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INTRODUCTION

BIENS DES EGLISES et REVENUS DE L'ÉVÈQUE DEPUIS L'ORIGINE DU CHRISTIANISME

jusqu'à la formation des Menses épiscopales.

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En étudiant les biens des Eglises et les revenus de l'évèque, pendant la période romaine, ensuite sous les mérovingiens et les carolingiens, nous allons voir que dans les premiers siècles du christianisme, l'episcopos, en latin episcopus, n'est pas seulement le surveillant spirituel de son troupeau, mais encore le surveillant du temporel des Eglises. Il a la haute main sur l'administration de leurs biens, en fait luimême la répartition, sans être tenu d'en rendre compte, sinon aux assemblées des conciles. Les canons lui imposent, après avoir réservé une part pour sa propre subsistance et celle de ses clercs, de veiller à l'entretien des Eglises et d'employer le surplus au soulagement des pauvres.

Le patrimoine des Eglises, d'abord modeste, croit rapidement, surtout lorsque Constantin et Licinius ont proclamé l'Edit de Milan (312). Avec les progrès du christianisme, le nombre des convertis devient si grand, que souvent, dans la ville épiscopale, la civitas, l'évêque est obligé de créer des tituli, auxquels sont attachés des prètres appelés cardinales;

de mème des curés, parochi, sont envoyés, à poste fixe, soit dans les bourgs, « vici», soit dans les places fortes, « castra », pour y fonder des paroisses. A ces coopérateurs de son ministère, l'évêque délègue la jouissance de quelques-uns des biens ecclésiastiques. Cette délégation, d'abord purement précaire, révocable à la volonté de l'évêque, tendra à devenir viagère, et, enfin, à se transformer en bénéfice, c'està-dire en dotation fixe, attaché à la fonction.

La fondation des paroisses a commencé au troisième siècle et s'est généralisée, en Gaule, pendant la période mérovingienne. Sous la première race de nos rois, les revenus de certaines églises épiscopales sont déjà très considérables. Au lieu de les appauvrir, la création des nouvelles paroisses ne fait que les augmenter. Le tiers des oblations devient bénéfice net pour l'évèque, puisque la paroisse, avec sa dotation et le reste de ses revenus, doit pourvoir aux besoins de ses clercs, à l'entretien de ses édifices du culte et au soulagement de ses pauvres.

Au huitième siècle, une terrible épreuve attendait l'Eglise. Charles Martel s'empara d'une partie des biens des évèchés pour les distribuer à ses guerriers. Grâce au rétablissement de la dime par les premiers Carolingiens Pépin et Charlemagne, peu à peu, les « episcopatus» purent reconstituer leurs richesses.

Nous sommes au neuvième siècle; la formation des bénéfices ecclésiastiques séculiers se dégage dans ses grandes lignes.

Du neuvième au douzième siècle, les évèques prélèvent une part de leurs biens-fonds et revenus pour doter le Collège des chanoines. La mense épiscopale sera séparée de la mense capitulaire. Nous entrerons

alors dans le vif de notre sujet en étudiant dans une première partie : le régime des menses épiscopales avant 1789, et, dans la deuxième partie : les menses épiscopales, depuis leur rétablissement, en 1813, jusqu'à nos jours.

Nous commencerons par étudier l'origine et la composition des biens dans les églises primitives; la législation romaine à leur égard; et enfin les revenus propres de l'évêque pendant cette période qui va du premier au cinquième siècle.

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Les biens des Eglises et revenus de l'évêque pendant la période romaine.

I. Origine et composition des biens ecclésiastiques. Aux premiers âges du Christianisme, la source originaire du patrimoine ecclésiastique est l'aumône. Les Actes des Apôtres, IV, 34, 35, nous mettent en présence de l'héroïque charité des fidèles de Jérusalem qui établissent le régime de la communauté parfaite. Leurs biens sont vendus, le prix en est apporté aux pieds des Apôtres qui se chargent de subvenir aux besoins de tous. De pareilles marques de détachement apparaissent d'ailleurs absolument libres.

A ce moment, les principales ressources de l'Eglise viennent des oblations ou offrandes mobilières faites par les fidèles. L'aumône, sous sa forme élémentaire, la collecte, fournit au début les ressources nécessaires à l'entretien du culte, des ministres sacrés et des pauvres.

Ce moyen primitif se perfectionne et la charité

prend de bonne heure des moyens plus sûrs de fournir à l'Eglise des revenus réguliers.

Lorsque les oblations volontaires deviennent insuffisantes, l'Eglise régularise la perception de ses droits par l'institution d'offrandes tarifées. De là, l'institution de l'oblation liturgique, des prémices, des dimes et de quelques autres contributions moins importantes, dont nous parlerons plus loin.

A ces ressources vient s'ajouter le produit des biens frugifères acquis soit à titre gratuit soit à titre onéreux par les évêques sur l'excédent des revenus ordinaires, afin de parer aux nécessités et de pourvoir aux besoins de l'Eglise, lorsque les offrandes ordinaires deviendront insuffisantes.

Prémices. Le Canon 1er des Apôtres (Cursus ` Patrologiæ gr., t. CXXXVII, col. 41) ordonne de porter directement à la maison de l'évêque tout ce qui n'a pas de rapport avec le pain et le vin du sacrifice. Les prémices étaient en principe destinées au clergé.

Cette contribution en nature est comme une continuation de la pratique judaïque qui consistait à apporter au temple les prémices de toutes les récoltes, afin d'entretenir par ce moyen les prêtres et les lévites.

Saint Augustin (Coll. P. L., t. XXXVII, col. 1910) établit que, d'après les paroles de Jésus-Christ dans le saint Evangile, l'Eglise a le droit strict de recourir aux fidèles pour sa subsistance et que ces derniers se doivent à eux-mêmes, ainsi qu'à Dieu, de ne pas attendre que l'Eglise exige ce qui lui revient. Cassien (440), dans sa vingt et unième conférence (C. P. L., t. XLIX, col. 1172-1173), déclare que les

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