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>> nel que l'Eglise gallicane rendit à sa doctrine, >> c'est qu'il fut placé dans un temps où nous » n'avions aucun démêlé avec la Cour de Rome, » et où le roi vivoit dans une parfaite intelligence » avec le pape, dont il ne craignoit rien, et n'a» voit rien à craindre, en sorte que ce fut à la » vérité seule, et non à la nécessité des conjonctu» res, qu'on fut redevable d'une déclaration des » sentimens du clergé si authentique et si una

>> nime. >>

Pendant le cours de la controverse du quiétisme, Bossuet avoit reçu plusieurs témoignages aussi flatteurs qu'éclatans de la considération publique et de la bienveillance particulière de Louis XIV. A la fin de 1695, l'université de Paris nomma Bossuet conservateur de ses priviléges. Elle s'étoit proposé de lui en donner le titre dès 1679, à la mort de M. Choart de Bézenval, évêque de Beauvais (1). Mais M. de Harlay, archevêque de Paris, ne permit pas à l'université de suivre son mouvement *; et elle préféra de laisser la place vacante, plutôt que de faire tomber son choix sur un autre; devenue libre enfin par la mort de M. de Harlay, elle déféra le titre de conservateur de ses privi

(1) Nicolas Choart de Bézenval, nommé à l'évêché de Beauvais en 1650, mort en 1679, à l'âge de soixante-huit ans.

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léges à Bossuet par une délibération du 14 décembre 1695, dans une assemblée générale présidée par le célèbre Rollin, alors recteur de l'université, Bossuet retenu à Meaux pour les affaires de son diocèse, ne put prendre possession lui-même de cette dignité. Il se fit représenter par l'abbé Bossuet son neveu, qui fut reçu au nom de son oncle dans une assemblée générale encore présidée par Rollin, le 2 janvier 1696; et on lut dans cette assemblée la lettre où Bossuet exprimoit sa reconnoissance et ses regrets. Ce titre de conservateur des priviléges de l'université de Paris donnoit des fonctions, et une autorité assez étendues dans des temps plus anciens. Mais il n'étoit plus qu'un titre honorifique, presque toujours déféré à quelque prélat distingué; et comme Fénelon l'écrivoit* avec sa grâce accoutumée à Bossuet lui-même, à l'occasion de sa nomination à cette place: Ces sortes de titres dorment sur certaines têtes ; et sur d'autres, ils peuvent servir à redresser les lettres. Le 29 juin 1697, Louis XIV nomma Bossuet, nommé con- conseiller d'Etat; et il prit place au conseil le

*Lettre du 18 décembre 1695.

XXVI.

Bossuet est

seiller d'Etat

(1697) et pre- 3 juillet suivant.

mier aumô

nier de M.me

Enfin, le 28 octobre 1697, Bossuet fut nommé la duchesse premier aumônier de M.me la duchesse de BOUR

de BOURGO- GOGNE. Il en reçut la nouvelle le 30 octobre, étant

GNE.

à Varèdes, paroisse de son diocèse, où il étoit occupé à faire la visite de la maison des Soeurs de la charité qu'il venoit d'y établir. « Il reçut → cette nouvelle, écrit l'abbé Ledieu, qui étoit >> auprès de lui, simplement, sans aucune démons»tration de joie, sans aucune affectation d'in» sensibilité. >>

Bossuet n'a pas cependant dissimulé qu'il avoit désiré cette place, et qu'il l'avoit même demandée dès 1696. On lit dans une de ses lettres à l'évêque de Mirepoix (M. de la Broue): « Vous » aurez su la nomination des dames et de quel>>ques autres pour la future duchesse de BOUR» GOGNE. On n'a point parlé des charges d'Eglise. » Je vous avoue sans hésiter, que j'ai fait ma de» mande ( de la place de premier aumônier); elle » a été aussi bien reçue qu'il se pouvoit; et les ap» parences sont bonnes de tous côtés. Dieu sait » ce qu'il veut; et pour moi, je suis bien près de » l'indifférence ».

* Lorsqu'il fut question de faire prêter le serment aux nouveaux officiers de la maison de la princesse, il survint une difficulté inattendue. Le roi avoit fixé le 31 décembre (1697) pour cette cérémonie. Le marquis de Dangeau, nommé chevalier d'honneur, prétendit prêter le serment le

* Mts. de

Ledieu.

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premier. Louis XIV ne voulut point prononcer sans entendre Bossuet, qui se borna à rappeler au roi, que lorsqu'il avoit été nommé premier aumônier de Madame LA DAUPHINE, il avoit été admis sans difficulté à prêter serment avant tous les autres officiers de la maison; que dans tous les états de la maison du roi, des princes et princesses, on plaçoit toujours les officiers de la chapelle au premier rang; que ce n'étoit point un honneur déféré aux personnes, mais un hommage que la piété des rois se plaisoit à rendre à la religion dans ses ministres; Bossuet présenta ensuite à Louis XIV l'article de la Gazette de France du 10 mars 1681. On y lisoit «< que M. l'évêque de Condom, pre>> mier aumônier de M.me la Dauphine, prêta le >> serment le premier; et après lui, la duchesse de » Richelieu, dame d'honneur, la maréchale de » Rochefort, première dame d'atours, la marquise » de Maintenon, seconde dame d'atours, et en>> suite le duc de Richelieu, chevalier d'honneur, qui par un sentiment de politesse, céda son rang aux dames de la maison de Madame la Dauphine.

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Le marquis de Dangeau, quoique d'un rang inférieur au duc de Richelieu, qui étoit pair de France, voulut encore insister, malgré l'autorité

d'un exemple aussi récent. Il passoit à la Cour pour avoir beaucoup de vanité, et attacher beaucoup de prix à l'éclat et à la représentation. Le duc de Saint-Simon n'a pas manqué de le tourner en ridicule sur l'appareil et l'ostentation qu'il affectoit de déployer dans la réception des chevaliers de l'ordre de Saint-Lazare, dont il étoit grandmaître. Louis XIV voulut consoler un peu la vanité du marquis de Dangeau, en décidant «<* qu'on » ne pouvoit refuser à M. de Meaux de prêter son >> serment le premier, en considération de son >> grand mérite. » Mais le marquis de Dangeau ne put se résoudre à paroître le second dans une cérémonie où il ne pouvoit pas se montrer le premier; et il obtint du roi de prêter son serment en particulier.

* Mts. de

Ledieu.

Au moment où Bossuet vint prêter son serment à M.me la duchesse de BOURGOGNE, cette jeune princesse en voyant à ses genoux cette tête, que ses cheveux blancs et les souvenirs de tant de gloire rendoient si vénérable, ne put s'empêcher de s'écrier avec une touchante naïveté : «*Que *Ibid. » je suis honteuse, Monsieur, de vous voir en » cet état ». Elle n'avoit alors que onze ans ; et elle annonçoit déjà l'éclat, les agrémens et les grâces qui parèrent sa brillante jeunesse, et qui

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