à d'autres princes allemands qui prendraient part à la ligue.

Autant il eût été naturel que les grandes puissances s'armassent pour empêcher mon agrandissement ultérieur, autant il était injuste et impolitique de vouloir nous remettre dans les limites de 1792. C'eût été fort bien si les autres états eussent voulu rentrer aussi dans les mêmes limites qu'ils avaient à cette époque. Mais la Russie, l'Autriche et la Prusse n'avaient-elles pas partagé la Pologne en 1795? L'Angleterre n'avaitelle pas acquis la moitié de l'Inde? La France, au

(1) Voyez cette note aux pièces justificatives, n° 1.

contraire, n'avait-elle pas perdu son alliance de famille avec l'Espagne, l'Autriche, la Sardaigne et Naples? Ses alliés dans l'Inde n'étaient-ils pas devenus des provinces anglaises: la ruine de St.Domingue ne lui ravissait-elle pas la suprématie dans les Antilles : n'eût-elle pas été dès lors dans un état relatif inférieur de moitié à l'état de 1792? Descendre quand tous ses ennemis montent, ne doit pas être le sort d'une grande nation victorieuse depuis dix ans; vouloir me faire subir une telle ignominie, c'était me mettre dans la nécessité de mourir les armes à la main, ou de subjuguer l'Europe.

La peur de mon ascendant et de mon génie entreprenant peut expliquer l'adhésion des puissances continentales à ce projet émané du cabinet de Londres; mais la peur de me voir sans cesse exposé au même danger doit expliquer aussi le parti que j'ai pris de me rendre dominant en Europe pour y échapper. Ainsi une crainte réciproque, portée à l'excès, devient souvent la cause des démêlés politiques les plus violents et pousse les hommes au-delà des bornes raisonnables, surtout après des révolutions. Quelque mal disposé que le cabinet russe fût La Russie pour moi, il était impossible qu'il ne trouvât pas le projet de Pitt exagéré; mais un nouvel incident leva tous ses scrupules. J'avais senti que l'Italie

négocie

avec lui.

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