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sans leur consentement est un

personne
acte de tyrannie.

Observez que cette propriété est déclarée inaliénable: ceci abolit tous les contrats dans lesquels on aliène ses services, particulièrement le contrat du mariage et les engagements militaires. Il ne peut donc plus y avoir entre les individus que des transactions du moment, nul ne pouvant s'engager pour l'avenir : c'està-dire qu'il n'y auroit plus de Société : car toute Société est fondée sur les droits réciproques d'un individu sur d'autres,

Aliéner, dira-t-on, c'est disposer pour la vie. Les engagements à temps sont permis. Le texte ne défend que les engagements indissolubles.

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Mais ce subterfuge ne mène pas loin car puisque la durée du bail personnel n'est pas limitée, il s'ensuit que chacun auroit le droit de s'engager pour le terme le plus long de la vie Fumaine.

D'ailleurs, pourquoi, au moment où l'on déclare qu'un homme est propriétaire de sa personne, lui ôte-t-on le caractère le plus essentiel de la propriété, le droit d'en disposer, celui de l'aliéner si cette alienation lui convient! Supposez un citoyen, à la façon de ces

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modernes Législateurs, fait prisonnier par des peuples qui lui offriroient de racheter sa vie au prix de sa liberté le citoyen leur diroit qu'il est le seul propriétaire de sa personne, que cette propriété est inalienable, qu'il ne peut faire en conscience ce qu'on lui demande, qu'il est au désespoir, mais qu'il a reçu de son maître le droit de sacrifier sa personne,, et non celui de l'aliéner.

pas

Cet article ainsi rédigé, étoit évidemment destiné contre l'esclavage des Nègres mais l'auteur n'avoit pas vu toutes les propositions particulières que renfermoit sa proposition générale. Il n'avoit pensé ni aux femmes, ni aux enfants, ni aux mineurs, ni aux fous, ni aux malfaiteurs ni aux ouvriers, ni aux soldats. Il n'avoit pas la moindre intention d'abolir l'ordre social. Il avoit pensé seulement que cette proposition, avec son air d'innocence et de simplicité naïve, amèneroit de droit l'abolition de la servitude personnelle.

Mais en cela même il alloit trop loin car l'affranchissement subit des Noirs étoit en même temps une grande injustice et une grande imprudence; c'étoit enlever aux maîtres ce qu'ils avoient acquis avec la permission des lois : c'étoit donner aux esclaves ce qui devoit leur

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être nuisible, à moins d'une longue préparation. Leur donner la liberté subitement, c'étoit les jeter dans l'oisiveté, dans la misère et dans tous les crimes qui en sont les résultats naturels.

Tout écrivain peut débiter ou faire débiter ses productions, et il peut les faire circuler librement tant par la poste que par toute autre voie, sans avoir jamais à craindre aucun abus de confiance. Je ne dis rien encore sur les dangers de cette liberté illimitée, -- mais je ne puis m'empêcher de faire observer la niaiserie de l'expression. L'auteur vouloit dire que tout abus de confiance seroit un délit : mais ce qu'il dit, c'est que le délit est impossible, tellement impossible qu'on n'a point à le craindre, comme s'il suffisoit de cette déclaration pour que le Gouvernement ou les particuliers n'eussent plus la faculté de commettre un abus de confiance.

Les lettres, en particulier, doivent être sacrées pour tous les intermédiaires qui se trouvent entre celui qui écrit et celui à qui il écrit.

Examinons-le style et la chose. Ce mot sacré que signifie-t-il ? qu'elle manière de parler pour un Législateur? Quoi! il suffit de mettre une calomnie un plan de conspiration, un

projet d'assassinat dans une lettre, pour que

cette lettre soit sacrée ? L'ouvrir sera un sacrilege? Ce délit, si c'en est un, sera rangé dans cette classe de délits que l'on regarde vulgairement comme les plus grands! ce sera un attentat contre la Religion, contre Dieu même !

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Quant à l'acte lui-même, est-il de l'intérêt public que le Gouvernement puisse ouvrir les lettres? Voilà la question. Si la loi le lui défend, la poste devient un instrument terrible entre les mains des malfaiteurs et des conspirateurs. Dans l'intention de protéger les communications des individus la loi exposé le public au plus grand des dangers. Il est des crimes. si nuisibles qu'on ne doit se priver d'aucun des moyens de les prévenir on de les mettre en évidence. Peut-on dire que la crainte d'avoir ses lettres ouvertes gêne les correspondances honnêtes, les liaisons de commerce, les épanchements de l'amitié ?

Il est vrai que si la simple confidence de sentiment entre particuliers pouvoit constituer un crime, l'ouverture des lettres pourroit devenir un moyen terrible de tyrannie. Mais c'est là qu'il faut placer les précautions pour .empêcher l'abus. C'est ce qu'on a fait en An

gleterre, où le Secrétaire d'État peut faire ouvrir les lettres, selon sa prudence, sans que cela soit permis à aucun autre.

Tout homme est pareillement le maître d'aller ou de rester, d'entrer ou de sortir et même de sortir du royaume et d'y rentrer, quand et comme bon lui semble.

11 ne s'agit pas ici du citoyen seulement, .mais de tout homme, de tout étranger comme de tout François. Tous sont maîtres d'aller ou de rester, d'entrer ou de sortir, de sortir du royaume et d'y rentrer comme bon leur semble. L'absurdité ne peut aller plus loin. La police n'a-t-elle rien à dire ? Ne peut-on point interdire de passages, fermer d'édifices publics, empêcher d'aller et de venir dans des places fortes, etc. etc. Avec ce droit illimité, comment s'avise-t-on d'avoir des prisons et d'y renfermer des malfaiteurs? Comment l'auteur de cette déclaration a-t-il toléré les lois contre les Émigrés? Ces lois n'étoient-elles pas le démenti le plus formel aux droits de l'homme ?

Je n'impute pas ces intentions extravagantes à l'auteur de l'article. Il a terminé le précédent par ces mots : la loi seule peut marquer les bornes qu'il faut donner à cette liberté comme à toute autre, et je suppose que le mot

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