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dois-je m'adresser pour me faire donner ce qui me manque? est-ce à Pierre plutôt qu'à Paul? Si vous vous bornez à déclarer un droit. général, sans spécifier comment je puis l'exercer, vous ne faites rien du tout, je puis mourir de faim avant de savoir qui doit me donner de la

nourriture.

Ce que l'auteur a dit, ce n'est pas ce qu'il a voulu dire. Son intention étoit de déclarer que les indigents auroient droit aux secours de la Communauté ! Mais alors il faut déterminer comment ces secours doivent se lever, se distribuer. Il faut organiser l'administration qui doit assister les pauvres, créer les officiers qui doivent constater son besoin, et régler la manière dont il doit procéder pour mettre son droit en valeur.

Le soulagement de l'indigence est une des plus belles branches de la civilisation. Dans l'état de nature, autant qu'on peut s'en faire une idée ceux qui ne peuvent pas se procurer de quoi vivre, meurent de faim. Il faut qu'il existe un superflu dans une classe nombreuse de la société, avant qu'on puisse en appliquer une partie au maintien des pauvres. Mais on peut imaginer un tel état de pauvreté, une telle famine, qu'il ne seroit pas possible

de donner du pain à tous ceux qui en manquent. Comment peut-on faire de ce devoir de bienfaisance un droit absolu? c'est donner à la classe indigente l'idée la plus fausse et la plus dangereuse: ce n'est pas seulement ôter aux pauvres toute reconnoissance pour leurs bienfaiteurs, c'est leur mettre les armes à la main contre tous les propriétaires.

Je sais bien que l'auteur se défendroit contre toutes les conséquences pernicieuses qui découlent si manifestement de ses principes, par la clause qu'il a insérée, qu'on n'a jamais le droit de nuire à autrui et que la loi peut mettre des bornes à l'exercice de toutes les branches de la liberté : mais cette clause réduit tout à rien car si la loi peut mettre des bornes, jusqu'à ce qu'on les connoisse, quelle connoissance a-t-on de son droit? quel usage en peuton faire! Rien de plus captieux qu'une déclaration qui me donne ce qu'elle autorise à me reprendre. Ainsi rédigée, elle pourroit être reçue à Maroc et à Alger, sans faire ni bien ni mal.

FIN.

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