Page images
PDF
EPUB

l'achat d'étoffes de soie et d'ornements pour l'église épiscopale.

Emploi de l'excédent des revenus. — Au début, les rois rendaient, la plupart du temps, les produits des régales aux nouveaux titulaires.

Charles VII, par lettres patentes octroyées à Montilles-Tours, le 19 mars 1452, donne le produit des régales du royaume à la Sainte-Chapelle de Paris. En 1641, Louis XIII en fait don aux évèques nommés. Louis XIV, en 1676 et 1714, modifie un peu cette décision de son prédécesseur, et ordonne de réserver le tiers des produits régaliens pour la subsistance des nouveaux convertis.

Reddition des comptes de l'économe. Chaque année l'économe devait rendre compte de ses recettes et de ses dépenses, et verser le boni entre les mains de celui qui avait été délégué par le roi pour entendre ces comptes. L'économe avait le droit de conserver pour lui, 2 sols par livre, de toutes les recettes comme frais d'administration; en plus il touchait cinq cents livres de gages. (Art. 18, 19 et 20.)

Litiges soulevés par l'exercice de la régale. — Pour tous les litiges soulevés par l'exercice de la régale, Louis XIV créa une compétence exceptionnelle : « Celle de la Grand'Chambre du parlement de Paris, privativement aux autres chambres du Parlement et à toutes autres cours et juges du royaume (1). »

L'ordonnance du 10 février 1673 consacre la mème attribution exclusive et privative à la Grand'Chambre du Parlement de Paris, à ce point qu'elle

(1) Ordonnance de 1667, art. 19.

« évoquait devant elle tous autres procès pendants par devant d'autres juges, même dans un autre parlement, ou une autre cour souveraine, entre d'autres parties, au sujet du bénéfice dont le pétitoire était poursuivi par le régaliste ».

Le but à peine dissimulé du roi était de parvenir, au détriment de l'Eglise, à l'augmentation des droits de la Couronne.

Louis XV se montra beaucoup plus modéré: par sa déclaration de 1725, il veut que tout procès intenté avant la vacance du siège, demeure sursis pendant tout le temps de la régale et que les préposés à la régie de la mense se contentent du recouvrement des droits, fruits et revenus dont le dernier titulaire était en possession lors de son décès.

-

IV. Clôture de la régale. Pour la clôture de la régale, quatre conditions étaient exigées.

1o Prestation du serment de fidélité au roi par le nouvel évêque, en personne; (Ordonnance de Charles VII, 14 février 1451.)

2o Obtention de lettres patentes royales donnant main-levée des fruits et contenant la preuve de la prestation du serment;

30 Enregistrement de ces lettres à la Cour des Comptes;

4o Notification des lettes patentes et de l'arrèt d'enregistrement, à l'économe ou agent régalien, ainsi qu'au substitut du procureur général, lequel était chargé de saisir et mettre entre les mains du nouvel évêque les fruits de la mense.

Tel a été le droit de régale sous l'ancien régime. Primitivement établi pour maintenir la bonne administration du diocèse, pendant la vacance, il est

devenu pour la royauté un privilège considérable, qui mettait les menses épiscopales dans la main du souverain. Au point de vue pécuniaire, le roi tirait de grands profits de ses droits régaliens, levant parfois sur les terres de l'évêché des tailles fréquentes et dont la quotité était illimitée. D'un autre côté, la collation des bénéfices vacants lui permettait de peupler le diocèse de ses créatures. Ce droit a été aboli en 1789, mais Napoléon Ier a voulu le faire revivre, ainsi que nous le verrons dans la seconde partie de cette étude.

DROIT DE DÉPOUILLES.-Une pratique fort ancienne, qui tenait de près à l'exercice de la régale (1), permettait à celui qui avait autorité sur les églises, aussitôt après la mort du titulaire, d'enlever non seulement l'or, l'argent, les céréales et le vin, mais les bestiaux, les récoltes, les meubles qui se trouvaient dans les maisons épiscopales. Cet usage, qui existait encore au douzième siècle, connu sous le nom de droit de dépouilles, appartint d'abord aux chanoines, puis aux seigneurs et au roi.

Le cartulaire de Notre-Dame de Paris (2) nous apprend que le roi Louis le Jeune, vers 1140, abolit la coutume dont il jouissait, lui et ses prédécesseurs, de s'emparer de tous les meubles de bois ou de fer appartenant aux évêques de Paris et trouvés dans leurs maisons après leur mort. Il ordonna que dorénavant leurs meubles, placés sous la garde du chapitre seraient remis à leur successeur.

En 1196, l'évêque Maurice de Sully légua son lit

(1) LUCHAIRE, Institutions monarchiques de la France, t. II, pp. 66 et 67. (2) T. I, p. 36.

à l'Hôtel-Dieu; plusieurs chanoines l'imitèrent. Depuis ce temps, jusqu'à 1789, dans le diocèse de Paris, l'usage voulait que le lit de l'évèque et celui des chanoines qui décédaient appartint à l'HôtelDieu.

CHAPITRE SIXIÈME

ABOLITION DES MENSES ÉPISCOPALES.

L'ÉVÈQUE DE 1790 A 1813.

REVENUS DE

Les dangers de toute sorte que faisait courir à l'Etat et aux particuliers l'envahissement du patrimoine des gens de mainmorte, en tète desquels se plaçaient les évêques, n'étaient pas restés inaperçus. Montesquieu les signale avec quelque àpreté au livre 25, chapitres v et vi de l'Esprit des lois.

L'édit d'août 1749, en renouvelant la défense de créer de nouveaux établissements de mainmorte sans la permission expresse du roi, essaya, mais trop tard, de conjurer le péril.

Les deux causes qui allaient servir de prétexte à la spoliation des biens d'église, en particulier à l'abolition des menses épiscopales, étaient l'exagération de la fortune de l'Eglise et l'inégale répartition des biens du clergé.

Exagération de la fortune de l'Eglise. — En 1780, les biens-fonds du clergé représentaient plus du vingt-cinquième du territoire du royaume et les revenus appréciables s'élevaient à 219.000.000 livres ainsi répartis (1):

[merged small][merged small][ocr errors][merged small]

(1) VUILLEFROY, Traité de l'administration du Culte catholique, p. 79, Paris, 1842.

« PreviousContinue »