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nélon adhéroit au jugement qui le condamnoit, avoit été en effet couvert des applaudissemens de toute l'Europe, et offre encore aujourd'hui à la postérité un de ses plus beaux titres de gloire. Le chancelier d'Aguesseau venoit d'en faire l'éloge le plus magnifique devant le premier tribunal du royaume; et le pape lui-même, quoique contraint et gêné dans l'expression de ses sentimens par la crainte de déplaire à Louis XIV, s'exprime dans son bref à Fénélon avec une sorte de bonheur, et presqu'avec reconnoissance sur un tel acte de docilité.

Bossuet fit à l'assemblée du clergé de 1700 le rapport de tout ce qui s'étoit passé dans l'affaire du quiétisme, et montra une modération qui acheva de rétablir le calme, que l'édifiante soumission de Fénélon avoit si heureusement préparé.

Tel fut le dernier acte de cette longue suite de scènes si vives et si animées, qui avoient fait tant de bruit et d'éclat, et auxquelles succéda toutà-coup un silence absolu, aussi remarquable que l'intérêt extraordinaire qu'on y avoit apporté.

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de

XXIII.

Bossuet

En finissant le récit de la controverse du quié- Démarches tisme dans l'Histoire de Fénélon, nous avons exprimé tous nos regrets de n'avoir pas vu Bossuet procher de

et Fénélon revenir aux sentimens de confiance et

pour se rap

Fénélon.

* Mts. de Winslou.

d'amitié qui les avoient unis si long-temps. Nous nous étions saisis avec avidité de quelques lignes d'une lettre de M.me de la Maison- Fort à Fénélon, écrite peu de temps après la mort de Bossuet. Elle y parloit « d'un voyage que l'abbé de » Saint-André avoit fait en Flandre à la prière » de M. de Meaux, et qui marquoit de la part » de ce prélat le désir sincère d'arriver à une ré» conciliation, et des contre-temps qui en avoient » empéché le succès ».

Nous regrettions de n'avoir pu répandre plus de lumières sur une particularité à laquelle un juste intérêt ne nous permettoit pas de rester indifférens. Mais nous avons été plus heureux que nous n'osions l'espérer. En parcourant les papiers qui nous ont été confiés pour l'Histoire de Bossuet, nous avons trouvé le récit de l'abbé de SaintAndré lui-même, qui nous a fait connoître tous les détails que M.me de la Maison-Fort nous avoit laissé ignorer. On y voit que Bossuet avoit en effet chargé l'abbé de Saint-André de faire les premières ouvertures d'une réconciliation, et que Fénélon n'a pas eu le tort de s'y être refusé. Un concours d'incidens bizarres ne permirent pas que les généreuses intentions de Bossuet arrivassent jusqu'à Fénélon.

C'est le célèbre Winslou * qui nous a conservé

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ces détails. Il déclare les avoir copiés sur le manuscrit original de l'abbé de Saint-André (1). Cet ecclésiastique rapporte « que le lendemain de » la quasi modo (1699) M. de Meaux, se prome>> nant avant le dîner sur la terrasse de Germigny avec l'abbé Berrier et lui, l'abbé Berrier >>crut devoir parler à M. de Meaux d'une con>>versation tenue chez le président de Lamoi» gnon. On y avoit beaucoup parlé de la victoire » que M. de Meaux avoit remportée sur M. de » Cambrai. Ce n'est pas moi, dit le prélat, en coupant la parole à l'abbé Berrier, c'est la vé» rité qui l'a remportée. L'abbé continuant son >> discours, ajouta que toute la compagnie avoit témoigné désirer vivement que les prélats se

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» réunissent pour l'édification du peuple ; et que » c'étoit à M. de Meaux à faire les premières » avances, comme ayant poursuivi le jugement. » Je l'ai déjà fait, Monsieur, reprit M. de Meaux » avec vivacité; et il ne tiendra jamais à moi, » que nous ne soyons bons amis, comme avant » la dispute. Il ajouta qu'il avoit reçu depuis peu

(1) Lorsque Winslou vint à Meaux dans l'intention d'abjurer le lutheranisme, Bossuet, avant de recevoir son abjuration, chargea l'abbé de Saint-André de l'y disposer par des instructions convenables. Depuis cette époque, Winslou entretint des re lations habituelles avec l'abbé de Saint-André, jusqu'à la mort de cet ecclésiastique.

» une lettre de M. le nonce, qui lui mandoit que » M. de Cambrai portoit des plaintes contre lui, » l'accusant de décrier partout sa soumission. » J'ai répondu, continua-t-il, que j'étois surpris » que M. de Cambrai m'imputát une fausseté » comme celle-là, et qu'il en portát des plaintes » au souverain pontife par son nonce; ce qui » m'engagea de me plaindre à M. le duc de » Beauvillier, ami intime de M. de Cambrai, » qui savoit bien lui-même que je louois la sou» mission de ce prélat. M. de Beauvillier me fit » réponse qu'il lui écriroit dès le lendemain, » pour lui faire connoître que des esprits mal » intentionnés, ou mal informés, l'avoient surpris; » et qu'il me communiqueroit la réponse qu'il en » recevroit. Depuis ce temps-là, M. de Beauvillier » ne m'a adressé aucun signe de vie, et c'est » pour cela que je vous prie de ne le point nom» mer; car j'ai un petit sujet de me plaindre de »son silence. L'abbé Berrier demanda la per» mission de rapporter cette conversation à » M. de Lamoignon, en ne nommant point le » duc de Beauvillier, et M. de Meaux y consentit. » Dans cette même promenade, l'abbé de Saint» André s'offrit de faire un voyage en Flandre; » ayant été seize ans chanoine d'Arras, étant » ami de l'évêque, qui lui-même, malgré la diffé

>>rence des sentimens l'avoit toujours été de >> M. de Cambrai, il pouvoit espérer par ce moyen » de travailler utilement à la paix. M. de Meaux » répondit que le temps n'étoit pas encore venu. >> Mais deux mois après, le même abbé de Saint» André l'étant allé voir à Paris, et lui ayant dit qu'il alloit faire un voyage de quinze jours, » le prélat lui demanda s'il se souvenoit de ce

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>>

qu'il lui avoit dit d'un voyage d'Arras. L'abbé >> lui répondit qu'oui. Eh bien, dit M. de Meaux, » c'est celui que je vous prie de faire, et vous » me ferez plaisir.»

Mais une suite d'incidens imprévus, dont le récit n'offriroit aujourd'hui aucun intérêt, et une maladie dont l'abbé de Saint-André fut attaqué pendant ce voyage, ne lui permirent point de se ménager un entretien particulier avec Fénélon, pour lui porter les paroles de paix dont il étoit chargé. M. de Meaux en fut très - fâché. Ce » voyage servit cependant à justifier la droiture » de son cœur, et le désir qu'il avoit d'une réu» nion entière avec M. de Cambrai. »

*

* Mts. de Winslou.

XXIV. Réflexions

sur le résul

tat de la con

La controverse du quiétisme a été un événement important dans l'histoire ecclésiastique du dix-septième siècle. Les deux plus grands évêques troverse du de l'Eglise gallicane se montrent en présence de quiétisme. toute la France et de toute l'Europe dans une

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